very old oneshot
POV ???
Le soleil touche ma peau. C'est déjà fini de dormir? Peux importe. Je me lève en m'étirant et je regarde le soleil. C'est bientôt "midi" comme disent les humains. Je me dirige vers mes semblables qui me saluent en baissant la tête. Il est vrai que je suis la fille du mâle alpha, mais je n'ai jamais compris l'utilité de me saluer.
- Mademoiselle Suzu, votre père vous demande ! cria Ryu dans la langue des pokémons
Pokémon !!!!
Ryu est une gentille Pyroli. De loin que je me souvienne, ce fut la seule qui m'accepta pour qui je suis et pas comme "la fille du mâle alpha du clan". En pensant à ça, je me mit à frissonné.
Ryu me regarda avec un sourire, elle sait que je n'ai pas peur de mon père. Elle sait que si je frissonne, c'est pour autre chose.
- Je te suis, répondais-je.
Ryu se retourna et commença à avancer. Je me mit à courir pour marcher à coté d'elle. On marcha pendant une minute ou deux et on arriva devant une sorte de tanière. Ryu me laissa la passage et je m'avança.
Dans la pièce se trouvait assis en son milieu mon père, un vieux Pyroli, qui se préoccupe plus de sa santé que de sa famille. Tsss, je ne l'ai jamais aimé et c'est réciproque. Il croit dure comme fer que je suis la cause de la mort de ma mère. En pensant à elle, je me sentis toute triste. Je me ressaisis, il ne fallait pas qu'il me voit comme ça.
- Merci d'être venu. Je viens t'annoncer que tu est maintenant assez grande pour décider de ta voie. dit-il avec un ton neutre.
Je me sentis heureuse d'un coup. Je répondis :
- Je ne vois pas de quoi vous voulez parlez.
Je ne l'ai jamais appeler papa ou même père. J'en ai pas besoin de cette preuve d'amour. Grandir dans la solitude peut-être utile pour ce qui m'attends.
- Tu va pouvoir choisir de continué à vivre dans le clan ou de partir loin d'ici et vivre comme une sauvage.
J'eus un sourire de coin. Mon père n'a jamais été par quatre chemin. Et n'appréciais pas les Pyrolis qui sortais du clan. Mais ces sauvages, eux, étaient libres. Et, depuis toujours, je la voulais, cette liberté. Je répondit en aissayant d'être neutre.
- Je pense que je vais partir du clan. Dis-je d'un ton neutre mais je ne pus m'empêcher de continuer de façon à l'insulter. Comme ces sauvages qui ont une liberté.
Sur cette pique je me retournai et partis. Je me mis à courir quand j'entendis mon père crier. " bien fais pour lui pensai-je.
Le crépuscule pointa le bout de son nez. Il est temps pour moi de trouver un endroit ou dormir. Je marchais et j'arrivais dans une clairière ou je le vit pour la première fois.
POV Suzu FIN
Elle le détailla. Il avait des cheveux ébène en bataille qui lui donnait un aire enfantin. Ses yeux était d'un vert foret si magnifique qu'elle pouvait si perdre. Il portait une chemise blanche et un pantalon bleu-noir. Le jeune garçon sentis un regard et dirigea légèrement ses yeux vers un... Pyroli.
POV jeune garçon
Je savait que ce Pyroli ne voyait pas que je le regardait. Je pencherait pour une femelle vu la façon don elle se tiens debout. Sa fourrure orange était magnifique comme sa. Sa queux ainsi que sa "barbe" était d'un jaune poussin magnifique. Ses yeux étaient d'un bleu qui faisait penser à la nuit. En gros, "elle" était magnifique.
Je levait la tête vers elle et ce fut un déclic. Le temps c'était arrêter. Plus rien ne comptait pour chacun à part l'autre. J'avais l'impression de voir un humain et non un Pokémon. Mais notre bulle fut vite brisé quand la Pyroli repris la raison et s'en alla en courant. Je soupirai. Et regarda les étoiles et dis une phrase les plus bizarre :
- Chers étoiles qui brillent dans les cieux, faites que je puissent la revoir.
POV jeune garçon FIN
POV Suzu
Je m'arreta. J'étais arrivé à un fossé. Mon regard tomba sur les étoiles et prononça une phrase qui ne venait pas de ma pensée, mais de mon cœur :
- Chers étoiles, vous qui brillez dans les cieux la nuit, faites que je puisse revoir ce jeune humain.
POV Suzu FIN
Mais ce qu'ils ne savait pas, c'est que les étoiles avaient écoutés leurs vœux semblable et décidèrent de le réalisé. Mais avec un tout petit ( un gros ) plus.
Quelque jours plus tard. Le jeune homme se retrouva à devoir combattre un Pokéùon mutant. La nouvel création de la Team Rockette. Mais la créature était puissante et se prépara à envoyer une attaque sur le jeune homme.
Suzu, étant présente, n'écoutant que son coeur fonça et sauta pour se prendre l'attaque et tomba sur le jeune homme, qui tomba.
POV le jeune homme
J'allais me ramasser une attaque de ce Pokémon Mutant quand, soudain, je la vit sauter et se prendre l'attaque. Le choc fut tellement puissant qu'elle tomba sur moi. Et nous tombâmes sur le sol. Attendez, je suis tombé? Mais je ne sentis pas le corps d'un Pyroli, mais d'une humaine sur moi. Je me redressa en tenant le corps de l'humaine qui d'ailleurs était chaud, très chaud.
Ses cheveux était aussi roux que la fourrure qu'elle avait avec des méches aussi blanche que la "barbe" qu'elle avait aussi. Son visage était fin avec un petit nez et des fines lèvres. Mon regard tomba plus bas et je rougis fortement. La fille ne portait pas de vêtement. Je remontai mon regard pour regarder le Pokémon Mutant. Mais je ne vis que des arbes et des mauvaise herbes. Je sentis du mouvement dans mes bras et entendis d'une voix cristalline :
-Mais... Ou suis-je. Je me souvient d'avoir vu ce jeune humain ce faire attaquer et je me suis mis entre pour le protéger puis plus rien...
Le jeune homme regarda son visage, les même yeux qu'elle a.
- Tu dois être le Pyroli qui ma sauvé. Mais pourquoi est tu ... humaine? dis-je.
POV Le jeune homme FIN
Suzu se regarda, puisque, oui, c'était bien Suzu, et, eu peur. Mais ne cria pas, elle eu juste des frissons. Le jeune homme la regarda. Il la déposa par terre, enleva sa chemise et lui donna.
- Il faudrait mieux que tu porte des vêtements si tu ne veux pas attraper froid.
Elle prit la chemise et... ne fit rien. Elle ne savait pas comment la mettre.
Le garçon ris d'un petit rire. Il reprit la chemise et lui fis passer un bras, puis l'autre. Puis vient le dilemme. car oui, Suzu avait hérité d'un beau corps de femme. Et, disons que sa poitrine ne faisait pas exception à la règle. Le garçon prit son courage à deux mains et commença à boutonner la chemise.
- Je me nomme Valentin. Je suis un dresseur, bon, je suis novice. Et toi, tu à un nom à part Pylori ?
- Je me nomme Suzu. dit-elle tout bas.
- Clochette...Tu savais que Suzu veux dire clochette ?
- Non.
Prit d'une pulsion, Valentin mit sa mains sur la joue de Suzu. Il se rapprocha de son visage. Il ne peut rien faire, c'est comme s'il est aimanté. Suzu n'était pas dans un état mieux que celui de Valentin. La bulle qui était apparu le premier jour revint en force. Leurs visages étaient séparé que par quelques millimètres. Que Valentin franchit très vite. C'était un simple baiser, mais pour eux, c'était mieux que ça.
Ils se séparèrent manquant d'aire (enfin surtout Valentin,Suzu pouvait ne pas respirer pendant 15 minutes). Ils se regardèrent dans les yeux. Ce fut Valentin qui rompit le silence :
- Ma petite clochette... fut tout ce qu'il dit avant que Suzu reprennent sa forme de Pylorit.
Valentin fut surpris mais quelque secondes plus tard la Suzu humaine revint et dit :
- Je sais modifiez ma forme à volonté. C'est incroyable !
- Et utile. Je ne te vois pas te balader en ville comme ça et moi non plus. Dit-il en regardant Suzu puis lui même. J'ai assez d'argent pour t'acheter des vêtements. Je vais demandé à ma sœur d'aller en acheter avec toi.
Suzu acquiesça. Valentin la regarda et mis sa main sur sa joue. Sur le coup, la jeune fille ferma les yeux mes les rouvrit pour voir Valentin sourire. Il déposa ses lèvres sur celles de Suzu. Mais Suzu le repoussa et dit devant le regarde à la fois triste et neutre :
- Quand... Quand tu m'embrasse, j'ai l'impression que mes... force reviennent. Est ce normal?
- Je ne sais pas. Mais ensemble on découvrira bien.
- J'avait demander aux étoiles de pouvoir te revoir, et je croit qu'elles réalisées plus...
- Toi aussi tu te dis ça? Bon, allez, ensemble, on part à la conquêtes du monde et on deviendra les meilleurs dresseurs...
- C'est surtout toi le dresseur. Moi je suis juste un... Pokémon. C'est comme ça que vous dites?
- Pour moi tu est bien plus... Allons-y. Partons voir ma famille.
Suzu se retransforma en Pylori, disant qu'elle préférait cette forme mais donna quand même la chemise à Valentin qui avait détourner le regard. C'est ainsi qu'ils partirent à l'aventure. Ce "couple" élu des étoiles, née d'un coup de foudre partagé.
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Aider un camarade à déménager
« Quittez tout, vous trouverez tout. »
Saint François d’Assise
Il faut aller chercher une camionnette de déménagement à l'autre bout de la ville. On fraude un métro, on fraude un train, on marche longtemps dans un parking souterrain, voilà c'est ici. Le camarade fait un crochet par Quick pour prendre un menu à emporter et il s'éloigne sous la pluie et mes blâmes diététiques, pendant que je remplis en ligne les formulaires d'état des lieux du véhicule, déverrouille la portière avec un téléphone. Une camionnette louée avec un téléphone loué, c'est fou le commerce "interface-machine". Le pote revient et monte au volant, moi à droite, démarrage. Tout se passe bien. D'abord une petite marche arrière à l'aveugle pour se mettre en jambes, avec le levier de vitesse dans la main droite et un cheeseburger dans la main gauche, à hauteur du nez pour y faire un croc de temps en temps, et l'autoradio sur Nostalgie FM qui chantonne un morceau des Beach Boys Aruba, Jamaica, oh I want to take ya to Bermuda, Bahama, come on pretty mama. Des tas de voyants s'allument sur le tableau de bord, et une stridulation d'alarme retentit par-dessus la musique. C'est le frein à main qui n'est pas desserré voyons! Et paf tout de suite l'allure du véhicule augmente. Key Largo, Montego, baby why don't we go. C'est parti pour deux jours de déménagement de cinglé. Nous nous y sommes pris trop tard et c'est en catastrophe que nous accomplissons chaque geste, pressés par les échéances qui sont autant d'heure H et de couperets sur un billard: douze heures pour rendre un appartement vidé et récuré de fond en comble, vingt-quatre heures pour rendre ce véhicule.
Adolescent je me promettais une fois adulte, de vivre dans la beauté, par et pour la beauté: j'aurai la verve d'Edouard Baer, l'ameublement Armani Casa, les vêtements hooligan chic, l'érudition de Pierre Grimal, le courage physique de Marcel Bigeard, le détachement de Sempé, et la France pour jardin semée de maisons de pierres blondes, de dentelures de feuilles de chênes qui se détachent sur un ciel de soir d’été et de clairières comme sur les tableaux d'Hubert Robert. Il n'y eut rien de tout cela et j'arrivai à la majorité dans un Grenoble abominable, dans le shit, le tam-tam et les dépressions.
Nous avons au préalable "fait les cartons" c'est à dire bourré des sacs de fortune avec toutes sortes de tableaux, de linges de maison, d'objets sortis d'héritages lointains et dont plus personne ne connaît la valeur. Les dentelles de Bruges, les écharpes de cachemire, les lustres du plafond, trésors des cristalleries européennes, emballés tous en vrac dans des journaux titrés "Alan Waquebaert quitte Namur", émergent ça et là d'un amoncellement de sacs, sachets, boîtes, paquets. Nous avons démonté des meubles, vidé le contenu des tiroirs à la verticale dans les poubelles, puis judicieusement entassé celles-ci sur le palier, palier dont les voisins d'en face se trouvent être les propriétaires d'ici.
Fracas dans la cuisine, le cache de porte du lave-vaisselle a frappé le carrelage. Catastrophe. Bientôt un réparateur bruxellois accourt, long et maigre, soixante-cinq ans, cheveux blancs jusqu'aux omoplates, gestes fébriles. Il se blesse au doigt en manipulant le cadre intérieur de la machine, toute de métal à bord tranchants, abominable. Du sang partout, des jurons, nous improvisons un pansement au sopalin et scotch et le congédions ; cette porte doit être réparée dans les dix heures prochaines et nous devons vider le chargement du véhicule d'ici une heure dans une maison des faubourgs de Charleroi, l'un des comptoirs du camarade.
En route il me semble soudain que ce n'est pas la grande forme. J'ai tous les symptômes d'un empoisonnement alimentaire passager et il va falloir rendre ce qui est de trop, tout en déchargeant des paquets dans un décor de briques et de désespoir wallon humide. Bientôt à Charleroi étalé sur un canapé, en proie aux joies des chauds et froids internes je rabat la capuche et médite un remède possible. Il me revient soudain que les Grecs recommandaient de traiter l'acidité par l'amertume et je progresse bientôt courbé en deux vers la cuisine, à la vitesse de 0,2 kilomètre par heure. En fouillant ici et là il s'avère possible de mêler dans une eau frémissante du thé vert et du curcuma en poudre. Un grand verre de ce mélange vous donne des frissons tellement c’est amer mais se révèle très vite constituer un baume souverain sur la douleur, et un fortifiant merveilleux. Me revoilà dispo et mon ami a dans l'intervalle terminé la manutention. Nous rentrons à Bruxelles. Tout s'arrange?
On bombarde sur l'autoroute. Des voyants s'allument sur le cadran de bord. Avant même de pouvoir y prêter attention un orage effroyable s'abat sur le pays, et l'autoroute devient un tobogan de parc aquatique. Le halo des phares ne porte plus qu'à trois mètres. Trente-cinq minutes de ce régime et nous arrivons, parquons le véhicule devant le logement à vider et mettons pied à terre. La portière latérale est grande ouverte. C’était pour ça les voyants allumés. Elle a été grande ouverte pendant trente-cinq minutes sous une averse de mer du nord. Bon, on ne dit rien. Un sac en toile que l'on avait bourré de paires de Crockett & Jones, trempé. On ouvre le sac pour vérifier les chaussures: miracle elles étaient cirées et fourrées d'embauchoir en pin, la pluie a glissé sur le cuir lorsque le bois sec ne l'a pas bue. L’averse a tourné au crachin. “La pluie tombait comme une aumône” dit quelque part Houellebecq dans un poème.
Avant de charger encore le véhicule il faut abandonner un bureau années 60 les quatre pieds en l'air sur un trottoir, sous la pluie, comme un bœuf abattu. Ces trucs sont invendables, les gens ne distinguent plus l’artisanat de la camelote, ne jurent que par Ikéa, les copeaux agglomérés sans style, sans race, sans passé. Signe des temps. Bientôt plus rien ne vaudra plus rien sur le marché, la beauté seule restera le critère inattaquable.
Il faudra beaucoup d'autres choses. Il faudra porter des tapis emballés dans des rideaux chouraves au logeur depuis la camionnette en triple file aux warnings dans un escalier branlant qui tient par miracle avec des poutrelles de soutènement jusqu'au 4ème étage chez des locataires ahuris et pas prévenus pendant qu'un GSM sonne pour la neuvième fois d'affilée dans une poche sans pouvoir l'éteindre (deux mains occupées). Mais qui appelle, bon sang? C'est un candidat Airbnb avec accent africain complètement paniqué qui a payé sa location et ne trouve pas la clé, normal nous sommes occupés à autre chose! Et puis le logement que tu as loué, mon petit père, a été vidé par nos soins et tu vas dormir par terre, ça te va comme ça? Et puis quoi, est-ce que nous sommes au service de ces fils d'ambassa-bassadeurs qui n'ont d'argent que par notre argent? De toute façon il patientera. Demain après l'état des lieux et la remise des clés, de ses clés à lui-aussi, il devra pour finir son séjour passer par la courette et grimper au logement par une échelle dissimulée sous une bâche dont lui indiquons l'emplacement, puis pousser la fenêtre de l'antichambre que nous aurons maintenu entrouverte au moyen d'un segment de carton astucieusement inséré entre le vantail ouvrant et le dormant précadre. Ce stratagème permet de sous-louer le bien au-delà de la fin du bail même après en avoir rendu les clés au logeur. Mais ce primitif à peine capable de saisir la complexité de phrases du genre de "clé sous paillasson" et qui téléphone 9 fois de suite pour se les faire répéter sera-t-il à même de suivre les directives évoquées ci-dessus? C'est le cadet de nos soucis.
On redescend, on remonte encore avec des tringles chargées de vêtements, des tapis, des trumeaux en marbre. Il reste un canapé à 40 euros et une armoire Ikéa. Ecœurés nous abandonnons ces marchandises sur le trottoir.
Mince, le lave-vaisselle cassé avec sa porte effondrée! Bim une idée, je me rappelle que nous avons un camarade menuisier dans un quartier tout proche. On l'appelle en catastrophe et le pressons de passer réparer d'ici une heure, il accepte. Réseau en béton, nous avons. Il arrive, pose des points de colle avec un pistolet à colle, compresse la porte... Ça tient. Merveilleux, on a presque fini. Dans douze heures il faudra avoir quitté les lieux.
Bientôt il y aura les effroyables négociations d'état des lieux, sous le regard furieux de propriétaires rêches comme des toiles de jute, dans une ambiance en bronze massif d'une pesanteur insoutenable, lorsque l'on compte les secondes et que ça ne finit jamais.
Nous sommes à jeun et j'aime extrêmement cette sensation lorsqu'on est au bout de ses forces et que l'on s'en découvre de nouvelles, insoupçonnées. Cette phrase dans les romans autobiographiques de Dostoïevski: "il n'avait rien mangé depuis trois jours", me porte et me transporte. Il y a une noblesse du jeûne et Paul Morand me comble avec son "J'aime manger, mais je n'aime pas avoir mangé". J'ouvre une porte d'armoire de cuisine pour vérifier que tout est vide et que voilà dedans? Bon sang un énorme lave-linge. Et par-dessus le mastodonte, quoi? Un sèche-linge rotatif. Je claque la porte écœuré et gueule des insultes à travers les pièces désertes à l'intention du camarade.
Il nous faut un "diable" pour bouger ces crasses, et un lieu de stockage. Oh ça c'est réglé: le gars fréquente une meuf actuellement qui a un logement avec cave dans le quartier européen, on lui fourguera le tout à cette eurocrate. Il reste juste le temps de foncer au grossiste de vin là-bas plus haut dans la rue, cinq minutes avant fermeture pour un mois, pour lui soutirer un petit peu son diable. Les heures suivantes sont brouillées, nous descendons et montons l'électroménager sur des escaliers, dans des camionnettes, dans des tunnels de cave, occupés que nous sommes à rentrer des lave-linges dans des caves, des sèche-linges dans des ascenseurs comme on fait rentrer des carrés dans des ronds, au forceps, au chausse-cube et au "han" de porteur d'eau avec la sueur qui perle au front. Mais tout s’arrange.
Le camarade m’offre un magnifique tapis, et un tableau splendide: le panthéon de Rome.
Je rentre écouter ceci. Bon, bon, je sais... Mais elle a une voix superbe.
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Epilogue de la fille du président
(conte de noël érotique pour backpackers névrosés)
Île du Soleil, lac Titicaca, 24 décembre au soir, Bolivie.
La fille du président prenait son bus pour aller à la frontière du Chili, en passant par Arequipa, la grande ville péruvienne du sud du pays, le soir-même. Elle m'a embrassé en se levant.
Il faut que j'aille voir mes deux amis pour prendre des billets pour le bus de ce soir. Je te laisse Bornu. Quelle nuit nous avons passé! N'est-ce pas mon chou ? Je l'oublierai jamais, tu peux en être sûr. Et elle se donna une claque sur la fesse en rigolant. On se voit en fin d'après midi ?
D'accord ma belle, j'ai répondu. On se retrouve avant que tu partes. Promis.
Je me suis rendormi une petite heure puis je suis allé prendre un café dans la cuisine de l’hôtel. Marina y était. Elle avait le regard sombre et, sans cérémonie, elle a dit, tu es sans doute fier de toi ? Baiser avec une gamine poilue comme un singe. Vous n'étiez pas beau à voir tous les deux sur ce lit.
Bonjour d'abord, Marina. Il y a un problème ?
Oui, je trouve cela dégueulasse. C'est bien connu, les françaises ce sont toutes des putes.
Oh non Marina, pas ma mère. Ma mère n'est pas une pute, je peux te le certifier.
Fais pas le malin avec moi Bornu. Ta mère, comme les autres, une pute. Sinon, elle se serait abstenue de mettre au monde un type comme toi. Et puis, se faire tailler une pipe dans la rue par une gamine et laisser tomber sa canne, ce n'est pas très fin tout ça.
C'était donc toi, la personne qui nous matait dans ce passage. C'est toi la dégueulasse, pas nous.
J'arrivais pas à dormir, alors je suis partie vous rejoindre au Lukuku. Je vous ai vus au loin prendre ce passage. Je voulais vous rejoindre. J'étais loin de penser à ce que vous avez fait. Si tu crois que je prends mon plaisir à regarder ces horreurs là, tu te trompes.
Mais qu'est-ce qu'il t'arrive à monter sur tes grands chevaux, j'ai dit. Excuse pour le bruit, si c'est ce que tu veux, des excuses. Mais pour le reste, c'est ma vie. Cela ne te regarde pas.
Jusqu'ici, elle avait une tasse dans la main et s'était tapotée les lèvres avec une serviette deux ou trois fois. Je remarquai qu'entre ses doigts, maintenant, la tasse tremblait. Elle la reposa et me foudroya du regard.
Bien sûr que ça me concerne. Si tu avais la moindre jugeote, tu ne poserais pas ce type de question. Puis elle a dit, d'une voix haute et froide, tu passes la soirée avec moi et tu baises avec une gamine quasiment sous mon nez. Tu me crois insensible ?
Je n'ai jamais dit cela.
Elle ne m'a pas écouté et elle a ajouté, d'une voix éteinte, je ne te plais donc pas ?
Ce n'est pas la question, Marina. Tu sais mon âge ? Tu es bien trop jeune pour moi.
Je sais que ce n’était pas très fin de dire cela, mais je le pensais réellement. Elle s'est mise à hurler.
Tu baises avec une pute de singe française qui a tout juste 18 ans et moi, qui ai 32 ans, je serais trop vieille pour toi. Tu n'es qu'un gros con le Frenchie, et elle tapa du poing sur la table.
Je suis resté coi. J'aurais jamais imaginé Marina tapant du poing sur une table.
Marina, calme toi. On est amis tous les deux.
Non, Bornu. Pourquoi tu n'as pas essayé avec moi? Tu n'as pas eu un geste depuis que je te connais, pour me monter que je te plais. Tu détestes peut-être les filles comme moi ?
Au contraire, Marina. Je te trouve superbe, et j'ai eu plus d'une fois envie de t'embrasser. Plus même, je pensais que je n'avais aucune chance avec toi. C'est juste pour cette raison. Tu es beaucoup trop belle pour moi.
Cette dernière phrase était stupide aussi, je le savais. Marina est une femme au-dessus du commun. Dans la rue, même les filles s'arrêtent pour l'admirer. Et sans doute que si j'avais eu 20 ou 30 ans de moins, j'aurais agi autrement, j’aurais laissé aller mes sentiments et me serais battu comme un lion pour elle. Aujourd'hui, je n'étais pas de taille face à des beaux mecs de son âge. Moi avec elle, je croyais que je n'avais pas une chance sur un million.
Je me suis approché d'elle et j'ai posé une main sur son épaule. Excuse-moi, Marina. Si j'avais su.
Me touche pas, Frenchie, elle a crié en se tournant d'un quart vers moi. C'est trop tard et tu comprends rien.
J'ai fait un bon en arrière. Marina s'est levée et m'a fait face.
C'est toujours la même chose avec vous les garçons. Vous baisez avec n'importe qui et à moi, vous dites que je suis trop belle pour vous. Je me retrouve toujours seule à la fin. Tu sais, c'est dur et douloureux à porter d'être la plus belle.
À mon tour, je me suis énervé. Elle aussi disait des phrases bateau que je ne supportais pas.
Marina, j'ai dit, arrête de faire ta malheureuse. Je connais des centaines, voire des milliers de filles, qui rêveraient être rien que le quart aussi belle que toi. Alors, ne fais pas ta narcissique malheureuse. Personne ne m'aime parce que je suis la plus belle, j'ai fait, en imitant sa voix. Marina, c'est des conneries. C'est dans ton esprit que cela se passe. Tu te prends pour une princesse ou je ne sais trop quoi d'autre. Tu te regardes trop dans le miroir et tu ne regardes pas assez les filles et les garçons de la rue. Tu n'as qu’à faire comme nous, si tu as envie de quelqu’un, bats-toi pour lui montrer tes sentiments et arrête avec ton narcissisme de petite fille bien élevée.
J'ai juste eu le temps de finir ma phrase que je recevais une baffe monumentale. Une seule. Mon oreille en sifflait, mais j'ai quand-même compris ce qu'elle m'a dit, avant de faire demi-tour.
Tu as raison.
Ensuite, elle est retournée dans le dortoir et a fait ses bagages. Elle a payé la nuit et est partie. Je ne l'ai plus revue.
Mais, une semaine plus tard, j'ai eu des nouvelles. J'étais dans la ville de Puno, dernière ville péruvienne, à la frontière avec la Bolivie, au bord du lac Titicaca et berceau de la civilisation inca. Je buvais un café dans un bar, dans la rue principale, quand la Française de l'Hostel Lucky, qui jusqu'ici n'avait pas quitté les bras de son superbe Péruvien, rentra et me vit. Je lui proposai un café. Elle travaillait comme volontaire dans un hôtel sur la place de la cathédrale et attendait de l'argent de France. Elle avait les traits tirés. Il n'y avait plus aucune trace de bonheur sur son visage. Ce n'était pas difficile à deviner, elle le portait sur elle. Elle s'était faite larguer par son mec. Dehors, il faisait un froid de canard. Depuis deux heures, il pleuvait des cordes. Par la fenêtre du café, je voyais les gens dans la rue, pliés en deux, faisant des grimaces sous leurs parapluies, et beaucoup étaient coiffés, le plus souvent avec classe, de leurs chapeaux melons, leurs hautes-forme ou leurs bonnets à oreillettes traditionnels des indiens Quechuas et Aymaras du lac Titicaca. Sur les carreaux, la buée laissait des traces qui ressemblaient à de la bave. Je me sentais bien au sec et au chaud. Elle a commencé très fort et je me suis dit. Ça y est, on recommence.
Toutes des putes, les Colombiennes et les Américaines (déjà, j'avais compris ce qu'il s'était passé). Tu te rappelles le bar à coté de la place San Blas, elle m'a demandé.
Oui, je vois bien, le Km Zéro.
C'est ça. Donc, elle a quitté notre hôtel. Tu vois, le jour où toi et la petite Française et le pitbull...
Je l'ai coupée, je ne voulais plus entendre parler de pitbull. Oui oui, je vois très bien. Elle a donc pris un autre hôtel, avec une chambre perso. Pas un dortoir. Elle savait ce qu'elle faisait, la sale pute.
J'avais envie de lui dire, bon, c'est fini les insultes entre filles, ça vous grandit pas, ni toi, ni elle. Mais la haine était trop forte. Cette fille était salement blessée. Elle avait dû l'aimer du plus profond d'elle-même, son Péruvien. D'un coup, son monde s’écroulait. Elle s'était transformée en une bombe attendant d'exploser sa haine. Elle aurait été capable de déchiqueter le beau Péruvien et Marina.
C'est donc au Km Zéro qu'ils se sont vus pour la première fois. Dès que je suis rentrée dans le bar, car j'avais rendez-vous avec Mario, la chienne perverse m'a vue. Elle m'a fait un sourire sournois et elle est partie en douce. J'avais compris son jeu. De toute façon, Carlos n'était déjà plus le même. Je sentais qu'il était sous le charme de cette sorcière. Si vite, quand-même ! Non, j'aurais pas cru cela de Carlos. Le soir même. Tu comprends ce que ça veut dire ? Deux heures plus tard, il me larguait comme une vieille chaussette. Il m'a dit qu'il ne m'aimait plus et, sans autre explication, il a fait son sac et a changé d’hôtel. Je l'ai suivi, je me suis traînée à ses genoux, je lui ai promis tout ce qu'il voulait. Mais non, rien, il n'a plus dit un mot. Il m'a abandonnée dans la rue.
Elle avait les larmes aux yeux. Il n'y avait rien à dire. Se faire larguer par quelqu'un qu'on aime au bout de deux mois ou de vingt ans ne change rien. La même douleur vous déchire les entrailles et il n'y a aucun baume pour vous soulager, excepté le temps, ce foutu temps de l’absence et de la souffrance, avec lesquelles vous allez vous coucher en boule, le poing dans le ventre, nuit après nuit, sans pouvoir dormir avant de longues et douloureuses heures. Avec la haine qui était en elle, je lui souhaitais bon courage. Il allait lui en falloir.
Oui, elle a repris, on était bien tous les deux, avant que cette salope de sorcière ne l'ensorcelle. Je ne vois pas d'autre raison. Elle est peut-être belle, pour vous les mecs. Mais quand on la regarde de près, on voit bien que ce n'est que du vent. Elle finira toute ridée, seule et ce sera bien fait pour cette pute colombienne.
J'avais envie de lui dire que c'était le lot de toutes et de tous, salopes ou pas, de finir ridés et seuls. C’était peut-être moche aux yeux de personnes âgées de seulement 30 ans, mais avec les années, la démolition et la solitude, personne n'y échappait. Cette Française me déprimait. À la fin, dans ce bar, elle parlait autant à elle-même qu'à moi. Toutefois, j'appris que tous les deux étaient partis à Lima. Carlos avait toute sa famille dans la capitale et la Française connaissait son adresse. Elle n'allait pas se laisser tondre la laine sur le dos sans réagir, a-t-elle dit. Ils vont en chier, je peux te le jurer. Je pars dans huit jours à Lima. Je ne vais pas les lâcher d'un pas. Si moi je suis malheureuse, je ne vois pas pourquoi la pute et lui seraient heureux. Tu n'es pas d'accord, elle m'a demandé. J'ai juste dit si si, pour avoir la paix et j'ai ajouté qu'il fallait que j'y aille, j'avais mon blog à écrire. Elle est restée assise et je suis allé au comptoir payer nos deux cafés.
Avant de sortir, je me suis retourné. Elle regardait fixement par la fenêtre du bar. Des larmes mouillaient le coin de ses yeux et elle avait les dents serrées. Les poings aussi. J'ai ouvert la porte du café et être happé par la pluie froide des rues de Puno fut un soulagement.
Même si je ne pouvais pas être heureux de la douleur de cette fille, j'étais content pour Marina. Le Péruvien était un type sympa et attentionné. Ils formaient un magnifique couple. Contrairement à ce que disait la française, je ne voyais pas Marina plonger dans les bras de Mario dès le premier jour. Je crois que cette fille a une éthique de l'amour. Elle n'irait pas coucher avec un homme qui a déjà une histoire. J'imagine plutôt que Mario a dû donner de sacrés gages avant que Marina l'accepte, comme par exemple de se séparer immédiatement de la Française. C'est cela, j'imagine. Elle a attendu deux ou trois jours avant de coucher avec lui. Et, ensuite, elle a tout donné. Je suis sûr que Marina fait une merveilleuse amoureuse. Et j'avais certainement tort (mais je n'ai pas eu le temps de m'expliquer). Elle n'est pas une grande narcissique, elle est juste un peu paumée avec toutes ces images merdiques que véhicule une société d'hommes au sujet des femmes. Je suis sûr que tous les deux vivent une très belle histoire. En tout cas, je leur souhaite, ce serait un très beau cadeau ce soir, puisque c'est le soir de noël.
Je suis sur l'Île du Soleil, sur le lac Titicaca. À part en faisant les courses ou en croisant les Indiens sur les chemins de l'île, je n'ai parlé avec personne depuis 6 jours. Je pense beaucoup à la fille du président. Souvent, elle me manque, sa présence me manque. En même temps, son fantôme est souvent à coté de moi. Quand je marche dans l'île, canne à la main, je souris. Je vois ma canne tomber pendant qu'elle me fait une petite gâterie. Je me suis aussi surpris à rire en me rappelant qu'elle m'avait appelé Pépé. C'était la première fois qu'on m'appelait Pépé. Faut bien en passer par là aussi, non ? Surtout quand on a une canne ! Je la vois se mettre une main devant la bouche et s'excuser tandis que je la regarde, furieux. Aujourd'hui, je peux en rire, ce qui n'était du tout le cas à Cuzco. Le seul souvenir qui ne me fait toujours pas rire et, au contraire, qui me donne encore des frissons d'horreur, c'est de me rappeler Lula en train de me renifler le trou de balle. Si je peux dire ainsi, je n'arrive pas à prendre du recul avec cette image. Ça doit être mon coté mec. J'associe immédiatement l'image de mon cul et ce pitbull avec l'image de mes couilles et de Lula en train de les bouffer. C'est d'un désagréable !
La fille du président me manque, aucun doute. La raison est peut-être due au fait que nous n'avons pas pu nous revoir avant son départ pour le Chili. Elle et ses deux amis avaient avancé l'heure de leur départ parce qu'il y avait une promo sur les prix des bus de l'après-midi. Elle m'a dit sur Messenger, viens tout de suite Bornu, nous partons dans une heure. Hélas, le temps que je lise le message et que je coure à la station d'autobus, je la ratais de 5 minutes. Cela fait 15 jours exactement et, depuis, je n'ai reçu aucune nouvelle d'elle. Des fois, je me demande si c'est à cause de cette nuit où nous avons fait l'amour. Je n'étais pas trop fier de moi et j'ai un peu, un peu seulement, mauvaise conscience. Ça avait été une nuit sauvage et elle n'a que 18 ans, tout compte fait. Presque 19, elle m'avait dit au lit, dans 4 mois mon chou.
Nous y sommes donc, au 24 décembre, le jour le plus terrible de l'année, tout le monde est en famille, exceptés quelques millions d'hommes et de femmes seuls, immensément seuls. Je me suis promené plusieurs heures sur les chemins de l’Île du Soleil. Mon dos tenait, je faisais des photos de lamas, d'alpagas, d’ânes, des couleurs sur le lac, des montagnes enneigées au loin, des pierres et des fleurs de l'île, mais pas des hommes et des femmes. Je n'ai jamais su photographier des hommes. Je ne m’en sens pas légitime. Et puis je crois, comme certains peuples, que faire une photo d'une personne, c’est lui voler son âme. J'ai fait quand-même quelques photos d'enfants mais j'étais pas fier de moi, car, sur une photo, vous verrez si vous regardez mon blog, une enfant tend la main pour que je la paie.
Le soir approche et, avec lui, je sens grandir un nœud de tension dans mon ventre. Chaque année, à la même heure, entre 4 et 6 heures, c'est la même chose. L'angoisse de la solitude me saisit et ne me lâche plus, jusqu'à ce que je trouve le sommeil, au milieu de la nuit, souvent après avoir bu une ou deux bouteilles de vin. Je me pose toujours la même question. Est-ce que cette année encore, je vais réussir l'épreuve et en sortir vivant ? Noël, c'est la mort sans la fête des morts et, de toute façon, a-t-on vu quelqu'un mourir une nuit de noël parce qu'il vient de prendre conscience de l'absolue solitude de tout être vivant ? Que cette solitude est le côté irréductible à notre désir du commun, d'être avec des amis, des amours, de la famille ? Goûter à la solitude d'un soir de noël ne serait-il pas plutôt la souffrance nécessaire pour que nous puissions vivre 364 jours de l'année en paix? Je ne sais plus. Mais je crois que oui.
Je vais, comme tous les soirs, au restaurant Pachamama, en haut du village. Il y a la fille et la maman. Ce sont des Guatémaltèques en vacances au Pérou et en Bolivie. Elles ont une chambre dans un hôtel pas très loin du mien. Je les ai saluées et j'ai été m’asseoir face à la baie vitrée qui donne sur le lac, du côté nord-ouest, et donc du côté Pérou. À l'horizon, il y a une immense masse de nuages noirs sous laquelle un soleil d'un rouge fluo et en même temps d'un rouge d'une douceur incroyable subsiste encore en entier, au dessus des montagnes. Dès que le soleil disparaît, les couleurs du ciel s'intensifient et celles de la terre de l’île deviennent plus charnelles, comme une révérence à la lumière, avant que, évanescente, celle-ci ne se meure dans la nuit. Il n'y a personne d'autre dans le resto. À côté du Pachamama, dans l'autre restaurant ouvert, un groupe de 6 personnes sont en train de prendre leur repas, peut-être des Américains ou des Canadiens car, dans l'après-midi, je les ai entendus parler anglais. Il y a aussi deux filles, des Allemandes, qui faisaient des photos du coucher de soleil dans le village. C'était la première fois que je les voyais et elle sont vite rentrées dans leur hôtel. Les deux petites filles que j'ai prises en photo tout à l’heure, dont une me tendait la main pour que je lui donne de l'argent, ont conduit leurs lamas, qui étaient à la pointe de l’île, dans la petite étable de la maison de leurs parents. Il n'y a donc plus personne dehors. La nuit arrive, il est 19h30 en Bolivie, une heure de moins au Pérou. Quand j'ai eu fini de manger la truite avec du riz, unique plat de cette soirée, j'ai eu envie d'un truc de sucré parce que nous étions le soir de noël. La patronne a ramené quelque chose qui ressemblait à de la crème brûlée, et c'était excellent. Je suis encore resté regarder le paysage à travers la baie vitrée du Pachamama. Dans le ciel, les couleurs vives s'étaient dissoutes en quelques traits oranges et grenats qui résistaient encore à l'encre de la nuit. Et puis, soudain, le ciel s'est illuminé, comme chaque soir. Il est redevenu comme en plein jour. On voyait le lac et, à l'horizon, les montagnes à des centaines de kilomètres. Cela a duré une fraction de seconde, ce ciel zébré d'un éclair furieux puis la nuit est tombée, noire, intense. On sentait venir la pluie. J'ai remercié la patronne et le serveur et je leur ai souhaité bon Noël. J'ai fait aussi une bise aux deux Guatémaltèque, puis j'ai mis mes gants, mon foulard et mon bonnet à oreillettes et j'ai pris ma canne. Des le premier pas, j'ai senti le froid de cette nuit-là. Un froid différent des autres nuits, le froid de l'homme seul. Il y avait de la lumière dans les quelques maisons du village mais, déjà, les trois petits magasins fermaient leurs portes. J'ai eu juste le temps d’acheter, au double du prix du continent, une bouteille de rhum et une de coca, le vin étant hors de prix. Mais, avec la bouteille de rhum, j'avais largement assez pour combattre contre la mort, la solitude et même le père Noël, s'il venait à déposer des cadeaux dans mon soulier. Ça faisait longtemps que je ne croyait plus au père Noël. Si toutefois je me trompais et qu'il passait me voir, j'espère qu'il savait boxer car j'avais la haine contre lui, et le seul cadeau que j'allais lui offrir, c'est un uppercut bien placé. Je posais avec précaution ma canne entre les pierres du chemin pour ne pas glisser, je redescendais du côté est de l'île et il ne restait plus aucune lumière, exceptée celle, blafarde, qui s'échappait des fenêtres de quelques maisons. Si tôt dans la soirée et il était déjà impossible de marcher sans une torche. Pendant les 10 minutes qui séparaient l'hôtel du village, je n'ai rencontré qu'un vieil Indien qui remontait avec ses trois ânes. Il m'a juste dit bonne nuit et j'ai répondu bonne nuit, mais le ton n'y était pas. Je savais que cette nuit n'était pas une bonne nuit.
La Bolivie comme le Pérou sont des pays pauvres. Le chauffage est un luxe que ne peut se permettre ni la majorité de la population ni les hôtels pour petits budgets. Sur l'île du soleil, dans la journée, il fait bon et on peut marcher en short, avec son pull autour de la taille. Cependant, à quatre mille mètres d’altitude, la nuit, les températures sont plutôt proches de zéro. Ma chambre avait conservé la chaleur de la journée. Quand j'ai refermé la porte derrière moi, je me suis senti au chaud. J'ai enlevé mon pull mais, très vite, je me suis rendu compte que ce n'était qu'une illusion due au contraste avec l'extérieur. Il ne faisait pas si chaud que ça et je l'ai vite remis. Je me suis servi un grand verre de rhum avec un peu de coca et, machinalement, j'ai allumé mon ordinateur. Depuis trois mois, je n'avais lu aucun livre. Je ne lisais que des journaux et des revues en espagnol, avec un stylo à coté de moi, et une application de traduction espagnol/français allumée sur mon smartphone ou sur mon ordinateur. Je traduisais des articles avec une lenteur exaspérante et, au bout d'une heure, j'étais complètement crevé, je n’avais plus aucune envie de lire. Ce n'est pas ce soir que j'allais m'y mettre, même si la lecture d'un roman ou d'une poésie me manquait.
Internet ne passait déjà plus et je me suis surpris à penser que j'étais coupé du monde. Des bêtises. L'ordinateur n'a jamais été le lien unique avec le monde. Il était si tôt, je n'avais rien à faire et je n'avais pas de télé pour boucher ce gouffre d'ennui qui s'ouvrait devant moi. Aussitôt après avoir bu mon verre de rhum coca, je me suis resservi un verre de rhum sans coca et je l'ai bu cul sec. J'ai soufflé, je me sentais mieux et j'ai commencé à écrire cette histoire.
Je n'avais pas écrit plus de deux lignes que j'ai entendu les premières gouttes tomber sur les marches de bois de l'escalier extérieur. C'étaient des gouttes lourdes comme l'annonce de la fin du monde. Plouc plouc plouc, elles faisaient et elles résonnaient jusque dans mon crâne. J'ai été ouvrir la porte et j'ai vu que la masse de nuages qui était à l'horizon quand je mangeais au Pachamama s'approchait de l'île, le vent s'était levé. Il y avait des éclairs et il y a eu le tonnerre. J'ai compté 6 secondes de décalage. Cela devenait sérieux, surtout que ça s'est mis à péter trois fois, très fort, et que la pluie s'est précipitée sur l'hôtel et a crépité sur le toit. On n'entendait plus rien d'autre. J'ai commencé à trembler. J 'avais une peur bleue de l'orage.
Putain de Noël ! Pas d'Internet et de l'orage, il ne manquerait plus que le père Noël fasse son apparition et je faisais un infarctus, tandis que la foudre tombait sur l'hôtel, explosait mon ordinateur et me grillait les neurones.
On m'a toujours dit de faire comme ça et c’est ce que j'ai fait. J'ai refermé la porte et j'ai vite éteint mon ordinateur. Ça n'a d'ailleurs servi à rien car, moins de trente secondes plus tard, il y a eu une coupure généralisée d’électricité. J'étais dans le noir complet et je flippais encore plus. Les éclairs se multipliaient et je comptais l'écart avec le bruit du tonnerre. On était rendu à 4 secondes, puis à trois, deux et même une seconde. C’est une toute petite île que celle du Soleil, au milieu d'un lac qui fait plus de 100km de long. Quand l'orage éclate, le son se propage sur l'eau et sur toute cette étendue d'air, sans aucun obstacle. J'avais l'impression que le son était la voix d'un ogre affamé et fou qui avalait l'espace, la terre et le lac, en éclatant de rire. Le ciel se couvrait d'éclairs. Parfois, on voyait plus loin qu'en plein jour par flash et, parfois, c'était des salves de trois ou quatre éclairs, suivies de roulements de tambours infernaux et de coups de canons si proches qu'ils semblaient exploser sur votre peau. En dehors des éclairs, tout était d'encre dans l'île et l'atmosphère était chargée à bloc de je sais trop quoi qui vibrait dangereusement comme une bête invisible et monstrueuse qui allait bientôt apparaître en crachant du feu, monsieur, que Noël est une torture ! J'ai vite été me réfugier sous les couvertures du lit. J'aurais voulu que quelqu'un me prenne dans ses bras. L’orage augmentait. La pression se faisait sentir jusque dans la pièce. La lumière des éclairs jaillissait dans la chambre. Je comptais encore deux secondes puis une, ça n’arrêtait pas, cette guerre du ciel et de la terre. Je crois que les couvertures, les draps, les murs et surtout mes cheveux vibraient. J'aurais mis mes doigts dans une prise, je m'imagine avoir la même sensation, de n'être plus qu'à un instant de brûler.
Puis, après, il n'y a même plus eu de tonnerre, ce n'était presque que le silence, mais je savais qu'on était au cœur de cet orage et qu'entre le bruit du tonnerre et l'éclair, il n'y avait plus rien d'autre que le toit. À ce moment-là, j'ai entendu des cracs. Trois fois. Je savais ce que c'était. La foudre tombait aux alentours, à moins de 30 mètres, j'aurais pu la toucher de la main. Mais j’étais tétanisé, aucun doigt ne bougeait, mon cœur ne battait plus pendant que mes cheveux se dressaient et accusait le ciel. Je tremblais de toute mon âme, mon corps refusait tout mouvement. Il me demandait de le rendre invisible.
Puis, à nouveau, il y a eu un décalage entre le son de l'orage et la lumière. Une seconde puis deux secondes. L'orage s'éloignait, il quittait l’île. Il y avait encore toute la masse de nuages au dessus de l'hôtel, mais le cœur électrique de la bête nous avait dépassés. L'eau tombait encore à une incroyable vitesse et elle tambourinait sur le toit, comme si la pluie désirait me cabosser la tête. Mon Dieu, cela avait duré 15 minutes tout au plus, mais, parfois, il y a des minutes qui nous révulsent comme l'éternité de la mort.
Je n'ai jamais eu aussi peur de noël que ce soir-là. Je me suis dit, la bonne droite que je vais lui mettre au P'tit Père des cadeaux. Dans son intérêt, valait mieux pas qu'il vienne.
Et pourtant, en quelque sorte, c'est ce qu'il a fait.
Il ne s'est pas réellement pointé, vous vous en doutez. Mais néanmoins, il m'a fait un cadeau.
Il a fait nuit noire encore vingt minutes. Je suis sorti de ma chambre. On aurait dit que l'orage n'était jamais passé par l'Île du Soleil. On sentait juste le froid et cette humidité lourde de la pluie qui s'était posée sur toute chose. J'ai mis mon bonnet, mes gants et ma veste. Il y avait quelques étoiles au-dessus de nous. Ici et là, la lumière des petits villages autour du lac aidait à en deviner les contours. Ça a fait ploc, un petit bruit, et la lumière est apparue dans ma chambre. Dans les maisons voisines aussi. Dans l’hôtel, j'étais seul. Les propriétaires et leurs deux enfants vivaient de l'autre côté. J'aurais aimé avoir un peu de présence, mais non. Dans l’hôtel où il y avait les deux Guatémaltèques, il n'y avait pas de lumière. La fille et la mère devaient dormir avec des boules Quiès ou alors elles avaient un sommeil de plomb. Il y a des personnes que rien ne dérange pendant leur sommeil. De toute évidence, c'était le cas de ces deux femmes. Même l'enfer ne les empêchait pas de dormir. Je suis rentré à nouveau dans ma chambre, il y faisait froid mais j’étais habitué au froid de ces hôtels de montagne. C’était juste un peu dur pour les mains. Si vous vouliez écrire la nuit, ce qui était mon cas, j’étais obligé de les réchauffer toutes les cinq minutes.
Soudain, j'ai dressé l'oreille. J'entendis l'universel petit son de mon smartphone indiquant que j'avais un appel.
Miracle. Internet fonctionnait et on m'appelait.
J'ai sauté sur mon smartphone et ouvert Messenger, c'était Lou, mon fils. Il avait écrit Bon noël Papa et il envoyait une photo de lui et de sa maman. J'ai été surpris de trouver sa mère très belle, toujours. Elle avait des cheveux blonds et longs, aussi beaux qu'au moment où je l'avais connue. Ses yeux pétillaient. Je savais qu'elle avait bu ses deux verres de champagne. Lou, qui allait avoir 19 ans, portait une longue barbe rousse. Je le reconnaissais à peine. J'ai répondu aussitôt. Qui est cette jolie jeune femme un peu pompette a côte de ce très vieux père Noël ? Bon Noël à vous deux ! Bien qu'il fut six heures du matin en France, il a répondu dans la seconde, LOL !
Et puis encore une sonnerie? C'était qui ????
C'était mes amis Nico et Marianne. Ils étaient maintenant à Grenoble et Nico essayait de réparer les conneries faites par les chirurgiens de cette clinique de Popayan, en Colombie
Je leur avais envoyé un bon noël quelques heures plus tôt. Ils me répondaient.
Oui, moche et dégueulasse. Je ne sais pas si cela va te remonter le moral mais voilà ce qu en disait à raison le bon vieux Bukowski.
On t'embrasse fort.
Ce poème était une vrai piqûre de rappel. Bukowski n'avait pas besoin de milliers de mots pour dire exactement ce que nombreux, nous pensions. Je me suis promis de le relire au moins un fois par an.
Je leur ai répondu aussitôt que j'avais justement envie de lire un poème de Bukowski une nuit de noël pour me sentir mieux, et c'est fait. Je me sens mieux ! Merci les amis. Et j'ai ajouté une dizaine de stickers de bisou.
Encore ! Quelle adorable sonnerie. C'était qui ? Qui ? Qui ? C'était elle !!! J'ai vite ouvert.
Salut mon chou, va vite sur ton mél.
J'ai retenu ma respiration, j'ai fermé l’application Messenger, ouvert mon mél et j'ai vite trouvé le sien, elle l'avait intitulé, la fille du président. Bien sûr. Je ne l'ai pas lu tout de suite. Je me suis levé, j'ai remis ma veste, mes gants, un bonnet. Je suis retourné dehors, ai regardé le ciel. On y voyait un peu plus d'étoiles. L'orage avait disparu et j' étais encore vivant. La nuit était loin d'être finie, mais j'avais l'intime conviction que cette fois ci encore, je devrais survivre. J'avais plus du tout envie de boxer le père Noël. Mon fils, des ami-es et la fille du président dans le même soulier, il ne pouvait pas me faire un plus beau cadeau. J'ai regardé le ciel. J'étais connecté au monde, un être sacré. L'univers était sacré. Je me suis dit qu'est-ce que c'est que ce charabia New-age que j'ai dans la tête ? Ce n'est pas parce que tu es sur le lac Titicaca, à 4000 mètres d'altitude, un soir de noël, qu'il faut te prendre pour un gourou. Tu es juste excité comme une puce parce que tu viens de recevoir un mél de la fille du président et que tu penses, n'est-ce pas! En fait, une petite pipe, hein Bornu? Une petite pipe, Pépé, un soir de noël, ça te dirait?
Oui, je me suis dit, c'est certain. Cela m'intéresse plus que les étoiles et l'univers entier.
Je suis rentré dans ma chambre, j'ai balancé mes affaires sur le lit et j'ai sauté sur l'ordinateur.
"SALUT MON CHOU"
C’était d'un nul d'appeler tout le monde mon chou. En même temps, j'adorais quand elle disait mon chou, en avançant ses lèvres et qu'on dirait une trompette. J'ai rebu un verre de rhum et je me suis mis à dévorer ses mots.
"Quelle connerie ces bus ! On n'a pas pu s'embrasser avant de partir de Cusco. Bornu Bornu Bornu, mille excuses de ne pas t'avoir donné de nouvelles parce que, à Arequipa, je me suis faite tirer mon téléphone à la gare routière et, tu sais, je n'ai pas beaucoup d'argent. Mais hier, on m'en a donné un autre et tu es la première personne à qui j'écris. Chéri, bon noël !
Je vais rentrer tout de suite dans le gras du sujet.
Quelle nuit j'ai passé avec toi. Et Lula ! Quel gros con cet asthmatique ! Et puis mon œil, asthmatique ! C'est juste un truc pour faire pleurer dans les chaumières et gagner du fric. Il n'est pas plus asthmatique que toi et moi. Je t'écris surtout pour te parler de l'après Lula, quand tu m'as enculée, mon chou."
C'est bien ce que je pensais, je n'allais pas lire une lettre de Chateaubriand. J'ai repris ma lecture, avec un enthousiasme hésitant.
"Tu me l'as vraiment bien mise tout au fond, ta jolie petite bite que n'avait pas dévorée le camarade Lula."
En effet, la fille du président ne faisait pas dans la dentelle. Elle avait vraiment pris une année sabbatique avec le parler correct de son école de prépa. J'ai continué à lire.
" Oh ne t'inquiète pas. Tu ne m'as pas violée. C'est bien moi qui ai écarté mes fesses au maximum et qui ai passé la tête à travers la fenêtre ouverte, moi qui t'ai guidé à l’intérieur et c'est encore moi qui ai crié dans la rue, je veux ta grosse queue. Hum mon chou, c'était ma première enculade. Tu m'as défoncé le trou duc et j'étais mouillée comme une petite fille qui vient de faire pipi dans sa culotte. J'ai adoré, encore plus la deuxième fois. Tu sais que j'en rêve encore la nuit. Je ne savais pas que c'était si bon. J'ai joui, jusqu'au fond de mon ventre et de mon cul à la fois. Quelle surprise pour moi qui n'avais fait que l'amour à la papa et taillé quelques innocentes petites pipes par-ci par-là. Pas beaucoup mon chou. Pas à tous les garçons à trente kilomètres à la ronde, comme tu me l'a dit, quand tu étais furieux, à Cusco. Non, à quatre seulement, mon grand-père, mon père, toi, et aussi le directeur du lycée Henry IV pour qu'il augmente ma moyenne. Claro que no ! Es una broma, amor ! Bien sûr que non, c'est une plaisanterie amour ! C'est quand même ta queue que j'ai préférée, même si elle avait un petit goût de caca après son gentil passage dans mon petit cul de jeune fille en fleur de chou. MDR !
Promis, je n'ai rien bu et n'ai pris aucune drogue. Une question très philosophique maintenant.
À part baiser et se faire sodomiser, à quoi d'autre peut penser une jeune fille bien élevée, ce qui est mon cas ? Et bien à rien d'autre. Et tout ça, c'est de ta faute si je deviens accro au sexe. C'est trop bon. Merci merci merci.
La plupart des garçons que j'ai connus n'aiment pas faire ça . Ils trouvent ça dégueulasse parce qu'il y a de la merde mais c'est des cons qui comprennent rien. Moi, je dis et je crois qu'il y en a beaucoup avant moi qui l'ont déjà dit. Là où il y a de la merde, il y a de la vie. Voilà Bornu. Depuis cette nuit-là, je ne suis plus la même. Je ne sais pas comment le dire. Je suis comment ? Plus large, plus épaisse. J'ai pris du volume, du muscle, de la profondeur. C'est bête de dire que je me sens une autre femme parce que j'ai pas les mots pour le dire. Je me sens plus qu'avant, j'ai quelque chose non en moins mais en plus. Quoi ? Impossible à dire. Ce que je sais, c'est qu'en me défleurant par derrière, tu m'as aidée à grandir. Sérieusement.
Je me suis repris une rasade de rhum. J'avais vraiment peur d'avoir été trop loin avec la fille du président. À la lire, elle m'enlevait toute mauvaise conscience et je savais que quand j'aurai fini cette lettre, j'irai me coucher. Je dormirai beaucoup mieux et noël sera passé.
Cette fille était la plus belle chose qui m'était arrivée depuis longtemps. J'avais envie de prendre à bras le corps mon ordinateur, de l'embrasser. Il y avait quelque chose d'elle là-dedans. J'ai continué.
"Il faut que je sois honnête avec toi Bornu. Je t'aime énormément et dès que je t'ai vu la première fois à Cali, j'étais trempée. Oh la la, il aurait fallu que je change de petite culotte toutes les trente secondes (J'exagère toujours un peu, tu as remarqué ?). Surtout que j'étais en short et tu cherchais ma chatte avec tes yeux qui étaient déjà en moi. Je savais que tu avais envie de moi... et moi de toi . Et qu'on allait coucher.
J'ai un petit copain. Il s'appelle Mario et c'est un Argentin, mais c'est un Argentin sympa, pas un arrogant comme beaucoup d'autres. Tu le connais, tu l'as vu une fois à Cusco. Il voyage avec moi et mon ami chilienne. Mais, à Cusco, je n'étais pas encore avec lui. Depuis notre nuit, j'ai envie de faire l'amour tout le temps et Mario est beau et très cool avec moi, et puis, à 22 ans, les queues des garçons sont un peu plus rapides à l'allumage que celles des plus vieux. Elles ont juste un petit défaut, ça se met à cracher tout de suite. Tandis que toi mon chou, tu tiens bien les longues distances. Sauf pour ma première p'tite pipe ! Ce ne seraient pas des images toutes faites sur la sexualité des hommes jeunes et vieux ce que je viens d'écrire ?
SI!
J'avais dit si, à haute voix, de toute ma conviction. En fait, j'en savais rien. J'avais toujours entendu des plaisanteries douteuses sur les queues des jeunes et des vieux. Tout bien réfléchi, peut-être que la fille du président avait raison. On est plus lent en vieillissant et aussi, même si elle ne l'a pas dit, on a moins de capacité de répétition qu''un jeune. Quand on a baisé une fois, au mieux deux, alors on est heureux. On sait qu'on ne pourra pas donner beaucoup plus. Tandis qu'à vingt ans, si je me rappelle bien... Fait chier les souvenirs ! J'ai ajusté mes lunettes et j'ai collé mon nez sur l'écran. Elle avait écrit.
"Je suis bien avec Mario. Surtout que toi, de toute façon, tu ne serais pas resté avec moi. Tu me l'as dit je ne sais plus combien de fois cette nuit-là. Je n'avais pas d'avenir avec toi, j'allais m'ennuyer, perdre mes meilleures années. Bornu, tu m'en as dit des conneries pour que je ne m'accroche pas à toi. Tu ne le sais pas, mais quand on s'est ratés à la gare routière, j'en ai pleuré.
Je ne crois pas du tout que je n'ai pas un avenir parce que j'aime me faire sauter par un pépé. Pardon Bornu, mais c'est bien cette question du pépé qui est importante. Ce n'est pas parce que j'ai dix huit ans que l'avenir est quelque chose qui se dessine sur dix ou vingt ou trente ans. Je peux aussi revendiquer un petit avenir de trois mois par exemple. Trois mois à faire l'amour avec toi et voyager avec toi. Cela aurait été très beau, fantastique peut-être. Tu n'en as pas voulu, alors j'ai pleuré dans le bus . J'ai pleuré, mais j'étais heureuse aussi. Tu m'avais bien défoncé le cul mon cochon, et puis je suis passée à autre chose, Mario. La vie est comme ça, Bornu chéri.
Tu sais d'où je t'écris, mon amour d'une nuit ? Non, bien sûr. On est sur l'île de chiloé dans la famille à Fausto, c'est dans le sud du Chili. Sa famille est comme Fausto, très chou. Je l'adore. Je suis bien avec Mario, mais toi, tu me manques. Mario est comme les autres garçons que j'ai connus avant, il n'aime pas faire ces choses-là. C'est peut-être la raison pour laquelle tu me manques tant.
Demain, on retourne sur le continent et on descend jusqu'à la Terre de Feu. J'ai hâte d'aller si loin dans le sud, j'en trépigne d'impatience. J'ai trouvé le livre que tu m'as indiqué, de Francisco Coloanne. C'est génial son Tierra del Fuego. Je ne voyais pas du tout la Terre de Feu dans les années 30 comme ça, avec ces bandits de grands chemins, ces milliers d'aventuriers venant à la chasse à la baleine, les derniers Indiens et, l'été, les étudiants de Santiago du Chili qui traversaient le pays pour aller faire une saison dans des immenses fermes isolées de tout. J'ai adoré et je vais lire ses autres livres.
J'ai beaucoup réfléchi aussi concernant mon année de prépa. J'ai toujours été bonne en sciences et en maths. Je suis une fille très rationnelle, même si ce n'est pas ce côté de moi que tu as vu. Je ne crois pas pour autant que je serais heureuse en choisissant une voix scientifique. J'aimerais faire de la philosophie, du journalisme. J'écris bien non ? Et puis, même si je n'écris pas bien, c'est cela que je veux faire aujourd’hui, étudier les sciences politiques, la philo, écrire pour des journaux. Quand je rentrerai à Paris, tu pourras m'aider ? Dis, tu viendras me voir ? Je te promets, je ne te toucherai pas.
Voila chéri pour l'essentiel des nouvelles. Ah j'allais oublier ! J'ai perdu au moins trois kilos grâce ou à cause de Mario. Il n'aime pas le poil. Lui ne me voit pas comme une ligne de coke ou de la MD ou une ecstasy. Il trouve que le poil ça fait sale. Je sais que je suis stupide. Cela fait un peu femme soumise. Pour lui plaire, j'ai tout rasé partout, même mes cheveux. Je n'ai plus un poil sur le caillou. Plus rien à déclarer. Rien sous les bras, rien sur les pattes, rien sur la foufoune et rien sur la tête. Cela l'excite comme un fou, Mario.
En attendant, moi j'ai une drôle de tronche. Elle est toute ronde. Je ne sais pas si tu m'aimerais ainsi. Oui ?
Je pense très fort à toi, et je t'embrasse d'un million de bisous de noël.
On se reverra Bornu, n'est-ce pas ?
Et elle avait signé d'un prénom qui ne correspondait pas à celui de son adresses mél.
Éloïse
Comment j'avais pu oublier un tel prénom ? Il était magnifique. Aujourd'hui, je dirais un prénom inoubliable.
Le matin, quand j'ai ouvert la porte de ma chambre, la lumière éblouissante du lac et du ciel réunis me fit cligner des yeux. Il faisait encore frais, mais j'avais mis mon pull, je me suis étiré et j'ai respiré à fond. J'avais passé une nuit à dormir d'une traite et sans rêves. Je me sentais en pleine forme. Le bateau pour le continent partait dans deux heure. Il était temps de me laver et de plier bagages. Éloïse, son nom, je l'avais en bouche comme un bonbon, je l'ai répété plusieurs fois et il fondait sous ma langue. Il avait un goût sucré et doux et en même temps âpre et ambré, comme son joli minois. J'étais heureux que son voyage se déroule parfaitement bien et j'étais encore tout surpris qu'elle ait adoré notre unique nuit alors que j’étais certain d'avoir été un goujat. La sodomie lui avait plu (Là aussi, elle exagérait, nous ne l'avions fait qu'une fois. J'avais juste pris une petite pause). N'empêche, c'était un beau cadeau qu'elle me faisait en m'écrivant qu'elle avait aimé. Je ne sais pas encore si de retour dans ma ville, j'irai la voir. Je me reposerai la question dans plusieurs mois, quand le temps aura décanté notre rencontre. Au fond de moi, je crois que oui, j'aurai envie de la voir. Éloïse m'avait offert une nuit incroyable de surprises et d'amour, mais elle ne pouvait être grande que si elle ne se répétait pas. On ne pouvait pas construire un avenir sur cette nuit de Cusco.
Elle me demandait un petit avenir de 3 mois. Je lui avait dit non. J'avais bien fait. Cela aurait été une catastrophe. J'aurai fini le voyage en tirant la langue et elle, les mains sur les hanches en me disant alors Pépé on assure plus ?... Peut-être pas ?
Personne n'est préparé à vivre avec une autre personne. On ne peut jamais rien en dire d’avance, cela aurait pu être bien ou catastrophique, un désastre ou une merveille. C'était un risque à prendre et pour être honnête, je me rappelai le visage de ces backpackers dans ce bar vénézuélien de Cusco quand je la tenais d'une main par la taille et de l'autre je m’appuyais sur ma canne. Ils avaient des têtes à vouloir nous écraser sous leurs réprobations et leurs préjugés. Je n'avais donc pas eu le courage de suivre la voie qu'elle m'avait proposée. C'est Eloïse qui ne manquait pas de courage, qui allait de l'avant, qui rejetait tout les préjugés Elle est forte, généreuse et elle se donne à fond. Je l'avait déçu en refusant de rester avec elle et parfois j'ai des regrets. Parfois seulement. A d'autres moments je me dit que j'avais eu mille fois raison de refuser. C'était important qu'elle fasse son voyage et qu'elle aime une personne de sa génération, pas de la mienne.
Éloïse est une femme petite, moins d'un mètre soixante, avec des yeux comme des billes, des seins ronds et fermes, une peau blanche, légèrement laiteuse des dents blanches aussi et régulière, une bouche un peu boudeuse qui fait que les garçons toute de suite pensent à plein de choses cochonnes, une jambe dont la cuisse est ferme et élastique, un cul comme un ballon bien gonflé, et son minois est adorable dont l'odeur est comme un tas de bonnes drogues dont on ne se lasse pas. Elle avait des cheveux châtains qui lui tombaient sur les épaulent et ondulaient quand elle faisait l'amour dans cette nuit de Cusco.
Quel con ce Mario !
Pas besoin de décanter longtemps cette rencontre avec la fille du président. J'étais maintenant certain. Je la reverrai.
fin
Depuis tout petit, le nom du lac Titicaca me fait rêver. Je voyais un océan sur le toit du monde, des Indiens philosophes, un ciel pur comme un diamant et je rêvais qu'un jour viendra où je pourrais vérifier si mes images correspondaient à la réalité. C'est fait !
La réalité est plus sublime encore que le rêve du lac Titicaca. Ce paysage dans lequel je m'étais fondu pendant six jours était devenu une partie de ma chair. Sans tomber dans le spiritualisme de bac à sable, je suis un peu de cette terre, de ce lac et de ce ciel. Pour toujours, ce paysage sera en moi. J'avais le cœur serré en quittant l'Île du Soleil.
Ce voyage arrive bientôt à sa fin. Une fois le bateau accosté au port de Copacabana, je prends un bus qui, en trois heures, va m’amener au plus loin et le plus au sud de mon voyage, à La Paz.
En ce jour de Noël, je vais arriver dans la capitale de la Bolivie, dont je ne connais rien, excepté le nom de son président, un Indien socialiste, Evo Morales. Ensuite, en repassant par le Mexique, j'aurai trois mois avant de rentrer chez moi, à Paris. Le compte à rebours commençait.
Et, pour finir, je vous envoie une chanson des Rolling Stones, de 1974. Je viens juste de la redécouvrir et il me semble qu'elle fait une bonne conclusion à cette histoire.
Time waits for no one
Bonne lecture et bonne musique j'espère. Si c'est possible, bon noël et surtout, prenez soin de vous.
Merci mille fois à Sylvain et Sarah pour leur patience et leurs corrections de ce texte
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