Jean Jacques Dessalines
Post Partagé Par Jean Jean-Pierre
Dapre atik (récit) jounal administrasyon Dessalines nan, Gazette 1er out [dawout] 1805 lan, fonksyonè leta yo te fete anivèsè Lanperè 25 jiyè 1805.
(Numéro 34.)
GAZETTE POLITIQUE ET COMMERCIALE D'HAITI, Du Jeudi 1" Août 1805, l'an deuxième de l'indépendance
L'injustice à la fin produit l'indépendance.
(Volt. Tano.)
Du Cap, le 31 Juillet.
C'est un usage admis chez tous les peuples de la terre, de celebrer les époques memo- rables où ils ont chassés leurs tyrans, qu'ils se sont affranchis du joug de quelques peuples barbares, ou qu'ils rappelent la mémoire des hommes fameux qui ont illustré leur siècle par des actions extraordinaires et des bienfaits envers leurs semblables. A ces époques, l'admiration, la reconnaissance, tour à tour enflamment l'esprit du peuple d'un heureux enthousiasme; et dans esse de sa joie, il benit le libérateur dont bouge Bero que l'a rendu à la liberté. Chaque contrée, chaque peuple a eu ses tyrans; chaque peuple aussi a en son libérateur.
Les États-Unis ont eu leur Washington; la Suisse, son Guillaume Tell; et nous, nous avons aussi notre Dessalines! Ce n'est pas parce qu'il est revêtu de la pourpre des rois, qui n'ajoute rien à sa gloire, que nous célébrons aujourd'hui ses vertus; mais nous voulons le considérer lorsque n'étant que simple général, il ralliait les soldats dispersés et découragés de l'armée du général Toussaint, qu'il faisait sortir, comme de dessous terre, une armée qu'il rendit invincible, et qu'il conduisit de victoire en victoire, jusqu'à ce que ses grandes conceptions fussent amenées et leurs fins, et qu'il eut vu sa patrie libre et indépendante. Il est quelquefois permis, au sein de la prospérité, d'enfler son courage et d'étendre son ambition; lorsqu'on voit en son pouvoir de grandes ressources, ou que des allies puissans nous offrent un appui protecteur, on peut quelquefois entreprendre des actions éclatantes; mais celui-là qui, Iivré à lui-même et abandonné dans une situation désespérante, trouve en soi assez de ressources pour entreprendre et faire réussir un projet qui aurait passé pour téméraire aux yeux des âmes moins fortes que la sienne, sans autres moyens que son courage et l'étendue de son génie voilà l'homme vraiment grand et le héros qui mérite l'admiration de ses contemporains et celui de la postérité.
L'histoire de notre asservissement n'est malheureusement que trop connue; l'on sait qu'il y a cinq siècles que des hommes venant de l'autre hémisphère, attirés vers nos plages agrestes, les uns par la soif de la gloire, et la plupart par celle de l'or, portèrent dans notre Île la destruction, le pillage et tous les fléaux que la cupidité entraîne ordinairement sur ses pas. Les moyens employés pour assouvir leur avidité, attirèrent plus d'une fois, sur leurs têtes, les effets de la vengeance d'un peuple faible et bon, que le désespoir, plutôt que le courage, armait contre ses oppresseurs, et dont on étouffait les révoltes à mesure qu'elles éclataient. Ces luttes inégales et souvent renouvelées, finirent par amener la destruction entière des malheureux insulaires qui habitaient jadis le sol sur lequel nous vivons, et leur facile conquête a depuis ce temps laissé dans l'esprit de leur vainqueur, l'idée de renouveler avec autant de facilité ces tragédies atroces, chaque fois que leur méfiante politique leur en aurait suggéré l'idée.
La vengeance des européens était assouvie, mais leur avarice était loin de trouver son compte dans l'extermination des bras qui arrachaient du sein de la terre le métal tentateur qui excitait leur convoitise; il fallait remplacer ces hommes, dont on ne compta pour quelque chose la destruction, que lorsqu'on fut privé du produit de leur travail; et l'injustice, la violation du droit des gens et l'insatiable amour des richesses, concoururent à l'envie à fournir les moyens de à remplacer la déplorable industrie des malheureux indigènes. Alors mille prétextes frivoles, mile arguments puérils colorèrent du voile de la religion la traite d''Afrique et les infortunés africains furent arrachés de leur délicieuse patrie pour venir en Amérique terminer, dans les tortures d'un esclavage cruel, la plus pénible des existences et préparer à leurs descendants le sort que nous avons éprouvés. L'on se rappelle que Brutus, qui devait un jour chasser les Tarquins de leur trône oppresseur et fonder les bases de la liberté de Rome sur les ruines de -la tyrannie, est né à la cour de ces mêmes Tarquins; ainsi au milieu du système colonial sous lequel nous gémissons, naquit Dessalines, à qui était réservé la gloire de détruire l'ouvrage de tant de siècles, de briser nos fers appesantis par la main du temps, d'affranchir ses compatriotes, et de conquérir à la pointe de l'épée l'indépendance de son pays.
Ses victoires, ainsi que ses glorieux travaux, sont connus de l'univers entier. Pour récompense de ses bienfaits signalés, le peuple d'Haïti, dont il fut le libérateur, pensant que celui qui avait su conquérir ses droits avec autant de valeur, devait savoir au moins comment les conserver, le plaça à la tête de son gouvernement pour être son chef et son législateur. Jamais choix ne légitima mieux la confiance d'un peuple reconnaissant.
Ce ne fut pas assez pour cet homme extraordinaire d'avoir montré pendant la guerre toute l'habilité d'un grand général, il a voulu consacrer les loisir de la paix en déployant, pour le bonheur de son peuple, la sagesse du législateur. Il est bien juste que tout ce qui a rapport à cet grand homme intéresse le peuple qu'il a su rendre libre et heureux, et qu'on lui donne tous les témoignages que le respect et la reconnaissance peuvent suggérer.
C'est dans cet esprit, que l'anniversaire du jour de sa fête a été célébrée le 25 de Juillet. En rendant compte des cérémonies qui ont eu lieu à cette occasion, nous remplissons un devoir qui nous est bien cher, en contribuant à faire connaître jusqu'à quel point l'amour et la fidélité du peuple d'Haïti se sont manifesté envers son souverain.
Le jour de la cérémonie fut annoncé par des salves d'artillerie de tous les forts, qui furent spontanément répondus par les batimens neutres armés de la rade. L'état major de Sa Majesté, les généraux présens, également que toutes les autorités administratives et judiciaires, se rendirent à hôtel de son excellence le général Christophe, d'où ils l'accompagnèrent à l'église, pour assister à l'office divin. On y avait préparé, à l'Empereur, un trône magnifiquement décoré, une indisposition survenue à Sa Majesté nous ravit sa présence: Après la célébration de la messe, sou excellence et son cortège se rendirent au palais impérial, et adressa à Sa Majesté le discours suivant:
"SIRE"
» La fête de Votre Majesté revient sous les plus heureux auspices. Ce jour, si cher, voit dans toute l'étendue de votre Empire, tous les cœurs des haïtiens portés vers leur vengeur et leur libérateur, lui payer ce tribut d'éloges, de respect, d'amour et de reconnaissance, qui est dû à la véritable vertu, au cœur paternel de Votre Majesté, qui donne tous les jours, à son peuple, des marques de sa sollicitude, et qui consacre pour son bonheur et sa félicité, les travaux, les veilles, les fatigues, et tous les immenses devoirs qu’entraîne l'art de gouverner. Aussi au dedans de vos états, les fruits de la plus touchante concorde, de l'aimable fraternité, de la douce égalité qui règnent, forment le gage précieux de fa prospérité et de la durée de votre Empire. »
Grâces immortelles vous soient rendues, JACQUES, le bien aimé, père du peuple, la postérité vous confirmera ces titres chers et sacrés, que vos contemporains se plaisent à vous donner! Que le Dieu tout puissant, protecteur de notre cause sacrée, daigne répandre sur vos jours ses saintes bénédictions, ainsi que sur ceux de Sa Majesté l'Impératrice et de toute votre auguste famille; et qu'il vous conserve longtemps à la tendresse de votre armée et du peuple, votre seconde famille.
» Je me félicité d'être, auprès de Votre Majesté, l'écho de la voix publique; et je profite de la solennité de ce jour, pour renouveler, à Votre Majesté Impériale, les assurances du plus profond respect, du plus sincère attachement et de la parfaite soumission dont je suis pénétré».
Sa Majesté répondit à Son Excellence: «Que le vœu de son cœur a toujours été la prospérité de son peuple, et que son bonheur sera la plus douce récompense de ses veilles ;' et qu'il n'y avait que le mérite et les services rendus à la cause publique par son excellence le général Christophe, qui puissent égaler l'estime et l'amitié de Sq Majesté, et la confiance entière qu'elle mettait en lui. Après la réponse de Sa Majesté, M. Roumain Jeune, administrateur principale de la division du Nord, lui adressa la parole au nom du Corps de l'Administration, et s'exprima en ces termes
"SIRE"
Nos cœurs éprouvent une bien douce satisfaction en ce jour, qui est celui de l'anniversaire de votre auguste Fête, en vous témoignant le bonheur que nous sentons de vous posséder au milieu de nous. Grâces soient rendues à la divinité de nous avoir conservé un héros dont les jours nous sont aussi précieux! Vous êtes le vrai fondateur et le sauveur de notre liberté et de notre immortelle indépendance; vous qui avez tout sacrifié pour notre patrie afin de la soustraire a la tyrannie sous laquelle on voulait la replonger. Après nous avoir donné l'indépendance, vous ne cessez de travailler à la défense de notre liberté, et de consacrer entièrement votre temps à la prospérité et a la gloire de votre Empire.
» Déjà nous voyons luire, pour chacun de nous, l'aurore du bonheur; permettez nous donc, en reconnaissance des bienfaits dont vous nous avez comblés et des services que vous avez rendus à notre chère patrie, de présenter à Votre Majesté nos hommages respectueux; permettez-nous de vous prier d'agréer en ce jour mémorable, l'assurance sincère de notre gratitude et des sentimens d'attachement, de fidélité et de dévouement que nos cœurs renferment pour vous. Puisse le ciel couronner d'un succès complet toutes vos entreprises, protéger votre personne sacrée, ainsi que celle de notre digne Impératrice, qui est notre idole, et assurer la prospérité de votre auguste famille; qu'il conduise à leurs fins les travaux que vous ne cessez d'entreprendre pour la félicité publique, qui fait votre sollicitude continuelle. Tels sont les vœux que nous ne cessons d'adresser pour votre gloire, et dont l'accomplissement peut seul assurer notre bonheur ».
L'Empereur accueillit avec bonté le discours de M. l'Administrateur, à qui il assura, ainsi qu'aux Officiers de son Corps, de sa bienveillance.
Sa Majesté se retira un instant, pour reparaître à un festin splendide, qui était préparé dans une des salles du palais impérial, et auquel elle assista, accompagnée, de leurs excellences le général Christophe, le général Bazelais, chef de l'état major de Sa Majesté, des généraux Roumain, Martial Besse, Capoix, Yayou, et de tous les officiers de la cour, ceux de l'état major de la division et des corps administratifs. Les négocians du commerce étranger y furent invités, et se firent un devoir de s'y rendre.
À la fin du repas divers toasts furent portés parmi lesquels on remarque les suivans:
Par l'Empereur, à la liberté et à l'indépendance d'Haiti.
Par le général Christophe à l'Empereur et à notre auguste Impératrice
Par le général Bazelais, au général Christophe et à tous les Généraux de l'armée.
Par l'adjudant général Mentor, aux.
États-Unis et aux Négocians americains amis de note indépendance.
Par une Députation spéciale des Négocians américains aux Peuples libres de l'univers, et à la conservation du gouvernement et de l'indépendance d'Haïti, etc.
Les Couplets suivans ont été composés et chantés par M. CHANLATTE, secrétaire général,
Sur l'Air Quels accents, Quels transports! Quels apprêts? Quels momens?
O jour plein d'allégresse!
Tout un peuple enivré près du trône s'empresse
Où se forgeaient ses fers, il marche avec fierté,
Dans sa force et sa liberté. [ Bis. J
Il bénit le héros de son indépendance;
Il chante, transporté d'une mâle assurance:
Qui de Jacques premier a reconnu la loi,
Célébré aussi sa fète en celle de son roi.
Que pourrait des tyrans la fureur despotique,
Contre les fier enfans de ce brûlant tropique,
C'est le flot qui s'irrite et qui court se briser, Contre l'immobile rocher! {Bis).
Sous l'abri protecteur d'un invincible égide,
Nous chantons en dépit d'une rare perfide,
Qui, etc
. Vous qu'il vient d'affranchir de l'antique esclavage."
Pour prix de ses travaux offrez-lui votre hommage,
Qu'un serment solennel soit par vous répété, De respect et fidélité; Bis.)
Autour de ses drapeaux, même nous rassemble.
Nous vivrons à ses pieds, ou nous mourrons ensemble.
Car de Jacques premier, qui reconnaît la loi
N'a qu'un esprit, qu'un cœur pour l'état et son roi
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Au Cap, chez P.Roux, imprimeur de l'Empereur, Rue W'Anjou et place d'Armes
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