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#comme ils disent
fidjiefidjie · 1 month
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Bon Matin đŸ’™đŸ§‘â€đŸ€â€đŸ§‘đŸ—ŁđŸ©”
Charles Aznavour đŸŽ¶ Comme ils disent
(Live 1994)
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some1willrememberus · 1 year
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Charles Aznavour - Comme ils disent (Audio Officiel)
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rearranging-deck-chairs · 11 months
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current state of my french studies:
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sportsallover · 1 month
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I am suddenly so mad that Lou missed a couple of races at the beginning of the season due to covid
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jezatalks · 1 year
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Je stresse tellement pour demain aaaaah
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lilias42 · 1 year
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Ma voie dorée sur AM en OS ! ... un OS en deux parties ! Je sais, moi aussi, désolé...
Bon ! J'avais envie de changer d'ambiance avec CF oĂč je savais que pour la majoritĂ© des persos vont mal finir parce que CF, mĂȘme quand leur dĂ©veloppement Ă©tait positif (j'essaye de toujours avoir des dĂ©veloppements positifs pour les persos du bon cĂŽtĂ© de la barriĂšre - soit contre Delagarde) alors, je voulais changer d'air. Donc, voici ma voie dorĂ©e toute dorĂ©e oĂč tout le monde de gentils survit ! (et quand je dis tout le monde, c'est tout le monde mais, ce sera pour la seconde partie) Et quand je dis tout le monde, c'est tout le monde. C'est complĂštement craquĂ© avec quelques libertĂ©s du cĂŽtĂ© de mes propres rĂšgles selon les interprĂ©tations aussi mais bon, c'est pas vraiment canon alors, ça marche quand mĂȘme. En plus, j'ai essayĂ© de garder les choses un peu ambigĂŒe, mĂȘme si je ne sais pas si c'est rĂ©ussi. C'est juste un peu un mĂ©lange de choses que j'aime et pour me faire plaisir donc, ça part dans tous les sens.
Pour poser les choses histoires de mieux comprendre :
-On est sur la route AM vu que c'est dĂ©jĂ  la voie dorĂ©e du jeu. Quand on commence, tout s'est dĂ©roulĂ© comme dans le jeu. C'est au dĂ©but de l'OS en deux parties oĂč les choses commencent Ă  changer.
-La toile de fond par contre, c'est celui que j'ai développé pour CF. Logiquement, avec ce que j'ai mis sur mon blog devrait suffire pour comprendre, et je rappelle certains éléments pour que ce soit compréhensible... enfin j'espÚre donc, n'hésitez pas à demander s'il y a un point obscure.
-C'est aussi ma version des choses ainsi que des Braves
-Les liens familiaux sont Ă©galement toujours les mĂȘmes, et l'interprĂ©tation des personnages aussi. La seule personne qui change, c'est Byleth qui a des neurones dans cette histoire (car personne du cĂŽtĂ© de Delagarde en a).
-Je reprend aussi des phrases et des éléments du canon à ma sauce donc, c'est normal si des mots sonnent comme du déjà vu, c'est que c'est repris du jeu mais, dans des contextes / avec des personnes différentes.
Je crois que j'ai tout dit sinon, s'il y a des questions, je vous répondrait sans problÚme.
Dans cette premiÚre partie, on commence à Gronder jusqu'à avant la prise de Fhirdiad (en gros, la moitié / deux tiers de l'OS en deux parties), le reste de la route en accélérée sera pour la seconde partie (encore pardon pour ce "petit OS" qui a fini par faire plus de cent pages).
@ladyniniane voilà ce dont je t'avais parlé !
FĂ©lix sentit la sueur perlĂ©e sur son front Ă  cause de l'effort, ses mains se fripĂ©es comme aprĂšs un trop long sĂ©jour dans l'eau alors que la magie coulait d'elles, se dĂ©versant dans la plaie bĂ©ante et sale pour la nettoyer et la refermer. Merde ! Cette maudite gosse avait utilisĂ© un couteau rouillé ! Et la DĂ©esse seule savait ce qu'elle avait pu mettre dessus ! Qu'elle l'aurait empoisonnĂ© pour ĂȘtre sĂ»re de rĂ©ussir son coup que ça ne l'Ă©tonnerait mĂȘme pas !
« Va en enfer ! »
Sous ses mains, il sentait le sang de Rodrigue lutter contre lui pour tenter de s’échapper, ses cĂŽtes bougeant trop peu sous ses respirations devenues silencieuses mais, FĂ©lix sentait encore son pouls, il le sentait d'ici. Le sanglier ne le lĂącherait pas ou ne le bougerait pas – et il le faisait, l'Ă©pĂ©iste jurait qu'il allait l'envoyer lui-mĂȘme s'expliquer avec son vieux ! – donc, il n'avait pas Ă  s'inquiĂ©ter pour ça, sa main ne bougerait pas d'Aegis. MĂȘme si tout Ă©tait flou, FĂ©lix se souvenait de quand il avait Ă©tĂ© griĂšvement brĂ»lĂ©, de la terreur qu'il avait ressentie dĂšs qu'on l'Ă©loignait du contact rassurant de leur Relique, des chants de Fraldarius restĂ©s gravĂ©s Ă  l'intĂ©rieur. Sans lui, les eaux du lac ne l'auraient jamais sauvĂ©, il le savait alors, peut-ĂȘtre

« Allez Fraldarius ! On a besoin d'un autre de tes miracles ! Alors, lac ou pas, tu vas le faire et le sauver ! »
La peau sous ses mains devenait froide, vide de sang. Non ! Juste tout mais pas ça ! Le vieux n'Ă©tait quand mĂȘme pas si faible Ă  la mort que ça ! Il avait dĂ©jĂ  survĂ©cu Ă  pire ! Il n'allait pas les lĂącher maintenant !
C'est à ce moment qu'un souvenir remonta à la surface, tout doux malgré la situation, allant dans ses mains et sur sa langue alors que les notes résonnaient à nouveau dans son esprit.
« Au clair de la lune, le vent chante,
Tu pleures dans cette forĂȘt de cendres,
Les nuages vont alors tous descendre,
Pour que plus jamais, le mal te hante.
Au clair de la lune, les loups murmurent,
Sans un bruit, ils s’approchent de tes blessures,
Ils t’entourent, te rĂ©chauffent avec leur fourrure,
Cette protection douce, elle te rassure.
Au clair de la lune, la forĂȘt te protĂšgera toujours ici,
Aux hurlements des loups, la brise te réconforte,
Tous pansent tes blessures et au loin les emporte,
Dans leur rassurante Ă©treinte, enfin tu t’endors guĂ©ri. »
« ça va aller louveteau... ça va aller... tu vas guérir... tu es trÚs fort, je le sais... reste avec nous... ne pars pas... protÚge-le Félicia... je t'en supplie... ça va aller... ça va aller... je te protégerais... »
De ses souvenirs, la berceuse guĂ©risseuse de Rodrigue passa dans ses mains, coula de ses propres lĂšvres malgrĂ© les fausses notes, alors que la marque de leur ancĂȘtre rĂ©agissait aussi, son Ă©nergie l'aidant enfin Ă  faire un meilleur soin. D'autres chants lui revinrent en mĂ©moire, il les rĂ©cita aussi avec autant d'efforts pour que ça marche aussi bien que sur lui.
« FĂ©lix
 il ne prit mĂȘme pas le temps de reconnaitre Ă  qui appartenait cette voix. Il faut que tu t’arrĂȘtes
 Tu saignes toi aussi

– La ferme ! Tu me dĂ©concentres ! DĂ©gage ! »
Plus personne ne vient le déranger.
Et celui qui tentait de l’arrĂȘter ou d’utiliser le sort « silence » signait son arrĂȘt de mort.
FĂ©lix n'avait aucune idĂ©e de combien de temps il s'Ă©tait acharnĂ© ainsi, ni si cela servait Ă  quoi que ce soit, ou s'il rĂȘvait les respirations sous ses doigts. Il n'en avait aucune idĂ©e et il s’en moquait, refusant d'arrĂȘter tant qu'il ne s'effondrait pas, et personne ne pourrait l'en empĂȘcher ! Le vieux n'allait pas mourir comme ça ! Jamais ! Faudrait le tuer d'abord !
« Ne laisse pas Alix tout seul ! Il va claquer aussi sans toi ! Vous ĂȘtes de tellement de vrais jumeaux que ça vous fait mal quand vous ĂȘtes trop loin l’un de l’autre ! Tu ne vas pas lui faire ça ! Tu ne vas pas me laisser comme ça ! »
« Je t’interdis de crever
 tu m’entends ? Je t’interdis de crever comme ça

– FĂ©lix

Il s’arrĂȘta en entendant son nom murmurer dans un souffle. Relevant les yeux de sa tĂąche, il rencontra ceux mi-ouverts de Rodrigue, le fixant comme s’il n’était pas lui-mĂȘme en train de se vider de son sang aprĂšs s’ĂȘtre jetĂ© sous un couteau pour protĂ©ger Dimitri. Pourtant, mĂȘme si ce dernier le tenait et qu’il aurait Ă©tĂ© plus facile pour lui de le regarder, il ne semblait le voir que lui, que FĂ©lix alors que sa main se levait, son doigt tremblant se posant sur sa joue, essuyant une larme dont le jeune homme aurait pu jurer qu’elle n’existait pas.
– Ne pleure pas louveteau
 ça va aller

– La ferme  » grogna-t-il en rĂ©cupĂ©rant sa main, pour la porter Ă  la place de cet idiot qui gaspillait ce qui lui restait de force pour un geste aussi ridicule, sans prendre la peine Ă  relever ce surnom puĂ©ril et ridicule qui lui rĂ©chauffait pourtant le cƓur. « Occupe-toi de toi pour une fois.
Les yeux de son pĂšre se refermĂšrent mais, le sang ne coulait plus de la plaie, et ses respirations Ă©taient plus rĂ©guliĂšres que tout Ă  l’heure, son air plus serein. FĂ©lix sentit alors les mains douces de Mercedes se poser sur ses Ă©paules, le tirant lĂ©gĂšrement en arriĂšre pour l’empĂȘcher de recommencer alors qu’elle lui assurait avec sa voix calme.
– Il est hors de danger FĂ©lix. Tu l’as sauvĂ©. »
Ces mots Ă©taient tout ce qu’il voulait entendre. Le vieux Ă©tait en vie, c’était le principal. Il sentit alors sa propre douleur et Ă©puisement le foudroyer, son corps protestant qu’il l’ait vidĂ© de ses forces alors qu’il sentait le sang couler de sa marque dans son dos. Le monde se mit Ă  tourner, et il sombra lui-mĂȘme dans les tĂ©nĂšbres du sommeil, s’accrochant Ă  la magie qu’il sentait dans la main qu’il tenait, alors que sa tĂȘte tombait sur les genoux de son pĂšre.
« Louveteau  » un bisou tout doux sur ses cheveux, une voix rassurante, une Ă©treinte toute chaude
 « Ça va aller
 il est parti le vilain cauchemar
 tu es en sĂ©curitĂ© ici
 nous sommes tous là  »
« Papa ? Papa  »
Il enfouit son visage dans la chaleur de son pĂšre qui s’était mis Ă  fredonner une berceuse apaisante, Ă  nouveau tout petit, assez pour se rouler en boule sur ses genoux et se presser contre sa poitrine, bien au chaud dans ses bras et sa cape
 Rodrigue Ă©tait si rassurant

FĂ©lix sentait Alix poser une couverture sur ses Ă©paules, puis se joindre Ă  son frĂšre, l’accompagnant de sa voix toute identique Ă  celle de son jumeau. Glenn Ă©tait lĂ  aussi, Ă  cĂŽtĂ© de lui, chantant avec eux
 comme quand il Ă©tait encore enfant, et que toute leur famille se rĂ©unissait autour du feu lors des longues soirĂ©es d’hiver pour passer le temps ensemble
 le benjamin s’assoupissait tout le temps avant tout le monde et quand il faisait un cauchemar, il se rĂ©fugiait toujours dans les bras de Rodrigue qui se mettait Ă  chanter avec Alix et Glenn, leurs belles voix Ă©loignant tous les mauvais rĂȘves du monde et le faisant dormir jusqu’au matin

Comme Ă  l’époque, il s’endormit dans son Ă©treinte sans craindre le danger ou les cauchemars, protĂ©gĂ© par tout l’amour de sa famille et de son pĂšre.
*
Comme un Ă©clair de rĂ©el, le poids du corps du jeune loup noir tomba sur ses genoux, rejoignant le poids blessĂ© de son pĂšre dont il tenait la patte. Il Ă©tait froid
 ils Ă©taient froids
 ils Ă©taient si froid
 comme de l’eau lentement piĂ©gĂ© par le gel et transformĂ© en glace jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de liquide vif, juste un bloc inerte
 comme

« FĂ©lix
 Rodrigue
 je t’en supplie Mercedes ! Sauve-les ! Sauve-les de la mort ! »
*
Ingrid et Sylvain attendaient nerveusement devant la tente de Mercedes, veillant sur Rodrigue alors que Flayn s’occupait de lui, profondĂ©ment endormi malgrĂ© un sommeil trĂšs agitĂ©. Leur guĂ©risseuse et Manuela essayaient de maintenir FĂ©lix en vie. La surcharge de magie avait provoquĂ© une grave hĂ©morragie interne, une partie de ses veines avait explosĂ© sous la pression et l’effort alors, c’était Ă  son tour de se balancer entre la vie et la mort.
« Pourquoi c’est aussi long ? Marmonna Ingrid, l’inquiĂ©tude lui faisant perdre toute sa patience pourtant lĂ©gendaire. Elles devraient dĂ©jĂ  avoir fini !
– Il a donnĂ© Ă©normĂ©ment d’énergie Ă  Rodrigue pour lui sauver la vie. Mieux vaut qu’elle prenne le temps qu’il faut pour ĂȘtre sĂ»r qu’il n’y a plus rien, lui rappela Sylvain, mĂȘme si ses yeux fixaient le rabat de tissu servant de porte Ă  la salle d’opĂ©ration improvisĂ©e sans dĂ©vier, comme s’il voulait voir Ă  travers.
– En plus, je suis sĂ»re qu’il va s’en sortir ! Ajouta Flayn avec son optimisme habituel. FĂ©lix ne se laissera pas mourir comme ça, et Mercedes et Manuela sont toutes les deux d’excellentes guĂ©risseuses ! Tout va bien se passer !
– On espĂšre
 rĂ©pondirent-ils tous les deux.
– AprĂšs tout
 il vient d’accomplir un vĂ©ritable miracle
 le seigneur Rodrigue est hors de danger Ă  prĂ©sent mais, la lame Ă©tait empoisonnĂ©e et elle a perforĂ© plusieurs organes vitaux
 FĂ©lix serait arrivĂ© une seconde plus tard et il n’aurait pas eu Aegis pour ralentir l’hĂ©morragie, j’ai bien peur que
 Flayn se tut, tous Ă©tant trop conscients de ce qui avait failli se produire. C’est un vrai miracle
 tout comme le fait qu’elle ne soit pas arrivĂ©e Ă  tuer Dimitri sur le coup
 heureusement que son armure l’a protĂ©gĂ© et a dĂ©viĂ© la lame
 elle l’a blessĂ© Ă  cause d’un endroit cassĂ© mais au final, plus de peur que de mal, mĂȘme s’il devra surement rester aussi en convalescence. Elle aurait frappĂ© juste

– Dimitri l’aurait laissĂ©e le tuer
 c’était un suicide, pas un assassinat
 souffla Sylvain, Ă  peine audible. Cette gosse ne savait surement pas mais, il a profitĂ© de la premiĂšre occasion qu’on lui offrait de se faire tuer, surtout qu’elle voulait aussi se venger
 c’était presque d’une ironie sans nom qu’il soit tuĂ© par quelqu’un qui voulait se venger de lui, alors que lui-mĂȘme a surement tuĂ© le frĂšre de cette gamine pour se venger
 la boucle est bouclĂ©e

– Hum
 je dĂ©teste le reconnaitre mais, tu n’as pas tort
 je me dis presque qu’on a eu de la chance qu’il ne prenne pas sa lance pour le faire lui-mĂȘme avant
 je crois que c’est Ă  cause des voix qu’il entend qu’il ne l’a pas fait
 pour une fois, elles ont servi, mĂȘme si elles l’enfoncent en lui disant de le venger, alors qu’ils ne lui demanderaient jamais ça. Glenn ne dirait jamais de choses aussi cruels Ă  Dimitri
 il Ă©tait trĂšs critique envers Lambert et je crois mĂȘme qu’il le mĂ©prisait, reconnut-elle avant d’ajouter, mais pas Dimitri. Il l’adorait et voulait le servir lui car, il mĂ©ritait son dĂ©vouement. Jamais il ne lui dirait des choses pareils.
– Et s'il arrive quoi que ce soit Ă  FĂ©lix ou Rodrigue
 mĂȘme avec les mots de Rodrigue, sa maladie risque de les lui montrer rejoindre les rangs de ses hallucinations
 marmonna le cavalier.
– Je n’espĂšre pas, mĂȘme si avec ce genre de mal, il est dur de prĂ©dire comment cela Ă©voluera, confirma Flayn, mĂȘme si elle ajouta avec plus d’optimisme. Par contre, Dimitri a suppliĂ© qu’on les sauve, et il s’est rendu compte tout de suite de ce qui Ă©tait vrai ou non. Il a su tout de suite que ce qui se passait devant ses yeux Ă©taient matĂ©riels et ce qu’il fallait prioriser. Ses hallucinations sont aussi rĂ©elles pour Dimitri mais, il a su ne pas les Ă©couter pour se concentrer sur ce qui Ă©tait devant lui alors qu’à l’instant d’avant, elles lui hurlaient de poursuivre Eldegard pour la tuer. Il a pourtant rencontrĂ© des difficultĂ©s Ă  savoir si la Professeure et Dedue Ă©taient rĂ©els ou non mais lĂ , il a tout de suite su que l’épuisement de FĂ©lix Ă©tait rĂ©el et il a agi en consĂ©quence. Je pense que c’est un bon signe, sourit-elle.
Les deux cavaliers hochĂšrent un peu la tĂȘte, prenant un peu de sa positivitĂ© pour eux.
– Fraldarius lui a sauvĂ© la vie mais, il a survĂ©cu pendant deux mois Ă  des brĂ»lures magiques avant que l’eau du lac ne les fasse disparaitre, dĂ©clara le rouquin, une vieille Ă©caille sarcelle entre ses doigts. Il survivra encore.
– Oui. S’il doit avoir une seule chose qui dĂ©finit FĂ©lix, c’est qu’il est horriblement tĂȘtu et obstinĂ©, il ne va pas se laisser mourir comme ça. Il rendrait la Mort folle en tentant de revenir dans son corps par tous les moyens, arriva Ă  sourire un peu Ingrid malgrĂ© tout.
Flayn sourit aussi alors qu’elle finissait d’ausculter la blessure de Rodrigue, avant de s’en aller quand on l’appela pour soigner le coup de masse Ă  la jambe d’Hapi. Les deux cavaliers n’étaient pas trop blessĂ©s et ils avaient dĂ©jĂ  aidĂ© Ă  soigner les Ă©clopĂ©s qu’ils pouvaient alors, ils restĂšrent devant la tente Ă  attendre la fin de l’opĂ©ration.
Quand la pluie commença Ă  tomber, ils prirent cela comme une sorte de soulagement. La magie de Fraldarius Ă©tait liĂ©e Ă  l’eau, une atmosphĂšre humide renforcerait peut-ĂȘtre ce qui en restait pour ses miracles
 ils attendirent encore, enfoncĂ©s sous une couverture et serrant leur propre Relique contre leur poitrine, cherchant l’énergie rassurante de leur ancĂȘtre Ă  l’intĂ©rieur malgrĂ© tout.
Aucun des deux ne savait depuis combien de temps ils attendaient que ce foutu rabat se soulĂšve, quand ils virent une ombre bleu et noir surmontĂ© de blond glisser sous les gouttes en direction de la porte du camp. Devinant qui s’était sans problĂšme, Ingrid laissa Sylvain continuer Ă  attendre les nouvelles pour le suivre, lui criant quand elle le rejoignit Ă  la sortie du camp.
« Eh ! Dimitri !
Son ami s’arrĂȘta, pivota la tĂȘte, son Ɠil unique la regardant sans la voir. Il ressemblait encore plus Ă  un fantĂŽme Ă  cheval entre deux mondes maintenant. Avec la pluie qui collait tout au corps, on ne pouvait que voir que Dimitri Ă©tait dĂ©charnĂ©, fait que de muscle, de peau et d’os. Il mangeait Ă  peine et ses amis d'enfance Ă©taient sĂ»rs qu'ils se nourrirait encore moins, s'il n'en avait pas besoin pour survivre. Il Ă©tait un vĂ©ritable squelette, ne prenait pas soin de lui au point qu’il devait ĂȘtre infestĂ© de vermine, refusant de s’occuper de lui-mĂȘme en prĂ©tendant qu’il n’en avait pas besoin et n’était pas digne de tels soins, ce n’était pas nĂ©cessaire Ă  sa mission.
Quand il la reconnut, Dimitri se tourna complĂštement vers elle, la regarda avec son Ɠil vide, bougeant mĂ©caniquement, le visage perdu dans l’ombre et les illusions. Elle n’osait mĂȘme pas imaginer quelles horreurs pouvaient se jouer devant son regard et quelles demandes odieuses il entendait

– Que veux-tu ? Demanda-t-il de sa voix caverneuse, dĂ©pourvu de toute la vie qu’il avait pu y avoir autrefois.
– OĂč est-ce que tu vas comme ça ? Alla droit au but Ingrid, ne voulant pas perdre de temps pour savoir ce qu'il avait en tĂȘte.
– Cela ne te regarde pas, rĂ©torqua-t-il.
– Si. Ça te concerne donc, ça nous regarde tous. En plus, tu es blessĂ©, tu ne devrais mĂȘme pas bouger, rĂ©pliqua-t-elle immĂ©diatement d’un ton sĂ©vĂšre. OĂč tu vas Dimitri ? Et rĂ©ponds cette fois !
Bon, finalement, ce serait elle qui tuerait le blond pour ĂȘtre toujours aussi horriblement tĂȘtu quand il avait une idĂ©e en tĂȘte. Ils partageaient ce mĂȘme dĂ©faut tous les quatre mais lĂ , c’était particuliĂšrement insupportable !
– Tu vas Ă  Embarr, n’est-ce pas ? Devina la chevaliĂšre devant son silence. C’est pour ça que tu t’es faufilĂ© comme ça hors du camp sans qu’on te voie ? Tu voulais y aller tout seul sans que personne ne te suive ? Et bien, c’est hors de question ! D’un, t’es blessĂ© quand mĂȘme ! C’est moins grave que ça aurait pu l’ĂȘtre mais, tu t’es pris un couteau empoisonnĂ© je te rappelle ! De deux, tu vas te faire tuer si tu y vas tout seul et ça, c’est hors de question ! Et tu n’y vas pas car de trois, personne n’est en Ă©tat de suivre ! Surtout pas Rodrigue et FĂ©lix ! FĂ©lix se bat encore pour sa vie et Rodrigue en a rĂ©chapper de peu ! Tu crois que c’est ce qu’ils voudraient ? Que tu jettes ta vie alors que Rodrigue a tout fait pour te sauver, puis FĂ©lix a tout fait pour sauver son pĂšre quitte Ă  s’en mettre en danger lui-mĂȘme ? Et ce que voudrait vraiment Glenn ? Il adorait sa famille plus que tout, il ne voudrait jamais ça ! Est-ce que tu crois que c’est ce que veulent vraiment les morts ?! S’énerva-t-elle. Je ne pense pas moi ! Personne ne veut ça ! Autant les morts que les vivants !
– Silence ! » S’écria-t-il, visiblement furieux que ce soit elle qui ait invoquĂ© les morts cette fois mais bon, Ingrid ne le craignait pas. MĂȘme dans cet Ă©tat, Dimitri ne leur ferait jamais aucun mal et il le savait autant qu’eux tous. « Tu ne sais pas de quoi tu parles Ingrid

– Bien sĂ»r que si ! Lui renvoya-t-elle dans la figure sans le laisser finir, les plumes autour de son Ɠil et de son oreille droite s’hĂ©rissant de frustration. C’est toi qui t’es mis martel en tĂȘte et qui ne veut pas changer d’avis ! Et pourquoi tu veux tant aller Ă  Embarr ? Ce serait du suicide et tu le sais ! Si je ne sais pas de quoi je parle, d’accord mais, explique-moi pour que je comprenne un peu !
– La mort est la fin
 commença-t-il d’une voix caverneuse, lui parlant sans vraiment lui parler, regardant par-dessus son Ă©paule oĂč devait se trouver des morts. Qu’importent tous nos regrets, nous sommes impuissants une fois morts. Incapables de souhaiter la moindre vengeance, et encore moins de l’assouvir. La haine. Les regrets. Il revient aux vivants d’hĂ©riter de la volontĂ© des morts. Je dois poursuivre dans cette voie. Je vous l’ai dĂ©jĂ  dit. Il est trop tard pour revenir en arriĂšre.
– Pas forcĂ©ment, et tu crois vraiment que c’est ce que les morts voudraient ? Les personnes qu’on a connues ? Vraiment ? D’accord, une fois mort, tu ne peux plus rien faire et les vivants doivent parfois poursuivre ce qu’ils voulaient faire sans avoir le temps de les achever eux-mĂȘmes, on est d’accord mais, tu crois qu’il demande tous vengeance ? Qu’ils te demandent tous vengeance ? Ce n’est pas ce que Lambert voudrait pour toi, ni Glenn, ni Nicola, ni Patricia, ni FrĂ©dĂ©rique
 ni personne. Et tu peux revenir en arriĂšre mais, il faut que tu acceptes de le faire en premier lieu
 je
 je sais que c’est difficile, quand on a pris une mauvaise voie de revenir en arriĂšre et de comprendre qu’on s’est trompĂ©, admit Ingrid, repensant Ă  toutes ses annĂ©es aprĂšs Duscur et aux horreurs qu’elle avait dites et pensĂ©es envers ce pays et ses habitants en croyant pleurer ses morts et avoir sa vengeance, autant pour son grand frĂšre FrĂ©dĂ©rique que pour Glenn. Mais tu peux toujours faire marche arriĂšre

– N’essaye mĂȘme pas de me dire que je dois vivre en allant de l’avant pour honorer leur mĂ©moire ou quelque ineptie de ce goĂ»t, rĂ©torqua-t-il avec un sourire, ayant presque pitiĂ© d'elle en entendant ses mots qu’il devait trouver trop naĂŻf. Ce ne sont que de belles paroles, la logique des vivants. Ceux qui sont morts pleins de regrets
 ne me laisseront aucun repos.
– Vraiment ? J’ai des doutes les connaissant ! Et pour FĂ©lix et Rodrigue ? Leurs avis et leurs actions, ça ne compte pas ? Car eux, ce qu’ils veulent, c’est clair et net ! Et ils ne veulent pas te voir ou voir quelqu’un d’autre mort ! Rodrigue ne veut pas ta mort et FĂ©lix a enfin assumĂ© qu’il aime son pĂšre et ne veut pas le perdre ! Et ça, on l’a tous vu ! MĂȘme toi tu le sais ! Qu’est-ce que tu en fais d’eux ? Leurs avis ne comptent pas car ils sont vivants ? Tu sais bien que FĂ©lix ne se le pardonnera jamais si tu meures et Rodrigue aussi ! Encore plus aprĂšs avoir mis leur vie en jeu pour Ă©viter un mort de plus ! ça, ça leur ressemble vraiment ! Pas comme ton Glenn qui veut juste tuer tout le monde alors qu’il n’était jamais comme ça de son vivant ! Qu’est-ce que tu vas leur dire quand tu te seras Ă  nouveau fait trouer la peau ? Que c’était ce que demandait Glenn ? Ils ne comprendraient surement rien Ă  raison !
– Ne les implique pas là-dedans ! Refusa Dimitri. Tu ne sais vraiment pas de quoi tu parles ! Il faut que

– Oh que si ! Le coupa Ingrid. Je sais de quoi je parle ! Alors, tu vas me faire le plaisir de me suivre, de te reposer car t’as rien Ă  faire debout, de veiller Ă  ce que Rodrigue n’ait besoin de rien avec nous, et d’attendre avec nous que FĂ©lix sorte vivant de cette foutue tente ! Ordonna-t-elle. Et il n’y a pas de mais qui tienne ! T’attend avec Sylvain et moi ! Ne me force pas Ă  te trainer par les pieds jusqu’à lĂ -bas ! Je l’ai fait avant, je recommencerais en appelant des renforts s’il le faut !
– ArrĂȘte de parler de ça ! Nous ne sommes plus des enfants ! C’est

– Alors ne te comporte pas comme un qui fait une fixation sur ce qu’il veut ! Lui hurla-t-elle presque dessus. Donc, tu me suis ou je te traine, tu choisis ! Et moi aussi, je suis pressĂ©e car, Mercedes et Manuela vont bientĂŽt sortir !
Elle ne sut pas trop par quel miracle quand aprĂšs une longue minute d’attente tendue, Dimitri accepta de la suivre, glissant avec elle dans le camp pour retourner aux cĂŽtĂ©s de Sylvain, qui leur dit que les deux guĂ©risseuses travaillaient encore. Rodrigue dormait toujours et heureusement, son Ă©tat semblait stable, Flayn ayant fini aussi par retourner Ă  sa tente avec Seteth qui dormait Ă©galement, se remettant d’une flĂšche prise dans sa jambe. Ils se posĂšrent tous les trois sur des caisses sous le rabat tendu de la tente, s’enroulĂšrent Ă  nouveau dans une couverture pour se protĂ©ger du froid, les deux cavaliers en passant un pan de la leur sur les Ă©paules du blond quand il refusa d’en mettre une malgrĂ© le froid. Enfin, ils attendirent en silence le verdict des guĂ©risseuses.
Au bout d’un moment, alors que la pleine lune se levait en chassant les nuages dans le ciel, le pan de tissu finit enfin par se soulever, rĂ©vĂ©lant Manuala ainsi que Mercedes qui rangeait leur tente d’opĂ©ration. Elle semblait Ă©puisĂ©e, son teint Ă©tait cireux et des cernes creusaient ses yeux mais, un grand sourire illuminait son visage quand elle leur annonça, radieuse.
« Nous avons rĂ©ussi Ă  stopper l’hĂ©morragie. Sa vie n’est plus en danger. Il lui faudra Ă©normĂ©ment de repos et une longue convalescence mais, il va s’en sortir. »
Ingrid et Sylvain sourirent de soulagement et de bonheur Ă  cette nouvelle, se retenant d’hurler de joie tellement ils Ă©taient heureux et soulagĂ©s. FĂ©lix allait vivre ! Il allait vivre ! Par rĂ©flexe, Ingrid se tourna vers Rodrigue toujours endormi, lui annonçant encore la bonne nouvelle de peur qu’il n’ait pas entendu, Dimitri la suivant de son unique Ɠil.
« Félix vit Seigneur Rodrigue, il vit ! Il vit ! »
Elle sentit l’ombre immobile du blond frĂ©mir en voyant un petit sourire soulagĂ© se dessiner sur les lĂšvres du pĂšre. Il semblait toujours entendre quand il Ă©tait inconscient, comme ses fils. Dimitri se tourna alors vers la mĂ©decin, son filet de voix faible ressemblant plus Ă  une supplique qu’à un ordre ou une demande.
– Peut-on le voir ?
– Bien sĂ»r mais, restez silencieux et ne le bouger surtout pas, il a besoin d’énormĂ©ment de repos et cela risque de rouvrir ses plaies s’il bouge.
Sans un mot, Dimitri se leva, dĂ©passa le rossignol, et avança en silence dans la piĂšce de tissu. Le loup dormait sur le ventre, son dos sans chemise recouvert de bandage, mĂȘme si la marque d’écaille flĂ©tri dĂ©passait toujours, scintillant faiblement Ă  la lumiĂšre du sort de feu. Il Ă©tait immobile, comme inerte.
– Il ne bouge pas
 fit-il remarquer.
– C’est normal, il a besoin de repos, lui assura Mercedes, avant d’ajouter aprĂšs avoir rĂ©flĂ©chit une seconde. Peux-tu me confier ta main Dimitri ? Promis, je ne ferais rien d’extraordinaire avec, ronronna-t-elle.
AprĂšs une seconde d’hĂ©sitation, il lui confia. Elle le fit tendre le bras jusqu’à la gorge pale, posant dĂ©licatement ses doigts sur le pouls de son patient.
Il battait. Vite, trĂšs vite mĂȘme mais, il battait.
MĂȘme s’il Ă©tait complĂštement inerte et avait frĂŽlĂ© la mort, vidĂ© de ses forces, son pouls Ă©tait encore lĂ .
– Son cƓur continue toujours de battre. FĂ©lix continue toujours Ă  se battre. Il est encore en vie, jura-t-elle en le relĂąchant, mĂȘme si Dimitri ne bougea pas, incapable de se dĂ©tacher de ce rythme si rĂ©gulier.
Elle finit de nettoyer et de ranger leur matériel avant de lui assurer, un sourire sur son museau de chat tout doux et moelleux quand elle le vit regarder fixement Félix sans un mot.
– Il est hors de danger et il va vivre, ne t’en fais pas Dimitri. Si tu veux lui dire un mot
 je suis sĂ»re qu’il sera trĂšs content de t’entendre.
Comme si la rĂ©alisation le frappait enfin, le monstre ne put s’empĂȘcher de de soupirer de soulagement, ses Ă©paules se relĂąchant pour la premiĂšre fois depuis qu’il avait retrouvĂ© l’armĂ©e du Royaume, une seule pensĂ©e en tĂȘte.
– Ne recommence pas.
À la porte de la tente, Ingrid et Sylvain prirent cette phrase comme une immense victoire.
*
Le retour Ă  Garreg Mach fut un peu pĂ©rilleux mais, les grands blessĂ©s survivraient sans trop de problĂšme. La DĂ©esse soit louĂ©e, Dimitri avait ordonnĂ© avec Byleth de retourner au monastĂšre plutĂŽt que de poursuivre Eldegard, surement parce qu’il ne voulait pas risquer la vie des Fraldarius dans la manƓuvre. Mercedes devait avouer que cela la soulageait beaucoup. GrĂące Ă  FĂ©lix, la blessure du Seigneur Rodrigue s’était refermĂ©e correctement mais, il avait tout de mĂȘme perdu beaucoup de sang et le poison sur la lame pouvait ĂȘtre restĂ© dans son organisme alors, mieux valait rester prudent, surtout que plusieurs organes avaient Ă©tĂ© touchĂ©s. De plus, le systĂšme digestif Ă©tait trĂšs fragile, ils ne devaient pas relĂącher leur vigilance. De mĂȘme, son fils Ă©tait complĂštement vidĂ© de ses forces Ă  cause de l’effort de soigner son pĂšre. Il Ă©tait un magicien douĂ©, et la guĂ©risseuse sentait qu’il avait dĂ» beaucoup la pratiquĂ© Ă  un moment donnĂ© Ă  cause de toute la magie dans son corps mais, il avait perdu l’habitude d’en utiliser autant d’un coup, et n’importe qui se serait effondrĂ© aprĂšs un tel tour de force. Sans l’intervention d’Aegis et du Seigneur Fraldarius, il y aurait des chances pour que

« Mieux vaut ne pas y penser
 songea-t-elle. Le principal, c’est que tant qu’on s’occupe d’eux, leur vie est hors de danger  »
Elle terminait de s’occuper du duc avec Annette et partait rejoindre Ingrid et Sylvain qui restaient au chevet de FĂ©lix pour s’assurer qu’il se reposait, quand elle entendit le bruit de quelque chose qui tombait par terre. Elles se retournĂšrent et virent le duc Ă  moitiĂ© dĂ©couchĂ©, le haut de son corps pendant depuis son matelas alors qu’il cherchait difficilement un appui pour tenter de se lever. Elles se prĂ©cipitĂšrent pour le recoucher, le blessĂ© devant le moins bouger possible.
« Non
 bafouilla-t-il, Ă  moitiĂ© inconscient. Mon fils
 il pleure
 je dois
 m’en occuper

Les deux jeunes femmes Ă©changĂšrent un regard, avant que Mercedes ne lui assure avec sa voix toute douce, posant sa main sur ses yeux avec un sort pour le rendormir.
– Il va bien, ne vous en faites pas, nous nous occupons de lui.
– Oui ! Il est ressorti de la bataille presque sans blessure ! Il faut juste qu’il se repose ! Ajouta Annette avec plus d’énergie et d’enthousiasme, mĂȘme si elle mentait par omission, ne voulant pas l’inquiĂ©ter.
– 
 prenez soin de mon louveteau
 souffla l’homme avant de sombrer à nouveau dans le sommeil.
– C’est promis Seigneur Rodrigue, c’est promis, souffla-t-elle en le remettant correctement le drap autour de lui.
– Salut vous deux, livraison de repas ! Annonça Caspar en ouvrant la porte sans s’annoncer, comme toujours, deux bols de soupe et deux miches de pain noir sur son plateau. Vous devez avoir faim en plus ! Vous avez pas fait de pause depuis qu’on est rentrĂ©s non ?
– Oui ! Merci Caspar ! On mangera tout ça aprĂšs qu’on se soit occupĂ©es de FĂ©lix ! RĂ©pondit Annette en se lavant les mains.
– Merci beaucoup Caspar, c’est trĂšs gentil, sourit Mercedes en le dĂ©barrassant. Comment va ton Ă©paule ?
– Bien, t’inquiĂšte, c’est tout bon ! Linhardt l’avait soignĂ© et recousu en deux temps trois mouvements. Au fait, j’ai croisĂ© Marianne, elle a fini de s’occuper de Dimitri et elle va aider les autres guĂ©risseurs. Elle a dit qu’il Ă©tait trĂšs calme mais, il ne bougeait pratiquement pas Ă  part si on lui ordonnait. Il parlait aussi de mots ou quelque chose comme ça. Enfin, il suit les instructions de Marianne et se repose, Dedue est avec lui.
– Hum
 d’accord, il est toujours assez doux avec elle, et mĂȘme s’il a tendance Ă  ĂȘtre surprotecteur, il l’écoutera surement, surtout si Dedue lui dit aussi », soupira un peu de soulagement Mercedes. MĂȘme si elle faisait des renforts envoyĂ©s par Claude en signe d’amitiĂ© et de bonne volontĂ©, et malgrĂ© le fait qu’Hubert avait tentĂ© de semer la zizanie entre eux Ă  Gronder, la prĂ©sence de Marianne Ă  leur cĂŽtĂ© Ă©tait une bĂ©nĂ©diction quand le prince Ă©tait blessĂ©, tout comme celle de Dedue depuis son retour. Il s’était aussi mis Ă  Ă©couter Ingrid et Sylvain quand ils s’agissaient des Fraldarius ou de lui-mĂȘme alors, elle prenait aussi ça comme un signe de victoire contre sa maladie. « Bien, trouvons quelqu’un pour le surveiller au-cas oĂč il tenterait de se relever et ensuite, allons-nous occuper de FĂ©lix, d’accord Annie ?
– Oui, ce sera plus prudent ! Dis Caspar ? Tu peux
 commença la magicienne avant de se reprendre tristement. Enfin, je ne suis pas sĂ»r que Son Altesse accepte de laisser un adrestien veiller sur le Seigneur Rodrigue

– Je crois pas qu’il m’ait Ă  la bonne non plus
 marmonna-t-il. Il est mĂȘme mĂ©fiant avec Linhardt pour dire alors, quelqu’un comme moi
 dĂ©solĂ© les filles mais, il va falloir trouvĂ© quelqu’un d’autre

– Oui
 Dedue veille sur Dimitri, Ashe est blessĂ© Ă  la jambe
 peut-ĂȘtre que RaphaĂ«l pourrait, il s’entendait bien avec Son Altesse Ă  l’acadĂ©mie

La porte s’ouvrit sur ses mots, dĂ©voilant Ingrid, suivit de Sylvain qui portait FĂ©lix dans ses bras, ce dernier serrant Aegis contre sa poitrine. La lumiĂšre du bouclier Ă©tait bien plus faible que d’habitude quand c’était l’épĂ©iste qui le maniait, en reflet Ă  sa perte colossale d’énergie mais, il restait toujours une lueur de vie dans ses mains, semblable Ă  une onde fraiche et vive.
– Excusez-nous de le dĂ©placer comme ça mais, on pense qu’il sera mieux ici avec Rodrigue, dĂ©clara la chevaliĂšre alors que Sylvain couchait leur ami d’enfance dans le deuxiĂšme lit. Il n’arrĂȘte pas de bouger et de parler dans son sommeil alors, on se demande s’il ne s’inquiĂšte pas pour son pĂšre.
– Vraiment ? Je croyais qu’il ne pouvait pas le saquer ? Fit remarquer Caspar, Ă©tonnĂ©. Bon, il l’a sauvĂ© mais, c’est pas son genre de laisser les gens mourir je crois donc, je pensais qu’il ne l’aimait pas beaucoup.
– Il fait bien semblant mais, si tu le connais, tu voies qu’il tient encore beaucoup Ă  lui, mĂȘme s’ils se sont disputĂ©s, assura Sylvain avec sĂ©rieux. Quand on Ă©tait petits, il Ă©tait toujours collĂ© Ă  Rodrigue et mĂȘme quand il rejetait sa famille en bloc, c’était Ă©crit sur sa figure qu’il l’aimait encore. Juste
 il n’assumait plus qu’il tenait Ă  son pĂšre pour faire simple.
– Oui, faut juste parler le FĂ©lix pour comprendre et depuis le temps, on sait dĂ©coder ce qu’il raconte, ajouta Ingrid. Enfin, il n’assume pas aprĂšs s’ĂȘtre Ă©puisĂ© Ă  ce point pour le sauver, il va m’entendre ! Et de toute façon, personne ne le croira donc, il va falloir qu’il se regarde en face et arrĂȘte de se mentir au bout d’un moment.
Sylvain ne put s’empĂȘcher de rire devant ses affirmations, avant de laisser Mercedes ausculter l’épĂ©iste pour vĂ©rifier que ses blessures ne s’étaient pas rouvertes, notamment sa grande marque d’écailles dans son dos. Heureusement que Manuela et Mercedes Ă©taient avec eux, elles l’avaient surement arrachĂ© de peu Ă  la mort, mais sa marque semblait plus enfoncĂ©e dans son dos, ancrĂ©e plus profondĂ©ment et lĂ©gĂšrement flĂ©trie, comme si on avait absorbĂ© quelque chose de l’intĂ©rieur d’elle. Enfin bon, c’était le signe de la bĂ©nĂ©diction de Fraldarius, cela ne devait pas ĂȘtre quelque chose de trĂšs rationnel.
– Hum
 elle semble toujours assĂ©chĂ©e
 ou plutĂŽt vide, commenta la guĂ©risseuse en allant chercher de quoi tenter de l’hydrater.
– Fraldarius est liĂ© Ă  l’eau, et il a surement utilisĂ© une partie de l’énergie qu’il lui a donnĂ© pour sauver Rodrigue alors, c’est peut-ĂȘtre pour ça ? Proposa Sylvain.
– Vous avez des trucs bizarres qui apparaissent sur votre corps quand vos ancĂȘtres vous sauvent la vie, c’est ça ? Leur demanda Caspar, un peu moins au courant de tout ça que les guĂ©risseuses. Comme avec les plumes qui sont apparues sur ton visage et ton oreille aprĂšs la bataille d'Ailell Ingrid ?
– Oui, tu as saisi l’idĂ©e, dĂ©clara-t-elle en passant sa main sur la petite aigrette de plumes tout autour de son oreille droite et qui descendait jusqu’autour de son Ɠil, son lobe aussi Ă©tant partiellement emplumĂ© aprĂšs un mauvais coup d’épĂ©e Ă  la tĂȘte, il s’en Ă©tait fallu de peu d’arriver sur les terres de Daphnel Ă  temps. Pour FĂ©lix, c’est beaucoup plus vieux, on Ă©tait encore enfants alors, peut-ĂȘtre qu’il y avait moins d’énergie en lui ? En plus, normalement, il faut ĂȘtre sur les terres du Braves en plus de sa Relique pour que ça marche donc, il a surement dĂ» utiliser plus de son Ă©nergie Ă  lui que de celle de Fraldarius.
– Peut-ĂȘtre, mĂȘme si la prĂ©sence rĂ©siduelle de son ancĂȘtre pourrait expliquer pourquoi ses veines ont aussi bien tenus le choc, bien qu’elles aient fini par exploser sous la pression de sa magie. Celle de Fraldarius qui reste dans Aegis a dĂ» aider aussi, analysa Annette. MĂȘme pour un guĂ©risseur expĂ©rimentĂ© avec une relique ou l’emblĂšme de Lamine ou de Sainte Cetheleann, c’est trĂšs compliquĂ© et dangereux de mobiliser autant d’énergie d’un coup.
– Dangereux comment ? Comme
 quoi ? Il n’aurait pas eu l’aide de Fraldarius ou sa marque ou sa Relique ou un mĂ©lange de tout ça, il se serait passĂ© quoi s’il s’était acharnĂ© comme ça pour sauver le seigneur Rodrigue ? Demanda le combattant en mĂȘlĂ©e.
Un silence trĂšs lourd de sens s’installa dans la petite piĂšce, personne n’osant rĂ©pondre. Seule Mercedes eut le courage de le faire une fois qu’elle eut fini d’ausculter l’épĂ©iste et de lui donner Ă  boire pour qu’il ne se dĂ©shydrate pas.
– Ils seraient sans doute morts tous les deux
 la blessure du Seigneur Rodrigue Ă©tait mortelle mĂȘme avec de la magie, sauf Ă  ĂȘtre Lamine en personne et l’effort aurait Ă©tĂ© trop important pour le corps de FĂ©lix. Ce ne serait pas une premiĂšre qu’un guĂ©risseur meure Ă  s’ĂȘtre trop entĂȘtĂ©. MĂȘme maintenant, sa convalescence va ĂȘtre longue avant qu’il puisse juste retrouver assez de force pour bouger seul, et il risque de ne plus pouvoir utiliser la magie de sa vie
 espĂ©rons que nous pourrons faire escale Ă  Fraldarius, nous pourrons les confier au Seigneur Alix, il doit s’inquiĂ©ter pour eux. On dit que l’eau du lac est curative, elle pourrait leur faire du bien.
– Elle l’ait, elle est mĂȘme miraculeuse cette eau, encore plus pour la famille du Brave donc, il faut qu’on y passe ! S’exclama Ingrid. Dimitri devrait accepter ! Surtout pour eux !
– Oui, par contre, faudrait peut-ĂȘtre attendre un peu avant de lui dire, ajouta Sylvain avec un regard indĂ©chiffrable Ă  part pour son amie d’enfance.
– Hum
 tu n’as pas tort
 mieux vaut attendre un peu
 de toute façon, je crois qu’il en est dĂ©jĂ  trop conscient
 soupira-t-elle.
FĂ©lix frissonna dans son sommeil, marmonnant des syllabes qui n’allaient pas ensemble en s’agitant comme il put. Les deux cavaliers le rejoignirent alors en murmurant quelques choses que les autres ne comprirent pas mais, le blessĂ© se calma un peu, replongeant dans les limbes.
*
Dimitri dĂ©ambulait dans les couloirs de Garreg Mach, la lumiĂšre de la demi-lune ne frappant que son cĂŽtĂ© aveugle, qu’importait comment il tournait. Il avait mal mais, il ne fit pas attention. Il avait pratiquement toujours mal, mal au corps ou mal Ă  la tĂȘte, ce n’était pas grave, qu’une partie des suppliques des morts rĂ©clamant vengeance en creusant sa peau de leurs ongles et phalanges
 il devait accomplir son office. Seul. Sinon, les autres se mettraient encore en travers de son chemin, que ce soit pour venger leurs morts Ă  tous, ou quand la Mort venait enfin le punir pour avoir survĂ©cu et ĂȘtre un monstre qui ne mĂ©ritait que d’ĂȘtre frappĂ© par ce couteau.
Mais
 Rodrigue avait refusĂ© que cette juste punition le frappe
 il l’avait pris Ă  sa place
 alors que cet homme mĂ©ritait seulement d’enfin vivre en paix aprĂšs avoir perdu toute sa famille Ă  cause de lui
 il n’était pas aveugle
 Rodrigue n’avait pas perdu que Glenn Ă  Duscur
 il avait aussi perdu FĂ©lix, et il avait perdu Alix
 obligĂ© de vivre sĂ©parĂ© de son propre jumeau alors qu’il Ă©tait insĂ©parable, tellement inquiet que cela en faisait mal
 mais qu’il ne rejoignait pas afin de s’occuper du Royaume Ă  leur place, sauf quand Rufus le chassait avant de le rappeler, bien incapable de faire un dixiĂšme de son travail
 obligĂ© d’entendre les beuveries et les insultes constantes de Rufus, les menaces constantes sur sa vie, celle de son frĂšre puis celle de FĂ©lix quand il se rapprochait de la majorité  mais Rodrigue restait Ă  Fhirdiad pour le Royaume autant que pour lui
 Dimitri l’avait dĂ©jĂ  bien assez abusĂ© de lui
 il n’aurait jamais dĂ» prendre en plus ce poignard Ă  sa place comme tant de membres de sa famille l’avait fait avant lui
 les Blaiddyd n’avaient survĂ©cu que parce les Fraldarius leur avait donnĂ© jusqu’à tout leur sang
 que ce soit les prĂ©cĂ©dents Alix et Rodrigue, les grands-parents des jumeaux tuĂ© dans les innombrables guerres de Clovis le Sanglant, leur propre pĂšre Guillaume qui s’était sacrifiĂ© pour son grand-pĂšre le roi Ludovic, Glenn qui avait donnĂ© sa vie pour lui Ă  Duscur, ou Rodrigue aujourd’hui
 il aurait dĂ» mourir Ă  cause de ce coup de poignard

Mais non, FĂ©lix avait refusĂ© de le laisser se faire faucher et l’avait sauvĂ©, mais il avait payĂ© le prix fort
 il aurait pu en mourir
 il aurait dĂ» en mourir
 pour avoir arrachĂ© la vie de son pĂšre du chemin de la faux de la Mort, il aurait dĂ» donner la sienne Ă  la place
 Fraldarius n’aurait pas Ă©tĂ© là
 ou quiconque
 sans ce miracle, les deux seraient morts
 les deux seraient morts
 mort et mort
 mort pour lui
 alors que

« Tu aurais sacrifiĂ© mon pĂšre et mon petit frĂšre Ă  ta place, et mon oncle n’aurait pas survĂ©cu longtemps sans notre famille ou son frĂšre, gronda Glenn en creusant sa gorge, ses larmes de sang coulant le long de la tempe du monstre, impuissant Ă  lui faire vraiment du mal. Vous aimez le gout de notre sang c’est ça ? Vampire que vous ĂȘtes
 vampire que tu es
 tu n’as pas le droit de les arracher Ă  Alix ! Tu n’as pas le droit de pulvĂ©riser encore plus notre famille ! Ne les approches plus ! Plus jamais !
– Je sais Glenn, je sais. Je ne les approcherais plus, plus personne
 au moins, Rodrigue et FĂ©lix pourront

– Leurs avis et leurs actions, ça ne compte pas ?
– Tais-toi Ingrid
 se remĂ©mora Dimitri, les mots de la chevaliĂšre sonnant dans ses oreilles. Tu ne comprends pas

– Oh que si ! Le coupa-t-elle Ă  nouveau dans sa tĂȘte. Je sais de quoi je parle !
– C’est plus compliqué  si tu pouvais les voir
 si tu voyais Glenn
 si tu l’avais vu
 il faut que

Le souvenir de dispute se fit couper quand il entendit des notes
 non, un chant
 un doux chant semblable Ă  un ruisseau coulant entre les rochers
 comme il en avait des milliers Ă  Fraldarius
 une berceuse
 une douce mĂ©lopĂ©e qui sonnait vaguement familier Ă  ses oreilles sensibles, encore plus depuis qu’il avait perdu un Ɠil
 comme le chant des sirĂšnes

Dimitri le suivit, et s’il devait se faire dĂ©vorer par un autre monstre, tant pis, il l’aurait de toute façon bien mĂ©ritĂ©.
Étrangement, au lieu de le mener Ă  l’étang, la mĂ©lopĂ©e l’emmena Ă  l’infirmerie, devant laquelle veillait RaphaĂ«l, sa masse Ă  la ceinture, sa hache dĂ©gainĂ©e et ses protections de poings enserrant ses doigts
 ça pouvait aller, mĂȘme s’il semblait complĂštement indiffĂ©rent au chant
 au moins, il Ă©tait concentrĂ© sur sa mission
 mais c’était tout de mĂȘme Ă©trange
 ce n’était pas la voix de Manuela, ni celle de Flayn, de Mercedes ou d’Annette, c’était une voix d’homme
 ce n’était surement pas la voix de Linhardt, hors de question qu’il s’occupe des deux loups
 Ashe pouvait aider Ă  l’infirmerie mais, ce n’était pas lui, ni Ignatz
 non
 s’il devait donner un nom Ă  cette voix, c’était
 Glenn
 ou au moins, cette voix ressemblait beaucoup Ă  la sienne en plus douce, un peu comme celle de Rodrigue et Alix mais pas vraiment
 Il passa devant RaphaĂ«l et entra, voulant en avoir le cƓur net.
Dimitri dĂ©couvrit alors un homme, penchĂ© sur FĂ©lix alors qu’il lui caressait les cheveux, la berceuse coulant de ses lĂšvres dans une langue que Dimitri ne comprenait pas. Il Ă©tait tout petit, vraiment minuscule et maigre mais, il voyait la force dans tous ses mouvements, mĂȘme les plus doux, comme la surface d’un lac dissimulant tous les courants fougueux au regard de l’imprudent. Ces joues Ă©taient recouvertes d’écailles blanches, surement de la mĂȘme couleur que sa peau d’origine, bien que son cou lacĂ©rĂ© de branchies prenne une couleur sarcelle qui devait entiĂšrement le recouvrir. Ces ouvertures ne semblaient cependant pas le gĂȘner pour porter son collier, composĂ© de quatre plaques en forme de mains ouvertes, couvertes d’une toute petite Ă©criture dans diffĂ©rents alphabets. Sa propre main Ă©tait palmĂ©e et ses doigts griffus, son chant rĂ©vĂ©lait des crocs dans sa bouche, comme celle d’une crĂ©ature lacustre sortie de l’eau. Quand il se redressa pour diriger son chant vers le pĂšre de FĂ©lix, ses yeux de chat bleu comme l’eau du lac s’accrochĂšrent Ă  son Ɠil unique, les mĂȘmes que ceux de Rodrigue et Glenn
 les yeux en amande des Fraldarius
 les yeux de Fraldarius, l’ÉpĂ©iste de l’Onde
 Brave de l’eau et premier receveur de l’emblĂšme confiĂ© par la DĂ©esse avant de la trahir
 il Ă©tait lĂ  en personne

La surprise passa dans ses prunelles, puis un cĂŽtĂ© blasĂ© alors qu’il lui demandait quelque chose dans sa langue. C’était fou comme ses expressions Ă©taient celles de FĂ©lix.
« Je ne parle pas latin, déclara froidement Dimitri.
– Ego loquor tua lingua, rĂ©torqua-t-il visiblement (peut-ĂȘtre que lui comprenait le fodlan), avec la voix de Rodrigue en beaucoup plus cinglant, comme le ton d’Alix, ainsi que plus grave que la voix des jumeaux.
Il continua à parler en appuyant ce qu’il disait avec ses mains, montrant Dimitri, puis faisant un geste de quelqu’un qui marchait avant de montrer le sol de la piùce.
– Je t’ai entendu chanter, comprit-il. Je me demandais à qui appartenait cette voix. Je m’en vais.
– Dicendi finem jacere », dĂ©clara-t-il sĂšchement en s’approchant de lui. Comment pouvait-il ĂȘtre aussi petit ? Cet homme arrivait Ă  peine Ă  sa poitrine
 il devait ĂȘtre Ă  peine plus grand qu’Annette
 il n’avait pas dĂ» manger Ă  sa faim souvent
 « Ubi is ? Is urbi adversariis ?
– Je te l’ai dĂ©jĂ  dit, je ne parle pas ta langue
 lui rappela-t-il, mĂȘme s’il dĂ» rĂ©pondre sur les mots transparents. Je vais Ă  Embarr tuer Eldegard, tu ne m’arrĂȘteras pas.
Fraldarius cribla Dimitri du regard, furieux. Tant pis, ce n’était pas lui directement qu’il devait venger, il devait tous les venger
 dont les descendants de l’homme devant lui

– C’est que tu ne comprends pas sa langue
 il te dit d’y aller, vas-y
 souffla Glenn Ă  son oreille, Dimitri se dĂ©tournant pour le regarder alors qu'il lui assurait avec un grand sourire entendu. Va nous venger
 tous autant que nous sommes avant de les mettre Ă  nouveau en danger

Une gifle aqueuse le força Ă  regarder Fraldarius, ce dernier le fixant impĂ©rieusement avec son regard d’eau trop semblable Ă  celui des jumeaux et de Glenn. Il montra ses yeux, puis l’Ɠil de Dimitri, avant de recommencer dans le sens inverse, des mots difficilement articulĂ© sortant de sa bouche.
– Er
couvté  moi
 sole
 soli
 sol. Ri
 rien d’otr.
Il continua sans un mot, parlant avec ses mains et ses expressions. Il lui montra Rodrigue et FĂ©lix, profondĂ©ment endormi, dĂ©signa leurs blessures et bandages, fit des gestes traduisant aussi bien que possible ce qu’il voulait dire. Il fit un signe d’attente, banda des membres blessĂ©s, nourrit quelqu’un alors qu’il faisait entre chaque geste un arc de cercle, comme pour mimer le passage du soleil et de la lune. Il montra Ă  nouveau ses descendants mais, il ajouta aussi Dimitri Ă  son Ă©numĂ©ration, puis dĂ©signa alors le sol oĂč il se trouvait avec un signe de s’endormir.
– Je ne peux pas dormir ou me reposer, je dois les venger
 et je ne peux pas rester. Je les mettrais encore plus en danger.
– Es contineri, et nominor Pertinax, marmonna-t-il avant de lui demander en montrant ses descendants. Tu aliquid respuo ? Mei filii filiorum elegerunt. Et tu eligis aliquid respuere delectuum ? Delectus no gravia sunt ?
– ArrĂȘte
 je t’ai dĂ©jĂ  dit que je ne comprends pas un traitre mot de ce que tu racontes, marmonna Dimitri en se frottant la tĂȘte, incapable de le regarder dans les yeux, ou mĂȘmes ses enfants, n’entendant que les autres morts lui hurler de partir, de laisser Fraldarius lĂ  et d’aller les venger. Je dois venger les morts
 c’est ce qu’ils me demandent sans cesse. Je dois

Il sentit alors des doigts plus doux lui faire relever le menton jusqu’à ce qu’il regarde Ă  nouveau le Brave dans les yeux, bien que toujours autoritaire. FĂ©lix Ă©tait vraiment son portrait craché 
– Puer.
Il montra l’Ɠil restant de Dimitri, puis les morts autour de lui avant de faire un signe de croix en dĂ©clarant.
– No gravia sunt.
Il dĂ©signa ensuite Ă  nouveau son Ɠil, puis lĂ  oĂč devait ĂȘtre son cƓur dans sa poitrine.
– Est. Anima gravissima est.
Le brave se dĂ©tourna alors de lui, attrapant les mains qu’il portait en pendentif pour les tenir entre ses doigts, comme le faisait Rodrigue avec son chapelet, avant que des notes coulent Ă  nouveau de ses lĂšvres. Il ne regardait plus Dimitri, ne s’occupait plus de lui, tournant plutĂŽt toute son attention vers FĂ©lix et Rodrigue Ă  qui cette berceuse Ă©tait destinĂ©e, le vengeur aurait pu partir accomplir son devoir sans problĂšme. Mais il resta sur place, ne pouvant se dĂ©tourner de ce chant
 la voix de Fraldarius Ă©tait vraiment magnifique
 certaines lĂ©gendes disaient que le mythe des sirĂšnes venait en fait de lui
 en l’entendant, Dimitri voulait bien y croire
 ce chant Ă©tait si beau qu’il pourrait faire tout oublier
 emportĂ© n’importe qui
 comme un bout de bois Ă  la surface de l’eau du lac, ballotĂ© par les vagues
 l’emporter lui-mĂȘme

La seconde d’aprĂšs, Dimitri se retrouva dans son lit, seul et en silence. Il ignorait complĂštement s’il dormait ou non, il ne faisait plus la diffĂ©rence Ă  prĂ©sent entre les deux. Sa blessure lui faisait toujours aussi mal mais, les appels des morts semblaient plus faibles comparĂ© Ă  la douleur, cette derniĂšre lui ordonnant encore plus fort de rester couchĂ©.
Il se laissa dĂ©river Ă  nouveau, comme si son esprit cherchait Ă  rĂ©entendre la voix de la sirĂšne, jusqu’à ce qu’il soit tirĂ© Ă  nouveau vers son lit par le bruit d’une petite dispute. Il ouvrit son Ɠil et vit Manuela entrer, accompagnĂ© d’Hanneman, Dedue sur les talons Ă©tant donnĂ© qu’il le veillait.
«  et moi je te dis que tu n’as rien Ă  dire sur mon mĂ©nage car
 ah ! Bonjour Votre Altesse, je suis heureuse de vous voir rĂ©veiller ! Gazouilla Manuela. Je viens vĂ©rifier votre blessure si vous me le permettez. Excusez-nous que ce ne soit pas Mercedes, Flayn ou Marianne mais, elles sont de gardes.
Dimitri hocha la tĂȘte, la laissant faire en demandant.
– FĂ©lix et Rodrigue ?
– Ils dorment toujours mais, leur Ă©tat est stable. Ils ont besoin de temps pour se remettre.
– Bien
 
 
 . . . Professeur Hanneman ? Finit-il par demander avant que l’érudit s’en aille, ayant posĂ© les bandages de Manuela sur le bureau de Dimitri.
– Oui Votre Altesse ?
– Parlez-vous latin ? Lui demanda le blessĂ©, des mots tournant dans sa tĂȘte.
– Oui, Ă©videmment, cela a Ă©tĂ© la langue de l’administration et de la science pendant longtemps au nord, lui assura le lĂ©rot. Pourquoi donc ?
– Pouvez-vous traduire « puer », « no gravia sunt » et « esse. Anima gravissima est » ? Dit par quelqu’un qui le parle tous les jours.
– Bien sĂ»r ! C’est du latin un peu commun, ce n’est pas de la grande littĂ©rature mais, puer est un mot commun qui peut autant se traduire par « enfant » que « jeune esclave » selon le contexte. À l’époque oĂč on parlait le latin comme langue vivante, on ne faisait pas la diffĂ©rence entre un enfant qui n’est pas le sien et un jeune esclave et la traduction dĂ©pend du contexte. Cela nous permet d’avoir des informations sur la maniĂšre dont l’enfance et le dĂ©but de la vie Ă©tait considĂ©rĂ© Ă  l’époque, ainsi que des indices sur la condition des enfants Ă  ce
 enfin, je m’égare. Pour « no gravia sunt », cela peut vouloir dire « ce n’est pas lourd » ou « ce n’est pas important » selon le contexte. Et pour « Esse. Anima gravissima est », cela veut dire « l’ñme est la plus importante », lui expliqua en dĂ©tail Hanneman, le regard brillant de plaisir de partager ses connaissances. Puis-je vous demander d’oĂč vient cette demande ?
– Quelqu’un me l’a dit
 cette nuit.
– Cette nuit ? Vous n’avez pas bougĂ© de votre lit pourtant, s’étonna Dedue.
Dimitri se mura un peu dans le silence, pensif avant de marmonner, la lumiĂšre d’Areadbhar brillant Ă  cĂŽtĂ© de son lit, protectrice. D’habitude, il dormait carrĂ©ment avec elle quand il avait vraiment besoin de se reposer, la Relique couvrait les suppliques des morts avec la mĂ©lodie d’une flute

– J’ai juste entendu une sirĂšne chanter
 nous restons tous ici tant que nous avons des blessĂ©s, finit-t-il par ordonner.
Ses mots durent un peu Ă©tonnĂ© s’il se fiait au silence gĂ©nĂ©ral des morts et des vivants mais, Manuela assura avant que son pĂšre ne le reprenne.
– C’est une trĂšs sage dĂ©cision, nous avons tous besoin de repos.
– Je vais immĂ©diatement prĂ©venir le capitaine Eisner, ajouta Hanneman avec un sourire sous sa grosse moustache. Avez-vous autre chose Ă  lui transmettre Votre Altesse ?
– 
 non, Ă  part de faire attention Ă  tous les blessĂ©s.
– Bien sĂ»r, cela va de soi, assura-t-il en partant, sa longue queue de lĂ©rot volant derriĂšre lui sous son imposant manteau.
Manuela gazouilla en inspectant sa blessure, passant prudemment un onguent avec ses ailes.
– Bien, la blessure se referme correctement, vous ĂȘtes trĂšs rĂ©sistant ! Dans quelques semaines, vous pourrez rebouger normalement !
– Et Rodrigue et FĂ©lix ? RĂ©pĂ©ta-t-il, voulant au moins autant de prĂ©cision que pour lui.
– Hum
 ses plumes se resserrĂšrent autour d’elle alors qu’elle avouait plus doucement, tirant de la bande pour changer son pansement. C’est plus dur Ă  dire
 leur blessure est plus profonde et grave, et ils ont tous les deux perdus Ă©normĂ©ment de sang et d’énergie
 il leur faudra beaucoup de temps pour se remettre, s’ils le font complĂštement, FĂ©lix risque de garder des sĂ©quelles
 nous saurons avec le temps, finit-elle en coupant la bande avant de reprendre. Cependant, je pense que l’on peut ĂȘtre optimiste. Ils ont tous les deux de bonnes raisons de s’en remettre. Cela ne fait pas tout, Ă©videmment mais, si le patient veut survivre et s’en sortir, cela simplifie la tĂąche du mĂ©decin car, il n’a pas Ă  lutter contre son propre patient pour le maintenir en vie. La force de la volontĂ© peut faire Ă©normĂ©ment de chose parfois.
Dimitri resta silencieux, la laissant changer son bandage en songeant Ă  ses mots.
Une fois qu’elle eut fini, il tenta de se relever mais, Dedue l’en empĂȘcha, posant sa grosse patte d’ours sur son Ă©paule.
– Vous devriez continuer à vous reposer Votre Altesse, vos blessures sont encore ouvertes.
– Je suis d’accord, vous devez Ă  tout prix Ă©viter de bouger, le soutint Manuela.
– Je n’en ai que pour quelques minutes.
Dimitri se releva malgrĂ© leurs protestations, attrapa Areadbhar puis descendit en s’appuyant sur elle. Il traversa toute la cour sans prĂȘter attention aux regards qui le suivaient, mĂ©langeant sans doute de la crainte et de l’étonnement mais, il les ignora, luttant dĂ©jĂ  assez contre les rĂ©primandes de son pĂšre et de sa belle-mĂšre, ainsi que les railleries de Glenn lui disant qu’Eldegard se trouvait de l’autre cĂŽtĂ©. Il se força Ă  ne pas les Ă©couter, avançant en s’appuyant sur sa Relique afin de se dĂ©placer plus facilement malgrĂ© ses blessures.
Le jeune homme se traina autant qu’il put jusqu’à la piĂšce oĂč dormait les Fraldarius. Balthus le laissa passer sans discuter, alors que Mercedes et Marianne changeaient les bandages de FĂ©lix avec l’aide d’Ignatz, l’une empĂȘchant les hĂ©morragies de reprendre avec sa magie, pendant que l’autre changeait les bandages, l’artiste tenant aussi dĂ©licatement que possible le corps de l’épĂ©iste. Sans perdre son objectif de vue, Dimitri s’avança jusqu’au fond de la piĂšce, lĂ  oĂč se trouvait Aegis. FĂ©lix pouvait tenir sans lui apparemment, tant mieux. DĂ©licatement, il posa Areadbhar Ă  cĂŽtĂ© du bouclier, leurs deux gemmes de sang scintillant Ă  l’unisson.
« Comme ça, vous jouerez Ă  nouveau en duo
 le chanteur et le flutiste non ? Il ne manque plus que Dominic mais bon, ça ferait trop de bruit si elle dansait dans la piĂšce. »
Leur lueur Ă©trange sembla changer un peu mais, il ne prit pas la peine de dĂ©coder. Il se tourna Ă  nouveau dans l’autre sens pour partir.
« Merci beaucoup pour l’attention, ronronna Mercedes, faisant signe Ă  Ignatz de reposer FĂ©lix alors qu’elle venait de finir ses bandages.
L’épĂ©iste dormait profondĂ©ment, le visage neutre n’exprimant aucune Ă©motion, pas mĂȘme de la douleur, comme celui d’un mort paisiblement dans son sommeil. Il semblait encore plus petit comme ça
 il Ă©tait musclĂ© mais, FĂ©lix semblait frĂȘle ainsi, le torse entourĂ© de bandage, le teint encore plus blafard Ă  cause de la perte de sang, renforcĂ© par l’encre de ses cheveux
 Rodrigue aussi
 on aurait deux poupĂ©es de verres sur le point de se briser

– Ils vivent encore ? Demanda-t-il.
– Oui, bien sĂ»r. Il leur faut beaucoup de soin mais, ils vivent toujours et vivront encore, lui assura la chatte crĂšme. Leur cƓur bat toujours.
Dimitri hocha la tĂȘte, avant de demander.
– Personne n’est rentrĂ© ici cette nuit ?
– Non, Ă  part nous pour nos gardes, rĂ©pondit Marianne, avant que la brebis ne note. Par contre, il y avait une sorte de magie dans la piĂšce
 une sorte de prĂ©sence mais, elle n’était pas agressive
 elle semblait baigner la piĂšce pour la protĂ©ger

Le jeune homme jeta son Ɠil vers Aegis, brillant toujours faiblement mais, ayant repris de la force quand Areadbhar fut Ă  cĂŽtĂ© de lui. Il marmonna, ne sachant mĂȘme pas comment l’expliquer de toute façon.
– C’était juste Fraldarius. Je l’ai entendu chanter

Il vit Glenn se dĂ©coller du chevet de son petit frĂšre et de son pĂšre pour se tourner vers lui, visiblement furieux qu’il dĂ©voile que leur ancĂȘtre Ă©tait apparu hier soir, voulant peut-ĂȘtre le garder pour eux
 mais Ignatz le coupa, le gorgebleue gazouillant avec bonne humeur.
– Je suis sĂ»r que l’ÉpĂ©iste de l’Onde est toujours Ă  leurs cĂŽtĂ©s pour les protĂ©ger ! J’ai lu plusieurs lĂ©gendes oĂč il apparait pour veiller sur eux sa famille, et il vient d’intervenir pour les sauver tous les deux. Si
 si vous voulez, je peux peindre une icĂŽne de lui pour les protĂ©ger ? Nous faisons souvent ça Ă  Leicester, nous gardons des petites icones des Braves sur nous pour nous accompagner dans nos tĂąches quotidiennes, selon leur spĂ©cialitĂ©. Ou au moins attirĂ© la chance mais, c’est comme vous le dĂ©sirez Votre Altesse, proposa-t-il plus timidement, hĂ©sitant. Mais je comprendrais si vous refusiez

Dimitri ne savait mĂȘme pas lui-mĂȘme pourquoi il accepta d’un signe de tĂȘte, sans un mot, ni mĂȘme prendre en compte le refus catĂ©gorique de Glenn, ainsi que celui de son pĂšre et de sa belle-mĂšre. Mais ils disparurent quand le gazouillement joyeux d’Ignatz qui lui promit de faire de son mieux rĂ©sonna dans la piĂšce.
ArrivĂ©e entre temps, Dedue et Manuela le ramenĂšrent dans son lit afin qu’il se repose et que ses blessures se referment correctement. De toute façon, aprĂšs Gronder, tous les belligĂ©rants devaient reprendre des forces avant de se rĂ©affronter. Eldegard avait Ă©tĂ© griĂšvement blessĂ©e alors, elle s’était retirĂ©e du cĂŽtĂ© d’Embarr. Si Ignatz avait bien tout compris, ceux qui s’en Ă©tait les mieux sortis, c’était l’armĂ©e de l’Alliance, Claude ayant vite fait reculer leurs troupes quand il comprit que l’ImpĂ©ratrice tentait de faire s’affronter Faerghus et Leicester pour n’avoir qu’à finir le travail. Heureusement, en voyant Dimitri et avec les signes de ses camarades, le grand-duc avait fait reculer leurs troupes, dĂ©jĂ  trĂšs peu nombreuses. Claude ne voulait pas affronter Dimitri et avait dĂ©jĂ  envoyĂ© tous les cerfs d’or mise Ă  part Hilda Ă  ses cĂŽtĂ©s en signe de bonne volontĂ© dĂšs la reprise du grand pont de Myrddin, ainsi que Lorenz qui jouait encore les agents doubles auprĂšs d’Eldegard. C'Ă©tait lui qui les avait prĂ©venus des attentions de l'ImpĂ©ratrice. La DĂ©esse soit louĂ©e, Dimitri ne les avait pas attaquĂ©s une fois la confusion Ă©cartĂ©e, le brouillard de magie noire levĂ©e, et les « troupes spĂ©ciales » d’Hubert rayĂ©es de la carte. Le bras droit d’Eldegard avait eu l’idĂ©e d’habiller deux de ses bataillons avec un Ă©quipement trĂšs proche de celui de l’Alliance et du Royaume, puis de les lancer contre les vraies factions alliĂ©es et royales, ce qui n’avait en rien aidĂ© Ă  amĂ©liorer la situation, surtout aprĂšs la mort des messagers du Royaume dans l’Alliance
 mĂȘme eux ne savaient pas qui blĂąmer pour ça
 les impĂ©riaux, Gloucester, des bandits, la malchance... trop de possibilitĂ©... encore heureux, ils Ă©taient arrivĂ©s Ă  Ă©craser rapidement les troupes dĂ©guisĂ©es
 sans ça, peut-ĂȘtre que
 enfin, le principal Ă©tait qu’une grande partie d’entre eux s’en Ă©tait sortie vivant

Quand Marianne et Mercedes n’eurent plus besoin de lui, Ignatz se prĂ©cipita aux Ă©curies, oĂč il savait qu’il trouverait Ingrid en train de s’occuper de sa monture. Sylvain n’était pas avec elle pour une fois, partit en infiltration. Pendant les cinq ans, il s’était plusieurs fois rendu Ă  Sreng avec sa mĂšre pour s’assurer que les traitĂ©s de paix avec sa tante, la reine Thorgil, tenaient toujours et en avait profitĂ© pour se faire tatouer un de leurs sorts dans le dos, lui permettant de se transformer en renard alors, il Ă©tait un de leurs meilleurs Ă©lĂ©ments pour l’infiltration. Shamir l’avait chargĂ© de vĂ©rifier si aucun soldat impĂ©rial ne rĂŽdait autour du monastĂšre discrĂštement, il ne devrait pas revenir avant plusieurs jours. Il lui raconta ce qui venait d’arriver Ă  l’infirmerie, ainsi que les mots de Dimitri et son attitude. La chevaliĂšre eut un sourire victorieux.
« Il continue sur la bonne voie ! »
*
Le soir suivant, Dimitri se retrouva à déambuler à nouveau dans le monastÚre malgré ses blessures. Il entendait toujours le fredonnement de Fraldarius venir bercer ses oreilles mais, il se retient de le suivre, il refusait de déranger encore plus cette famille
 Glenn lui en voulait assez de retarder sa vengeance

Il sortit donc dans la cour, le vengeur bien dĂ©cidĂ© Ă  enfin donner aux morts ce qu’ils rĂ©clamaient depuis des annĂ©es, avant de recommencer Ă  se trouver des excuses pour ne pas le faire
 il devait se rendre Ă  l’évidence et arrĂȘter ses enfantillages Ă  vouloir rester Ă  leurs cĂŽtĂ©s Ă  tous
 c’était trop dangereux pour eux

Dimitri traversa la cour devant le rĂ©fectoire, puis contourna l’étang pour sortir, quand il vit une silhouette colorĂ©e lui bloquer le passage, entourĂ© des chats et des chiens habitants le monastĂšre.  Ses cheveux roux prenaient une teinte plus douce sous la lumiĂšre tamisĂ©e de la lune, retenus autour de son front par un bandeau dĂ©corĂ© de clochettes, sa tresse entourant ses Ă©paules jusqu’à tomber au sol, habillĂ© de feutre et de cuir colorĂ©s et brodĂ©s, avec une grande veste croisĂ©e sur sa poitrine, d’un pantalon Ă©pais et de bottes remontant jusqu’à ses genoux, un habit idĂ©al pour un cavalier. Une longue canne reposait aussi sur son Ă©paule, Ă©galement agrĂ©mentĂ© d’une clochette teintant dans la brise de la nuit. Une longue queue de renard dĂ©passait de sa tunique, sa face Ă©tait couverte de poils aussi roux que ses cheveux, ses ongles semblaient plus durs de loin

L’homme colorĂ© semblait bavarder avec les animaux tout autour de lui, mais il redressa la tĂȘte dĂšs que Dimitri s’approcha, demandant dans une sorte de latin avant de rĂ©pĂ©ter en fodlan avec un trĂšs fort accent.
« Qui est là ? Je sens qu’il y a quelqu’un
 il prit appui sur sa canne pour se relever, demandant encore. Il y a quelqu’un
 ne vous en faites pas, je jure devant les dieux que mes attentions sont pacifiques
 il tourna la tĂȘte vers Dimitri, mĂȘme s’il ne rĂ©pondait toujours rien. Je crois que vous ĂȘtes là
 je sens votre odeur dans ce sens-là

Ses yeux Ă©taient ouverts mais, ils ne voyaient rien. Ses yeux et sa cornĂ©e Ă©taient opaques, recouverts d’un voile brun teintĂ© de rouge
 cet homme Ă©tait complĂštement aveugle
 et s’il se fiait Ă  sa derniĂšre rencontre nocturne ressemblant Ă  quelqu’un qu’il connaissait, Dimitri devinait sans trop de problĂšme Ă  qui il avait Ă  faire.
– Tu es Gautier, n’est-ce pas ? Que veux-tu ? Et comment peux-tu parler notre langue ? Tu es mort depuis des siùcles

– Tiens, ta voix ressemble beaucoup Ă  celle de Simplex mais, on dirait que tu n’as rien mangĂ© depuis des jours
 elle sonne creuse
 ou tu es beaucoup plus vieux
 enfin, je me comprends pour le coup
 et oui, c’est bien le nom de ma famille, je m’appelle Atta Gautier Loquax et ne te gĂȘnes pas, tu peux m’appeler Loquax. C’est peut-ĂȘtre parce que je suis douĂ© pour apprendre d’autres langages et que j’aime discuter si j’arrive Ă  parler ta langue, mĂȘme si l’histoire durerait toute la nuit je pense
 enfin, je ne suis que de passage. AprĂšs tout, nos pas nous mĂšnent n’importe oĂč et peuvent nous faire croiser n’importe qui.
– Alors, que me veux-tu ? Tu es comme Fraldarius ? Vas-tu me faire la leçon aussi ? Si tel est le cas, tu ne comprends pas, je dois le faire.
– Non, je ne le ferais pas, savoir ce que tu dois faire Ă  ta place alors que je ne te connais pas serait prĂ©somptueux de ma part. Mmmhhnn
 peut-ĂȘtre que je cherche tout de mĂȘme un peu mon chemin
 un chat m’a dit qu’ici, il y avait un lieu bĂ©ni par une dĂ©esse. Si cela ne l’offense pas, je serais curieux de m’y rendre mais, j’ai du mal Ă  m’orienter, cet endroit est construit Ă©trangement
 puis-je te demander de m’accompagner ? Je te laisserais vaquer Ă  tes occupations aprĂšs, je te le promets. J’ai juste besoin d’un bras et d’yeux qui me guident.
Son pĂšre lui hurlait de le laisser se dĂ©brouiller, qu’il n’avait pas Ă  l’aider et qu’il devrait savoir se dĂ©brouiller tout seul avec sa cĂ©cité  il le hurlait si fort, voulait tellement qu’il

« Tu crois que c’est ce qu’ils voudraient ? »
La voix impĂ©rieuse d’Ingrid rĂ©sonna dans ses oreilles, sĂ»re d’elle et autoritaire, ses plumes de pĂ©gases et autour de son Ɠil se hĂ©rissant de colĂšre en le voyant tenter de partir accomplir son devoir, dont envers son fiancé  mais d’un autre cĂŽté  Lambert ne dirait jamais ça dans son Ă©tat normal
 mais il n’était pas dans son Ă©tat normal
 il Ă©tait mort
 mort assassiné  sa tĂȘte n’était plus sur ses Ă©paules mais sous son bras
 il Ă©tait mort horriblement alors, c’était normal que mĂȘme lui soit dĂ©vorĂ© par la haine
 c’était normal qu’il soit dĂ©vorĂ© par la haine
 c’était normal pour tous
 c’était normal que

– Je te sens troublĂ©, reprit Loquax, sa voix toute douce comme pouvait parfois l’ĂȘtre celle de Sylvain quand il s’inquiĂ©tait. Si tu es occupĂ© ou que ma demande te gĂȘne, je comprendrais et ne t’en fais pas, je me dĂ©brouillerais
 ce village ne doit pas ĂȘtre construit si diffĂ©remment de la ville de la reine

– Non, ne put s’empĂȘcher de dire Dimitri en le voyant se dĂ©tourner, ne voulant pas qu’il parte tout de suite sans trop savoir pourquoi. Je t’accompagne
 ce ne sera pas long, la cathĂ©drale est Ă  cinq minutes de marche, dix s’il marche vraiment lentement
 je pourrais vite accomplir mon office.
Loquax sourit, soulagĂ© d’avoir un peu d’aide. Il tendit sa main en cherchant le bras de Dimitri mais, ce dernier la mit directement sur son coude pour lui Ă©viter de chercher dans le vide. De la fourrure rousse les recouvrait, et des griffes remplaçaient ses ongles mais, il fit tout pour que seule la partie tendre le touche, lui Ă©pargnant les pointes dures. DĂ©esse, comment quelqu’un qui semblait ĂȘtre aussi doux pouvait-il ĂȘtre le Protecteur Sauvage, le guerrier fĂ©roce qui broyait tous ceux qui s’approchait trop prĂšs de son peuple ? Cet homme semblait ĂȘtre tout l’inverse des lĂ©gendes autour de lui

– Tu es donc trĂšs maigre, mĂȘme si tu as aussi beaucoup de force, ce n’était pas l’ñge
 dĂ©clara-t-il en sentant les os sous les muscles de son bras, un air triste se gravant sur ses traits expressifs sous la fourrure. Les temps sont durs
 j’ai un peu de nourriture dans mon sac, je peux partager si tu veux, je mangerais l’herbe que je sens autour de nous.
– Ce n’est pas la peine, se serait gaspiller de la nourriture de me la donner, je n’en ai pas besoin, rĂ©torqua Dimitri. Garde-la pour toi.
– Tout ĂȘtre vivant a pourtant besoin de manger, tu risques de tomber malade ou de mourir si tu manges mal
 je suis sĂ»r que beaucoup de monde serait triste s’il te perdait
 et ne t’en fais pas pour moi, Ă  force de me transformer en cheval ou en cerf, j’arrive Ă  digĂ©rer l’herbe et les feuilles des arbres, je peux me passer de la nourriture normale.
– Je ne mourrai pas avant d’avoir accompli ma mission. Ce n’est pas important pour l’instant. Attention aux marches, le prĂ©vient-il, voulant couper la conversation avant que Gautier n’aille trop loin.
Loquax fit buter sa canne contre les marches de l’escalier, tapa un peu dessus et autour pour voir ce que c’était puis, suivit le rythme lent de Dimitri pour grimper, attentif Ă  ce qui l’entourait, ses oreilles n’arrĂȘtant pas de bouger dans tous les sens sur le cĂŽtĂ© de son crĂąne.
– Hum
 tu as donc une mission, souffla-t-il en avançant prudemment. Elle doit ĂȘtre trĂšs importante si c’est ta raison pour continuer Ă  manger. Est-ce que cela veut dire que tu arrĂȘteras de manger une fois qu’elle sera accomplie ?
– Tu n’arrĂȘtes donc jamais de parler, grogna-t-il, ne voulant pas rĂ©pondre Ă  cette question, ça ne le regardait pas.
– Ah ! Ah ! Rit-il de bon cƓur, et c’était encore le rire de Sylvain. Effectivement, je suis une vĂ©ritable pie ! Je parle tout le temps ! C’est pour ça qu’on m’a surnommĂ© Loquax, je suis horriblement bavard et je n’arrĂȘte pas de poser des questions. Le seul moment oĂč je ne parlais pas, c’est quand j’ai perdu la vue jusqu’à ce que RĂ©gina ne me sorte de mon mutisme.
– RĂ©gina ? Et tu as perdu la vue ? Comment tu t’es dĂ©brouillĂ© pour ne plus rien y voir ? Je croyais que c'Ă©tait de naissance, tes yeux n'ont pas l'air si endommagĂ© que ça.
– C’est ma meilleure amie, et mon Ă©pouse. C’est une femme extraordinaire avec une volontĂ© de fer, elle m’a beaucoup aidĂ© quand j’en avais le plus besoin. C’est avec elle que j’ai rĂ©appris Ă  me dĂ©placer mĂȘme sans mes yeux par exemple, elle allait jusqu’à se bander les yeux pour voir comment je percevais les choses et mieux comprendre, ronronna-t-il comme un chat. Et oui, j’ai perdu la vue
 j’étais encore brulant de fiĂšvre Ă  cause de mes entrainements de sorcellerie, j’ai essayĂ© de dĂ©couper un de nos moutons pour cuisiner, sauf que je tremblais trop
 j’ai Ă©chappĂ© mon couteau qui est parti se ficher dans mon Ɠil
 on a tentĂ© de le soigner mais, la plaie s’est infectĂ© et a fini par contaminĂ© mon autre Ɠil
 les dieux soient louĂ©s, et surement merci Ă  ma sorcellerie, j’ai survĂ©cu Ă  l’infection mais depuis, je ne vois plus rien
 je voyais surement autant que toi avant
 mĂȘme si on dirait que tu as une faiblesse du cĂŽtĂ© droit, fit-il remarquer. Tu prends toujours plus de temps quand il faut tourner dans cette direction
 tu voies mal de ce cĂŽtĂ©-là ? Si ce n’est pas trop impoli ou indiscret, se corrigea-t-il.
– Au point oĂč on en est
 Je n’ai plus d’Ɠil Ă  droite. Un coup de lance au visage, j’ai arrachĂ© l’Ɠil avant de finir comme toi quand il a commencĂ© Ă  noircir, j’ai trouvĂ© de quoi soigner l’infection trop tard.
– D’accord, cela a dĂ» ĂȘtre douloureux
 tu devrais essayer de boire beaucoup de lait. J’ai entendu dire que quelqu’un qui ne mangeait rien d’autre que de l’avoine avait perdu la vue et plusieurs autres sens. Raison de plus pour manger un peu.
– N’insiste pas, rĂ©torqua-t-il.
– Je peux toujours tenter, souligna Loquax. Et je comprends mieux pourquoi tu marches ainsi. Est-ce à cause de cela que tu manges si peu à part pour ta mission ?
– Comment ça ? Cela n’a rien à voir. À part si c’est une punition pour avoir tant tarder à accomplir la vengeance des morts

– D’accord. C’est peut-ĂȘtre moi qui pense Ă  ta place pour le coup. Je me sentais tellement inutile quand j’ai perdu mes yeux
 aveugle, comment pouvais-je aider mon groupe ? Je pouvais Ă  peine monter Ă  cheval, je ne pouvais plus sculpter, je m’inquiĂ©tais de ne plus pouvoir garder les moutons ou les tondre, encore moins les chevaux
 j’étais persuadĂ© que je ne pouvais plus que baratter le lait, ce qui est un devoir important mais, je ne voyais vraiment pas comment ĂȘtre utile aux miens ainsi
 mĂȘme si je dĂ©testais dĂ©jĂ  la violence, je pensais mĂȘme que je n’étais pas utile car je ne pouvais plus me battre ou chasser
 Ce n’est que quand j’ai rĂ©appris Ă  me dĂ©placer normalement que j’ai pu retrouver ma place en faisant ce que je savais le mieux faire, parler avec tout, humain comme animaux. » Un grondement amusĂ© sortit de sa poitrine alors qu’ils arrivaient sur le pont de la cathĂ©drale. « J’avais tellement la tĂȘte dans le sable de ma tristesse que je ne pensais mĂȘme plus Ă  ce que je prĂ©fĂ©rais faire

– Tu avais quel ñge ?
Dimitri n’aurait pas dĂ» poser cette question. Loquax semblait prĂȘt Ă  enfin se taire et Ă  marcher en silence, ils Ă©taient pratiquement arrivĂ©s Ă  la cathĂ©drale en plus mais, sans vraiment savoir pourquoi, il voulait encore l’entendre. Peut-ĂȘtre parce que la voix du Brave couvrait celles des morts, balayant leurs suppliques et leurs ordres avec ses intonations douces et calmes, peut-ĂȘtre aussi parce que ça faisait longtemps qu’il n’avait pas parlĂ© aussi longtemps Ă  quelqu’un qui ne lui ordonnait pas de ramener la tĂȘte d’Eldegard
 c’était
 agrĂ©able
 mĂȘme s’il ne mĂ©ritait pas autant d’attention

– J’avais « vu » seize Ă©tĂ©s. J’étais encore plus frustrĂ© de me dire que je perdais la vue et toute utilitĂ© avant mĂȘme d’ĂȘtre adulte
 heureusement que RĂ©gina m’a tirĂ© la tĂȘte de tout ça et m’a bien aidĂ©, ronronna-t-il encore.
Loquax semblait un peu amusĂ©, comme une sorte de souvenir tendre
 il lui racontait pourtant qu’il s’était cru complĂštement inutile et que jamais, il ne retrouverait ce qui aurait pu le rendre Ă  nouveau utile Ă  son peuple
 qu’il vivrait Ă  jamais dans le noir sans aucun espoir de retrouver ses yeux
 ils Ă©taient complĂštement morts
 pourtant, ils se plissaient dans une expression joyeuse
 son visage restait expressif et toujours doux
 comme un vieux renard qui Ă©coutaient les autres avec la nostalgie d’une vie bien remplie

– Toi aussi, tu ne fais pas ton Ăąge, souffla Dimitri en le faisant pĂ©nĂ©trer dans la cathĂ©drale. Nous sommes arrivĂ©s.
– On me le dit souvent. Merci beaucoup de m’avoir emmenĂ© ici
 c’est vrai que l’atmosphĂšre est diffĂ©rente ici
 on a l’impression d’ĂȘtre dedans et dehors Ă  la fois
 cela ressemble bien Ă  un endroit aimĂ© d’une dĂ©esse

Il le lñcha, avançant avec prudence en esquivant les gravats que rencontraient sa canne de marche, avant de trouver un relief qu’il inspecta du bout des doigts.
« C’est bon ? Tu as assez paressĂ© comme ça ? Laisse-le et va nous venger Ă  prĂ©sent ! Mon assassine de fille s’éloigne de plus en plus de nous de seconde en seconde ! » S’écria sa belle-mĂšre, sa robe de cendre semblant brĂ»ler encore et encore.
« Oui
 j’y vais
 il n’a plus besoin de moi
 songea Dimitri avant de demander, Ă©tonnĂ© en le voyant se baisser et fouiller dans sa besace. Qu’est-ce que tu fais ?
– Je fais rĂ©chauffer ma nourriture, afin de partager mon repas avec la divinitĂ© ici prĂ©sente comme il est de tradition de le faire. J’avoue qu’en plus, je commence Ă  avoir faim. Enfin, si c’est interdit de cuisiner dans sa maison, je comprendrais

– 
 non
 je reste encore un peu, juste au cas oĂč il aurait un problĂšme. »
Le jeune homme s’avança vers Loquax, ayant sorti une sorte de purĂ©e de lĂ©gumes et de fĂšves, ainsi qu’une gourde et les bols qui se trouvaient dans son grand sac. Il alluma du feu et plaça un plat de fer dessus, faisant Ă  nouveau cuire ses aliments. MĂȘme si la langue de Dimitri Ă©tait complĂštement morte, son nez pouvait encore dire que la nourriture sentait bon
 un peu Ă©trange mais bon
 tout du long, Loquax discuta encore et encore avec lui, lui expliquant sa recette, la maniĂšre dont ils avaient troquĂ© les pois et les plantes cultivĂ©s avec le village d’un certain Pertinax, en passant par la maniĂšre dont on trayait les juments chez lui.
« Que la fumĂ©e de notre cuisine rejoigne la DĂ©esse qui habite en ce lieu, et que nous puissions partager ce repas avec elle, afin qu’elle protĂšge notre route
 pria-t-il en sortant deux gobelets qu’il remplit du contenu de sa gourde, que Dimitri reconnut comme Ă©tant du lait. Vu que tu ne veux manger, laisse-moi au moins partager avec toi un verre de lait. Je l’ai rĂ©cupĂ©rĂ© ce matin, il est encore tout frais, je te le jure.
Le blond comprit Ă  peine lui-mĂȘme pourquoi il leva la main pour prendre le verre. Les morts levĂšrent les yeux au ciel, mais Dimitri prĂ©fĂ©ra voir le sourire de Loquax quand il accepta le verre. Il prit alors le sien et le leva en lui souhaitant.
– A notre route Ă  tous les deux et qu’elles soient toujours tranquilles. »
Dimitri se rĂ©veilla en sentant encore l’odeur du repas et du lait dans son nez. Encore un rĂȘve Ă©trange
 aprĂšs Fraldarius, Gautier
 il perdait tellement de temps
 c’était dĂ©jĂ  l’aprĂšs-midi.
« Je devrais y aller  »
« Dimitri ? Tu es rĂ©veillé ? Sylvain entra dans la piĂšce, un grand plateau bloquĂ© sur sa hanche pour libĂ©rer son autre main, son apparence de renard laissant place Ă  son visage humain depuis longtemps. Ah ! Tant mieux ! Mercedes a dit que tu t’es rĂ©veillĂ© ce matin avant de resombrer direct ! Enfin, c’est mieux vu qu’il faut que tu te reposes.
– Tu es dĂ©jĂ  rentré ? Lui demanda-t-il, se souvenant qu’il ne devait revenir que demain.
– Oui, j’ai parcouru ma zone de recherche un peu plus vite qu’on ne le pensait. Être sur quatre pattes, mĂȘme si elles ne sont pas bien longues, et pouvoir passer sous les buissons sans faire de dĂ©tour, ça aide, lui assura-t-il. Dans tous les cas, livraison de repas ! Bouillon de la mer au fromage avec du poisson sĂ©chĂ© façon sreng par nos seigneurs et maitres en cuisine Dedue et Ashe ! Tu as mangĂ© quelque chose ce matin ?
– Non

Sylvain soupira un peu, son masque joyeux tombant un peu en dĂ©voilant l’inquiĂ©tude. Il le reprit vite avant de dĂ©clarer.
– Je sais que tu ne veux pas manger plus que nĂ©cessaire ou que tu n’as pas faim mais, il faut que tu manges plus
 tu as la peau sur les os
 dĂ©jĂ  que pour l’hygiĂšne, c’est aussi le minimum du minimum, tu vas finir par tomber malade si tu continues
 
 avale au moins un peu de bouillon histoire de te caler un peu, d’accord ? MĂȘme deux ou trois cuillĂšres et une bouchĂ©e de poisson, ce serait dĂ©jĂ  bien, c’est une recette trĂšs nourrissante d’aprĂšs ma cousine Hlif et mes tantes

– 
 d’accord
 mais tu peux rester ici ? S’il te plait
 lui demanda-t-il.
Le rouquin ne cacha pas sa surprise mais, finit par sourire en acceptant avec joie. Il avait le mĂȘme sourire que Loquax

– D’accord, si tu veux ! Tu me laisses juste cinq minutes pour aller rĂ©cupĂ©rer mon repas dans ma chambre ? J’avais prĂ©vu d’étudier un peu les rapports des autres Ă©claireurs mais, ça me semble une bien meilleure option ! Je reviens tout de suite !

 et sa langue bien pendue aussi. Mais Dimitri ne voulait pas que ça s’arrĂȘte
 rien que quand il se retrouva Ă  nouveau seul dans le silence, les morts recommençaient Ă  grommeler et Ă  marmonner dans ses oreilles
 et il avait juste envie d’encore parler Ă  quelqu’un de physique

Il revient assez vite avec son repas aprĂšs que Dimitri ait hochĂ© la tĂȘte, composĂ© d’un vrai ragout de viande et pas seulement d’un bouillon comme lui. En voyant son Ɠil posĂ© sur son bol, Sylvain le reprit avec amusement, sur le ton de la taquinerie qu’il utilisait depuis toujours, mĂȘme s’il semblait faire attention Ă  son dos.
– DĂ©solĂ©, faut que tu te contentes du bouillon, c’est pas bon de trop manger d’un coup aprĂšs une grosse disette et en Ă©tant aussi maigre que toi. Faut que tu rĂ©habitues ton corps petit Ă  petit avec des plats qui ne te pĂšseront pas trop sur l’estomac. T’inquiĂšte, ma mĂšre nous a envoyĂ© un livre de recette de chez elle qu’elle tient d’Arnina, la cuisine sreng est passĂ© maitre dans ce genre de plat. Et ma tante Huld m’a bien dit de manger plus de viande quand je me transforme
 et d’expĂ©rience, c’est mieux aussi quand je passe ma journĂ©e en renard. DĂ©jĂ  que j’ai le dos brĂ»lant
 enfin, une petite tĂȘte dans l’étang et ça allait mieux. Dans tous les cas, bon appĂ©tit ! Je meurs de faim !
– Merci
 mĂȘme si ton dos te fait encore mal. Tu le bouges Ă  peine. La magie sreng semble douloureuse
 et comment vont Rodrigue et FĂ©lix ?
– Hum
 un peu, c’est une grosse question d’habitude. J’ai mis cinq ans avant de pouvoir me transformer et il fallait y aller doucement. Au dĂ©part, je ne tenais mĂȘme pas deux minutes avec juste les capacitĂ©s d’un renard, alors une transformation entiĂšre
 ! Enfin, les transformations, une fois que t’es habituĂ©, c’est ce qui fait le moins mal vu que ton corps encaisse pas mal de magie pour te transformer. C’est les autres sorts en dehors du rappel de l’arme qui sont vraiment difficiles Ă  supporter sans ĂȘtre habituĂ©. Tu verrais ma tante Huld et Hlif ! Elles sont couvertes de tatouages des pieds Ă  la tĂȘte ! Et Hlif a autant galĂ©rĂ© que moi avec ses sorts ! Enfin, le principal, c’est que maintenant, elles peuvent tenir longtemps, mĂȘme si elles piquent toutes les deux une tĂȘte dans l’eau glaciale aprĂšs. Hlif voulait me rejoindre ici mĂȘme si lĂ , elle aide Gautier Ă  contrer les assauts de CornĂ©lia. Elle dĂ©teste mon paternel et le trouve indigne de ma mĂšre mais, elle veut aussi protĂ©ger Fregn et c’est un devoir d’aider les proches chez les srengs, surtout quand les temps sont durs. Pour Rodrigue, il se remet tranquillement, mĂȘme s’il dort encore mais, c’est normal. Il a Ă©puisĂ© toutes ses forces aprĂšs tout. Pour FĂ©lix, de ce que j’ai compris en revenant, il s’est un peu agitĂ© cette nuit mais, Mercie, Marianne et Flayn se relaient pour bien les surveiller au cas oĂč. Pour le moment, l’hĂ©morragie n’a pas repris alors, c’est dĂ©jĂ  un bon point. Il faut surtout faire attention Ă  ce qu’il boive beaucoup vu qu’il semble ĂȘtre un peu dĂ©shydratĂ©.
– Tant mieux. Hlif
 C’est une de tes cousines de mĂ©moire
 tu nous as dĂ©jĂ  parlĂ© d’elle avant. Tu en as beaucoup

– Ouaip, c’est la fille de ma premiĂšre tante Arnina ! On a le mĂȘme Ăąge tous les deux, et elle adore s’occuper des valravens alors, ça fait des sujets de conversation. Quand j’allais Ă  Sreng avec ma mĂšre, je passais beaucoup de temps avec elle. Tu la verrais sur un valraven, elle est impressionnante ! C’est pourquoi on l’appelle la Hrafn, le corbeau, elle est trĂšs douĂ©e dans les airs ! C’est vraiment quelqu’un de sympa, et elle voudrait vous rencontrer. J’ai aussi un petit cousin qui a failli me suivre, le petit Hveiti, il est trĂšs curieux de Fodlan Ă  force d’en entendre parler mais, il est trop petit pour partir. Tu le verrais, c’est pratiquement un mini-toi ! C’est un tout petit gosse tout blond avec des yeux bien bleu qui colle pratiquement tout ! À chaque fois, il tentait de se planquer dans les bagages pour aller en Fodlan ! C’était son dĂ©fi Ă  lui ! Il rendait Thorgil folle ! Et beaucoup
 oui et non, les srengs ont pas la mĂȘme dĂ©finition de la famille. On peut appeler cousin quelqu’un si on se souvient qu’on a un lien de sang avec lui, mĂȘme si ce lien remonte Ă  dix gĂ©nĂ©rations. C’est une expression pour marquer un lien ou de l’affection, mĂȘme si ça n’est pas forcĂ©ment de la parentĂ©. Genre, pour un sreng, tu peux appeler Claude cousin vu que vous ĂȘtes parents Ă©loignĂ©s et que vous le savez. Pour Hlif et Hveiti
 il avala un morceau de viande de son ragout avant de reprendre. Enfin
 Ludwig dit Hveiti, on l’appelle juste tous par son surnom parce que ça lui va juste comme un gant de s’appeler « blé », il est aussi blond qu’eux, c’est des cousins au sens fodlan du terme
 et content de voir que tu manges un peu aussi ! Sourit-il avec joie et soulagement.
Dimitri constata alors qu’effectivement, il avait pratiquement vidĂ© son assiette en Ă©coutant Sylvain bavarder
 il s’en Ă©tait Ă  peine rendu compte, enchainant les coups de cuillĂšres dans le bouillon au fil de la conversation
 tout Ă©tait silencieux aussi. Cela faisait du bien

– Tu ressembles beaucoup à Gautier tu sais
 lñcha-t-il.
– Hum ? C’est-à-dire ? Lui demanda le rouquin.
Dimitri entendit la voix de Glenn revenir, se moquant de lui d’avoir dit ça, qu’il ne le croirait jamais
 mais personne ne l’avait vraiment remis en question quand il avait avouĂ© avoir entendu Fraldarius
 et Sylvain l’avait souvent cru
 pratiquement toujours mĂȘme
 il avait Ă©tĂ© un des premiers Ă  le croire sur le fait que les duscuriens n’étaient pas responsables de la TragĂ©die
 et lui aussi avait vu Gautier qui lui avait sauvĂ© la vie aprĂšs que Miklan l’ait abandonnĂ© dans la forĂȘt enneigĂ©, en tĂ©moignait les petits crocs qui remplaçaient ses canines Ă  prĂ©sent
 peut-ĂȘtre que

Le blond marmonna alors, devenant aussi bavard que Sylvain et Loquax.
– J’ai vu Gautier pendant mon sommeil
 il te ressemblait vraiment beaucoup
 et Ă©tait tout le contraire des lĂ©gendes

– Vraiment ? DiffĂ©rent comment ? Le questionna-t-il Ă  son tour.
– TrĂšs doux, trĂšs gentil et surtout, trĂšs bavard
 il n’arrĂȘtait pas de parler
 il disait lui-mĂȘme qu’il Ă©tait une vraie pie
 tu lui ressemblais vraiment
 mais je suis sĂ»r que c’était lui
 mĂȘme si je ne sais pas comment je l’ai vu

– Hum
 la Lance de la Destruction est appuyĂ©e contre le mur qui sĂ©pare nos chambres, ça aide peut-ĂȘtre ? En tout cas, je te crois.
– Tu ne me prends pas pour un fou ? S'Ă©tonna-t-il tout de mĂȘme un peu.
– 
 honnĂȘtement, je ne sais pas ce qui se passe dans ta tĂȘte, Ă  part que pour toi, c’est rĂ©el, mĂȘme si ce n’est pas cohĂ©rent. Tu as fait des choses vraiment horribles que je ne suis pas sĂ»r de te pardonner
 nous mettre en danger comme ça pour ta vengeance par exemple. Mais d’un autre cĂŽtĂ©, je sais aussi que pour toi, ce que tu voies est rĂ©el alors, tu ne mentiras pas lĂ -dessus, et je ne vais pas t’en vouloir de me dire ce que tu vois en Ă©tant honnĂȘte. Je t’ai toujours cru, je vais pas arrĂȘter maintenant. J’aurais plutĂŽt prĂ©fĂ©rĂ© que tu nous dises avant que t’étais hantĂ© par des fantĂŽmes qui te hurlaient de les venger avant, on aurait pu t’aider plus tĂŽt.
– Donc, tu me crois quand je dis que j’ai vu ton ancĂȘtre ? Sans toucher ta Relique ? Et qu’il Ă©tait totalement diffĂ©rent des lĂ©gendes sur lui ?
– Oui, je te crois. Je te fais confiance depuis toujours, on est amis tous les quatre depuis qu’on est tout petit, et j’ai pas envie de m’arrĂȘter maintenant. De toute façon, je te suivrai jusqu’au bout, lui assura-t-il avec un peu de dĂ©sinvolture dans sa voix mais, elle disparut vite sous le sĂ©rieux. DĂ©jĂ , je me dis que c’est une bonne chose si tu avoues ce que tu vois. Pour moi, si tu affrontes ce que tu vois et que tu vas de l’avant, ça me va, ça me donne envie de te donner une seconde chance.
– Hum. Qui te dit que j’abandonnerais ma vengeance ? Elle devra bien ĂȘtre accomplie un jour ou l’autre, les morts doivent bien finir par reposer en paix ! S’exclama-t-il, presque autant pour se l’affirmer Ă  lui-mĂȘme et s’en reconvaincre tout seul.
– Si tu repars direct sur ça aussi
 enfin, et si pour commencer, tu relevais un dĂ©fi ? Lui proposa le rouquin en levant un doigt.
– Un dĂ©fi
 marmonna Dimitri, mĂ©fiant de ce qu’il allait dire, le regard dĂ©rivant vers Glenn qui lui montrait la porte et tapait dessus pour couvrir leur conversation.
– Par ici Dimitri, je suis lĂ , le rappela tout de suite Sylvain. Il n’y a personne Ă  la porte
 en plus, s’il y a quelqu’un que je ne vois pas, il peut aussi entendre que ça te rendra service et que ça ne t’empĂȘchera pas d’accomplir ta vengeance qu’ils dĂ©sirent tous absolument, lui assura-t-il. C’est juste la maniĂšre sreng de faire. Ils font souvent comme ça que quand ils ont des objectifs Ă  rĂ©aliser, ils se lancent un dĂ©fi ou plusieurs pour se motiver.
– Ce serait quoi ?
– Le dĂ©fi, c’est que tu continues Ă  manger aussi bien que maintenant jusqu’à
 hum
 disons jusqu’à ce que FĂ©lix et Rodrigue se rĂ©veillent. Ça leur fera plaisir de te voir un peu mieux nourri alors, ça vaut encore plus le coup que tu acceptes. Qu’en dis-tu ?
– 
 
 
 d’accord
 si on discute encore.
– Pas de souci, je suis sĂ»r que les autres seraient aussi content de manger avec toi en bavardant ! Lui assura-t-il en souriant.
Les fantĂŽmes faisaient toujours du bruit, ils hurlaient toujours leurs suppliques mais, elles semblaient un peu moins fortes
 c’était juste un petit temps d’attente supplĂ©mentaire et juste pour rassurer FĂ©lix et Rodrigue en mangeant un peu plus
 Glenn n’aimerait pas les inquiĂ©ter tous les deux
 il ne devrait pas trop lui en vouloir mĂȘme s’il le faisait encore attendre
 son pĂšre aussi
 Rodrigue Ă©tait son ami, tout comme Alix
 l’un des jumeaux mourrait, l’autre le suivrait surement de prĂšs dans la tombe, encore plus s’il perdait aussi son neveu
 cela devrait les calmer s’il voyait les choses comme ça

*
Tout Ă©tait noir, sombre
 mais aussi calme
 comme s’il flottait dans l’eau
 son ventre lui faisait mal mais, il le sentait presque plus
 la plaie se soignait petit Ă  petit, autant sa peau que ses organes
 l’eau faisait du bien

Il entendait un petit rĂąle.
C’était tout faible, presque inexistant
 mais il ne pouvait que l’entendre

« Mon louveteau  »
Rodrigue entrouvrit les yeux, voyant la forme lointaine de FĂ©lix
 sa respiration aussi sifflante

La derniĂšre fois qu’il avait entendu ses rĂąles, c’était quand il Ă©tait brĂ»lĂ© par ce monstre d’Arundel
 ils avaient eu si peur
 toutes ses brĂ»lures atroces
 il avait failli
 heureusement que Fraldarius avait
 mais pour ça

Aucune lumiĂšre dorĂ©e n’était prĂšs de son fils

Aegis n’était pas avec lui

Non

Non
 non
 il devait

Aegis devrait ĂȘtre avec lui

Il l’avait toujours
 protĂ©gé  mĂȘme du pire

Fraldarius tenait Ă  sa famille mĂȘme par-delĂ  la mort

Rodrigue se redressa comme il put, se tenant Ă  tout en cherchant oĂč Ă©tait leur Relique qu’il entrevit prĂšs du mur
 juste Ă  cĂŽtĂ© d’une autre Relique mais, elle n’avait pas d’importance
 juste

En boitant de fatigue, il le rejoignit et attrapa le bouclier malgré son poids et le tira comme il put contre lui. Ses jambes tremblaient, comme ses bras, sa poitrine, ses mains, ses os
 mais il ne pouvait pas tomber
 il devait amener leur Relique à son fils
 il en avait besoin.
Le pĂšre s’effondra quand il se retrouva Ă  son chevet, mais ce n’était pas grave, il Ă©tait arrivé  il tira le bouclier sur le lit, puis sous le bras de son petit qui le serra un peu contre lui par rĂ©flexe, comme toujours

« Ça va aller
 ça va aller
 souffla Rodrigue malgrĂ© ses yeux de plus en plus flous, le souvenir de sa propre mĂšre leur disant que ça irait pour les rassurer avec Alix. Tu as toujours Ă©tĂ© trĂšs fort
 tu t’es toujours battu
 toujours
 je t’en supplie, reste encore
 il arriva Ă  attraper sa main, sourit en sentant ses doigts se serrer autour. Mon petit louveteau
 FĂ©licia
 Glenn
 veillez bien sur lui
 merci pour tout Fraldarius

– Mais qu’est-ce que
 seigneur Rodrigue !
Il entendit la voix du jeune Ashe entrer et ses pas se prĂ©cipiter vers eux, aprĂšs la sonnerie d’une cloche.
– Ce n’est rien
 souffla-t-il alors que les bras de l’archer l’entouraient. Sa respiration sifflait
 il a besoin d’Aegis
 il faut lui laisser

– Euh
 d’accord, nous le ferons. Ne vous en faites, on s’occupe bien de vous deux.
– Faites attention Ă  FĂ©lix

Il resombra dans ce sommeil aqueux, sentant toujours la main de son fils dans la sienne.
*
Mercedes se rĂ©veilla en sursaut en entendant la cloche d’urgence sonner dans ses oreilles. Elle se mit tout de suite sur ses pieds, encore habillĂ©e pour sa garde, prit sa sacoche d’urgence, puis fila en vitesse vers la chambre des Fraldarius. Elle trouva Ashe en train de tenter de tirer Rodrigue sur ses Ă©paules, aidĂ© par sa force d’archer, alors qu’il Ă©tait accoudĂ© au chevet de son fils.
« Ah ! Mercedes, tu es déjà là ! Souffla-t-il à mi-voix.
– Je suis venue dĂšs que j’ai entendu la cloche. Qu’est-ce qui s’est passé ? Demanda-t-elle en prenant tout de suite le pouls du blessĂ©.
– J’ai entendu du bruit alors, je suis entrĂ© et je l’ai trouvĂ© Ă  cĂŽtĂ© de FĂ©lix avec Aegis
 il a dit qu’il a entendu que sa respiration Ă©tait sifflante alors, qu’il fallait qu’il lui donne

– Une respiration sifflante
 rĂ©pĂ©ta-t-elle, pensive.
Elle l’aida Ă  remettre Rodrigue dans son lit, puis retourna auprĂšs de FĂ©lix. Mercedes se pencha Ă  cĂŽtĂ© de lui et Ă©couta son souffle, posa doucement son doigt sur sa gorge pour prendre son pouls. Son cƓur battait Ă  toute vitesse, cognant avec force dans sa poitrine mais, cela restait stable avec son Ă©tat.
Le regard de la guĂ©risseuse se posa alors sur Aegis. FĂ©lix le tenait contre sa poitrine comme si c’était sa propre vie, la lueur jaunĂątre semblant le protĂ©ger. Étant donnĂ© qu’il semblait tenir sans, les guĂ©risseurs avaient tentĂ© d’enlever sa Relique pour observer ce qu’il allait se passer. Elle tira alors la couverture, dĂ©couvrant son dos bandé : sa marque d’énergie brillait lĂ©gĂšrement, de l’énergie circulant Ă  l’intĂ©rieur, comme si la magie remplaçait le sang
 quand elle le frĂŽla, elle avait l’impression de plonger ses doigts dans de l’eau, alors que la peau Ă©tait trĂšs sĂšche Ă  cet endroit. FĂ©lix buvait beaucoup mais, sa peau restait sĂšche, mĂȘme s’il n’y avait pas d’autre symptĂŽme de dĂ©shydratation. Peut-ĂȘtre que

Prudente, Mercedes souffla, mĂȘme si elle ne savait pas si le blessĂ© l’entendrait mais, elle devait tenter. Sylvain et Ingrid lui avait dit qu’il entendait toujours tout quand il Ă©tait inconscient, et elle avait malheureusement pu le vĂ©rifier par elle-mĂȘme auparavant, mĂȘme si le doute persistait. Ce serait surement trop brutal si elle ne le faisait pas, ou alors leur ami ne le lĂącherait pas.
– FĂ©lix
 il faut que tu me laisses te prendre Aegis. Je te jure que je te le rendrai presque tout de suite mais, il faut que je vĂ©rifie ta respiration. Rodrigue dit qu’elle est sifflante alors, je dois t’ausculter sans ta Relique, surtout qu’elle semble agir sur ton organisme encore plus qu’auparavant. Ce ne sera pas long, c’est promis

La DĂ©esse soit louĂ©e, la guĂ©risseuse arriva Ă  retirer le bouclier des mains de son patient sans trop de difficultĂ©, remerciant aussi l’arme de ne pas l’attaquer. FĂ©lix les entendait d’une certaine maniĂšre, ce qui Ă©tait une bonne nouvelle, et mĂȘme si c’était Ă©trange qu’un bouclier l’écoute, il s’agissait un don de la DĂ©esse, ce n’était pas une arme ordinaire.
DĂšs que la protection physique de son ancĂȘtre s’éloigna, la lumiĂšre dans son dos disparut, la magie dans ses veines semblant se dissiper avec elle et comme Rodrigue l’avait dit, sa respiration devient sifflante, comme s’il Ă©tait essoufflĂ©. C’était trĂšs faible, presque inaudible mais, le rĂąle Ă©tait bien là

– Il a bien entendu. On dirait qu’il a du mal Ă  respirer
 vu qu’il a perdu beaucoup de sang Ă  cause de l’hĂ©morragie, il doit avoir du mal Ă  en refaire. Il faudra qu’il mange des plats Ă  base de foie et de rognon, c’est trĂšs bon pour le sang.
– D’accord, je lui cuisinerai tout ça. Mais comment le Seigneur Rodrigue a-t-il pu l’entendre de son lit ? On l’entend Ă  peine en Ă©tant Ă  cĂŽtĂ© de lui pourtant

Mercedes fredonna avec un sourire, touchĂ©e. Il aimait vraiment son fils de tout son cƓur

– L’instinct paternel je dirais.
*
À nouveau, Dimitri se retrouva Ă  dĂ©ambuler dans le monastĂšre pendant la nuit mais, il arriva un peu mieux Ă  comprendre que c’était un rĂȘve cette fois. Juste un rĂȘve
 peut-ĂȘtre
 les morts continuaient Ă  le supplier d’accomplir son devoir de toute façon

« Juste le temps qu’ils se rĂ©veillent tous les deux
 jura-t-il. Comme pour les repas et le dĂ©fi de Sylvain
 Rodrigue s’est rĂ©veillĂ© la nuit derniĂšre, mĂȘme s’il s’est tout de suite rendormi
 cela ne devrait plus ĂȘtre trĂšs long  »
Il dĂ©ambula sans vraiment d’autres buts que de passer le temps, qu’il soit Ă©veillĂ© ou endormi, quand il entendit un petit fredonnement. Il crut au dĂ©part que c’était la voix de Fraldarius, avant de se rendre compte que c’était une voix de femme avec un timbre bien diffĂ©rent du sien. Elle Ă©tait bien plus lĂ©gĂšre et semblait un peu se rĂ©pĂ©ter, comme certains danseurs le faisaient pour s’accompagner en absence de musicien.
Arrivant Ă  deviner qui il allait rencontrĂ©, Dimitri suivit la voix, et trouva une femme minuscule en train de virevolter entre les grands plans de lin trempĂ©s qu’elle Ă©tendait, dansant tout en travaillant avec un air joyeux. Elle Ă©tait minuscule avec de trĂšs longues et innombrables tresses rousses qui drapaient chacun de ses mouvements, tout comme son collier oĂč se cĂŽtoyaient quatre mains de fer en pendentif oĂč un petit texte Ă©tait Ă©crit, trĂšs semblable Ă  celui de Fraldarius. Sous ses chĂąles Ă  carreaux se dessinaient les contours d’une sorte de squelette extĂ©rieur, semblant fait de bois et de racine, l’entourant complĂštement, rendant sa silhouette Ă  premiĂšre vue frĂȘle plus solide et forte, bien qu’elle semblĂąt ĂȘtre une danseuse trĂšs expĂ©rimentĂ©e et musclĂ©e. Quand il la vit de face, il vit que ses pupilles Ă©taient blanches au milieu des iris viridines mais, il sut assez vite qu’elle le voyait quand elle le fixa et le salua. C’était fou ce qu’elle ressemblait Ă  Annette

« Dominic j’imagine

– Suis. Annia Dominica Laeta, se prĂ©senta-t-elle surement. Et tu ? Quo nomine es ?
Elle Ă©tait encore plus dur Ă  comprendre que Fraldarius
 son accent Ă©tait assez diffĂ©rent du sien mĂȘme s’ils parlaient tous les deux latin normalement, surtout qu’elle s'exprimait trĂšs vite. Enfin, s’il Ă©tait logique, il avait dĂ» lui demander son nom.
– Dimitri

– No nomen ? Es servus ?
– Je ne parle le latin, et tu es dure à comprendre
 je ne comprends à peine ce que tu dis.
Elle fit une petite moue, avant de s’avancer vers lui. Une fois Ă  cĂŽtĂ© de lui, elle traça des lettres au sol, puis se montra.
– Annia Dominica Laeta, arriva à lire le blond, ce qui la fit sourire qu’il arrive à se comprendre ainsi.
MĂȘme si la graphie des lettres avait changĂ©, elle Ă©crivait en majuscule ce qui la rendait plus facile Ă  lire. Elle sourit avant de faire partir un trait de son nom qui se divisa en deux. D’un cĂŽtĂ©, elle Ă©crivit un nom qui semblait fĂ©minin « Livia Justinia Fusca », puis un autre de l’autre cĂŽtĂ© « Annius Dominicus Messorinus ». De ce nom, elle fit remonter un autre trait avec un autre nom « Dominicus », puis un autre, puis un autre, puis un autre.
Elle pointa alors ce nom en répétant.
– Nomen.
– Tu parles des noms de familles ? 
 Blaiddyd. Je m’appelle Dimitri Alexandre Blaiddyd.
Elle eut l’air un peu Ă©tonnĂ©e, puis eut un sourire.
– Sicut Simplex. Nominorat Blaiddyd Simplex. Es

Elle commenta quelque chose mais, elle parlait trop vite avec un accent trop fort pour qu’il comprenne quoi que ce soit
 mais il la laissa faire, sa voix Ă©tait apaisante et chassait un peu les fantĂŽmes.
Dominica
 ou plutĂŽt Laeta si son nom fonctionnait comme celui de Loquax, finit par fixer sa tĂȘte, l’inspectant de la tĂȘte au pied, avant de grimacer et de dire quelque chose qu’encore une fois, il ne comprit pas. Elle dut s’en rendre compte car, elle rĂ©pĂ©ta mais, en faisant mine de se gratter de partout, avec des poux qui sautait sur ses bras et ses cheveux.
– Ce n’est pas important. Ce serait gaspillĂ© du savon de l’utiliser pour moi.
Elle ajouta autre chose en faisant un signe de cercle avec son doigt, mimant une puce sauter sur son autre main et la gratter Ă  son tour. Laeta sortit alors un grand peigne de sa ceinture, mima de l’utiliser sur elle puis le pointa lui. Elle mima autre chose qui devait ĂȘtre le fait de se savonner vu le contexte mais, il Ă©tait bien incapable d’en ĂȘtre sĂ»r

« AprĂšs manger autant, tu veux qu’on te pomponne ? Tu ne mĂ©rites pas, arrĂȘte de lambiner et va nous venger. »
Le sermon des morts rĂ©sonnait dans ses oreilles, rĂ©pĂ©tant encore et encore la mĂȘme chose. Ils avaient raison, il ne mĂ©ritait aucun soin et gaspillait assez le temps et la nourriture des autres. Il devrait envoyer Ă  NĂ©mĂ©sis le dĂ©fi de Sylvain et repartir les venger immĂ©diatement

Mais Laeta le regardait avec une telle insistance, son peigne en bois dans les mains

Elle ressemblait tellement Ă  Annette quand elle voulait quelque chose et qu’il Ă©tait impossible de lui dire non

C’était de famille visiblement

– Bon, cĂ©da-t-il. D’accord, je veux bien que tu me peignes

Elle sourit en lui faisant signe de se baisser, Ă©tant beaucoup plus petite que lui. Elle devait faire la mĂȘme taille qu’Annette
 elle avait la mĂȘme Ă©nergie et bonne humeur qu’elle en tout cas.
S’asseyant en tailleur Ă  cĂŽtĂ© d’elle, Laeta passa dans son dos pour le peigner plus facilement. C’était presque comme Ă  Gronder
 aprĂšs le premier coup, il Ă©tait Ă  genoux
 c’était mĂ©rité  cette fille n’avait fait que rĂ©clamer justice pour son frĂšre
 il mĂ©ritait toute sa fureur
 et il s’était agenouillĂ©, prĂȘt Ă  recevoir sa juste punition
 un deuxiĂšme coup de poignard qu’il savait mĂ©rité  c’était son juste sort
 jusqu’à ce que l’ombre de Rodrigue se

Le lĂ©ger tirement du peigne dans ses cheveux l’arracha Ă  ses ruminations, entrecouper parfois de doigts qui farfouillait entre ses mĂšches pour l’épouiller ou ce qui ressemblait Ă  une petite pince pour tirer des tiques, accompagnĂ© du bavardage de Laeta. Cela faisait longtemps que personne ne l’avait peigné  il l’avait fait lui-mĂȘme depuis toujours, mĂȘme si sa nourrice ou ses parents le coiffaient parfois pour les occasions importantes oĂč il devait ĂȘtre apprĂȘtĂ©. Un souvenir aqueux sortit de ses mĂšches, son pĂšre qui rit un peu d’une bĂȘtise qu’il avait faite Ă  Fhirdiad avec FĂ©lix et qui les avaient complĂštement Ă©bouriffĂ©s
 peut-ĂȘtre qu’il avait essayĂ© d’utiliser la magie de vent ? FĂ©lix Ă©tait autant un magicien qu’un Ă©pĂ©iste avant la mort de Glenn, imitant Rodrigue pour manier aussi bien la magie que lui alors, ils avaient pu essayer de faire de l’aĂ©romancie
 il revoyait Rodrigue prendre FĂ©lix sur ses genoux, passant doucement un peigne dans ses cheveux aprĂšs une petite leçon, tout comme Lambert le faisait aussi avec lui
 le mouvement rĂ©gulier du peigne dans ses mĂšches pour enlever les nƓuds
 c’était apaisant.
Laeta parlait tout du long qu’elle passait les petites dents souples dans les cheveux de Dimitri, comme si elle n’aimait pas le silence comme Loquax. Son ton Ă©tait assez joyeux mais Ă  un moment, il devient plus sombre, nostalgique mais lourd, comme si elle remuait des souvenirs durs.
– Je ne comprends toujours rien de ce que tu dis mais, tu as l’air de parler d’une mauvaise pĂ©riode de ta vie
 je suis dĂ©solĂ© pour ce qui t’es arrivé 
Dimitri ne savait mĂȘme pas pourquoi il avait dit ça
 il ne comprenait rien, elle aurait pu parler des pires idioties du monde qu’il n’aurait pas fait la diffĂ©rence, et ça ne le regardait pas, il devrait penser Ă  sa vengeance uniquement et pas se soucier de ceux qui le ralentissait
 mais il n’avait pu s’en empĂȘcher, sentant que c’était quelque chose d’important pour Laeta.
Il sentit son sourire en demi-teinte derriĂšre sa tĂȘte, avant qu’elle reprenne. Le ton Ă©tait sĂ©rieux mais, plus elle avançait, plus ses mots semblaient gorger d’espoir avant de finir sur une joie qui ressemblait Ă  une dĂ©livrance

Elle finit par retourner Ă  ses cĂŽtĂ©s, faisant onduler les dents de son peigne pour nettoyer les restes de vermines. Dimitri passa ses doigts dans ses cheveux
 ils Ă©taient de nouveau plutĂŽt doux et en ordre, autant qu’il Ă©tait possible
 on lui avait toujours dit qu’il avait la criniĂšre d’un lion, comme sa mĂšre biologique, HĂ©lĂ©na
 ça grattait moins
 c’était agrĂ©able

Laeta dĂ©clara quelque chose qu’il ne comprenait pas mais, Ă  son visage, cela semblait ĂȘtre un bon souvenir. Elle fit alors un geste de peigner quelqu’un dans le vide, ainsi que le fait que quelqu’un d’autre la peigne, son visage exprimant toute l’affection pour les personnes qu’elle mimait, des mots remplis de douceur quittant ses lĂšvres, ses mains finissant sur son cƓur, attrapant ses mains en pendentif avec affection.
« Je crois que j’ai compris ce que tu dis  » souffla Dimitri en se rĂ©veillant dans son lit.
Il se redressa, sa blessure lui permettant de plus en plus de mouvements, bien qu’ils restaient douloureux. Se mettant sur ses pieds, il se dirigea vers son bureau, chercha dans les chiffons dont il se servait pour entretenir ses armes et ses cuirs, ainsi que son matĂ©riel de pansage, oĂč il trouva un peigne pour la criniĂšre des chevaux. Il enleva le crin qui se trouvait encore entre les dents, avant de les faire onduler afin de faire tomber la poussiĂšre dessus, travaillant mĂ©ticuleusement afin de ne pas casser les petites tiges de bois toutes fines.
Il finissait de le nettoyer quand Annette entra avec Ashe, lui apportant tous les deux son repas avec le leur. Comme tout le monde depuis quelques jours, il les voyait comme des humains et plus comme des animaux
 il ne savait pas trop pourquoi ou s’il fallait remercier Loquax pour cela

« Ah ! Bonjour Votre Altesse ! Vous ĂȘtes dĂ©jĂ  rĂ©veillé ? On vous apporte le petit dĂ©jeuner ! Et on peut rester pour discuter si vous voulez, lui proposa Ashe, plus timidement que Sylvain et Ingrid qui venaient toujours sans hĂ©siter manger avec lui.
– Oui, merci.
– C’est normal ! Sourit la magicienne en entrant un peu plus. Vous avez ressorti un peigne ? Demanda-t-elle en le voyant avec le petit instrument à la main.
– Oui
 hum
 pour mettre de l’ordre sur
 enfin, pour mettre de l’ordre pour faire simple
 marmonna-t-il. Les riviĂšres ne sont
 peut-ĂȘtre pas les meilleurs endroits pour se laver

S’il voulait bien dire ce qu’il voyait en rĂȘve Ă  Sylvain ou Ă  Ingrid si l’occasion se prĂ©sentait, il n’était pas prĂȘt Ă  le faire avec Annette et Ashe. C’était juste
 pas le moment.
– D’accord ! Il faut dire, ça doit ĂȘtre bien emmĂȘlé ! S’exclama-t-elle, toute contente de le voir accepter de prendre soin de lui. Par contre, il vous faudra un peu d’aide pour vous nettoyer correctement aprĂšs tout ce temps
 En plus, vous ĂȘtes encore faible et trĂšs maigre, il faut faire attention, ajouta-t-elle plus doucement.
– Je demanderais Ă  Sylvain ou Ă  Dedue s’ils peuvent vous aider mais, je suis sĂ»re qu’ils seront d’accord ! Assura Ashe. Vous devriez ĂȘtre plus Ă  l’aise avec eux.
– Je peux aussi vous peignez si vous voulez en attendant, proposa Ă  son tour Annette. Ça permettra de dĂ©grossir un peu !
– D’accord, accepta Dimitri sans trop de souci, l’enthousiasme de ses deux cadets couvrant les soupirs de consternation des fantîmes.
Ils s’installĂšrent tous les trois pour manger, Ashe et Annette bavardant des derniĂšres nouvelles du monastĂšre et de leur armĂ©e. La nourriture disparut toute seule au fil de leur voix, avec aucun bruit de fond qui les gĂȘnait.
Quand ils eurent fini, Ashe repartit avec les plateaux vides chercher Sylvain ou Dedue. Annette l’emmena alors devant sa chambre, le faisant asseoir dehors, devant sa porte, pour Ă©viter de mettre des parasites Ă  l’intĂ©rieur, puis prit une minute pour aller rĂ©cupĂ©rer un peigne en meilleur Ă©tat dans sa chambre, ainsi qu’une petite pince et un petit rĂ©cipient pour mettre les lentes. Elle inspecta le cuir chevelu pour enlever les tiques qui s’y accrochait, avant de passer le peigne tout doucement en fredonnant un air connu Ă  Faerghus. C’était apaisant

« Annette
 finit-il par murmurer.
– Oui Votre Altesse ?
– Je voulais te demander pardon
 pour avoir Ă©tĂ© aussi froid et nĂ©gligeant avec toi
 avec vous tous
 j’ai Ă©tĂ© odieux et mĂ©prisable
 tu avais raison quand tu disais que nous devions nous soutenir
 j’ai dĂ» te faire beaucoup de peine
 je le regrette
 je comprendrais si tu ne me pardonne pas
 je l’aurais mĂ©rité 
– Hum
 c’est vrai que ça a fait mal quand vous l’avez dit, avoua-t-elle, la voix sombre et lourde comme celle de son ancĂȘtre. Mais si vous regrettez, je veux bien vous donner une autre chance ! J’ai envie de plus vous connaitre, et de vraiment vous connaitre ! Alors, je suis heureuse de vous voir aller mieux et de pouvoir bavarder avec vous ! Lui assura-t-elle avec son ton joyeux et gai.
Les fantĂŽmes levaient tous les yeux au ciel, semblaient lui hurler quelque chose, rĂ©clamant surement encore et encore leur vengeance mais ainsi, avec Annette Ă  ses cĂŽtĂ©s
 avec tout le monde Ă  ses cĂŽtĂ©s
 ils semblaient moins insistants
 cela pouvait continuer encore un peu
 au moins jusqu’à la fin de son dĂ©fi et quand le seigneur Rodrigue et FĂ©lix seront complĂštement rĂ©tabli
 c’était une bonne Ă©chĂ©ance

Annette avait presque fini d’enlever le plus gros des nƓuds, lorsqu’Ashe arriva avec Sylvain qui l’accompagna jusqu’aux bains et l’aida Ă  se nettoyer. Cela ne le gĂȘnait pas trop, ils se connaissaient depuis trop longtemps pour ĂȘtre vraiment incommodĂ© et ils s'Ă©taient dĂ©jĂ  baignĂ©s ensemble en Ă©té  la seule chose qui le gĂȘnait Ă  prĂ©sent, c’était de montrer Ă  quel point il Ă©tait squelettique mais, le rouquin ne fit aucune remarque, ni aucun commentaire. Il l’aida juste Ă  enlever la crasse et les parasites sur lui sans rien dire de plus, Ă  part lui demander s’il ne lui faisait pas mal.
Quand ils ressortirent, Dimitri avait des habits en bien meilleur Ă©tat que ceux qu’il se bornait Ă  mettre d’habitude, et il ne portait pas d’armure. C’était des vĂȘtements de rechange de Sylvain, Ashe avait prit tout son linge pour aller le dĂ©sinfecter et Ă©radiquer tous les parasites qui pouvaient s’y trouver.
« Fais respirer un peu ta peau et ton corps ! C’est pas bon d’ĂȘtre tout le temps enfermĂ© dans une cage en mĂ©tal ! Tu vas choper des affections en plus si tu continues ! » Lui avait pratiquement ordonnĂ© Sylvain, et dĂ©cidemment Ingrid dĂ©teignait sur lui pour ça

Le bain et la vapeur l’avaient Ă©puisĂ©, pompĂ© ses forces mais, il se sentait bien mieux maintenant qu’il Ă©tait propre
 moins dĂ©mangĂ© par les parasites
 plus lĂ©ger mais
 mais ce qui gĂȘnait le plus Dimitri, c’était l’impression d’ĂȘtre presque nu sans son armure
 sans cette protection
 c’était plus simple d’ĂȘtre complĂštement enfermĂ© et dissimulĂ© sous l’acier et la toile de sa cape
 il se drapa dans son manteau pour se cacher dedans, tout en se tenant un peu Ă  Sylvain pour marcher correctement.
Ils allĂšrent tous les deux vers l’infirmerie clopin-clopant pour que Mercedes vĂ©rifie si sa blessure se refermait bien correctement, quand ils entendirent quelques notes volĂ©es. C’était tout faible mais, ils ne purent que reconnaitre ce timbre et d’oĂč il venait.
Échangeant un regard, ils accĂ©lĂ©rĂšrent le pas comme ils purent pour monter Ă  l’infirmerie, Sylvain portant mĂȘme un peu Dimitri afin de gagner du temps et ne pas risquer qu’il tombe dans les escaliers. Quand ils y arrivĂšrent, ils virent Mercedes, Marianne, Flayn, Manuela et Ignatz dont c’était le tour de garde, attroupĂ©s devant la porte avec Ingrid, Ă©coutant attentivement le chant dont les paroles Ă©taient pratiquement toutes claires Ă  prĂ©sent.
Quand elle les vit, la chevaliĂšre leur fit signe d’approcher en silence, puis leur laissa un peu de place pour qu’ils puissent observer Ă  l’intĂ©rieur de la piĂšce.
« Au clair de la lune, le vent chante,
Tu pleures dans cette forĂȘt de cendres,
Les nuages vont alors tous descendre,
Pour que plus jamais, le mal te hante.
Au clair de la lune, les loups murmurent,
Sans un bruit, ils s’approchent de tes blessures,
Ils t’entourent, te rĂ©chauffent avec leur fourrure,
Cette protection douce, elle te rassure.
Au clair de la lune, la forĂȘt te protĂšgera toujours ici,
Aux hurlements des loups, la brise te réconforte,
Tous pansent tes blessures et au loin les emporte,
Dans leur rassurante Ă©treinte, enfin tu t’endors guĂ©ri. »
Rodrigue Ă©tait assis Ă  cĂŽtĂ© de son fils, passant sa main dans ses cheveux, sa voix claire et douce s’élevant sans difficultĂ© dans les airs, chantant les paroles de la berceuse de guĂ©rison sans trembler malgrĂ© les frissons de faiblesse qui parcourait son corps. Il semblait toujours aussi fatiguĂ© mais, il s’était enfin rĂ©veillé  enfin

Quant Ă  FĂ©lix, il semblait toujours aussi frĂȘle et fragile, enveloppĂ© dans sa couverture et ses bandages, comme un poisson forcĂ© de rester hors de l’eau trop longtemps
 cependant, son visage d’habitude neutre semblait plus calme, comme apaisĂ© par la voix de son pĂšre, sa tĂȘte serrĂ© contre sa hanche, plus proche de lui Ă  l’instant que pendant ses neuf derniĂšres annĂ©es
 il tenait toujours leur Relique contre son cƓur, Aegis les baignant de sa lueur protectrice
 comme si toute la famille Ă©tait rĂ©unie
 il ne manquait plus qu’Alix

Sylvain et Ingrid jetĂšrent un regard Ă  Dimitri
 cela faisait une Ă©ternitĂ© qu’il ne l’avait plus vu sourire ainsi

*
Dimitri n’avait aucune idĂ©e du temps qu’il Ă©tait restĂ© Ă  la porte sans osĂ© entrer. Il avait rĂ©glĂ© ce qu’il devait faire avec Gilbert, Ă  part une chose, ce dernier lui ayant demandĂ© qu’est-ce qu’il voulait faire Ă  prĂ©sent
 Dimitri devait avouer qu’il ne savait pas lui-mĂȘme
 les morts lui hurlaient de foncer vers Embarr mais, petit Ă  petit et Ă  sa grande honte, il commençait Ă  se dire qu’il devrait Ă©viter pour le moment, que c’était trop dangereux
 il croyait pourtant que c’était ce qu’il voulait aussi
 mais maintenant, alors que leurs troupes retrouvaient petit Ă  petit des forces
 il ne savait plus
 il avait remis ça Ă  plus tard et l’avait aidĂ© avec l’approvisionnement ainsi que la mise en dĂ©fense du monastĂšre comme il put, aiguillĂ© par Byleth. Elle Ă©tait souvent passĂ©e voir comment il allait mais, elle restait silencieuse la plupart du temps et quand il lui avait demandĂ© pourquoi, elle avait juste rĂ©pondu.
« Vos camarades vous disent bien mieux que moi ce que je pense. »
Encore une rĂ©ponse cryptique
 au moins, c’était en fodlan

Enfin, depuis qu’il avait fini son travail avec Gilbert, le jeune homme Ă©tait lĂ , coincĂ© devant cette porte
 ne sachant pas quoi faire ou mĂȘme dire ou autre chose
 Rodrigue s’était enfin rĂ©veillĂ© et apparemment, il n’avait pas trop de sĂ©quelle, mĂȘme si sa convalescence serait trĂšs longue et que la douleur de la blessure restera toujours, comme un fantĂŽme
 est-ce qu’il avait juste le droit de le voir ? AprĂšs tout, c’était de sa faute si lui et son fils
 lui et ses fils
 en Ă©taient là
 et que son frĂšre avait Ă©tĂ© Ă  deux doigts de perdre son jumeau

« Non
 je n’ai pas le droit d’ĂȘtre ici  » songea-t-il en partant.
Cependant, il dut faire du bruit car, la voix usĂ©e de fatigue mais douce de Rodrigue s’éleva, demandant.
« Qui est là ? Mercedes ? Marianne ? C’est vous ?
RepĂ©rĂ©, Dimitri ne put que se rĂ©soudre Ă  entrer, saluant bien bas l’homme.
– Bonjour. Excusez-moi de vous dĂ©ranger.
Il Ă©tait assis au chevet de FĂ©lix, toujours profondĂ©ment endormi, Aegis contre lui. MĂȘme quatre jours aprĂšs son Ă©veil, le pĂšre Ă©tait encore fatiguĂ© et trĂšs pale, chaudement enveloppĂ© dans sa couverture sur sa chaise mais, ses prunelles se posĂšrent doucement sur lui malgrĂ© tout et il lui sourit
 des yeux de chat bleu comme de l’eau
 exactement les mĂȘmes que ceux de Fraldarius

– Tu ne dĂ©ranges pas, lui assura-t-il. Entre donc, cela ne doit pas ĂȘtre bon pour toi de rester debout trop longtemps
 tu dois aussi te reposer. Il y a une autre chaise lĂ .
Timidement, le jeune homme prit le siĂšge qu’il lui dĂ©signait et s’installa Ă  ses cĂŽtĂ©s, mĂȘme s’il resta Ă  une distance respectueuse, ne voulant pas s’imposer, encore moins Ă  cet homme dont il n’avait jamais mĂ©ritĂ© le sacrifice. Glenn recommençait Ă  s’agiter, furieux qu’il approche de sa famille, crachant ce qui lui restait de sang sur lui
 Dimitri pouvait presque sentir les gouttes sur ses mains
 cependant, le mort se tut quand son pĂšre demanda.
– Comment te sens-tu ? Tes blessures se referment bien ? Je n’ai pas pu te parler depuis mon rĂ©veil

– Oui, elles se referment bien, je ne devrais pas avoir de sĂ©quelles Ă  part une lĂ©gĂšre douleur chronique. Je serais prĂȘt Ă  retourner me battre dans quelques jours.
– VoilĂ  une excellente nouvelle, mĂȘme si faites attention Ă  ne pas repartir trop tĂŽt. Cela risquerait de les aggraver, lui recommanda-t-il avec prĂ©venance.
– 
 d’accord. Et
 et vous Rodrigue ?
– Je vais mieux. Je suis encore en convalescence pendant un moment mais, je devrais guĂ©rir, aussi Ă  part quelques douleurs fantĂŽmes. Il faudra aussi que je fasse attention Ă  ce que je mange pendant un temps, l’arme a surtout touchĂ© mon estomac mais, heureusement, mes poumons sont intacts. Je ne devrais pas non plus avoir de marque qui apparaissent comme pour FĂ©lix, Sylvain, Ingrid ou toi, Ă©tant donnĂ© que c’est la magie de FĂ©lix aidĂ© par Fraldarius qui m’a soignĂ©.
– D’accord, tant mieux  » souffla Dimitri, rassurĂ© pour Rodrigue que ses poumons soient Ă©pargnĂ©s. Il aimait beaucoup chantĂ© alors, une plaie aux poumons aurait pu entravĂ© sa capacitĂ© Ă  le faire. Puis il demanda, plus timide qu’il ne l’aurait voulu. « Et FĂ©lix ? 
 comment va-t-il ?
– L’état de FĂ©lix semble stable tant qu’on lui laisse Aegis. Cela a toujours Ă©tĂ© ainsi quand il Ă©tait gravement blessĂ©, notre Relique l’a toujours protĂ©gé  il est encore trĂšs faible mais, guĂ©rit et retrouve un peu plus de force chaque jour pour guĂ©rir
 il est trop attachĂ© Ă  la vie pour la laisser filer ainsi, dĂ©clara-t-il, confiant envers son fils. C’est un battant qui ne laisse jamais rien tombĂ©, je sais qu’il n’abandonnera pas aujourd’hui aussi
 un sourire nostalgique fleurit sur le visage de Rodrigue, comme s’il glissait dans des souvenirs. Il est vraiment le portrait de FĂ©licia
 elle s’accrochait toujours et ne laissait jamais rien tombĂ©, mĂȘme si son cƓur lui interdisait beaucoup de choses
 elle ne supportait pas de ne pas aider les autres quand elle pouvait agir, mĂȘme si cela impliquait de se mettre en danger elle-mĂȘme Ă  cause de sa santĂ© fragile
 FĂ©lix est aussi tĂȘtu et dĂ©terminĂ© qu’elle.
Dimitri voyait Ă  peu prĂšs ce que Rodrigue voulait dire. Il se souvenait du tableau de l’épouse de Rodrigue, FĂ©licia
 pas de son vrai visage, il ne l’avait jamais connu. Elle Ă©tait morte en couches aprĂšs avoir donnĂ© le jour Ă  FĂ©lix, elle Ă©tait de constitution trĂšs fragile
 malgrĂ© tout, on leur avait beaucoup parlĂ© de cette femme, les jumeaux les premiers. On la dĂ©crivait comme quelqu’un de trĂšs joyeux et vif, souvent au mĂ©pris de sa propre santĂ©, mais qui n’oubliait jamais d’aider les autres. C’était ce qui revenait le plus sur sa personnalitĂ©, un rayon de soleil trĂšs inconscient, sauf quand on parlait commerce oĂč elle Ă©tait trĂšs habile et prudente. S’il se souvenait bien de la peinture qui la reprĂ©sentait, FĂ©lix Ă©tait le portrait vivant de sa mĂšre

– Tant mieux
 j’espùre qu’il se remettra vite

– J’en suis sĂ»r. Et toi aussi, tu as l’air d’aller beaucoup mieux.
– Oui, mes blessures se referment bien.
– Je ne parle pas de cela, le corrigea-t-il doucement. Tes joues sont un peu moins creuses et on voie que tu t’es lavĂ© correctement il y a peu de temps. Cela me rassure de te voir prendre soin de toi-mĂȘme.
– Je ne mĂ©rite pas tant d’attention
 marmonna-t-il, tous les fantĂŽmes hurlant dans ses oreilles, lui rappelant encore et encore sa mission malgrĂ© tout, alors que tant d’autres vivants tentaient de la lui faire oublier. Surtout pour la nourriture
 si je n’avais pas relevĂ© le dĂ©fi de Sylvain
 ils me le disent bien
 tous
 ce n’est que de la futilitĂ© et du gaspillage de temps et de ressources

Un air triste apparut sur le visage de Rodrigue, au grand mĂ©contentement de Glenn qui lui reprochait dĂ©jĂ  de faire de la peine Ă  son pĂšre. Dimitri aurait dĂ» l’écouter et ne jamais venir ici

– Dimitri
 pourquoi serait-ce une perte de temps ? Tu risques de tomber malade Ă  cause des carences ou des vermines si tu ne manges pas plus et que tu ne prends pas soin de toi-mĂȘme

– J’ai survĂ©cu ainsi pendant cinq ans

– Et nous t’avons retrouvĂ© comme l’ombre de toi-mĂȘme, rĂ©torqua l’homme plus ĂągĂ©. Nous avons dĂ©jĂ  eu si peur de t’avoir perdu ou de ce qui aurait pu t’arriver
 et quand
 Rodrigue secoua la tĂȘte. Personne ne veut te perdre, nous tenons tous Ă  toi
 il n’aimerait surement pas que je te le raconte mais, malgrĂ© tout ce qu’il te disait, FĂ©lix aussi Ă©tait fou de chagrin pendant tout ce temps, mĂȘme s’il n’a jamais acceptĂ© que tu Ă©tais mort
 il t’a toujours cherchĂ© aussi

– Je ne vous apporte pourtant que des problĂšmes
 la preuve, vous avez tous les deux failli mourir par ma faute
 Glenn le dit bien
 je ne devrais pas vous approchez
 je ne fais que vous mettre tous en danger
 tous autant que vous ĂȘtes

– Glenn te dirait donc ça
 marmonna Rodrigue avant de le questionner, attentif. Dimitri, et si tu m’expliquais clairement ce que tu vois ? Tu n’en avais jamais parlĂ© avant que nous nous te retrouvions, j’aimerais comprendre plus exactement ce qui t’arrive, si tu veux bien m’en parler.
« N’ose mĂȘme pas raconter ce que tu voies, il te prendrait pour un encore plus gros tarĂ© que tu ne l’es dĂ©jĂ , » lui commanda Patricia mais, malgrĂ© tout, les mots coulĂšrent de ses lĂšvres.
– Je vois les morts de ce jour-là
 partout
 tout le temps
 tel qu’il Ă©tait le jour de la TragĂ©die
 mon pĂšre dĂ©capitĂ© qui doit porter sa propre tĂȘte
 ma belle-mĂšre qui est complĂštement calcinĂ©e pour avoir disparu ainsi
 Glenn qui regrette d’ĂȘtre venu Ă  Duscur et de ne plus jamais vous revoir, toi, FĂ©lix et Alix
 Nicola qui se brise en mille morceaux pour protĂ©ger Glenn
 Myrina et Kimon qui se font massacrer alors qu’ils tentaient de se protĂ©ger l’un l’autre
 FrĂ©dĂ©rique qui tente de fuir avec d’autres membres de l’intendance et appelle ses parents quand des flĂšches lui traversent le dos
 Jacques qui est dĂ©chiquetĂ© par la magie
 tous les soldats de ce jour
 tous leurs visages dĂ©formĂ© par la souffrance
 tous
 tous
 tous me rĂ©clament vengeance
 leur sort a Ă©tĂ© si horrible
 personne ne peut comprendre quelle horreur ils ont vĂ©cu
 dans quelle horreur ils sont morts
 Ă  part moi
 je suis le seul Ă  avoir survĂ©cu alors
 alors que bien plus aurait mille fois plus mĂ©ritĂ© de survivre
 c’est mon devoir de les venger
 c’est mon devoir Ă  accomplir aprĂšs avoir survĂ©cu
 raconta-t-il en dĂ©tournant de plus en plus le regard de Rodrigue, n’osant plus le regarder bien qu’il soit incapable de s’arrĂȘter, mĂȘme si les morts souriaient, ivres de joie constater qu’il n’avait pas oubliĂ© son devoir. C’est pour ça que j’ai survĂ©cu
 c’est pour ça que je dois accomplir la mission qu’ils m’ont donné  qu’ils me rappellent Ă  chaque instant
 mĂȘme maintenant
 je ne peux pas les abandonner moi aussi
 sinon
 sinon
 ils
 ils ne pourront jamais

– Tu connais la lĂ©gende des feux follets Dimitri ?
La question fit taire le blond, ne s’attendant vraiment pas Ă  ça. Il pensait que Rodrigue allait le disputer, le gronder, avoir peur de lui, ou pire ne rien dire du tout, ĂȘtre juste impĂ©nĂ©trable comme quand il se disputait avec Lambert
 mais non, c’était une question presque au hasard, poser au milieu de sa tirade en toute confiance. Ne pouvant pas faire vraiment autre chose, il rĂ©pondit, un peu hĂ©sitant de ce qu’il allait suivre :
– Bien sĂ»r. Ce sont des feux magiques qui attirent les voyageurs perdus pour les entrainer vers la mort
 certains disent que c’est l’ñme des morts dans les marĂ©cages ou l’eau trouble, et d’autres que ce sont des esprits malins qui s’amusent de la mort

– Oui, c’est bien ce que dit la lĂ©gende Ă  leur sujet
 
 
 moi aussi, j’ai perdu mon pĂšre de maniĂšre violente, il a pris un coup de poignard Ă  la place de Sa MajestĂ© Ludovic pour le protĂ©ger
 mĂȘme si j’étais bien plus petit que toi, j’étais encore un enfant qui ne comprenait pas la mort avec Alix. On ne comprenait mĂȘme pas que la « boite » oĂč il « dormait » Ă©tait son cercueil, on pensait qu’il dormait dedans quand il est arrivĂ© Ă  la maison
 raconta-t-il, un peu perdu dans ses pensĂ©es, Dimitri n’osant pas le couper. On ne comprenait pas pourquoi il n’était plus lĂ , pourquoi on n’avait plus notre pĂšre, pourquoi des gens s’en prenait Ă  notre mĂšre, on Ă©tait triste et on faisait tout pour qu’il revienne
 mĂȘme si notre « oncle » Ludovic nous avait dit qu’il Ă©tait mort comme un vrai chevalier, on voulait juste le revoir une derniĂšre fois

– Comme un vrai chevalier ? Hoqueta Dimitri en entendant cela, reliant les points entre eux. Et Ludovic
 est-ce que

– Oui, c’était ton grand-pĂšre, Alix et moi le surnommions « Oncle Ludovic » quand nous Ă©tions petits. On le considĂ©rait ainsi, surtout qu’il Ă©tait trĂšs proche de Guillaume, il considĂ©rait notre pĂšre comme son grand frĂšre
 c’est lui qui nous a annoncĂ© sa mort
 et nous expliquait ce que s’était en mĂȘme temps, c’était la premiĂšre fois qu’on la rencontrait
 comme on ne comprenait pas, il a utilisĂ© l’image du chevalier des histoires qu’on lisait, pour qu’on arrive Ă  comprendre ce qui Ă©tait arrivĂ© Ă  votre pĂšre
 mĂȘme si on a mis longtemps Ă  comprendre rĂ©ellement qu’il ne reviendrait pas
 on voulait tellement le revoir
 au moins une fois
 alors un jour, alors qu’on Ă©tait tous les deux sur le bord du lac en pensant Ă  lui, on a cru voir sa silhouette au-dessus de l’eau
 on Ă©tait persuadĂ© que c’était Guillaume qui nous disait de le rejoindre
 on ne pensait mĂȘme pas aux feux follets
 on pensait que c’était vraiment papa

– Alors, vous ĂȘtes entrĂ©s dans l’eau, devina Dimitri.
– Oui, on a avancĂ© jusqu’à en avoir jusqu’à la taille et si notre mĂšre n’était pas intervenue, on serait surement allĂ© plus loin avec Alix
 on Ă©tait persuadĂ© que c’était Guillaume
 et quand on s’est dĂ©battus pour tenter de le rejoindre en pensant qu’elle ne le voyait pas, elle nous a dit que c’était des feux follets et elle nous a aussi posĂ©s une question

– Et quelle Ă©tait-elle ? Demanda-t-il.
– « Quel pĂšre digne de ce nom mettrait en danger ses enfants ? ». Notre pĂšre avait toujours fait passer sa famille avant tout, il ne nous aurait jamais mis en danger ainsi, mĂȘme si notre envie de le revoir nous l’avait fait oublier
 il posa doucement son regard dans le sien, lui demandant avec calme. Qu’en penses-tu ?
Dimitri détourna les yeux, incapable de le fixer. Devant son silence, Rodrigue insista, posant sa main sur sa joue pour le forcer à au moins voir dans sa direction.
– Dimitri, regarde-moi. Penses-tu vraiment que Lambert voudrait que tu coures ainsi Ă  ta mort pour le venger ? Penses-tu que Glenn voudrait que tu meures pour lui ainsi ? Penses-tu que ta tante Myrina et ton oncle Kimon voudrait voir le fils unique de leur sƓur HĂ©lĂ©na mourir ainsi ? Penses-tu que Nicola voudrait que tu suives un chemin ensanglantĂ©, alors qu’il a aidĂ© Ludovic Ă  dĂ©trĂŽner Clovis le Sanglant ? Penses-tu que tous les morts voudraient voir encore plus de cadavres s’empiler ? Que tu risques ainsi ta vie pour eux ? Ce n’est que mon avis mais, je ne pense pas que Glenn souhaiterait un tel sort Ă  qui que ce soit, mĂȘme Ă  l’ĂȘtre qu’il mĂ©prisait le plus au monde. Il t’aimait et te respectait Ă©normĂ©ment, il n’aurait jamais voulu te faire subir un sort aussi horrible et poser sur tes Ă©paules autant de responsabilitĂ©s si tĂŽt. Nicola aussi, il n’aurait jamais voulu ça. À la mort de Guillaume, il n’a jamais rĂ©clamĂ© une vengeance aveugle, il a toujours voulu la justice juste et rĂ©flĂ©chie, pas un bain de sang. Lambert aussi, mĂȘme si je le trouvais parfois trĂšs nĂ©gligeant sur certains points, ne voudrait jamais que son fils et l’enfant qu’HĂ©lĂ©na voulait et aimait tant ne risque sa vie pour le venger

– Mais
 mais c’est ce que je vois ! C’est ce que je vois et j’entends ! Je
 je ne peux pas m’en empĂȘcher ! Ils me disent ça ! Paniqua-t-il encore en s’échappant de sa main. Je ne peux que les voir et les entendre encore et encore ! Jamais ils ne me laisseront en paix avant que

– Je le sais, le coupa Ă  nouveau Rodrigue, son ton calme apaisant un peu Dimitri en voyant que l’homme le croyait. Je sais que tu ne mens pas et que c’est ce que tu vois. Je sais que ces fantĂŽmes sont bien rĂ©els pour toi, je ne le nie pas non plus. Je te demande juste de rĂ©flĂ©chir Ă  ce qu’ils te disent, et de te demander si cela leur ressemblerait vraiment.
– Si ça
 je sais que
 mais
 mais ils insistent tant
 Dimitri passa sa main sur son visage, couvrant son Ɠil restant avec ses doigts. Je ne sais mĂȘme pas par quoi commencer ou comment faire

– Cela viendra
 lui assura Rodrigue en posant sa main sur son bras, faisant un peu glisser sa main de son Ɠil, permettant Ă  Dimitri de voir son sourire et la confiance qui irradiait de lui. Pour cela, tu dois trouver la rĂ©ponse non pas dans ce qu’ils te disent eux
 dĂ©clara-t-il en montrant l’espace autour de la tĂȘte de Dimitri, avant de continuer en montrant sa tĂȘte puis sa poitrine, 
mais lĂ , et lĂ . C’est lĂ  que trouvera la rĂ©ponse qui te satisfera le plus.
Le jeune homme posa sa main sur son cƓur, regardant Rodrigue, puis FĂ©lix qui dormait toujours, puis encore Aegis contre lui, luisant toujours, mĂȘme si Dimitri y voyait Ă  prĂ©sent le mĂȘme Ă©clat que dans les yeux de ses descendants.
« Anima gravissima est
 il faut croire que c’est de famille  »
*
La nuit Ă©tait tombĂ©e quand Dimitri se rĂ©veilla. Il entendait la musique toute douce d’une flute
 s’il se fiait aux prĂ©cĂ©dentes nuits oĂč il s’était rĂ©veillĂ© ainsi, alors
 alors

Se levant avec le cƓur Ă  la fois rempli d’espoir et d’apprĂ©hension, le jeune homme descendit des dortoirs et rejoignit la cour au bord de l'Ă©tang oĂč il vit une silhouette toute semblable Ă  la sienne. Le flutiste y plongeait ses jambes, ses braies relevĂ©es dĂ©voilant des cristaux de glace qui recouvraient Ă©galement ses joues, sa gorge et tout le tour de sa tĂȘte, comme s’il portait une couronne sous ses trĂšs longs cheveux blonds comme les siens. Sa chevelure ressemblait Ă  une riviĂšre d’or interminable, liĂ©e dans un chignon qui tombait comme une tresse jusqu’à sa hanche. Mais ce qui l’étonna le plus Ă  part qu’ils se ressemblaient Ă©normĂ©ment, c’était que c’était impossible de nier qu’un Brave Ă©tait duscurien
 sa peau Ă©tait aussi noire que celle de Dedue
 si la plupart des seigneurs et faerghiens savaient que le Flutiste des Glaces Ă©tait duscurien, beaucoup le nieraient et diraient que c’était une erreur mais... il sentait son emblĂšme rĂ©agir Ă  ses cĂŽté  il le sentait jusque dans son sang... et cette mĂ©lodie...
L’air se finit sur une note toute douce et tendre, pleine d’affection, puis l’homme le regarda
 ses yeux Ă©taient vairons, le gauche azur d’eau entourĂ© de quelques Ă©cailles semblables Ă  celle de Fraldarius, le droit bleu faerghien comme les siens et ceux de son pĂšre
 c’était fou comme ils se ressemblaient tous les deux
 Dimitri avait presque l’impression de se voir dans un miroir

Blaiddyd  » souffla Dimitri sans croire qu’il voyait son ancĂȘtre Ă  son tour et ses propres yeux... ils se ressemblaient tellement

Il lui sourit en le saluant mais, il avait un accent encore plus fort que Laeta, ressemblant Ă  une sorte de mĂ©lange entre le latin et le duscurien, ce qui faisait qu’il ne comprenait vraiment rien du tout Ă  ce qu’il racontait.
Blaiddyd dut comprendre car, il rĂ©pĂ©ta plus lentement, mĂȘme s’il avait beaucoup de difficultĂ©.
« P
 pardonne
 parle trĂšs mal tes mots
 comprendre, oui
 parler este difficile
 bon jour faste
 nom Ă  moi este Blaiddyd Simplex. Ete tu ?
– B
 bonjour Ă  toi. Je m’appelle Dimitri Alexandre Blaiddyd
 et tu parles plutĂŽt bien ma langue, lui assura-t-il, mĂȘme si le jeune homme se doutait qu’il aurait plus de mal s’il ne maitrisait pas le duscurien, son ancĂȘtre parlant avec un accent trĂšs prononcĂ© proche de ce langage.
Simplex sourit et lui fit signe de s’asseoir Ă  cĂŽtĂ© de lui, commentant quand il le vit ramener ses jambes sous lui plutĂŽt que les plonger dans l’eau.
– Eau froide
 este bon aprùs travail
 moutons marchent beaucoup
 pieds font mal à la nuit. Eau froide oublie douleur, et rappelle bons souvenirs.
– Tu es berger ? Et des bons souvenirs ? Que veux-tu dire ?
– Oui. Depuis toujours
 mais maintenant
 berger pour moi
 pas pour maitre
 et oui
 avec
 avec personnes trĂšs importantes pour moi, Laeta ete Pertinax », dĂ©clara-t-il en prenant son pendentif, un peu enfoui sous son grand chĂąle mais, qui Ă©tait le mĂȘme que ceux des ancĂȘtres de FĂ©lix et Annette : un fil avec quatre plaques en forme de main ouvertes, ainsi que des phrases gravĂ©es dessus dans deux alphabets diffĂ©rents. Ils avaient donc bien les mĂȘmes car ils Ă©taient amis. « AprĂšs journĂ©e dure, toujours dedans la riviĂšre pieds mettaient

« C’est vrai que selon les lĂ©gendes, il est nĂ© esclave avant de se libĂ©rer avec Fraldarius et Dominic
 songea-t-il au mot de son ancĂȘtre. Il s’appelle Simplex on dirait
 Loquax le connait donc aussi
 si ce n’est pas un nom courant
 il faut dire, leurs peuples sont voisins, ils ont dĂ» se croiser  »
– Este comme musique, continua-t-il en posant sa flute sur ses genoux. Bons souvenirs ensembles
 un commun amour pour musique
 Pertinax a trùs beau chant
 Laeta este meilleure danseuse
 ete moi joue
 
 
 

Il hĂ©sita en lui montrant son instrument, visiblement hĂ©sitant et ne sachant pas quel Ă©tait le bon mot. Il ne devait pas l’entendre souvent.
– Une « flute » ?
– Esse ! Une flute ! Flute aide à
 enlever problĂšme du cƓur et
 le ranger pour rĂ©flĂ©chir
 ete es une passion libre cum
 aouec eux. Ete tu ? Commente te sense tu ?
Le jeune homme hĂ©sita, ne voulant pas rĂ©pondre au dĂ©but, avant de se rendre au regard attentif de Simplex. AprĂšs tout, parler avec tous les autres braves l’avaient aidĂ© jusque-là

– 
 je ne sais plus oĂč j’en suis
 avoua-t-il. Mais
 mais Ă  chaque fois que rencontre l’un d’entre vous
 vous
 vous semblez dĂ©tenir toutes les rĂ©ponses
 alors
 est-ce
 est-ce que je peux t’en parler ?
– Toutes les rĂ©ponses personne ne les a, mĂȘme tous les dieux
 mais veu bien t’aider
 autant que moi pe
 lui assura-t-il, attentif, posant sa flute Ă  cĂŽtĂ© de lui pour mettre ses mains sur ses genoux.
– Je
 je n’arrĂȘte pas de les entendre
 les morts me rĂ©clament tous leurs vengeances, de combler leurs regrets en les vengeant tous pour leurs morts affreuses
 ils me le rĂ©pĂštent encore et encore

– Tu voie toi comme ministre morts ?
– Le ministre ? Que veux-tu dire ?
– Oui ? Ministre, personne qui sert autres personnes, expliqua-t-il, Dimitri comprenant que son ancĂȘtre s’était surement fait avoir par un faux ami pour « serviteur ». Ou arme morts ?
– Hum
 si on veut pour les deux
 aprĂšs tout, ils ne peuvent plus rien faire d’eux-mĂȘmes, ils ne peuvent pas plus assouvir la vengeance qu’ils me rĂ©clament tous tant
 je l’ai dit Ă  Ingrid et elle ne l’a pas compris mais, il revient aux vivants d’hĂ©riter de la volontĂ© des morts
 et il me revient comme seul survivant de ce massacre de les venger

– Hum
 mon sens m
 mĂȘh ? Mais ? Mai, sens de tes mots Ă  mĂšh
 mĂšh
 aures, se rendit-il en montrant son oreille. Sens de tes mots a mĂšh aures comme esclaves des morts tu te considĂšres toi
 considĂšres comme esclave de maitres morts

– Leur esclave ? Que veux-tu dire ? Se redressa un peu Dimitri pour le regarder quand il entendit sa voix triste.
– Esclave este bĂ©tail
 esclave este objet
 humain sans ĂȘtre humain
 vie esclave este au maitre, pas Ă  esclave
 esclave parfait este objet sin
 sans Ăąme ete esprit
 raconta-t-il avec ses mots hachĂ©s et hĂ©sitants mais, le jeune homme pouvait voir toute la peine et le vĂ©cu Ă  l’intĂ©rieur, Simplex parlant de quelque chose qu’il connaissait que trop bien. Toi et tu mots di
 dicez obĂ©ir Ă  ordres morts
 mais mon sens de tu mots este obĂ©ir sans penser
 armes sont objets
 si lance tu esse, objet esse tu ?
– Cela ressemble un peu Ă  ce que disait Rodrigue
 Ă  ce moment, si c’est ce qu’il faut pour les venger, je l’accepterais de l’ĂȘtre
 
 
 enfin, c’est ce que je pensais
 mais depuis que
 depuis Gronder
 je doute
 je pensais que tous ces gens Ă©taient morts pour moi et m’imposaient alors de survivre pour les venger mais, Rodrigue s’est sacrifiĂ© pour me sauver en disant qu’il le faisait pour ce en quoi il croyait et que ma vie m’appartenait
 pas Ă  quelqu’un d’autre
 puis FĂ©lix a mis sa propre vie en jeu pour sauver celle de Rodrigue, mĂȘme si cela le faisait souffrir et qu’il risquait sa propre vie

– Ami FĂ©lix este pareil Pertinax, sourit Blaiddyd, faisant danser un peu ses mains jointes sur son cƓur pour mieux se faire comprendre. Aime son paire ete famiye.
– Oui
 il a toujours aimĂ© sa famille plus que tout au monde
 mĂȘme si Glenn me hurle de ne plus les approcher car je les mets en danger, je ne peux pas m’en empĂȘcher
 tant de personnes m’ont Ă©galement dit de vivre et tous leurs mots disent le contraire que ceux des morts
 Ingrid, Pertinax, Loquax et Sylvain, Laeta, Annette et Ashe, Rodrigue quand il s’est rĂ©veillĂ©, maintenant toi et tant d’autres personnes
 tous me disent de vivre

– Personne n’aime voir ami mourir
 mĂȘme a
 aprĂšs longue vie
 amis t’aiment beaucou
 lui assura-t-il.
– Je sais
 mais
 mais malgrĂ© tout ça
 les morts sont encore lĂ , rĂ©clament toujours encore et encore
 alors
 alors, toi qui es un Brave
 dit-moi comment faire ? Comment puis-je mettre fin Ă  leurs lamentations ? Comment puis-je
 Comment puis-je les sauver ? Depuis ce jour, il y a neuf ans... je n’ai vĂ©cu que pour les venger. MĂȘme les journĂ©es passĂ©es Ă  l’AcadĂ©mie des officiers avaient pour but d'accomplir ma vengeance et de les libĂ©rer de leurs regrets. C’est la seule raison pour laquelle j'ai continuĂ© Ă  vivre
 La seule raison qui me poussait Ă  continuer

– Morts sont mort. Mort ne rend rien. Maintenant, aouec autres morts ete dieux à eux. Mort à eux pas ta faute. Dans mon peuple, aide mort en mangeant aouec ete les oubliant pas sous souvenirs ete tristesse
 souvient bons moments, souvient mauvais moments autant
 mort este viouant avant, viouant este difficile à expliquer avec bon ete mauvais face
 este comme neige
 neige repose sols en hiver mais, tue aussi vivants avec froid
 tu esse comme neige. Aouec bons et mauvais faces. Morts que tu aimes comme neige, aouec bons et mauvais faces. Ta vouie este comme neige
 beaucoup de mauvais jour mais, aussi bons, avant mais, demain este jour faste

Il posa sa main sur une de ses jambes, le tira un peu pour qu’il la dĂ©plie et la plonge dans l’eau, puis l’encouragea Ă  mettre l’autre. L’eau Ă©tait gelĂ©e et ses jambes de pantalon trempĂ©es mais, en mĂȘme temps, c’était agrĂ©able
 comme si la douleur Ă©tait trop lourde et tombait au fond
 il comprenait pourquoi aprĂšs une longue journĂ©e de travail, surement affamĂ©s, maltraitĂ©s, considĂ©rĂ©s avec autant d’attention que le bĂ©tail qu’ils gardaient, son ancĂȘtre et ses amis allaient plonger leurs pieds dans l’eau

– Ta journĂ©e atroce este longue comme annĂ©s mais, journĂ©e atroce peut s’arrĂȘter
 assez souffert tu as
 ete te pardonner en ce jour
 droit at repos ete paix

– Me pardonner ? Le repos et la paix ? RĂ©pĂ©ta-t-il sans y croire, encore plus quand Simplex hocha la tĂȘte en souriant pour confirmer. Mais
 mais alors
 qu’est-ce que

Dimitri se maudit lui-mĂȘme en se rĂ©veillant en sursaut dans son lit. Il se rĂ©veillait toujours d’un coup aprĂšs ces rĂȘves Ă©tranges avec les Braves mais, c’était la premiĂšre fois que c’était aussi brutal. Il devait y avoir une raison mais, quant Ă  savoir laquelle

Il regarda par la fenĂȘtre, vit le soleil matinal s’élever doucement dans le ciel. C’était aussi l’heure pour lui.
Le jeune homme descendit pour manger avec Ingrid et Sylvain, ses deux-lĂ  le poussant Ă  aller jusqu’au rĂ©fectoire pour manger, ce qu’il faisait sans trop de souci Ă  prĂ©sent, mĂȘme si le regard lourd de ses hommes Ă©tait impossible Ă  ignorer. Ils n’avaient pas tort aprĂšs tout
 il n’était qu’un monstre sanguinaire qui mĂ©ritait leur crainte
 c’était une autre forme de juste punition

Une fois leur ventre Ă  tous les trois pleins, ils allĂšrent dĂ©buter leurs taches de la journĂ©e. Dimitri rejoignit Byleth et Gilbert dans la salle du conseil pour discuter de l’approvisionnement et de la marche Ă  suivre.
« Le Seigneur Alix nous fournit toujours des vivres, tout comme la fratrie Charon qui sont arrivĂ©s Ă  rassembler assez d’équipements pour nous les envoyer, dĂ©clara Gilbert. Ils nous ont aussi envoyer un grand nombre de lettres. Si une partie est pour Catherine afin d’avoir des nouvelles d’elles, l’autre est pour vous, et LachĂ©sis aimerait que vous donniez votre avis vous-mĂȘmes sur la situation dont sa fratrie et elle vous informent.
– Bien, j’y rĂ©pondrais, rĂ©pondit-il en prenant le tas de lettres. Pourrais-je aussi avoir votre avis sur la question ?
– Bien sĂ»r, lui rĂ©pondit simplement Byleth, son air assez indescriptible, comme toujours.
– Je vous aiderai Votre Altesse. Cependant, une des questions principales est celle de la reprise de Fhirdiad et du Royaume de Faerghus. Alix n’en parle pas mais, c’est la principale question de LachĂ©sis Charon.
Dimitri se rĂ©tracta un peu Ă  la question. C’était toujours aussi confus dans sa tĂȘte. Il penchait de plus en plus vers la reprise de Fhirdiad mais, il liait plus cela au fait qu’il devenait de moins en moins attentif Ă  ce que rĂ©clamait les morts
 aprĂšs tout Fhirdiad avait besoin d’eux, ses sujets vivants souffraient du rĂšgne tyrannique de CornĂ©lia et seuls Alix et Gautier avec l’aide de quelques royaumes srengs arrivaient Ă  arrĂȘter l’expansion du Duché  et encore, il arrivait quoi que ce soit Ă  la mĂšre de Sylvain et Ă  Sylvain lui-mĂȘme, sa tante Thorgil risquait de retirer ses troupes, et il y avait toujours le risque qu’elle se fasse renverser
 les coups d’État pour renverser un souverain jugĂ© incompĂ©tent Ă©tait monnaie courante en Sreng
 non, il devait libĂ©rer la capitale au plus vite
 mais Ă  cĂŽtĂ© de cela, les morts maintenaient leur objectif de gagner Embarr pour ĂȘtre vengé  les vivants voulaient et voudraient tous libĂ©rer Fhirdiad
 les morts voulaient la tĂȘte d’Eldegard
 choisir l’un ou l’autre lui donnait l’impression de trahir le camp mis de cĂŽté 
– Je pense que nous pouvons encore patienter avant de rĂ©pondre, intervient Byleth. Nous devons encore reconstituer certains pans de notre armĂ©e, notamment nos fournitures de guerres et une partie de nos hommes sont encore blessĂ©s. AprĂšs tout, le combat a Ă©tĂ© rude et cela ne fait mĂȘme pas une lune que nous avons remportĂ© la victoire.
– Je comprends mais, nous ne pouvons pas repousser Ă©ternellement cette dĂ©cision, lui rappela Gilbert. Il faudrait au mieux savoir quelle route nous suivrons Ă  la fin de la lune du Grand Arbre ou au tout dĂ©but de la lune des Chapelets au plus tard. Chaque jour qui passe est un jour de plus pour que nos ennemis pansent leurs plaies et reprennent des forces.
– J’en conviens mais, prendre une dĂ©cision de maniĂšre prĂ©cipitĂ©e ne ferait que nous achever. Comme vous l’avez dit, notre ennemi doit aussi reprendre des forces, surtout que nous avons dĂ©truit deux de ses principaux bataillons qui s’étaient grimĂ© en nos troupes ou en celles de l’Alliance pour nous pousser Ă  nous entretuer. Nous devons aussi finir de nous assurer que le Grand-Duc Claude est toujours notre alliĂ© malgrĂ© tout. Seteth s’attelle Ă  cette tĂąche et notre alliance ne semble pas menacer mais, un mouvement trop brusque pourrait inquiĂ©ter Claude et ses proches, surtout que nous devons passer par les terres alliĂ©es pour nous rendre Ă  Embarr au plus vite. Prudence et patience sont mĂšres de suretĂ©, le reprit-elle, avant de tourner son regard complĂštement neutre vers Dimitri. Vous pouvez encore rĂ©flĂ©chir, et ainsi prendre une dĂ©cision en laquelle vous avez vous-mĂȘme foi et confiance.
– Merci professeure, la remercia Dimitri, comprenant en partie oĂč elle voulait en venir.
Byleth hocha la tĂȘte avec un sourire discret, avant qu’ils ne reprennent le travail.
Ils discutaient de l’approvisionnement en blĂ© de Garreg Mach quand un cri de douleur rĂ©sonna dans tout l’étage, Dimitri reconnaissant tout de suite la voix. Sans rĂ©flĂ©chir, il sauta hors de la salle du conseil, courut Ă  toute vitesse Ă  travers les couloirs et se prĂ©cipita dans l’infirmerie. Il trouva le lit de Rodrigue vide, et FĂ©lix se tordant de fiĂšvre dans le sien alors que Mercedes et Manuela lui rendaient Aegis, toutes les deux Ă  cran.
« Qu’est-ce qui se passe ? Demanda-t-il, l’apprĂ©hension montant de plus en plus dans sa gorge alors qu’il s’approchait du lit. OĂč est Rodrigue ?
– Oh ! Dimitri ! Ne t’en fais pas pour Rodrigue, il se repose au soleil sur la terrasse de l’ArchevĂȘque, le grand air lui fera du bien. C’est plus l’état de FĂ©lix qui nous inquiĂšte
 avoua sa camarade de classe, alors que le blessĂ© serrait Ă  nouveau sa Relique contre sa poitrine par instinct.
– Cela fait une heure qu’il s’est mis Ă  haleter plus fort qu’avant et Ă  avoir de la fiĂšvre, lui expliqua Manuela. Nous l’avons auscultĂ© mais, aucune hĂ©morragie ne s’est dĂ©clarĂ©e et il n’a reçu aucun choc physique ou magique
 on a tentĂ© de voir si on trouvait quelque chose sans Aegis mais, il s’est mis Ă  hurler comme si on lui avait pris sa vie

– Il ne rĂ©siste plus sans Aegis
 marmonna Dimitri, s’imaginant dĂ©jĂ  le pire, alors que Glenn arrĂȘtait de lui hurler de s’éloigner de sa famille pour aller trancher la tĂȘte d’Eldegard, afin de rejoindre au chevet de son petit frĂšre.
FĂ©lix se mit Ă  se tordre autour de sa Relique, la serrant de plus en plus contre lui, semblant souffrir comme s’il Ă©tait jetĂ© sur des braises. Des paroles faibles coulĂšrent de ses lĂšvres, suppliant comme il ne l’avait jamais fait Ă  part brĂ»ler vif.
– De l’eau
 par pitié  de l’eau

– De l’eau ? RĂ©pĂ©ta la mĂ©decin avant d’ordonner. Mercedes ! Va vite chercher le pichet ! Peut-ĂȘtre qu’il est plus dĂ©shydratĂ© qu’on ne le pensait !
– Non, il n’a pas besoin d’eau comme ça, comprit Dimitri.
Sans hĂ©siter, il prit FĂ©lix dans ses bras en faisant tout pour Ă©pargner son dos, tout en le laissant serrer son bouclier, mĂȘme s’il dut redoubler de vigilance quand il le porta afin que le blessĂ© ne tombe pas. Il descendit aussi prudemment et vite qu’il put les escaliers, avant de traverser tout le monastĂšre en ignorant le regard des soldats et membres de l’intendance, Ă©berluĂ©s de voir leur prince monstrueux porter l’épĂ©iste qui le dĂ©fiait si souvent comme un bïżœïżœbĂ©, Ă  moitiĂ© courbĂ© en arriĂšre non pas Ă  cause de son poids mais, pour Ă©pargner Ă  son dos des pressions inutiles et pour Ă©viter qu’il tombe.
Quand il arriva Ă  l’étang de pĂȘche, Dimitri fit glisser FĂ©lix dans l’eau avec toute la douceur qu’il avait encore en lui, priant pour ne pas se tromper et avoir vu juste.
« Normalement, il te faudrait le lac Egua
 c’est le lac de Fraldarius
 enfin de Pertinax qui contient encore son pouvoir et fait des miracles
 espĂ©rons que la Relique suffira pour l’instant  »
Le soulagement fit exploser son cƓur quand il vit la marque dans le dos de son ami luire, Ă  l’unisson avec le joyau d’Aegis, le blessĂ© se calmant au contact avec le liquide clair. LĂąchant un soupir, Dimitri resta Ă  cĂŽtĂ© de FĂ©lix, le tenant par les Ă©paules dans l’eau, son visage du cĂŽtĂ© du ciel pour Ă©viter qu’il se noie. FĂ©lix avait toujours Ă©tĂ© un excellent nageur qui flottait facilement, et sa Relique semblait aussi l’aider Ă  rester Ă  la surface mais, c’était trop dangereux de le lĂącher. Le jeune homme dĂ©cida donc d’attendre que son dos s’arrĂȘte de briller, cela voudrait surement dire qu’il allait mieux et sinon, il aviserait Ă  ce moment-lĂ .
Le jeune homme regarda autour de lui. Simplex Ă©tait lĂ  la nuit derniĂšre, jouant cet air tout doux et affectueux avec sa double flute
 le son qu’il en tirait n’était pas habituel mais, restait trĂšs agrĂ©able

« Tu sais FĂ©lix, j’ai vu mon ancĂȘtre ici hier soir, aprĂšs avoir vu le tien, celui de Sylvain et celui d’Annette
 Blaiddyd Simplex Ă©tait là
 juste lĂ  avec les pieds dans l’eau
 lui raconta-t-il, s’était moins effrayant de parler Ă  quelqu’un qui ne rĂ©pondrait pas, pas immĂ©diatement en tout cas. Je lui ai racontĂ© ce qui s’est passé  ce que me demandent les morts
 ce que demandent les vivants
 et quand je lui ai demandĂ© quoi faire, il m’a dit que j’avais assez souffert et de me pardonner Ă  moi-mĂȘme
 je
 je dois avouer que je ne sais pas si je peux
 aprĂšs tout ce temps oĂč j’ai vĂ©cu seulement pour me venger et libĂ©rer les morts de leurs souffrances, est-ce que je peux
 et si oui, pour qui
 pour quoi devrais-je vivre ?
– Alors, tu vivras pour ce que tu crois toi pour une putain de fois.
Dimitri sursauta Ă  la rĂ©ponse, et se rendit alors compte que les yeux de FĂ©lix Ă©taient Ă  prĂ©sent grands ouverts, l’ambre plantĂ© dans son Ɠil restant et dans son orbite vide. Il bĂ©gaya, ne s’y attendant pas du tout, resserrant sa prise autour de ses Ă©paules pour ne pas l’échapper dans l’eau.
– Tu
 FĂ©lix ! Tu es enfin rĂ©veillé ! Mais
 mais depuis

– Depuis que tu m’as enfin mis dans l’eau
 bordel, je ne rĂȘvais que de ça mais, je n’avais mĂȘme plus assez de force pour le dire jusqu’à ce que j’en puisse plus
 j’avais l’impression de sĂ©cher sur place Ă  part quand il
 il ravala ce qu’il allait ajouter avant de lui rappeler. De toutes façons, j’entends toujours tout quand je suis inconscient, et c’est pas le plus important. ArrĂȘte de vivre pour des morts qui ne voudraient jamais ça, et vis pour toi pour une fois. Glenn ne voudrait jamais te faire ça et tu le sais ! Encore plus si ça te pousse Ă  te laisser poignarder par une gosse ! DĂ©esse ! Ne nous refais jamais un coup pareil ! Mon pĂšre recommencera Ă  tenter de le prendre Ă  ta place et mĂȘme si je ne pourrais surement pas recommencer, j’essaierais quand mĂȘme de le soigner car, refuser de laisser les autres mourir quand on peut faire quelque Ă  s’en faire mal soi-mĂȘme, dĂ©cidemment, c’est de famille ! MĂȘme quand ça va jusqu’à la connerie car, ça va nous tuer comme FĂ©licia avec son cƓur trouĂ©, grogna-t-il, avec trop de pĂ©tulance pour quelqu’un qui se rĂ©veillait Ă  peine d’un coma de plusieurs semaines, mĂȘme si cela lui ressemblait bien. Alors, arrĂȘte de te jeter Ă  la mort ou je te ressuscite pour te tuer aprĂšs pour ta connerie !
– FĂ©lix
 murmura Dimitri, heureux de le voir toujours ĂȘtre Ă©gal lui-mĂȘme malgrĂ© tout, mĂȘme si les mots lui manquaient. Ce en quoi je crois
 tu parles comme ton pĂšre
 tu lui ressembles tellement

– Je ressemble Ă  ma mĂšre, mĂȘme toi tu le sais et le vieux n’arrĂȘte pas de le rĂ©pĂ©ter. En plus, ce n’est pas le sujet. Le sujet, c’est que tu arrĂȘtes de croire que tu dois venger tous les morts de ce jour, mon grand frĂšre le premier car, t’as toujours pas compris que Glenn ne voudrait jamais ça, et que tu commences Ă  accepter de juste vivre ta vie pour ce que toi tu veux et pas les autres.
– Cela a l’air simple dit comme ça

– Car ça l’est, piqua-t-il. Faut juste que tu l’accepte et ça, on ne peut pas le faire à ta place.
– Mais pourrais-je vraiment FĂ©lix
 tu es le premier Ă  le dire
 le premier Ă  l’avoir vu
 je ne suis qu’un phacochĂšre
 mes mains sont tachĂ©es de sang
 pourrais-je ne serait-ce qu’espĂ©rer vivre ma vie ainsi ? Moi qui suis le seul survivant de ce jour tragique, ai-je
 ai-je le droit de vivre pour moi-mĂȘme
 ?
– Pas la moindre idĂ©e Ă  part que tu rĂ©flĂ©chis trop pour un phacochĂšre. Tu ne le sauras jamais si tu n’essayes pas alors, arrĂȘte de tourner autour du pot et dĂ©cides-toi. Histoire que mon pĂšre ne se soit pas pris un coup de couteau dans le ventre et que je ne sois pas dans cet Ă©tat pour rien

– Si tu savais comme je regrette pour cela
 souffla-t-il, les remords dĂ©vorant encore plus fort son cƓur Ă  sa remarque. Je n’ai rien d’autre que des mots pour l’exprimer mais

– Non, tu peux aussi arrĂȘter de marmonner et agir, rĂ©torqua-t-il.
Le blond se tut quelques secondes, faisant le point sur tout ce qui s’était passĂ©, tout ce qu’il avait vu, toutes les personnes avec qui il avait parlĂ© et Ă©changĂ©, le poids de FĂ©lix sur ses mains qu’il ne devait surtout pas lĂącher l’empĂȘchant de dĂ©river trop loin.
– J’ai enfin compris
 souffla-t-il, un fardeau semblant tomber de son cƓur alors qu’il prenait sa dĂ©cision en sachant que c’était la sienne. Nous allons libĂ©rer Fhirdiad.
– Et bien enfin. T’en as mis du temps Ă  te dĂ©cider Dimitri. T’as intĂ©rĂȘt Ă  reprendre la capitale et Ă  bouter CornĂ©lia et les impĂ©riaux hors de Faerghus.
– Je te le promets

– Et bien, on avance
 conclut-il avant de se reblottir contre sa Relique en fermant les yeux et de se laisser simplement flotter dans l’eau, ayant surement fini de dire ce qu’il voulait.
Dimitri sourit un peu de le voir se dĂ©tendre autant en sa prĂ©sence, et le laissa tranquille. Ils s’étaient dĂ©jĂ  tout dit de toutes façons

– FĂ©lix !
Les iris d’ambre s’ouvrirent Ă  nouveau d’un coup, en entendant la voix toute faible et essoufflĂ©e de Rodrigue l’appeler. Dimitri se tourna pour voir l’homme arrivĂ©e, Alois l’aidant Ă  se dĂ©placer avec Marianne. Reprenant difficilement son souffle aprĂšs autant d’effort malgrĂ© sa blessure, le pĂšre demanda, mort d’inquiĂ©tude.
– Dimitri
 j’ai entendu F
 pfff
 FĂ©lix crier
 il n’était pas Ă  l’infirmerie
 Manuela et Mercedes m’ont
 arf
 m’ont dit que vous
 que vous l’aviez emmené  est-ce que

– Il avait besoin d’eau, il m’a expliquĂ© qu’il avait l’impression de se dessĂ©cher, lui expliqua Dimitri avant de le rassurer. Il va mieux maintenant.
– Il te l’a expliqué  alors
 devina-t-il, les yeux brillants d’espoir.
– Je suis rĂ©veillé  pĂšre
 marmonna FĂ©lix, le visage Ă  moitiĂ© cachĂ© par Aegis.
Rodrigue s’approcha encore puis se dĂ©tacha comme il put d’Alois pour se baisser au plus prĂšs de son fils, mĂȘme si l’autre pĂšre l’aida Ă  se baisser pour qu’il ne parte pas la tĂȘte en avant. Des larmes de soulagement bordaient ses yeux quand ils rencontrĂšrent l’ambre de ceux de son fils.
– FĂ©lix
 la DĂ©esse soit louĂ©e
 j’ai
 j’ai eu si peur

– Toi aussi, tu
 tu as Ă©té  à
 tu es
 les mots de FĂ©lix se bousculĂšrent maladroitement dans sa bouche, avant que les plus justes arrivaient finalement Ă  s’échapper, mĂȘme si l’épĂ©iste baissait les yeux pour fuir le contact visuel, Ă  moitiĂ© cachĂ© par Aegis. Moi aussi, j’ai eu peur
 tu m’as fait peur
 ne me refais plus jamais ça. Alix dĂ©pĂ©rirait sans toi
 t’es la derniĂšre personne qu’il veut perdre

Rodrigue sourit, Dimitri entendant aussi la phrase qui n’était pas prononcĂ© mais, que les yeux et l’attitude de FĂ©lix hurlaient : « je ne veux pas te perdre ».
– C’est promis
 lui jura-t-il en tendant timidement la main vers lui.
AprĂšs une seconde d’hĂ©sitation gĂȘnĂ©e, FĂ©lix leva Ă©galement la sienne de la mĂȘme maniĂšre, attrapant les doigts de son pĂšre.
– Je crois qu’il faut qu’on parle
 marmonna le jeune homme, jetant un regard furtif Ă  son pĂšre avant de se dĂ©tourner immĂ©diatement.
– Je pense aussi
 confirma Rodrigue en serrant la petite main de fils dans la sienne lĂ©gĂšrement plus grande. Mais en attendant, repose-toi
 tu as encore besoin de repos louveteau

Dimitri sourit Ă  son tour quand il vit FĂ©lix s’endormir Ă  nouveau mais, en tenant toujours la main de son pĂšre

« Cela fait des annĂ©es que tu n’as plus laissĂ© personne t’appeler louveteau
 la famille du loup
 cela vous va bien  »
*
Deux semaines plus tard, l’armĂ©e prit la direction Fhirdiad. Tous les rĂ©giments Ă©taient en ordre pour combattre CornĂ©lia, les soldats guĂ©ris et bien Ă©quipĂ©s avançant Ă  un rythme soutenu, leur dĂ©sir de chasser les impĂ©riaux de la capitale et de Faerghus. Dimitri les regarda le suivre, sans hĂ©sitation malgrĂ© leur doute Ă  son encontre, la peur qu’il avait pu leur inspirer quand il ne pensait qu’à la vengeance
 il ne le mĂ©ritait pas
 pas quand les fantĂŽmes lui hurlaient encore et encore de faire demi-tour et de foncer vers Embarr pour couper la tĂȘte d’Eldegard pour leur offrir
 il Ă©tait forcĂ© de regarder ses amis pour se rappeler ce qu’il devait faire pour les vivants et pas pour les morts
 le jeune homme avait encore besoin de cette bĂ©quille et de cette ancre pour ne pas perdre de vue ce qu’il devait faire
 enfin, il devait tenir, toute son armĂ©e comptait sur lui. Il devait ĂȘtre Ă  la hauteur de leurs attentes et faire cesser la tyrannie de CornĂ©lia sur son Royaume.
Pour se rendre Ă  Fhirdiad, la route la plus directe et praticable pour une armĂ©e comme la leur passait par Fraldarius. Il ferait escale par leur ville Fort Egua puis partirait par la Grand’Route jusqu’à la capitale directement, qui Ă©tait moins protĂ©gĂ© de ce cĂŽtĂ©-ci Ă  cause des liens entre les familles royales et ducales, Ă  part un rĂ©seau de fortification cĂŽtĂ© Fraldarius datant de l’époque de Kyphon et Clothilde, puis restaurĂ© sous les parents des jumeaux, Guillaume et AliĂ©nor. Ils en profiteraient pour confier Rodrigue et FĂ©lix, allongĂ©s dans une charrette en dormant la plupart du temps, Ă  Alix, ils pourraient mieux s’occuper d’eux et l’épĂ©iste serait prĂšs du Lac Egua. Il avait besoin d’aller rĂ©guliĂšrement dans l’eau sinon, il avait l’impression de se dessĂ©cher et c’était presque qu’à cette condition que ses blessures se soignaient rĂ©ellement. Le lac toujours pur de Pertinax lui ferait le plus grand bien
 en plus, Alix devait ĂȘtre mort d’inquiĂ©tude pour eux.
Quand ils traversĂšrent les terres des Fraldarius, ils virent des habitants travailler dans les champs, une tĂąche rude et rigoureuse dans les terres gorgĂ©es d’eau de la famille ducale, les champs demandant Ă  ĂȘtre rĂ©guliĂšrement drainĂ©es afin d’ĂȘtre exploitable et pour chasser des maladies comme le paludisme. Si Dimitri se fiait Ă  l’aspect des champs, les jumeaux avaient rĂ©ussi Ă  conserver assez de ressources pour entretenir leurs terres
 la nourriture que leur avait apportĂ© Rodrigue venait certainement d’ici. Quand les paysans virent l’étendard royal et celui de l’Ordre de Seiros marcher cĂŽte Ă  cĂŽte, ils s’arrĂȘtĂšrent dans leurs travaux agricoles pour se prĂ©cipiter vers eux, acclamant l’armĂ©e royale, les encourageant et demandant oĂč Ă©tait leurs seigneurs. « OĂč sont le loup calme et le louveteau ? » Ă©tait la question sur toutes les lĂšvres.
« On a entendu dire que le loup avait pris un coup pour vous Altesse, puis que le louveteau a pratiquement donné sa vie pour le sauver, déclara une femme à la peau brûlée par le soleil. Comment vont-ils ?
– Ils vont bien ? Demanda un homme. Vu que pour les ducs, c’est des vrais jumeaux, le loup vif risque de trĂšs mal le vivre de ne plus ĂȘtre avec son frĂšre
 dĂ©jĂ  que d’aprĂšs les rumeurs, c’était trĂšs dur d’ĂȘtre sĂ©parĂ© ces derniĂšres annĂ©es

– Vous nous les ramenez en entier ? Demanda un autre.
– J’espĂšre ! S’exclama une vieille femme. Ils ont dĂ©jĂ  vĂ©cu plus longtemps que leur pĂšre pour les jumeaux mais, qu’ils ne perdent pas la vie si vite ! Tout comme le louveteau ! C’est un jeune loup Ă  prĂ©sent mais, il est bien trop jeune pour y rester ! C’était l’ñge oĂč la duchesse Alix et son mari Rodrigue sont morts pour Clovis le Sanglant ! Et on a vu ce que ça a donné !
– Je comprends votre inquiĂ©tude, surtout que ces rumeurs sont vraies. Par la grĂące de l’ÉpĂ©iste de l’Onde et leur force de vie, ils vont bien tous les deux, mĂȘme s’ils devront beaucoup se reposer pour guĂ©rir complĂštement. Nous les ramenons aussi au Seigneur Alix afin qu’ils se reposent plus loin des lignes de front, une fois la capitale reprise.
– C’est vrai ?! Ils sont là et vous allez reprendre la capitale ?!
– La DĂ©esse et Fraldarius soient louĂ©s !
– Ils sont en vie !
– L’un des bons ducs et son fils sont sauvĂ©s et vivants !
– Vive le roi et les ducs !
– Hourra ! Hourra !
– Reprenez vite Fhirdiad de cette dĂ©mone envoyĂ©e de l’ImpĂ©ratrice !
– Tout le monde vous attend !
– Il y a quelque chose que nous puissions faire pour vous Votre Altesse ?
– On peut aussi se battre Ă  vos cĂŽtĂ©s !
– C’est vrai ! On a nos flĂ©aux et nos fourches !
– Restez en sĂ©curitĂ© et faites attention Ă  vous, les calma un peu Dimitri avant de leur assurer. Vous ĂȘtes dĂ©jĂ  une force centrale de notre armĂ©e : c’est le blĂ© que vous cultivez qui nous nourrit. Sans votre travail acharnĂ©, nous ne pourrions pas combattre. Vous avez toute notre reconnaissance.
– On bossera encore plus fort alors ! S’écriĂšrent-ils alors avant de scander Ă  nouveau. Pour le roi ! Pour les ducs ! Pour Faerghus !
– Faites juste dĂ©gager CornĂ©lia de votre trĂŽne et on sera lĂ  pour nourrir tout le monde derriĂšre !
Le soutien du peuple de Fraldarius toucha Dimitri en plein cƓur. S’il savait ce qui Ă©taient arrivĂ© Ă  Rodrigue et FĂ©lix, ils Ă©taient surement aussi au courant de l’état oĂč il Ă©tait avant
 ou au moins avait des Ă©chos de sa mauvaise gestion de leur armĂ©e Ă  l’origine
 les soldats avaient surement envoyĂ© des lettres Ă  leurs familles et fait passer les nouvelles, surtout dans un duchĂ© oĂč tout le monde savait lire et Ă©crire
 ils devaient savoir
 mais ils continuaient Ă  lui faire confiance
 ses sujets continuaient Ă  lui faire confiance

Le prince s’inclina alors autant qu’il put depuis son cheval en jurant, la main sur son cƓur, les fantîmes plus silencieux que jamais.
– Je ne vous dĂ©cevrai pas. »
*
Leur route se passa relativement bien, leur chemin Ă©tant encore assez Ă©loignĂ© des lignes de front mais, d’aprĂšs leurs informations, Fort Egua Ă©tait encore assiĂ©gĂ©e par l’armĂ©e de CornĂ©lia.
« Pendant les cinq ans, ils ont Ă©tĂ© trĂšs souvent en Ă©tat de siĂšge mais, la ville n’a jamais cĂ©dĂ©, mĂȘme avec des troupes bien supĂ©rieures en nombre, apprit Ashe Ă  Dimitri.
– Effectivement, cette forteresse est pratiquement imprenable par un siĂšge, sauf s’il y a un traitre qui ouvre les portes, lui expliqua-t-il. Les murailles sont non seulement trĂšs Ă©paisses mais, les douves sont trĂšs larges et trĂšs profondes, ce qui empĂȘche les tours de siĂšges de s’approcher. De plus, mĂȘme s’il y a beaucoup d’habitants Ă  l’intĂ©rieur, la ville borde le lac alors, ils peuvent se ravitailler en passant par-lĂ . Le principal enjeu, c’est de garder le contrĂŽle du Lac Egua afin de pouvoir continuer Ă  se fournir en vivre ou venir harceler l’ennemi sur ses flancs. Cela les rend plus vulnĂ©rables Ă  d’excellents navigateurs comme les srengs mais, une armĂ©e de terre aura Ă©normĂ©ment de mal Ă  les assaillir.
– Oui, mĂȘmes s’ils ont aussi une faiblesse aux unitĂ©s volantes, fit remarquer Gilbert. Pour le moment, Alix et Rodrigue arrivaient Ă  les repousser, notamment en trompant l’ennemi sur qui dirigeait la citĂ©, et donc quel type de troupe serait le plus prĂ©sent Ă  l’intĂ©rieur mais lĂ , ils savent que c’est le seigneur Alix. Ils ont donc surement adaptĂ© leur stratĂ©gie pour affronter un chevalier archer qui emploie surtout des troupes Ă©quipĂ©es d’armes blanches. De plus, leurs vassaux frontaliers ont pour consigne d’avant tout protĂ©ger la frontiĂšre avec le duchĂ© alors, sauf appel Ă  l’aide de leur part, ils ne viendront pas dĂ©fendre Egua. Les villages environnant sont Ă©galement en sĂ©curitĂ© dans les divers forts et villes fortifiĂ©s alors, les pillages sont trĂšs limitĂ©s. L'armĂ©e impĂ©riale se retourne, ils se font attaquer par un fortin ou les eguanais qui les attaquent depuis le lac.
– C’est vrai
 rejoignons-le au plus vite et prĂȘtons-lui main forte, dĂ©cida Dimitri, sĂ»r de lui. Nous avons quelles informations sur les assiĂ©geants ?
– D’aprĂšs nos Ă©claireurs, c’est une armĂ©e spĂ©cialisĂ©e dans la prise d’une forteresse avec surtout des architectes pour construire les engins de siĂšges, ainsi que des armateurs et des vaisseaux. Cependant, ils ont presque tous Ă©tĂ© coulĂ©s par l’armĂ©e ducale, le renseigna Byleth. Ils ont un corps dĂ©fensif mais, le gros de leurs forces est tournĂ© vers Fort Egua. Si nous frappons assez vite et fort, ils n’auront pas le temps de s’organiser pour se dĂ©fendre, et nous devrions avoir le dessus rapidement.
Dimitri hocha la tĂȘte, rĂ©flĂ©chissant un peu avant de se dĂ©cider. La stratĂ©gie de Byleth pourrait marcher et il ne fallait pas que le verrou de Fort Egua tombe, cela exposerait trop les paysans de Fraldarius aux pillages de CornĂ©lia.
– Bien
 si cela vous convient Ă  tous, nous ferons cela si cette proposition est acceptĂ©e par tous. Il faudra cependant faire attention car, la ville est entourĂ©e de plaine. Nous ne pourrons pas partir d’une hauteur pour prendre de la vitesse. Nous devrions peut-ĂȘtre les contourner lĂ©gĂšrement pour qu’ils se retrouvent coincer entre le lac et nous ? Proposa-t-il.
– Ce serait une bonne idĂ©e, confirma-t-elle.
AprĂšs concertation, le plan d’attaque fut adoptĂ© par tout le monde, surtout que cela leur prendrait Ă  peine plus de temps.
« Enfin, la moindre minute peut ĂȘtre dĂ©cisive dans un siĂšge
 connaissant les jumeaux, leur ville est saine et derriĂšre eux mais, il faut penser Ă  toutes les Ă©ventualitĂ©s  »
Il voyait du coin de l’Ɠil Glenn le fixer, son regard suivant sa nuque Ă  chacun de ses mouvements, le criblant encore et encore, les mots silencieux Ă©tant encore pire que tout ce qu’il avait pu dire ses derniĂšres annĂ©es
 Dimitri imaginait trop bien ce que ses yeux hurler les pires reproches

« Tu as failli tuer mon pĂšre et mon petit frĂšre
 et maintenant, tu vas tuer mon oncle rien qu’en l’approchant
 tu vas le tuer
 il va mourir
 mon pĂšre aussi
 mon petit frĂšre aussi
 tous vont mourir
 et ce sera de ta faute  »
Dimitri dut garder son regard et toute son attention sur Byleth, puis sur Sylvain qui reprenait forme humaine aprĂšs avoir discrĂštement espionner l’armĂ©e assiĂ©geante. Elle Ă©tait bien infĂ©rieure en nombre Ă  la leur et disposait au final d’assez peu de combattants en dehors des bataillons aĂ©riens, mais ils Ă©taient lourdement Ă©quipĂ©s et il faudrait aussi faire attention de ne pas recevoir les tirs dĂ©fensifs des assiĂ©gĂ©s Ă  leur place. Alerte, Annette proposa de disposer leurs archers et magiciens derriĂšres les guerriers en armures lourdes, afin qu’elles les protĂšgent des attaques par la terre. Cela permettrait aux unitĂ©s attaquant Ă  distance d’inonder le ciel de flĂšches et de magies. Pendant ce temps, la cavalerie et infanterie lĂ©gĂšres iraient harceler l’ennemi sur son flanc, afin de le forcer Ă  se replier du cĂŽtĂ© du lac afin de les prendre en tenaille. Étant donnĂ© la composition de l’armĂ©e, ils se rendraient surement, ce n’était pas des combattants. Convaincus par ses arguments, le corps des gĂ©nĂ©raux accepta sa proposition.
« Massacre-les
 souffla un chƓur de voix dans sa tĂȘte alors que le blond acceptait la stratĂ©gie de la magicienne. Massacre-les tous
 massacre-les tous et offre-nous leur tĂȘte
 tue-les
 leur tĂȘte, leur corps, leur membre, leur ĂȘtre
 donne les nous tout entier  »
Dimitri se força Ă  ne pas les Ă©couter, resserrant sa prise sur Areadbhar, l’énergie gelĂ©e lui rappelant l’attention et l’écoute de Simplex. Il ne devait pas les Ă©couter, il ne devait pas se laisser emporter, il devait ĂȘtre digne de la confiance de ses hommes
 il devait ĂȘtre calme comme de la glace
 sa Relique lui rĂ©pondit avec une Ă©nergie douce et apaisante

Une fois leur stratĂ©gie mise au point et leurs soldats prĂȘts, leur armĂ©e contourna les troupes ennemies, puis une fois leur camp en vue, ils sonnĂšrent l’attaque, chargeant dans leur arriĂšre-garde. La bataille fut trĂšs brĂšve, l’ennemi n’étant clairement pas prĂ©parĂ© Ă  subir un assaut frontal. Heureusement pour l’armĂ©e royale, les ingĂ©nieurs se rendirent trĂšs vite devant l’offensive, se rĂ©fugiant dans leurs tours de siĂšges ce qui les rendit facile Ă  apprĂ©hender et en voyant cela, une partie des conscrits impĂ©riaux se ligua pour Ă©liminer eux-mĂȘmes leurs gĂ©nĂ©raux. Au final, les soldats faerghiens n’eurent Ă  combattre que le tiers des forces ennemis prĂ©sentes qui furent trĂšs vite Ă©crasĂ©s, surtout une fois leurs chefs Ă©liminer et aprĂšs que les mutins se soient mis Ă  les attaquer.
Dimitri s’accrocha encore plus fort Ă  son arme, se tenant de toutes ses forces Ă  la hampe d’Areadbhar mĂȘme une fois les combats terminĂ©s. Quand il Ă©tait descendu de son cheval, quand il avait commencĂ© Ă  combattre, quand il avait empĂȘchĂ© un soldat impĂ©riaux de viser le dos d’un de ses Ă©pĂ©istes, quand l’ennemi se rendit finalement, quand ils dĂ©cidĂšrent de leur sort de prisonniers de guerre et ce qu’ils feront des mutins et des ingĂ©nieurs avec Gilbert et Byleth
 tout le long de la bataille et encore aprĂšs, les morts lui hurlaient de massacrer ses adversaires, d’écraser leurs os, de remplacer son Ɠil manquant avec les leurs, d’arracher leur peau, d’éviscĂ©rer leurs entrailles, d’arracher leurs crĂąne
 tout
 toutes les pires horreurs possibles et inimaginables, ils lui demandaient tous cela et plus d’une fois, il crut une seconde qu’il allait craquer. Qu’il allait recommencer et sombrer Ă  nouveau.
« Ceux que je connais ne demanderaient jamais une chose pareille
 ceux que je connais ne demanderaient jamais une telle horreur
 ceux que je connais ne demanderaient jamais un massacre et un bain de sang
 ce n’est pas eux
 ce n’est pas eux
 ce ne sont pas leurs fantĂŽmes  »
Tel Ă©tait les maximes qui tournaient dans sa tĂȘte encore et encore, sa poigne fermement vissĂ©e sur Areadbhar afin de s’accrocher Ă  la rĂ©alitĂ© et ne pas les Ă©couter
 la serrant presque contre son cƓur pour garder l’énergie de Simplex au plus prĂšs de lui

« Eh ! Dimitri ! Il vit le Sylvain trotter vers lui avec Ingrid, celle-ci ayant combattu au sol pour ne pas prendre un sort ou une flÚche perdue. Tout va bien ?
– Tu n’es pas blessé ? Lui demanda la chevaliĂšre. Tu trembles de partout !
– Ou
 oui
 une seconde
 il faut juste que
 qu’ils

Comprenant oĂč il voulait en venir, ses amis lui tendirent leur main qu’il attrapa pour tenter de se calmer plus facilement, s’accrochant de toutes ses forces Ă  leur chaleur. Dimitri se maudit de sa propre faiblesse, ayant encore besoin d’aide pour chasser les fantĂŽmes
 il Ă©tait le seul Ă  les voir mais, on aurait dit que les morts ne fuyaient que quand il s’accrochait Ă  quelque chose, mĂȘme la plus banale des conversations ou quelque chose d’idiot

– Votre Altesse ! Votre Altesse ! Ah ! Vous ĂȘtes là ! S’exclama Alois en les rejoignant aussi vite qu’il pouvait avec son armure lourde, un bandage superficiel Ă  l’épaule. Je vous cherchais, le seigneur Alix doit
 ah ! Je vois, comprit-il assez vite en le voyant s’accrocher ainsi Ă  ses amis. Oh, vous en faites pas, on a un peu de temps avant de prendre l’eau, surtout qu’on ne s’est pas pris une douche froide et que le plan n’est pas tombĂ© Ă  l’eau ! Alix peut ĂȘtre sec mais, il mettra toujours de l’eau dans son vin et ça ne devrait pas faire dĂ©border le vase !
Si Sylvain et Ingrid restĂšrent de marbre devant les jeux de mots d’Alois, Dimitri ne put s’empĂȘcher de pouffer, repoussant encore un peu plus les fantĂŽmes et leurs demandes obscĂšnes. L’humour du chevalier de Seiros Ă©tait toujours aussi mauvais mais, c’était le genre de blagues qui le faisaient rire Ă  chaque fois.
– Oui, il devrait ĂȘtre patient, mĂȘme si je prĂ©fĂ©rerais ne pas trop le faire attendre. Il doit surement avoir hĂąte de retrouver Rodrigue et FĂ©lix.
– C’est sĂ»r ! J’étais tout jeune quand ils Ă©taient eux-mĂȘmes Ă©tudiants Ă  l’acadĂ©mie mais, ils Ă©taient toujours collĂ©s ! Jeralt pouvait me passer un savon car, il me disait d’apporter quelque chose au premier ou au deuxiĂšme jumeau Fraldarius sans prĂ©ciser lequel alors, je me trompais une fois sur deux. Simple curiositĂ©, ils se ressemblent toujours autant tous les deux ? Souvent, plus les vrais jumeaux vieillissent, moins ils se ressemblent. MĂȘme si bon, pour pouvoir se faire passer l’un pour l’autre en cas de besoin, ils doivent encore ĂȘtre comme deux gouttes d’eau ou pas loin.
– Pour eux, la question serait plutĂŽt « est-ce qu’ils se diffĂ©rencieront un jour ? », rĂ©torqua Ingrid. Ils sont toujours complĂštement identiques.
– Comme quoi, il y a des choses qui ne changent pas !
– Vous verrez quand Alix arrivera
 je suis curieux de voir la tĂȘte d’Ashe ! Il m’a dit qu’il savait que les vrais jumeaux existaient mais, qu’il n’en avait jamais rencontrĂ©, sourit Ă  pleines dents Sylvain.
– Ne te moque pas trop, nous aussi, on pourrait se tromper s’ils ne se diffĂ©renciaient pas. Le seul qui ne se trompe jamais, c’est FĂ©lix, lui rappela Dimitri, les fantĂŽmes redevenant enfin qu’un grondement au fond de sa tĂȘte. Allons le retrouver Ă  prĂ©sent, nous l’avons fait suffisamment attendre. »
Ils suivirent Alois jusqu’aux portes de la citĂ©, s’éloignant prĂ©cautionneusement du pont-levis qu’on abaissait doucement afin d’enjamber les douves immenses. Les portes grincĂšrent un peu sur leurs gonds quand elles furent ouvertes, dĂ©couvrant Alix, entourĂ© de ses gĂ©nĂ©raux de confiance comme Estelle et son second Bernard, ainsi que de ses soldats. Dimitri entendit Ashe hoqueter un peu de surprise en dĂ©couvrant le frĂšre de Rodrigue. Il fallait dire que c’était comme voir le reflet de Rodrigue habillĂ© d’un uniforme d’archer, en vert et avec une queue de cheval derriĂšre la tĂȘte, lĂ  oĂč son frĂšre portait toujours du bleu et les cheveux dĂ©tachĂ©s. C’était une nĂ©cessitĂ© qu’ils aient chacun un code couleur particulier sinon, il serait encore impossible de les diffĂ©rencier sans les connaitre ou avant qu’il ne parle.
« Salutation Votre Altesse. Ravi de vous revoir en entier et dans votre Royaume. Merci pour votre aide pour repousser l’armĂ©e du duchĂ© de nos murailles et fortifications. Vous avez Ă©courtĂ© le siĂšge de notre citĂ© de quelques semaines et le calvaire de tout Ă  chacun.
– Nous ne pouvions vous laisser ainsi. J’espùre que vous n’avez pas subi trop de perte parmi les votres pendant le siùge.
– Comme toujours dans ce genre de situation : l’ennemi se casse les dents sur les remparts ou boit la tasse dans les douves, pendant que nous ont attend tous Ă  l’intĂ©rieur avec nos vivres qu’ils s’en aillent, en leur envoyant des pierres dessus. Ils sont tĂȘtus en plus. On leur trouait la peau qu’ils ne foutaient toujours pas le camp. Dans tous les cas, les troupes de CornĂ©lia n’ont clairement pas le pied marin, ils sont arrivĂ©s Ă  couler ou Ă©chouer tous leurs navires avant mĂȘme d’arriver ici, et ils n’ont toujours pas compris que nous assiĂ©ger ne sert Ă  rien tant qu’on a un accĂšs au lac ces cons. Enfin, ça rĂ©sume la politique de CornĂ©lia, une suite constante de conneries, mĂȘme si elle semble surtout vouloir dĂ©truire Faerghus en nous tuant tous avec ses impĂŽts.
Ce n’était pas sĂ©rieux de sa part mais, pour le coup, Dimitri aurait rĂȘvĂ© voir la tĂȘte de ses camarades qui rencontraient Alix pour la premiĂšre fois. Quand il Ă©tait petit, ça le faisait toujours rire Ă  quel point cela pouvait Ă©tonner les gens qui rencontraient les jumeaux de voir Ă  quel point ils avaient des caractĂšres diffĂ©rents, tout en Ă©tant pourtant identiques physiquement. Cela crĂ©ait un dĂ©calage qui Ă©tonnait facilement, et les deux frĂšres savaient parfaitement en jouer pour tromper leurs ennemis, et quand la situation Ă©tait moins grave taquiner un peu leur entourage.
– Vous me voyez rassurer que les fortifications de Fort Egua soient toujours aussi solides, et je vous remercie pour toute la tĂ©nacitĂ© que vous avez su mettre en Ɠuvre. Ces informations nous seront prĂ©cieuses pour renverser CornĂ©lia. Connaissez-vous la situation Ă  Fhirdiad ?
– Entre deux siĂšges, on a rĂ©ussi Ă  obtenir des informations de nos hommes infiltrĂ©s lĂ -bas. Le meilleur agent de tout le nord est Ă©galement lĂ -bas donc, nous avons Ă©galement des informations trĂšs prĂ©cises, mĂȘme si je les tairais ici. D’aprĂšs leurs derniers rapports, la rĂ©volte gronde Ă  la capitale et des groupes de rĂ©sistants se sont formĂ©s d’aprĂšs nos informations. Visiblement, apprendre que vous Ă©tiez encore en vie Ă  donner du courage Ă  beaucoup de nos compatriotes pour se rassembler et rĂ©sister ensemble. Un mĂ©decin et inventeur qui se fait appeler Omnes aurait pris la tĂȘte du mouvement, mĂȘme si j’ai trĂšs peu d’information sur lui, Ă  part que CornĂ©lia veut sa peau et qu’apparemment, il crĂ©e des armes et des dispositifs mĂ©dicaux rĂ©volutionnaires. Sinon, rien n’est connu sur son apparence ou son origine. La moindre chose Ă  son sujet qui se rĂ©pand, c’est signer son arrĂȘt de mort pour lui alors, il se fait discret.
– D’accord. Il faudra que nous arrivions Ă  nous coordonner avec eux si cela est possible, mĂȘme si notre prioritĂ© est de faire en sorte que les civils ne soient pas pris dans les combats.
– C’est trĂšs clairement la prioritĂ© de tout le monde. Gautier vous envoie un rĂ©giment de soldat avec quelques troupes de la reine Thorgil, qui a dĂ©cidĂ© de nous venir en aide de maniĂšre plus active. Et de votre cĂŽtĂ©, comment vont les troupes ? Vous m’avez dit qu’au final, il y avait assez peu de perte, le ravitaillement qu’on vous a envoyĂ©s a suffi ? Rodrigue et FĂ©lix sont là ? Finit-il par demander, la question lui brulant clairement les lĂšvres depuis le dĂ©but. Comment vont-ils ? Le voyage n’a pas Ă©tĂ© trop rude pour eux ?
– Oui, les pertes ont Ă©tĂ© moins importantes qu’elles auraient pu l’ĂȘtre, grĂące Ă  nos alliĂ©s de Leicester qui ont su prĂ©venir Claude et leurs compatriotes de l’embuscade d’Hubert, et inversement de leur cĂŽtĂ©. Le ravitaillement envoyĂ© est suffisant pour le moment, mĂȘme si nous cherchons aussi Ă  trouver d’autres endroits pour nous fournir pour ne pas imposer une trop grosse pression frumentaire Ă  Fraldarius. Quant Ă  Rodrigue et FĂ©lix, ils se remettent petit Ă  petit de leurs blessures, mĂȘme si FĂ©lix a besoin d’eau et d’Aegis pour que les siennes se referment plus vite. Ils nous suivent dans une charrette de l’intendance, et ils ont bien endurĂ©s le voyage.
– Ouf
 les Braves et la DĂ©esse soient louĂ©s pour tout, soupira-t-il de soulagement, ses Ă©paules se dĂ©tendant enfin. Puis-je les voir ? S’ils sont assez en forme pour supporter une visite bien sĂ»r.
Dimitri jeta un regard Ă  Mercedes qui hocha la tĂȘte, puis rĂ©pondit avec un sourire Ă  Alix.
– Bien sĂ»r. Ils ont aussi hĂąte de te voir. »
Il le guida alors lui-mĂȘme jusqu’à la charrette oĂč Ă©tait sa famille, endormie. Le jeune homme pouvait presque entendre le cƓur du jumeau de Rodrigue battre dans sa poitrine, le soulagement et le bonheur de les revoir gravĂ©s sur son visage.
Doucement, le cƓur surement prĂȘt Ă  exploser de les retrouver en vie, Alix grimpa Ă  l’intĂ©rieur, passa la main sur la tĂȘte de son neveu, puis prit la main de son frĂšre.
« Je l’ai senti quand il a pris le coup
 murmura-t-il presque tout seul, s’encrant complĂštement Ă  la main de son jumeau. Je courrais de partout Ă  cause d’impĂ©riaux qui avaient encore tentĂ© de prendre le fort de Robien et les douanes alors, j’étais allĂ© aider LorĂ©a Ă  les repousser. Puis, j’ai senti une douleur en plein ventre et je savais que c’était Rodrigue. Ça allait mieux assez vite aprĂšs mais, je savais qu’il s’était passĂ© quelque chose
 toujours
 il est moi et je suis lui
 ça a toujours Ă©tĂ© comme ça entre nous

– Vous ĂȘtes trĂšs fusionnels tous les deux
 je me souviens que lorsque Rodrigue Ă©tait Ă  la capitale pendant deux ans, il avait fait une crise de colĂšre en mĂȘme temps que toi alors que tu Ă©tais Ă  Fort Egua, souffla Dimitri.
– Ah oui, je m’en souviens de celle-lĂ . Des connards de profiteurs ont tentĂ© de nous forcer Ă  aller massacrer les duscuriens, tout en nous traitant de parents indignes mĂȘme pas capable de venger leur enfant. LĂ , on avoue, on a pĂ©tĂ© une rĂȘne et envoyĂ© tout ce qu’on avait sur le cƓur, marmonna Alix. Des vengeurs et des saintes lames allant purifier des terres maudites
 tu parles, que des profiteurs qui voulaient des mines pour se remplir les poches tout en massacrant les gens mais, qui n’avait pas l’argent pour le faire
 et ses petits roquets pensaient qu’on allait leur faire l’aumĂŽne
 il eut un sourire noir, une dent dĂ©passant un peu dans un air menaçant. Qu’est-ce qu’il ne fallait pas entendre
 je leur ai donnĂ© une engueulade de premiĂšre, un coup de croc et un coup de pied au cul, j’étais dĂ©jĂ  gĂ©nĂ©reux avec eux. Ils sont tous passĂ© Ă  CornĂ©lia d’ailleurs, leur colĂšre vengeresse arrive de maniĂšre trĂšs variable selon leurs intĂ©rĂȘts du moment, Ă©videmment
 ils sont partis la queue entre les jambes et quand Rod est revenu ici, il m’a racontĂ© que Rufus aussi a dĂ» avoir peur pour sa peau vu qu’il l’a chassĂ© direct.
– Les chiens errants n’ont aucune chance face Ă  des loups, c’est comme ça que vous dites dans la famille de mĂ©moire
 se souvient le jeune homme.
– De notre mĂšre et de notre pĂšre
 et ils n’avaient pas tort, c’est des crĂ©tins les chiens, rĂ©pliqua Alix.
– Tu es toujours aussi direct, arriva Ă  rire un peu Dimitri devant son ton et sa maniĂšre de le dire, avant de chuchoter, devant le dire Ă  l’homme devant lui. Alix
 je
 je suis dĂ©solĂ© qu’il soit dans cet Ă©tat
 c’est
 c’est entiĂšrement ma faute
 si je n’avais pas

– Hum ? Il le regarda vraiment dans les yeux en redressant la tĂȘte. Vous ĂȘtes encore vivants tous les trois ?
– Euh
 oui, mĂȘme s’ils vont avoir une longue convalescence tous les deux, alors que moi

– Tu ne penses plus Ă  juste couper la tĂȘte d’Eldegard quitte Ă  tuer tout le monde et toi le premier ? Le coupa-t-il d’un ton un peu blasĂ©.
– Non ! Évidemment ! Mais ça n’empĂȘche pas

– Tu vas reprendre Fhirdiad et nous dĂ©barrasser de cette dĂ©mone de CornĂ©lia que mĂȘme une fosse Ă  latrine ne voudrait pas ? Le coupa-t-il encore avec plus d’insistance.
– Bien sĂ»r aussi, mais

– Et tu vas continuer en Ă©coutant les autres et pas juste ta soif de vengeance ou que toi-mĂȘme ? C’est ça le plan ?
– Aussi, mais

– Alors, ne te met pas martel en tĂȘte. Rod est en vie, FĂ©lix est en vie, tu es en vie, tu as repris tes esprits, tu vas bouter de l’impĂ©rial hors de chez nous, et tu ne vas pas te comporter en connard en faisant juste ce que tu veux sans Ă©couter personnes alors, ça me va. Je laisse Ă  un autre moi qui n’existe pas la peine de penser Ă  ma rĂ©action si quelque chose leur Ă©tait arrivĂ© alors, laisse cette rĂ©flexion Ă  l’autre toi de ce monde aussi. En plus, tu te mets Ă  nouveau Ă  n’écouter personne, si c’est pas FĂ©lix qui te colle une baffe, c’est moi qui le fait pour te ramener Ă  la rĂ©alité  ce que j’aurais dĂ» faire plus souvent Ă  d’autres tiens

– Je
 je comprends ton point de vue mais
 dĂ©clara Dimitri avant d’hĂ©siter, avant d’avouer. Mais je ne suis pas digne de cette confiance

– Et pourquoi donc ? Lui demanda Alix, plantant ses yeux dans les siens, comme pour l’accrocher ici et l’empĂȘcher de partir.
– J’ai
 j’ai encore besoin d’aide
 avec les fantĂŽmes
 ils comptent tous sur moi mais, je suis obligĂ© de m’accrocher Ă  ceux en qui j’ai confiance pour que les fantĂŽmes s’en aillent et arrĂȘtent de m’ordonner de ramener la tĂȘte d’Eldegard
 je n’arrĂȘte pas de les repousser, encore et encore mais, il revienne toujours et je finis toujours par avoir besoin d’aide
 j’ai failli craquer plusieurs fois pendant le combat
 si je n’avais pas eu Areadbhar qui me calmait

– Oui, et y a Ă  peine deux mois en arriĂšre, tu les Ă©coutais tout le temps sans Ă©couter les vivants, ce qui mettait en danger les autres. Tu es toujours Ă  ce stade ?
– Non
 je refuse de leur faire du mal
 ce n’est pas ce que je veux
 je veux juste
 juste que tout le monde se sorte de cette guerre vivant
 mĂȘme si c’est surement un objectif modeste. Mais je ne sais pas si j’en serais capable
 je m’appuie sur tant de monde

– Donc, tu es en progrĂšs alors, tu es sur la bonne voie, c’est le principal. Tu arrives Ă  leur rĂ©sister donc, c’est dĂ©jĂ  un pas dans la bonne direction. MĂȘme deux vu que tu suis ce que toi tu veux plutĂŽt que ce que veulent les morts ou je ne sais quoi qui te tourmente, lui fit remarquer Alix. C’est normal d’avoir besoin d’aide, et quand tu es tout seul avec tes illusions, tu finis au fond du trou. En plus, c’est pas possible de tout faire tout seul. Celui qui fait tout, tout seul ou avec des personnes qui pensent comme lui, il fait juste que des erreurs car personne ne vient lui dire que c’est mal fait. A ton avis, pourquoi la devise de notre pĂšre, c’était « c’est mon boulot de t’empĂȘcher de faire des conneries » ? C’est que quand c’était Clovis, personne n’osait ouvrir la bouche devant lui, jusqu’à ce que Ludovic fasse son coup d’état pour virer son pĂšre. Alors, Ă©videmment que ses proches ont toujours Ă©tĂ© lĂ  pour le limiter s’il allait trop loin, lui le premier. Et pour quelque chose de plus proche, tu crois qu’ils discutent Ionius et Eldegard ? Non, ils ne font que s’écouter parler ou l’écho de leur voix car, ils sont seuls dans le palais et qu’ils sont persuadĂ©s d’avoir la vĂ©ritĂ© ultime, alors que c’est juste la version des faits qui les arrange. C’est pas Hubert qui va dire Ă  son impĂ©ratrice qu’elle fait de la merde, il vĂ©nĂšre plutĂŽt sa merde en disant que c’est un miracle de la DĂ©esse car, son ImpĂ©ratrice est sa DĂ©esse Ă  lui, et ça ose se prĂ©tendre athĂ©e au passage.
– Oui mais, si un jour je rechute et que je me remets Ă  Ă©couter les morts ? Qu’est-ce qui se passera le jour oĂč mĂȘme cette bĂ©quille ne m’empĂȘchera pas de faire le pire ?
– Ce jour-lĂ , on sera Ă  tes cĂŽtĂ©s, en sachant ce que tu as alors, on pourra t’aider plus efficacement, rĂ©pondit-il sans hĂ©siter une seule seconde. Personne ne fait les choses bien en Ă©tant toujours tout seul, surtout dans ta position. Tu ne pourras jamais tout maitriser Ă  la perfection, tu auras toujours des faiblesses que d’autres combleront et toi-mĂȘme, tu combleras les faiblesses de tes compagnons. Je sais que ça vient de quelqu’un qui fait toujours tout Ă  deux ou il se sent mal d’ĂȘtre sĂ©parĂ© de son double car, quarante-huit annĂ©es de vie et neuf mois de grossesse, ça rapproche un peu mais, je travaille toujours mieux avec Rodrigue et avec d’autres personnes de notre fief pour nos conseiller. Le roi Loog lui-mĂȘme Ă©tait trĂšs entourĂ© pour combler ses lacunes. Les vieilles carnes d’Adrestia se plaignaient mĂȘme que Loog n’était pas capable de lire le latin pendant longtemps et qu’il avait besoin d’aide pour le dĂ©crypter, et ça ne l’a pas empĂȘchĂ© de faire de grandes choses. Être isolĂ© ou n’écouter que des personnes qui vont dans ton sens ou celui de leurs intĂ©rĂȘts Ă  elles ne t’aidera pas Dimitri. Tu en apprendras bien plus en Ă©tant entourĂ©s de personnes avec des opinions trĂšs diffĂ©rentes les unes des autres, et surtout des tiennes. En plus, ton Ă©tat s’amĂ©liore, tu arrives mieux Ă  rĂ©sister aux demandes que tu entends, tu le dis toi-mĂȘme. Donc, tu t’es beaucoup amĂ©liorĂ© en trĂšs peu de temps. Tu peux en ĂȘtre fier. Et je suis sĂ»r que Rodrigue et FĂ©lix sont d’accord avec moi, assura-t-il en les montrant tous les deux avec un sourire.
– Oui
 ils le sont, lui rĂ©pondit Dimitri en lui rendant son sourire, un peu rassurĂ© par les mots d’Alix.
Rodrigue se mit Ă  remuer un petit peu, ouvrant Ă  nouveau les yeux aprĂšs avoir dormi une bonne partie de la journĂ©e. MĂȘme dans le flou, son visage s’illumina en voyant son frĂšre, arrivant Ă  hacher malgrĂ© le reste pĂąteux de sommeil sur sa langue.
– Alix
 tu es là

– Oui, content de te revoir aussi
 il serra un peu plus sa main dans la sienne. Ne me refais jamais un coup pareil, d’accord ?
– Je suis dĂ©solĂ© de t’avoir fait peur
 c’est promis, je n’ai plus envie de te quitter
 Tu restes aussi ?
– Bien sĂ»r, on ne se sĂ©parera plus jamais ! Jura-t-il Ă  son tour.
– Comme on se l’était dit

– Hum
 FĂ©lix trembla Ă  son tour sous sa couverture, et entrouvrit ses yeux d’ambre vers les jumeaux. Qu’est-ce

– Bon retour à la maison, lui souhaita son oncle.
– C’était ça le bruit
 marmonna le plus jeune en Ă©mergeant.
– Moi aussi, je suis ravi de te voir rentrer en entier, rĂ©torqua Alix en souriant avec son frĂšre, avant de passer sa main dans ses cheveux. Toi aussi, tu ne me fais plus jamais peur louveteau.
Ils prirent tous le grognement qu’il marmonna comme un oui, Dimitri sentant sa poitrine s’allĂ©ger en voyant la meute enfin rĂ©unie.
*
Rodrigue somnolait dans le lac, de l’eau jusqu’à la poitrine, sentant la magie de leur ancĂȘtre fuser autour d’eux et dans sa blessure. MĂȘme s’il Ă©tait pratiquement guĂ©ri, leur mĂ©decin avait ordonnĂ© qu’il reste dans l’onde toujours pure jusqu’à ce que la plaie ne lui fasse plus mal, surtout qu’il Ă©tait encore trĂšs fatiguĂ©.
« Je vous interdis de reprendre votre travail, jusqu’à ce que nous soyons absolument sĂ»rs que cette blessure ne se rouvrira pas ! Vous avez interdiction de bouger ou d’utiliser la magie jusqu’à nouvel ordre ! S’était Ă©criĂ© Pierrick en le voyant tenter d’aller aider Alix, surtout maintenant que leur principale seconde, la capitaine Estelle Duchesne et son adjudant Bernard Parjean, suivaient l’armĂ©e royale pour mener les troupes fraldariennes aller rĂ©cupĂ©rer la capitale. Au nom de la DĂ©esse et de ses Braves, reposez-vous ! »
Il s’y Ă©tait alors pliĂ©, passant une bonne partie de son temps Ă  dormir. En tout cas, l’eau du lac lui faisait vraiment du bien
 quand il Ă©tait dedans, c’était comme s’il n’avait jamais reçu aucun coup
 c’était frustrant de ne pas pouvoir aider Alix d’ici mais, Pierrick ne le laisserait jamais faire. Au moins, il pouvait rester un peu avec FĂ©lix.
Son fils aussi Ă©tait confinĂ© au lac, dormant la plupart du temps tout comme lui. Ses veines luisaient de magie, tout comme sa marque d’écailles dans son dos, mĂȘme s’il Ă©tait toujours trĂšs fatiguĂ©. Au moins, il ne souffrait pas ici, mĂȘme hors du flot pur, c’était le principal
 Fraldarius mĂȘme le protĂ©geait
 tout comme l’eau
 FĂ©lix avait toujours Ă©tĂ© un vĂ©ritable poisson, nageant trĂšs jeune, toujours dans le lac et capable de rester en apnĂ©e plus que n’importe qui. Son cadet Ă©tait si fier de lui quand il remontait de ses profondeurs avec un artĂ©fact ancien
 mais c’était avant que la TragĂ©die ne lui fasse rejeter aussi son passe-temps favori pour se tourner uniquement vers l’entrainement
 encore plus aprĂšs la rĂ©bellion qu’il avait matĂ© avec Dimitri
 il ne retournait alors dans l’eau que pour conserver son souffle exceptionnel

Quand il ne dormait pas, FĂ©lix Ă©tait dans une sorte de demi-conscience, marmonnant des mots dĂ©pareillĂ©s les uns avec les autres
 souvent, il parlait de Glenn
 dans ses moments-lĂ , Rodrigue chantait toujours pour l’apaiser, comme quand son cadet Ă©tait petit, regrettant d’autant dormir alors que son louveteau devait faire des cauchemars quand lui-mĂȘme sommeillait.
« Ça va aller
 C’est fini mon louveteau
 se souvient-il d’un soir au coin du feu tous ensemble, alors que son cadet s’était rĂ©veillĂ© en sursaut Ă  cause d’un mauvais rĂȘve, le pĂšre l’enlaçant pour le consoler comme il n’aurait surement plus le droit de le faire Ă  prĂ©sent. Le Cheval Mallet ne te fera jamais de mal
 je te protĂ©gerai
 la meute te protĂ©gera
 c’est promis
 un cheval, aussi malĂ©fique soit-il, ne peut rien faire contre une meute de loup tant qu’elle reste unie  »
Il y pensait quand FĂ©lix se remit Ă  s’agiter dans son sommeil, se tordant un peu sur lui-mĂȘme en babillant. Passant sa main dans ses cheveux par instinct, Rodrigue recommença alors Ă  fredonner, la derniĂšre chanson de son pĂšre lui venant Ă  l’esprit et coulant de ses lĂšvres. MĂȘme si Guillaume n’avait pas tenu parole, c’était un des derniers souvenirs qu’il avait de lui, il tenait beaucoup Ă  cette chanson, ce chant de l’armĂ©e pour apaiser des pleurs avant l’angoisse de la sĂ©paration

*
FĂ©lix luttait de toutes ses forces pour se rĂ©veiller
 ou au moins arrĂȘter de rĂȘver de ce moment-là
 il avait tout fait pour l’oublier, ne voulant pas se souvenir de ses deux mois horribles qui avaient fini sur Glenn partant en Duscur avec Nicola
 dĂšs qu’il s’en souvenait, il se sentait mal et Ă©tait en colĂšre contre quelqu’un qui ne pouvait plus rĂ©pondre de ses conneries
 et il devait admettre qu’il ne devrait pas ĂȘtre en colĂšre contre d’autres
 il avait pourtant tout fait pour oublier

Mais non, le jeune homme n’avait rien oublié  au contraire, il se souvenait de tout presque dans les moindres dĂ©tails
 l’annonce au dernier moment de Lambert qu’il se rendrait Ă  Duscur pour nĂ©gocier la paix avec Dimitri
 personne n’était au courant
 personne
 pas mĂȘme son pĂšre et son oncle
 Ă  quel point cela faisait mal
 tout le monde qui se prĂ©cipitait
 tout le monde en colĂšre
 tout le monde effrayé  sa famille Ă©puisĂ©e de devoir rattraper tout ce que Lambert avait mal fait
 les insultes des diplomates qui fusaient quand aucun des fidĂšles du roi n’était lĂ  mais, que les oreilles des enfants entendaient toujours
 Ă  quel point son travail Ă©tait un travail de tĂącheron et ce voyage une folie
 le dĂ©dain de Nicola pour le roi, marmonnant Ă  quel point il faisait honte Ă  son pĂšre le roi Ludovic
 Glenn qui cachait Ă  peine tout le mĂ©pris qu’il avait pour le roi en privĂ©, un roi qui les emmenait dans une mission aussi dangereuse sans demander son avis Ă  personne, ou prendre la moindre prĂ©caution alors que son propre enfant Ă©tait du voyage
 son oncle Ă  deux doigts d’égorger le roi et son grand frĂšre lui-mĂȘme Ă  cause de ses mauvaises dĂ©cisions, Lambert n’écoutant que ceux qui allaient dans son sens, mĂȘme les ennemis de la veille, et Rufus l’encourageant dans cette folie
 personne ne voulait de ce voyage
 Rodrigue de plus en plus Ă©puisĂ© et dĂ©sespĂ©rĂ© de trouver une solution pour empĂȘcher ce voyage jusqu’à ce que le jour fatidique arrive, en charge de tous les aspects techniques et matĂ©riel du voyage, ainsi que le cĂŽtĂ© humain

Mais plus que tout, il avait voulu effacĂ© de sa mĂ©moire un souvenir
 il dormait dans leur chambre, rattrapant sa nuit oĂč il aidait sa famille en leur apportant de quoi manger ou en prenant soin d’eux, les adultes n’ayant plus le temps pour le faire eux-mĂȘmes, quand il entendit quelqu’un entrer. Il alla Ă  la porte, observa par la serrure et vit Alix pratiquement tirer son pĂšre, tremblant et livide, les yeux exorbitĂ©s, s’accrochant Ă  son jumeau comme Ă  sa vie
 quand il vit son oncle regarder que personne n’était lĂ , le petit garçon alla se cacher dans son coffre, ayant encore oubliĂ© de le ranger. Sous le bazar, personne ne le verrait et Alix n’avait pas fait exception. AprĂšs un peu de temps, il en ressortit pour observer dans l’entrebĂąillement de la porte la discussion des jumeaux
  son pĂšre avait tellement de mal Ă  juste parler
 il avait du mal Ă  trouver ses mots et Ă  enchainer deux phrases, se rĂ©pĂ©tait beaucoup et tremblait tellement, n’arrivant Ă  se calmer que parce qu’il Ă©tait avec Alix
 les jumeaux avaient toujours Ă©tĂ© fusionnels
 il parlait de Lambert, Rodrigue avait encore tentĂ© de le convaincre de ne pas emmenĂ© Dimitri Ă  Duscur car c’était trop dangereux mais, en rĂ©ponse, il lui avait vomi des mots horribles :
« MĂȘme si le pire devait arriver, tout ira bien. C’est un garçon intelligent Rodrigue. MĂȘme s’il devait perdre son pĂšre, je sais qu’il deviendrait un homme bon et respectable »
FĂ©lix se souvenait d’avoir bouillonnĂ© de rage en entendant cela, tout comme Alix. Comment Lambert pouvait prĂ©tendre ĂȘtre leur ami pour leur cracher Ă  la figure comme ça ?! Il avait oubliĂ© que Rodrigue et Alix Ă©taient eux-mĂȘmes orphelins ou quoi ?! Eux, ils savaient ce que c’était de perdre son pĂšre et de devoir survivre Ă  une rĂ©gence, pas Lambert ! AprĂšs un mois et demi Ă  tout mettre sur le dos des jumeaux et des Charon en plus ! Lambert avait eu de la chance de ne pas se faire lĂącher par toute la noblesse de l’est ! Personne n’en voulait de ce voyage, les roturiers et ceux qui rĂ©flĂ©chissaient plus de deux secondes les premiers ! Et il lui avait mĂȘme fait promettre de faire son travail de pĂšre Ă  sa place s’il se faisait tuer par sa connerie en plus ! Et sans se rendre compte d’à quel point il l’avait blessĂ© avec ça ! Est-ce qu’il y avait un esprit dans ce corps Ă  la fin ?! Le petit garçon se souvenait d’avoir entendu quelque fois Glenn appeler Lambert un « chien idiot » mais lĂ , il passait dans la catĂ©gorie des chiens errants ! Ce n’était qu’un idiot qui faisait du mal Ă  sa famille ! Il n’avait pas le droit de faire du mal Ă  son pĂšre !
Rodrigue finit par Ă©clater en pleurs en avouant que Lambert lui faisait peur
 pas Ă©tonnant aprĂšs tout ce qu’il lui avait envoyĂ© en pleine figure en continue pendant plus d’un mois, tout le monde suant sang et eau pour que ce voyage ne soit pas la catastrophe qu’il devait ĂȘtre
 mĂȘme maintenant, FĂ©lix Ă©tait obligĂ© d’admettre que ça faisait trop pour un seul homme
 mĂȘme pour un loup

Il Ă©tait alors sorti de sa cachette et avait consolĂ© son pĂšre, se jetant contre lui en disant que ce n’était pas sa faute mais celle de Lambert. C’était lui qui les jetait tous dans la gueule du lion ! Pas son pĂšre ! Il n’avait rien fait de mal ! FĂ©lix se souvenait de ses bras qui l’entouraient, la prĂ©sence de son pĂšre, Ă  quel point il Ă©tait rassurĂ© d’ĂȘtre avec lui, tout comme Rodrigue, se calmant enfin vraiment avec lui

Tout s’enchainait trĂšs vite aprĂšs ça dans son rĂȘve mais, la sensation de dĂ©sespoir restait, le dĂ©gout fort de faire ce que tout le monde savait ĂȘtre une erreur sauf celui ayant le pouvoir de la stopper
 Alix avait Ă©tĂ© Ă  deux doigts de frapper Lambert
 FĂ©lix l’avait fait dans une crise de fureur de voir sa famille aussi mal
 Glenn avait promis d’ĂȘtre chevalier Ă  la maison et plus Ă  la capitale
 le convoi de dĂ©part qui ressemblait Ă  un cortĂšge funĂšbre tellement tout le monde Ă©tait triste et inquiet, l’air lourd et les larmes proches d’exploser chez tous
puis le messager qui s’écroula Ă  leur porte, son pĂšre et lui qui partaient immĂ©diatement pour Fhirdiad, ne retrouvant de Glenn qu’une Ă©pĂ©e et un plastron brisé  le choc d’apprendre qu’il ne reviendrait pas, que personne ne reviendrait, que seul Dimitri Ă©tait revenu
 le chaos qui s’installa dans tous le Royaume
 allant mĂȘme jusqu’à attenter Ă  la vie du prince jusque dans le palais

FĂ©lix se souvient de sa dispute avec son pĂšre, partie du fait que Rodrigue ne pouvait pas rentrer avec lui et devait rester Ă  la capitale pour tenir le Royaume, Rufus ne faisant que jeter plus d’huile sur le feu et rallumer les braises. Avec le recul, il se sentait tellement stupide
 Ă©videmment que c’était plus important d’empĂȘcher Faerghus de brĂ»ler que de rentrer
 en s’en souvenant vraiment, il ne pouvait plus que voir Ă  quel point son pĂšre voulait aussi rentrer Ă  la maison, Ă  quel point il voulait le suivre et retourner faire son deuil dans leur famille
 le jeune homme se sentit encore plus stupide en sachant maintenant d’oĂč venait cette phrase qui l’avait fait dĂ©tester son pĂšre
 le fuyant sans lui laisser le temps de s’expliquer, en rentrant seul dĂšs le lendemain matin sans lui dire au revoir
 refusant de mĂȘme admettre Ă  quel point Rodrigue lui manquait et Ă  quel point FĂ©lix voulait se rĂ©concilier avec lui
 Ă  quel point ça lui faisait mal de ne plus ĂȘtre avec lui, mĂȘme s’il le niait, enfermant tous ses sentiments et ses Ă©motions dans une boite aussi profonde qu’il le pouvait et lui-mĂȘme dans l’entrainement

Cependant, la suite de son rĂȘve ne fut pas ses souvenirs
 il se transforma en vĂ©ritable cauchemar ! Des hommes avec les armes de Rufus cousues sur leur poitrine arrivĂšrent en trombe chez eux, arrĂȘtĂšrent tout le monde, son oncle le premier et leurs principaux soutiens encore en vie, l’attrapĂšrent et le jetĂšrent Ă  part comme un objet. Il reconnut Ă  travers les barreaux le chemin de la capitale, puis on l’envoya dans une famille qu’il ne connaissait mĂȘme pas, qui le forcĂšrent Ă  Ă©crire des ordres d’arrestation envers des personnes qu’il aimait et Ă  servir de serviteur. FĂ©lix rĂ©clama son pĂšre et son oncle, demandant oĂč ils Ă©taient et ce qui se passait mais, il ne reçut en rĂ©ponse que des coups et des repas en moins
 son pĂšre ne l’avait jamais traitĂ© aussi mal, il avait toujours Ă©tĂ© doux, gentil et juste avec lui, mĂȘme quand il faisait des bĂȘtises
 apparemment, il Ă©tait chez eux en attente pour l’envoyer ailleurs quand il serait assez vieux
 et ils se plaignaient aussi qu’il vomisse toujours son repas sans jamais tomber
 Rufus devait vouloir se dĂ©barrasser de lui discrĂštement
 DĂ©esse, qu’est-ce qu’il allait faire Ă  son pĂšre et son oncle ?! OĂč est-ce qu’ils Ă©taient ?!
Il avait Ă©tĂ© forcĂ© d’écrire que Fregn Ă©tait maintenant accusĂ©e d’ĂȘtre une ennemie de l’intĂ©rieur car, elle Ă©tait sreng et avait repris Lambert sur son inconscience qui serait trĂšs mal vue par les siens, disant tout haut ce que tout le monde pensait tout bas de ce voyage
 Rufus voulait sa tĂȘte pour ce « crime » de s’ĂȘtre opposĂ© au roi. Elle avait fui in extremis en Sreng en emmenant Sylvain avec elle, lui aussi accusĂ© de complicitĂ© avec sa mĂšre et d’ĂȘtre un mauvais faerghien Ă  cause de son mĂ©tissage et du fait qu’il ne pensait pas les duscuriens coupables de la TragĂ©die.
Ingrid et sa famille durent renoncer à leurs terres et travailler comme serviteurs pour Rufus, ce dernier leur donnant les tùches les plus ingrates et dangereuses car, son pÚre Francis avait conseillé à Lambert de prendre plus de temps et avait mal fait son travail

Alors que son Ă©tat s’amĂ©liorait quand il Ă©tait parti, Dimitri faisait une rechute et Ă©tait clouĂ© au lit
 la famille qui s’occupait de lui disait que le prince s’était mutilĂ© aprĂšs avoir vu le corps de Dedue dĂ©chiquetĂ© par des proches de Rufus, tous appelant Ă  la vengeance et Ă  brĂ»ler Duscur tout entier, pendant que Dimitri hurlait que les duscuriens Ă©taient innocents et dĂ©lirait Ă  propos de corbeaux humanoĂŻdes
 des rumeurs disaient que son oncle l’avait fait attachĂ© par les bras et les jambes aux montants de son lit, pour l’empĂȘcher de se faire du mal tout seul et d’arrĂȘter la folie de Rufus

Quand on le laissa enfin sortir pour voir sa vraie famille, le jeune garçon pataugea dans le sang
 toutes les rues de Fhirdiad Ă©taient Ă©carlates, les bas des robes et des pantalons couverts de tĂąches rouges et noirs, des rats nageant Ă  l’intĂ©rieur en grignotant la chair en putrĂ©faction qui y flottait
 des chats Ă©taient pendus par le cou aux maisons, les gens disaient que c’était parce que les ducs de Fraldarius les adoraient, leur forteresse en Ă©tant toujours pleine
 toutes les personnes qu’il croisait Ă©taient malades Ă  cause de ça et du manque de nourriture, tout l’argent partant dans la traque aux traitres et aux duscuriens, tous chasser bien plus que les rats par Rufus
 cela rappela Ă  FĂ©lix les histoires de Nicola sur Clovis le Sanglant
 le roi sanguinaire qui massacrait son propre peuple dans des guerres interminables, jetant ses opposants sous la hache du bourreau ou les flammes du bucher, Ă©liminant n’importe qui se mettait sur son chemin jusqu’à ce que le roi Ludovic n’arrĂȘte la folie meurtriĂšre de son pĂšre en le dĂ©trĂŽnant par la force

FĂ©lix se crut dans ces histoires quand il arriva Ă  la place principale de Fhidiad
 c’était un vĂ©ritable charnier
 les corps s’entassaient, laissĂ©s Ă  pourrir lĂ  comme sous Clovis, le roi cruel n’autorisant pas qu’on enterre ses ennemis afin de les mettre plus bas que terre
 la plaque commĂ©morative en leur mĂ©moire faite par Ludovic Ă©tait brisĂ©e, basculĂ©e au sol et servait maintenant d’estrade pour les exĂ©cutions
 son cƓur s’arrĂȘta en voyant le corps d’Alix tomber dans le charnier, trainĂ© par Ingrid et ses frĂšres dont les membres Ă©taient couverts d’infections Ă  cause du sang et des cadavres, sa tĂȘte rejoignant d’autres alignĂ©s sur des piques avec celles d’Estelle et de Bernard, mĂȘme celle de Nicola qu’on avait dĂ©terrĂ© pour ĂȘtre exĂ©cutĂ© avec sa fille et son gendre, ses petites-filles pleurant leur famille dont les corps pourrissaient Ă  l’air libre
 elles Ă©taient si petites ! Puis
 les dĂ©mons servant Rufus trainĂšrent son pĂšre sur l’échafaud
 le forcĂšrent Ă  poser la tĂȘte sur le billot, le bourreau attrapant Moralta volïżœïżœ chez eux pour l’exĂ©cuter avec leur propre hĂ©ritage familial, alors que ses assistants tailladaient ses cheveux pour ne pas gĂȘner le passage de la lame.
« Non ! Non ! Papa ! ArrĂȘtez ! Mon pĂšre n’a rien fait de mal ! Papa ! »
Il ne put s’empĂȘcher d’hurler devant cette injustice, alors que ses tortionnaires le poussaient tout devant, aux premiĂšres loges pour voir son pĂšre se faire couper la tĂȘte. Rodrigue n’était pas coupable ! C’était Lambert qui avait dĂ©cidĂ© de les emmener Ă  Duscur ! C’était lui qui avait tout organisĂ© sans en parler Ă  personne ! C’était lui qui s’était prĂ©cipitĂ© partout et les avait emmenĂ©s dans ce piĂšge Ă  rat ! Son pĂšre avait tout fait pour l’en empĂȘcher mais, le chien errant qui leur servait de roi n’avait rien Ă©couté ! Il n’avait Ă©coutĂ© que Rufus qui le poussait dans ses pires dĂ©cisions et dĂ©fauts ! C’était lui qu’on devrait exĂ©cuter ! Pas ceux qui avaient tout fait pour empĂȘcher ce dĂ©sastre d’arriver ! Papa !
Rodrigue l’entendit, sa tĂȘte se relevant d’un coup du billot. Ses yeux s’exorbitĂšrent en le voyant, l’inquiĂ©tude et la peur se mĂ©langeant Ă  l’intĂ©rieur alors qu’il lui hurlait, les assistants du bourreau essayant tant bien que mal de lui remettre la tĂȘte sur le billot.
« Félix ! Fuit ! »
Non ! Pas sans lui ! Pas sans toi ! Tout mais pas ĂȘtre sans toi comme ça ! Tout mais pas ĂȘtre sans eux ! Tout mais pas ĂȘtre seul sans sa famille ! Il ne voulait pas que son pĂšre meure ! Pas quand les assistants du bourreau le forçaient Ă  remettre la tĂȘte sur le billot pour se faire exĂ©cuter ! Pas quand l’assassin encagoulĂ© levait
 papa !
Le bourreau abaissa Moralta quand d’un coup, un vague emporta tout, balayant tout ce qui l’entourait, autant les gens, les corps, le sang que la mort. FĂ©lix sentit alors quelque chose l’entourer de sa chaleur, doux avec lui
 c’était agrĂ©able
 il s’y sentait bien
 cela lui rappelait de bons souvenirs
 des instants tout doux aprĂšs un cauchemar, oĂč son pĂšre le prenait dans ses bras et sa cape pour le rassurer
 il le nierait aujourd’hui mais, Glenn le taquinait souvent sur le fait qu’il Ă©tait collĂ© Ă  leur pĂšre, surtout quand il Ă©tait petit
 Alix aurait mĂȘme dit qu’il allait finir coller Ă  l’épaule de Rodrigue, tellement il aimait faire la sieste dans ses bras quand il Ă©tait bĂ©bé 
Comme quand il Ă©tait petit, des notes le bercĂšrent, tout douces, leur fil tissant une chanson que les jumeaux fredonnaient tout le temps, venue de leur pĂšre

« Je pars ce matin avec les chants des laudes,
Mes pieds vont d’un cĂŽtĂ©,
Mais mon cƓur reste figĂ©
Il reste ici dans vos petites mains chaudes
Ne pleurez pas mes tous petits,
Je reviendrais sans ĂȘtre meurtri
Je pars Ă  reculons, je pars sans jamais vous oublier
Je pars en ce jour en pensant toujours Ă  vous,
À chaque pas sur ce long chemin, je l’avoue,
Je vous voie derriùre moi et souhaite m’en retourner.
Ne pleurez pas mes tous petits,
Je reviendrais sans ĂȘtre meurtri
Je vous promets de revenir un soir,
Je reviendrais Ă  vous un jour,
Cette promesse de velours
Je ne la laisserais jamais choir,
Ne pleurez pas mes tous petits,
Je reviendrais sans ĂȘtre meurtri
Et quand nous nous serons retrouvés
Ce sera pour ne plus jamais se lùcher. »
Comme Ă  l’époque, le chant le tira loin du cauchemar, rassurĂ© par la prĂ©sence de son pĂšre Ă  ses cĂŽtĂ©s
 comme avant que la TragĂ©die ne fiche tout en l’air
 comme toujours s’il Ă©tait honnĂȘte
 ça faisait du bien

Rodrigue tint la derniĂšre note aussi longtemps qu’il put, la laissant former un fil assez long pour lier la personne qui partait Ă  ceux Ă  qui il promettait de revenir. Guillaume n’était pas revenu mais, il restait avec eux malgrĂ© tout d’une certaine maniĂšre, dans le peu de souvenir que les jumeaux avaient de lui, tout comme dans ceux de tous ceux qu’ils avaient perdu
 ils les entendaient presque dĂšs que les loups hurlaient Ă  la lune

FĂ©lix se calma au fil des notes, son visage devenant plus serein, recroquevillĂ© dans l’eau claire, sa main sur Aegis entre eux. Ses yeux d’ambre s’entrouvrirent, flottant entre la conscience et l’inconscience. Il n’avait pas eu la chance de connaitre FĂ©licia et de le constater par lui-mĂȘme mais, FĂ©lix avait vraiment les yeux de sa mĂšre
 Ă  part la forme de ses derniers, en amande, semblable Ă  ceux des chats et aux siens, il avait tout hĂ©ritĂ© d’elle

« Ça va aller
 c’est passé 
– Hum
 C’est frustrant
 marmonna-t-il en se rĂ©veillant, se rattrapant avant d’ĂȘtre vraiment honnĂȘte avec son pĂšre. D’ĂȘtre bloquĂ© ici

– Il faut que tu te remettes, et le lac semble ĂȘtre le meilleur remĂšde. Aucun de nous deux est en Ă©tat pour se battre de toute façon

– Mouais
 il fit une grimace alors qu’il tentait de bouger. C’est trop lent quand mĂȘme.
– Fait attention Ă  toi
 lui conseilla Rodrigue en le stabilisant d’une main. Et tu seras bientĂŽt sur pied, ton organisme semble se rĂ©gĂ©nĂ©rer bien plus vite dans le lac que quand nous Ă©tions Ă  Garreg Mach.
– Hum  »
FĂ©lix ne dit rien de plus, dĂ©tournant le regard. Rodrigue n’insista pas, ne voulant pas trop le pousser de peur que son fils retourne tout de suite dans sa carapace couverte d’épines. Ils s’étaient dit qu’ils se parleraient mais, cela ne s’était toujours pas fait, tout deux trop fatiguĂ©s pour le faire, surtout autour de
 tout ça
 le pĂšre se rappuya alors sur la pierre, laissant l’eau bĂ©nie par leur ancĂȘtre faire son effet, savourant sa caresse chassant la douleur
 s’il pouvait au moins rester avec son enfant et pouvoir lui parler un peu, cela lui irait

« J’entendais tout
 quand je dormais
 finit par dire FĂ©lix, regardant au loin pour ĂȘtre sĂ»r de ne pas rencontrer les yeux de son pĂšre.
Le jeune homme ne sut pas pourquoi il avait parlé  son pĂšre se taisait et le silence lui allait trĂšs bien
 mais en mĂȘme temps, les mots que Rodrigue avait dit Ă  Dimitri tournaient encore dans sa tĂȘte
 des mots flous mais, qu’il n’avait pas pu nier
 et c’était dur de nier ce qu’il avait tout fait Ă©touffĂ© pendant des annĂ©es maintenant
 pas aprĂšs avoir Ă©tĂ© si prĂšs de donner sa vie pour sauver celle de son pĂšre

Rodrigue le regarda, attentif, comme s’il s’était prĂ©parĂ© Ă  ce qu’il lui dise cela ce qui Ă©tait surement le cas, trop patient comme toujours.
– Tu as toujours tout entendu quand tu Ă©tais inconscient.
– Hum
 ce que tu as dit Dimitri
 Ă  propos de Guillaume et du roi Ludovic, c’était vrai ou juste pour le consoler ?
FĂ©lix dĂ©tourna encore plus le regard, une pointe de remord poignardant son cƓur. Évidemment, il savait que son pĂšre ne mentirait pas sur un sujet pareil, encore moins sur Guillaume

– Oui, tout Ă©tait vrai, je ne lui ai pas menti, rĂ©pondit-il sans se fĂącher, et il Ă©tait encore une fois beaucoup trop calme.
Sans trop savoir pourquoi, FĂ©lix voulait presque qu’il s’énerve
 il n’en avait pas envie, il n’avait pas l’énergie pour se disputer et  il voulait savoir mais, ce serait plus simple s’ils se disputaient vraiment
 juste des mots qui font mal des deux cĂŽtĂ©s et le silence aprĂšs
 ce serait tellement plus simple
 mais bon, maintenant qu’il avait commencĂ©, il ne pouvait plus reculer
 et dans le fond, il voulait arriver Ă  comprendre
 Ă  comprendre ce qui s’était passĂ© dans la tĂȘte de Rodrigue ce jour-là

– Tu n’en avais jamais parlĂ© avant
 Alix aussi
 et Nicola encore moins

– Ce n’est pas le souvenir que j’aime le plus raconter. C’est le plus clair que j’ai Ă  propos de mon pĂšre mais, c’est aussi celui qui me fait le plus mal alors, je prĂ©fĂšre me concentrer sur les bons. Ils sont bien plus flous et la plupart sont des histoires qu’on nous a racontĂ©es aprĂšs mais, ils sont bien plus rĂ©confortants
 ce sont des souvenirs oĂč Guillaume est vivant, pas dans une boite
 les bons souvenirs se perdent facilement alors que les mauvais sont les plus difficiles Ă  oublier, mĂȘme si on le veut
 alors je prĂ©fĂšre ne pas en parler, comme Alix

Rodrigue tenta de le regarder dans les yeux quand il parlait mais, FĂ©lix fuit son regard
 il savait dĂ©jĂ  trop bien Ă  quel point ce qu’il racontait Ă©tait vrai
 et il n’était pas sĂ»r de pouvoir se dĂ©fendre ou mordre s’il le regardait dans les yeux
 il verrait trop toutes les Ă©motions de son pĂšre Ă  nu

– Alors tu as gobĂ© ce qu’on t’a dit et tu ne l’as jamais remis en question
 pourquoi tu es obsĂ©dĂ© par la chevalerie alors qu’elle a tuĂ© ton pĂšre avant mĂȘme de tuer Glenn ?!
– J’avais six ans Ă  ce moment-lĂ  FĂ©lix, et on n’avait que ça pour expliquer et comprendre pourquoi notre pĂšre Ă©tait parti avec Alix, lui rappela-t-il d’un ton un peu plus sĂ©vĂšre mais, toujours calme. Je ne savais mĂȘme pas ce qu’était d’affronter la mort et Ă  quel point elle faisait mal
 quand on a grandi, on a mieux compris pourquoi il a fait ça, ce qui s’était passĂ© ce jour-lĂ  et pourquoi Ludovic avait dit ça
 et voir comment se comportaient certains chevaliers pendant notre enfance nous a aussi bien ramenĂ©s Ă  la rĂ©alitĂ©. On a rencontrĂ© bien plus de chevaliers de titre prĂȘts Ă  tout pour Ă©pouser la veuve et tuer l’orphelin afin de rĂ©cupĂ©rer leurs terres, qu’à les dĂ©fendre, mais cela restait toujours un idĂ©al Ă  atteindre d’aider les autres, c’était mĂȘme des qualitĂ©s qu’on retrouvait plus chez des personnes qui ne l’étaient pas. Tu n’as jamais connu ta grand-mĂšre AliĂ©nor mais, c’était une vĂ©ritable louve et une duchesse exceptionnelle, et Nicola aussi Ă©tait un vĂ©ritable chevalier alors qu’il a toujours refusĂ© d’ĂȘtre adoubĂ©, il ne voulait pas servir le roi aprĂšs ce qui s’était passĂ© avec Clovis, il a toujours Ă©tĂ© l’ami de Guillaume et de notre famille
 mĂȘme si on Ă©tait toujours tristes et qu’on aurait prĂ©fĂ©rĂ© mille fois avoir un pĂšre, on a gardĂ© cette phrase avec nous Alix et moi car, elle rĂ©sumait l’acte de Guillaume, mĂȘme si on sait que ses derniers mots Ă©taient qu’il ne voulait pas mourir, et aprĂšs autant de temps Ă  s’accrocher Ă  elle comme Ă  une canne pour continuer Ă  marcher malgrĂ© la peine, elle fait partie de nous. On ne pourra surement jamais s’en dĂ©barrasser tellement elle est ancrĂ©e.
– C’est pour ça que tu l’as dit pour Glenn ? Devina FĂ©lix, bien obligĂ© de le reconnaitre.
– Oui
 avoua-t-il, FĂ©lix voyant son pĂšre chercher son chapelet sur son bras mais, qu’il n’avait pas pour une fois, de peur que l’eau n’endommage le bois dĂ©jĂ  presque aussi vieux que lui. Ça
 ça faisait si mal
 j’avais l’impression que c’était la mort de Guillaume qui recommençait mais en bien pire
 Glenn
 Glenn n’était plus là
 il Ă©tait mort lĂ -bas alors qu’aucun d’entre nous ne voulait de ce voyage
 hein
 je ne sais pas si tu t’en souviens mais Ă  ce moment-lĂ , Glenn en Ă©tait arrivĂ© Ă  dĂ©tester Lambert
 il lui en voulait d’en faire qu’à sa tĂȘte sans demander l’avis de personne, de s’obstiner dans l’erreur alors que tout Faerghus lui hurlait que c’était une mauvaise idĂ©e sauf les futurs complices de CornĂ©lia et de l’Empire, et il lui en voulait encore pour Arundel
 il ne lui a jamais pardonnĂ© d’avoir laissĂ© ce monstre entrer Ă  la cour sans surveillance pour
 pour une raison un peu trop longue Ă  expliquer maintenant
 et d’avoir mis autant de temps Ă  le chasser alors qu’il a failli te tuer avec ses brĂ»lures maudites
 mais il a insistĂ© pour y aller
 Ă  cause du Kyphonis Corpus, un membre de notre famille Ă©tait obligĂ© de suivre le roi pour le protĂ©ger sinon, on aurait Ă©tĂ© accusĂ© de haute trahison
 j’y serais allĂ© Ă  sa place, et Alix aussi s’était proposĂ© mais, il n’a jamais voulu nous laisser sa place
 ça aurait Ă©tĂ© Ă©trange que ce ne soit pas lui qui protĂ©geait le roi alors qu’il Ă©tait majeur, et que nous devions gĂ©rer le Royaume en l’absence de Lambert avec Rufus

– A sa place  » le corrigea FĂ©lix, sachant Ă  quel point Rufus avait abusĂ© de sa position pour que Rodrigue fasse tout son travail Ă  sa place, pendant qu’il allait boire et courir les jupons en hurlant que les jumeaux mĂ©riteraient de se faire exĂ©cuter.
« C’est la version officielle qu’on devait rĂ©gner avec lui. Glenn se doutait que cela serait difficile, et que le voyage Ă©tait trĂšs dangereux alors, il a refusĂ© qu’on se sĂ©pare
 il savait que nous fonctionnions toujours mieux ensemble
 et cela aurait pu nous retomber dessus si quelque chose arrivait Ă  Lambert et pas Ă  nous
 alors on a cĂ©dé  et quand il n’est pas revenu
 c’était un de mes pires cauchemars qui recommençait
 je
 sa voix se brisa en mille morceaux, autant de mauvais souvenirs remontant Ă  la surface. Je ne pensais pas que j’enterrerais mon propre enfant un jour
 et que je n’aurais rien Ă  enterrer
 je
 je n’arrivais pas Ă  m’enlever tout ce qui avait pu arriver Ă  son corps de la tĂȘte 

Sans savoir trop pourquoi Ă  part qu’il dĂ©testait le voir aussi brisĂ©, FĂ©lix tira sa main hors de la distance qu’il gardait toujours avec Rodrigue depuis leur dispute, et attrapa son manteau du bout des doigts
 DĂ©esse, depuis combien de temps il n’avait pas fait ça ? Il se comportait Ă  nouveau comme un enfant qui se cachait dans la cape de son pĂšre ! Mais ça semblait tellement calmer Rodrigue
 un simple contact
 il Ă©tait dĂ©jĂ  foutu aprĂšs tout ça Ă  ce sujet alors, un peu plus ou un peu moins

– Les seules choses qui arrivaient Ă  repousser tout cela, c’était la surcharge de travail qui m’empĂȘchait de penser Ă  autre chose
 le chaos Ă©tait de partout et Rufus criait dĂ©jĂ  qu’il fallait venger nos morts en exterminant les duscuriens, je devais tout faire pour l’arrĂȘter et faire en sorte que le Royaume tourne encore, mĂȘme si une grande partie de sa tĂȘte Ă©tait morte
 cette phrase pour me convaincre moi-mĂȘme que Glenn n’était pas mort pour rien
 elle m’avait dĂ©jĂ  tenu entier Ă  l’époque, je m’y suis accrochĂ© Ă  nouveau
 ça faisait moins mal que de penser aux charognards des montagnes, et que Glenn devait regretter d’ĂȘtre mort pour un homme qu’il mĂ©prisait de tout son ĂȘtre
 et surtout, il y avait toi

– Moi
 ?
Son pÚre arriva à sourire dans une expression mélancolique.
– Bien sĂ»r
 tu Ă©tais lĂ , avec moi, et ça me donnait de la force pour continuer Ă  me lever tous les jours sans m’écrouler, alors que j’avais l’impression que le monde s'effondrait encore une fois
 tu as toujours Ă©tĂ© aussi tenace que ta mĂšre, qui a toujours Ă©tĂ© beaucoup plus acharnĂ©e que moi », de l’affection dĂ©borda de son visage quand il Ă©voqua FĂ©licia. « Je ne pense pas que j’aurais eu la force comme elle de dire Ă  mon cƓur malade de la boucler car, elle n’avait pas le temps de faire une crise cardiaque alors que des personnes avec une longue vie devant eux Ă©taient en danger. Elle Ă©tait si rĂ©siliente, mĂȘme si c’était aussi trĂšs imprudent de sa part, reconnut-il. Mais oui, j’arrivais Ă  me lever car, tu Ă©tais lĂ  et que tu avais besoin de moi
 Rufus aurait Ă©tĂ© seul, on aurait fini avec un encore plus gros bain de sang que celui qui a vraiment eu lieu
 j’étais mort de peur Ă  l’idĂ©e que le Royaume s’effondre et que tu n’es plus nulle part oĂč aller, que tu sois en danger
 et dans le fond de la tĂȘte, j’avais peur que le rĂšgne de Clovis le Sanglant recommence
 je ne voulais pas que tu vives le mĂȘme cauchemar Ă©veillĂ© que tes grands-parents qui ont dĂ» survivre Ă  son rĂšgne
 mon pĂšre a dĂ©jĂ  failli mourir des dizaines de fois Ă  cause d’ambitieux qui voulaient nos terres, dont plusieurs Ă©taient envoyĂ©s par le roi
 je savais que certains « vengeurs » projetaient de t’enlever pour me forcer Ă  accepter de les aider Ă  faire encore plus de morts inutiles
 je ne faisais confiance Ă  personne Ă  la capitale, sauf Ă  des fidĂšles de toujours quand il s’agissait de toi
 et quand ce comploteur a essayĂ© de tuer Dimitri et que tu as failli prendre le coup Ă  sa place

Il ravala ses mots, n’arrivant pas Ă  les prononcer, et secoua la tĂȘte pour en chasser la scĂšne de ce jour. FĂ©lix serra un peu plus son manteau dans ses mains, Rodrigue le remerciant d’un regard avant de continuer.
– Le monde s’effondrait encore
 j’ai cru que j’allais devenir fou tellement j’ai eu peur de te perdre aussi ! Je ne pensais plus qu’à t’éloigner de Fhirdiad qui s’était transformĂ© en coupe-gorge, et de te renvoyer Ă  la maison pour que tu sois en sĂ©curitĂ©, pour qu’Alix te protĂšge mieux que je ne le faisais ici. J’aurais pu, j’aurais aussi envoyĂ© Dimitri Ă  Egua mais, sa seule prĂ©sence permettait de garder un semblant de calme Ă  la capitale
 mais j’étais tellement pressĂ© de te mettre en sĂ©curitĂ© que je n’ai mĂȘme pas pris le temps de t’expliquer correctement
 ni pourquoi je ne pouvais pas rentrer avec toi pour enterrer Glenn
 je le voulais et je sentais que tu l’avais devinĂ© mais, je ne pouvais pas quitter la capitale alors que la TragĂ©die avait tout laissĂ© dans le chaos
 je ne voulais pas te dire cette phrase mais, j’étais tellement fatiguĂ© et inquiet
 je n’ai pas fait exprĂšs
 et j’ai encore plus tout foutu en l’air aprĂšs en niant
 et je n’ai mĂȘme pas pu prendre le temps de te rejoindre pour m’expliquer quand tu es parti, tous les problĂšmes Ă  rĂ©gler Ă  la capitale me tombait dessus les uns aprĂšs les autres
 et aprĂšs, j’avais l’impression de tout ruiner encore plus si j’en reparlais quand je te voyais
 je ne voulais pas te bousculer
 et Alix a essayĂ© mais, il se doutait que rajouter un troisiĂšme parti ne ferait qu’empirer les choses, et je ne voulais pas ruiner en plus ta relation avec lui

– 
 faut dire
 je ne t’ai pas rendu la vie facile non plus
 finit par admettre FĂ©lix. Je te fuyais tout le temps
 et tu n’es pas le seul Ă  devoir t’excuser
 je

Le jeune homme se tut, dĂ©tournant encore plus le regard de son pĂšre
 pourquoi s’était aussi simple pour Rodrigue et aussi dur pour lui ?! ça aussi, il le tenait de FĂ©licia ?! MĂȘme pas en plus ! Elle, elle Ă©tait honnĂȘte tout le temps ! C’était tellement frustrant !
Il resserra un peu son Ă©treinte sur le bout de tissu qu’il tenait, cherchant peut-ĂȘtre un peu de son courage, puis finit par relever la tĂȘte pour enfin le regarder dans les yeux. Il n’y vit que de la patience et de l’espoir alors, il continua, bien que trop timidement Ă  son gout.
– Je
 je n’aurais pas
 c’était mal
 j’ai
 il avala une pique pour lui-mĂȘme avant de finir par y arriver. Je suis dĂ©solĂ© de t’avoir frappé  c’était mal et je n’aurais pas dû  je suis aussi dĂ©solĂ© de t’avoir ignoré  j’ai dĂ» te faire beaucoup de mal

– C’est vrai que ce coup Ă©tait le plus douloureux que j’ai reçu de ma vie entiĂšre, admit-il avant d’ajouter, mĂȘme si sur l’instant, je m’inquiĂ©tais surtout de savoir si ce n’était pas les os de tes doigts qui avaient craquĂ©, je n’avais pas pu vĂ©rifier moi-mĂȘme vu que tu t’étais enfui. J’ai mĂȘme envoyĂ© une lettre Ă  Alix exprĂšs pour lui demander si ta main allait bien, mĂȘme si je savais que c’était ma joue qui avait craquĂ© Ă  ce moment-lĂ .
– Car tu t’en fais toujours pour les autres et pas pour toi ! Mordit un peu FĂ©lix. Tu es incurable ! Tu pourrais ĂȘtre mort, tant que c’est toi et pas les autres, ça te va ! ça doit ĂȘtre dur pour Alix ! C’est toujours pareil avec toi ! On peut te faire le pire, tu finis presque toujours par pardonner
 sauf quand l’autre dĂ©passe vraiment les bornes
 comme si je ne l’avais pas fait en te frappant et en t’ignorant tout ce temps

– Tu serais surement Ă©tonnĂ© de savoir Ă  qui j’en veux le plus
 glissa-t-il, les yeux dans le vague avant de le regarder Ă  nouveau. Et Ă  t’entendre, on dirait que tu prĂ©fĂ©rerais que je sois en colĂšre, lui fit remarquer Rodrigue, encore trop patient malgrĂ© tout ce qu’il venait de lui dire.
– Hum
 un peu
 ce serait plus simple si tu Ă©tais en colĂšre
 admit-il Ă  moitiĂ©. MĂȘme si
 grrr
 pourquoi c’est aussi dur Ă  dire

– Si tu as besoin de temps

– Encore ce que je te disais ! Tu es trop patient ! MĂȘme si je n’ai pas envie de me disputer avec toi ! ça te va ça ? De toutes façons, c’est grillĂ© vu Ă  quel point je me suis acharnĂ© pour ne pas te perdre
 marmonna le jeune homme du bout des lĂšvres, ne regardant plus son pĂšre.
Il sentit alors une main timide caressé ses cheveux, alors que la voix de Rodrigue lui assurait.
– Moi non plus, je n’ai pas envie de me disputer avec toi
 je n’en ai jamais eu envie, et c’est surement pour cela que je te pardonne aussi vite
 tu m’as tellement manquĂ© pendant toutes ses annĂ©es
 je ne veux plus te perdes, encore moins aprĂšs une peur pareille
 je sais que rien ne sera plus jamais comme avant mais, j’aimerais vraiment pouvoir te reparler, si tu veux bien me faire entrer Ă  nouveau dans ta vie, bien sĂ»r

– Hum
 toi aussi, tu m’as manqué  ne te jette plus jamais sous un poignard alors
 ne me fait plus jamais peur comme ça

– Je te le promet
 et merci
 lui sourit à nouveau son pùre, lisant entre les lignes.
FĂ©lix ne sut pas vraiment pourquoi ou peut-ĂȘtre le niait-il encore malgrĂ© tout, trop embourbĂ© dans son habitude de le faire mais, il se sentit plus lĂ©ger d’un coup
 bien plus qu’il ne l’avait Ă©tĂ© pendant des annĂ©es
 comme si le lac venait d’arracher un poids qui s’accrochait Ă  son cƓur, pour l’emmener trĂšs loin et l’enfouir dans la vase
 ça faisait du bien

Alors qu’il se rendormait encore, le jeune homme sentit un peu mieux la magie de son ancĂȘtre en lui, colmatant toutes les veines qui avaient explosĂ© sous l’effort
 elles changeaient un peu
 comme quand sa marque d’écaille Ă©tait apparue dans son dos
 surement le contrecoup de la magie de Fraldarius
 les miracles marquaient toujours ceux qui les recevaient
 il sentait une Ă©nergie trĂšs forte en lui, parcourant ses jambes et ses poumons de toutes part mais, il n’avait pas peur
 il n’avait plus peur de Fraldarius depuis des annĂ©es
 et mĂȘme si quelque chose se passait, Rodrigue veillait sur lui, comme il n’avait jamais arrĂȘtĂ© de le faire
 il ne lui arriverait rien

(suite)
#attention SPOILER dans les tags !#Ă©criture de curieuse#fe3h#route cf + divergente canon#plus ou moins#lĂ  c'est la voie dorĂ©e de cette univers#pour les Braves qui apparaissent dans ce chapitre ils ne parlent pas tous français de la mĂȘme maniĂšre...#je suis plutĂŽt du genre Ă  me dire qu'ils apprennent Ă  parler la langue de l'Ă©poque en Ă©coutant ce qui se passe autour d'eux#histoire de comprendre ce qui se passe Ă  cette Ă©poque#donc pour la comprĂ©hension orale c'est parfait mais pour le parler eux-mĂȘmes c'est une autre histoire (pas beaucoup d'aide pour discuter)#alors leur maitrise du parler est alĂ©atoire -gros spoiler en approche ! - :#Loquax est celui qui parle le mieux car c'est sa spĂ©cialitĂ© de parler aux autres et de se faire comprendre de tous qu'importe l'espĂšce#Simplex est le deuxiĂšme qui parle le mieux mĂȘme si c'est difficile. J'ai essayĂ© de calquer la maniĂšre de parler d'un latin...#et penser Ă  ce qui pourrait les bloquer en parlant français vu que la construction des phrases est diffĂ©rentes#le latin est une langue faite pour l'oral alors c'est l'oral qui est calquĂ© sur l'Ă©crit- lĂ  oĂč en français c'est le contraire#d'oĂč le fait que ses phrases soient hachĂ©s et certaines expressions sont des calques latins -comme 'mon sens' 'j'ai l'impression'#*pour 'j'ai l'impression' des mots de latin qui reviennent et les sonoritĂ©s -comme le V qui est confondu avec le U a ce moment-lĂ #Pertinax et Laeta comprennent sans parler d'oĂč le fait qu'ils disent presque rien en français ou trĂšs mal#et ils parlent plus par expressions faciales#sauf quand ils doivent vraiment se faire comprendre comme avec Pertinax#et c'est aussi peut-ĂȘtre un peu plus classe vu que je lui fait dire que Dimitri crache sur ce qu'ont fait ses descendants#vive les dicos de latin ça sert toujours ! -par contre je sais pas si ça passe Ă  google trad je sais pas ce que ça vaut ce truc en latin-#petite vĂ©rif'... mouais pas fameux... au moins vous ĂȘtes dans le mĂȘme Ă©tat que Dimitri pour comprendre ce qu'ils disent...#j'espĂšre juste que j'ai pas massacrĂ© le latin vu que je traduis un peu du latin vers le français mais presque jamais l'inverse#en tout cas j'espĂšre que ça vous aura plu ! merci encore !
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echo-s-land · 9 months
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Honestly, there are a lot of English songs I love, of course.
But it's different when a song actually resonate with you AND is in your native language
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dixvinsblog · 11 months
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https://ledixvins.blog/2023/05/13/comme-ils-disent-jean-paul-clair-31/
Circulation perturbĂ©e devant les toilettes de la gare, suite Ă  une manifestation de ” sans papiers “. **** Le principal du collĂšge souffre d’un refroidissement qu’il a contractĂ© lors de la journĂ©e porte ouverte. **** On a notĂ© dans l’assistance la prĂ©sence de Mademoiselle Bard Annie, la cĂ©lĂšbre crĂ©atrice du soutien-gorge ” Annie Bard ” . Elle Ă©tait accompagnĂ©e de Monsieur Adam , l’inventeur

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ekman · 1 month
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Moi, la guerre, je l’ai faite, figurez-vous. Oui, on ne dirait pas en me voyant. Cet air de s’en foutre que j’affiche toujours du coin de mon Ɠil bleu, les gens se disent en le dĂ©couvrant que je dois ĂȘtre un fieffĂ© malin, peut-ĂȘtre mĂȘme un salaud, un abuseur, allez savoir.
Moi, je les emmerde tous. J’ai pas survĂ©cu Ă  la mitraille, Ă  la boue, aux Boches et aux rats pour subir leur sale gueule et baisser les yeux. Je les emmerde, je vous dis. Et dans des proportions que vous ne soupçonnez pas. Pas l’un d’eux ne trouvera grĂące Ă  mes yeux. Ni le bourgeois replet parti prier son Juif repenti Ă  l’église le dimanche, ni le tchĂ©kiste restĂ© Ă  encenser son grand Staline dans une rĂ©union de quartier. Les deux me font chier – et savez-vous pourquoi j’entretiens Ă  leur endroit une haine parfaitement Ă©galitaire ? Mais parce qu’ils sont jumeaux, sortis du mĂȘme ventre flasque de la RĂ©volution, de la mĂȘme fente puante, matrice qui dĂ©gueule son trop plein d’humanitĂ© fĂ©roce, foetus aux dents acĂ©rĂ©es, dĂ©voreurs de mamelle ! Boivent autant de sang que de lait, ces monstres absurdes. Des vraies dĂ©gueulasseries biologiques conçues pour anĂ©antir le monde beau et sauvage qui ne les a pas vu venir.
Ces affreux-lĂ , j’en ai croisĂ© sur le front. Jamais en premiĂšre ligne, trop couards pour ça. Toujours en retrait, juste ce qu’il faut. Se chiant dessus Ă  la premiĂšre dĂ©flagration, mĂȘme lointaine, mĂȘme tĂ©nue. TerrorisĂ©s Ă  l’idĂ©e d’une baĂŻonnette boche s’enfonçant dans leur sale bide tout gonflĂ© de haricots mal cuits et de gaz diaboliques. Le rouge et le calotin unis dans la mĂȘme pĂ©toche minable, incapables de transcender leur peur de mammifĂšre absurde, condamnĂ©s Ă  baisser la tĂȘte, Ă  lever les bras, Ă  Ă©carter leurs miches poisseuses de merde honteuse. Ah ils puaient ces deux-lĂ , faut me croire. Dans les abris, on les laissait pas rentrer ces ordures. “Allez les gars, soyez pas salauds, allez. Faites une place... Je boirais bien la moitiĂ© d’un quart de soupe... Allez
” Des cafards, des magouilleurs, arrangeurs, tricoteurs. Des enculĂ©s de frais. “Va chier avec ton quart, sale rat !”, que je leur gueulais. “Quand il fallait monter l’échelle tout Ă  l’heure, t’étais oĂč, hein, mon salaud ?” GĂ©nĂ©ralement, ils baissaient la tĂȘte ou mieux, ils se barraient. Partaient pleurnicher dans l’abri d’à-cĂŽtĂ©. Mendigoter un quignon ou une tige Ă  de bonnes Ăąmes qui ne les avaient pas vu s’affaler au signal de l’assaut. Les mĂȘmes tous les deux ! Le rouge et le calotin. Tout pareillement conjoints dans la terreur, taillĂ©s pour survivre Ă  tout, coĂ»te que coĂ»te, dussent-ils se faire cracher Ă  la gueule pour l’éternitĂ© des temps, se faire maudir par les agonisants, ceux dont la tripe s’étalait tout autour et qui mettaient pourtant tant de temps Ă  crever ! J’aurais jamais assez de toute ma vie pour les maudire, ces fils de salaud, ces petits rongeurs sans honneur, sans grandeur, sans rien !
Et allez ! Que croyez-vous ? Qu’on n’avait pas peur nous autres ? Qu’on ne pleurait pas en claquant des dents au milieu des Ă©clairs qui hurlaient la mort ? Que l’on se prenait pour des CroisĂ©s ou pour des Jean-sans-Peur ? Tu parles ! Dans toute cette apocalypse, nous n’étions plus rien ! Et c’est bien Ă  cause de cela qu’on se redressait et qu’on y allait. Parce que je vais vous dire, moi, l’idĂ©e de crever recroquevillĂ© comme un cafard, ça m’a toujours Ă©tĂ© insupportable. Si je dois y passer, ce sera debout, nom de Dieu. À ma gauche, j’avais Lepault Gaston, un garçon gentil comme tout qui voulait entrer dans la banque. À ma droite, j’avais Lefeuvre Martial, fils de paysan, au travail depuis ses treize ans, pĂšre de quatre marmots Ă  pas vingt-cinq. Un peu plus loin, il y avait notre lieutenant, un marquis avec un nom Ă  rallonge incroyable, qu’on appelait Duguesclin pour faire court. Eh bien vous le croirez ou pas, mais on est sortis de la tranchĂ©e tous les quatre comme un seul homme et moins de deux minutes plus tard, j’étais le seul en vie, coincĂ© dans un trou peu profond, avec un Ă©clat boche calĂ© dans la cuisse. Les autres Ă©taient partis en poussiĂšre, pulvĂ©risĂ©s par un obus fabriquĂ© avec soin par de rondelettes bouffeuses de saucisse, quelque part du cĂŽtĂ© de Cologne.
Alors ne venez pas me faire chier avec mon regard inquisiteur. Il fera toujours moins mal que le shrapnel, tas de cons. Si je vous attrape du coin de l’Ɠil... si je vous ajuste, pour tout dire, soyez heureux que ce ne soit pas entre deux rangĂ©es de barbelĂ©s avec, calĂ© dans la molletiĂšre, le beau couteau de chasse que mon oncle Albert gardait depuis Sedan.
J.-M. M.
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clhook · 2 months
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La semaine derniĂšre je regardais Danse avec les stars et la miss France qui participe disait qu'elle supportait pas les critiques et ça m'a fait penser que je trouve ça toujours difficile Ă  croire les gens qui disent qu'ils sont timides ou anxieux ou complexĂ©s et qui font un mĂ©tier qui nĂ©cessite de s'afficher devant le public, du style les gens qui travaillent sur les rĂ©seaux sociaux. Je me trouve un peu cruelle de penser ça mais en tant que fille trĂšs timide (mais quand mĂȘme pas maladivement, genre j'arrive Ă  parler aux gens de maniĂšre gĂ©nĂ©rale), trĂšs angoissĂ©e (mais pareil, pas non plus de façon vraiment extrĂȘme je pense), complexĂ©e et supportant difficilement la critique, c'est quelque chose que je serai incapable de faire et j'ai vraiment du mal Ă  comprendre, s'ils considĂšrent avoir ce caractĂšre, pourquoi ils s'infligeraient un mĂ©tier comme ça ?? je suis d'accord que je peux pas savoir comment ils se sentent parce que je suis pas dans leur tĂȘte mais pourquoi vous faites ça ???? je sais pas vous en pensez quoi vous
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tealviscaria · 3 months
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J'ai regardĂ© l'interview live d'Orelsan et Gringe oĂč ils parlent de la sortie de Comment c'est loin et je sais que je ne vous apprends rien de nouveau. Mais. Il est vraiment impressionnant de voir comment ils juste... disent les trucs.
Alors je vous offre une petite liste des choses que j'ai notées:
"C'est un film transgenre." Oui, je le sors du contexte. C'est peut-ĂȘtre mieux comme ça.
Gringe qui tourne sans cesse sur sa chaise, c'est tellement un mood.
"Non, c'est pas vraiment nous, ça pourrait ĂȘtre n'importe qui. Par exemple ils pourraient s'appeler Dmitri et Stanislas." Dmitri et Stanislas sont les Касёр Đ€Đ»ĐŸŃ‚Ń‘Ń€.
Les cheveux ébouriffés d'Orel quand il a enlevé son bonnet <3
Le jeu de trois petit chats improvisé <33
Toute la partie avec la lumiĂšre. "Ça me nique les yeux!" Je considĂšre la verlanisation de "les yeux" comme un chef-d'Ɠuvre. (Enfin, si le français Ă©tait une langue plus accueillante, on l'aurait dĂ©jĂ  prononcĂ© comme [le jƓz], Orelsan est simplement un visionnaire.)
"Orel de BloquĂ©s est quand mĂȘme plus con. Orel de CCL envisage pas de regonfler le chat."
"Comment on s'est rencontrĂ©s? On s'est rencontrĂ©s sur un site de rencontre. Pour les adultes." Okay, Gringe 👍
Mais là, je dois souligner mon étonnement. Parce que juste avant, ils ont dit qu'ils avaient travaillé ensemble dans un hÎtel pendant un certain temps, mais que Orelsan a démissioné. Et Gringe a dit: "Il m'a refilé le bébé".
ALORS.
Moi, ne connaissant pas cette expression, j'ai écouté cette partie cinq fois au minimum pour m'assurer que j'entends bien. (En fait, d'abord je n'ai pas entendu le "re-".) Perplexe, j'ai alors écrit "il m'a filé le bébé" dans un traducteur. Et, bien sûr, ça m'a présenté la traduction suivante: "he gave me the baby".
Yeah. Sure. Why not at this point. Donne-lui un bébé, pourquoi pas. Mais tout est bien qui finit bien, j'ai trouvé la vraie signification juste aprÚs.
"BEUGUÉ! BLOQUÉ!"
"EnculĂ©s, vous n'ĂȘtes pas en Suisse!"
10/10, would watch again.
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lisaalmeida · 3 months
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« Est-il possible qu’on n’ait encore rien vu, reconnu et dit de vivant, est-il possible qu’on ait eu des millĂ©naires pour observer, rĂ©flĂ©chir et Ă©crire et qu’on ait laissĂ© passer ce millĂ©naire comme une rĂ©crĂ©ation pendant laquelle on mange sa tartine et une pomme ?
Oui, c’est possible.
Est-il possible que malgrĂ© invention et progrĂšs, malgrĂ© la culture, la religion et la connaissance de l’univers l’on soit restĂ© Ă  la surface de la vie ? Est-il possible que l’on ait mĂȘme recouvert cette surface qui aprĂšs tout eu encore Ă©tĂ© quelque chose, qu’on l’ait recouverte d’une Ă©toffe indiciblement ennuyeuse qui la fait ressembler Ă  des meubles de salon pendant les vacances d’étĂ© ?
Oui, c’est possible.
Est-il possible que l’histoire de l’univers ait Ă©tĂ© mal comprise, est il possible que l’image du passĂ© soit fausse parce que l’on a toujours parlĂ© de ces foules comme si l’on ne racontait jamais que des rĂ©unions d’hommes au lieu de parler de celui autour de qui ils s’assemblaient parce qu’il Ă©tait Ă©tranger et mourant ?
Oui, c’est possible.
Est-il possible que nous croyons devoir rattraper ce qui est arrivĂ© avant que nous soyons nĂ©s ? Oui, c’est possible.
Est-il possible qu’il faille rappeler Ă  tous l’un aprĂšs l’autre qu’ils sont nĂ©s des anciens, qu’ils contiennent par consĂ©quent ce passĂ© et qu’ils n’ont rien Ă  apprendre d’autres hommes qui prĂ©tendent possĂ©der une connaissance meilleure ou diffĂ©rente ?
Oui, c’est possible.
Est-il possible que tous ces gens connaissent parfaitement un passĂ© qui n’a jamais existĂ© ?
Oui, c’est possible.
Est-il possible que toutes les réalités ne soient rien pour eux, que leur vie se déroule et ne soit attachée à rien comme une montre oubliée dans une chambre vide ?
Oui, c’est possible.
Est-il possible que l’on ne sache rien de toutes les jeunes filles qui vivent cependant ?
Oui, c’est possible.
Est-il possible que l’on dise les femmes, les enfants, les garçons et que l’on ne se doute pas malgrĂ© toute sa culture, que l’on ne se doute pas que tous ces mots depuis longtemps n’ont plus de pluriel mais n’ont qu’infiniment de singulier ?
Oui, c’est possible.
Est il possible qu’il y ait des gens qui disent Dieu et pensent que ce soit un ĂȘtre qui leur est commun ?
Oui, c’est possible.
Vois ces deux Ă©coliers, l’un s’achĂšte un couteau de poche et son voisin, le mĂȘme jour, s’en achĂšte un identique et aprĂšs une semaine, ils se montrent leurs couteaux et il apparaĂźt qu’il n’y a plus entre les deux qu’une lointaine ressemblance tant a Ă©tĂ© diffĂ©rent le sort des deux couteaux dans des mains diffĂ©rentes ? Oui, dit la mĂšre de l’un s’il faut que vous eussiez toujours tout et encore est-il possible que l’on croit possĂ©der un dieu sans l’user ?
Oui, c’est possible ».
Mais si tout est possible, si tout cela n’a mĂȘme qu’un semblant de possibilitĂ©, mais alors il faudrait pour l’amour de tout au monde, il faudrait que quelque chose arriva.
- Rainer Maria Rilke se pose les questions dans ÂŽLes Cahiers De Malte Laurids Brigge
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echo-s-land · 8 months
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French queer playlist because why not
Comme ils disent by Charles Aznavour (1972) | about a gay man, he cross-dresses too. Don't really know how to explain that one. It's great, it aged really well (Aznavour was a straight man but he had several queer friends)
Sans Contrefaçon by MylÚne Farmer (1987) | wasn't actually written with trans masculinity in mind, but it's a trans masc anthem at this point
Ziggy (un garçon pas comme les autres) by Céline Dion (1991; the original cover/song was in 1978 tho) | girl falls in love with her friend, a gay teen - is sad for herself but doesn't insult him or anything
College boy by Indochine (2013) | a song I found not so long after figuring out my own queerness so it has a special place in my heart. lots of cw for the visual clip (homophobia, bullying, conservatism, police violence, religious hypocrisy, physical assault, crucifixion)
J'ai le droit aussi by Calogero (2014) | gay teenager wants to live like he wants, is scared of other's view/judgement on him (including his parents)
Mohammed je t'aime by GargÀntua (2015) | being gay in the hood is like everywhere else - it may not be a good idea to be public about it. lots of cw for the visual clip (physical assault, homophobia, internalized homophobia, suicide). I hope one day GargÀntua will make a song about Mohammed finding happiness because he clearly deserves it if not for the trauma in this song
comme les autres by keen'v (2015) | gay man (teen?) coming out to his father, father is homophobic
C'est toi qu'elle préfÚre by Alice et Moi (2017) | sapphic anthem at this point; unrequited love
Normal by Eddy de Pretto (2018) | gay man responding to an homophobe (honestly i find it very satisfying)
Grave by Eddy de Pretto (2018) | the singer is an openly gay man, he talks to a wide range of different gay boys/teens/men and are telling them to not worry when they discover their homosexuality; that it's okay
SĂ©duction by Joanna (2018) | bi woman falls in love with another woman
Ta reine by AngĂšle (2018) | wlw.
Amour censure by Hoshi (2019) | Hoshi is an openly lesbian singer; the song denounces homophobia
Immoral & Illégal by GargÀntua (2022) | 'Everything I love is immoral and illegal' - if that's not a queer feeling. More seriously, it's more me deciding to interpret the song this way then the song being about queerness. Still, whether you listen to this song and think about addiction, queerness, or any marginalized community, well.. well you can't change my mind about it having (intended or not) queer subtext
La mort avec toi by GargÀntua (2022) | literally 'partners in crimes', I decided it was queer for various reasons but you may not think like me
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dixvinsblog · 1 year
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Comme ils disent - Jean-Paul Clair
– Mon fabricant est de Redon, comme disait le vendeur de literie. ****************************************************************************** – Il faut que j’y aille, comme disait le militaire amĂ©ricain. ****************************************************************************** – Je prends toujours un air dĂ©tachĂ©, comme disait le teinturier

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