Tumgik
#putain de Bolloré et ses sbires... c'est terrifiant cette merde
thebusylilbee · 10 months
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Comme dans beaucoup de journaux français, un parfum de vacances flotte sur la rédaction du Journal du dimanche. Mais il est altéré par un goût amer : celui de l’arrivée à sa tête du très droitier Geoffroy Lejeune. L’ancien directeur de l’hebdomadaire Valeurs actuelles débarque ce mardi 1er août au sixième étage de l’immeuble de Lagardère News, dans le XVe arrondissement de Paris, pour prendre la tête d’un journal dont la quasi-totalité des troupes ne veut pas travailler avec lui. Un Lejeune seul dans son bureau sans rédacteurs en grève depuis près de quarante jours ? Pas sûr… Selon nos informations, les négociations entre les représentants de l’équipe, officiellement rompues depuis une semaine, ont repris avec la direction avec l’objectif d’obtenir de bonnes conditions de départs individuels, y compris pour les plus précaires. Lundi 31 juillet au soir, réunie en assemblée générale jusque tard dans la soirée, l’équipe devait décider de la poursuite du mouvement après six dimanches de non-parution – un record – de ce titre fondé par Pierre Lazareff en 1948.
Samedi, les salariés étaient encore 97% à voter pour la reconduite de la grève. Sans trop d’illusions. «Il y a quelque chose d’inéluctable [dans cette lutte], nous ne sommes pas naïfs», rappelle un journaliste, conscient que Vincent Bolloré – dont le groupe Vivendi doit absorber Lagardère – a toujours réussi ses tours de force précédents. Le journaliste Guillaume Caire assurait encore vendredi 28 juillet, lors d’un rassemblement devant le ministère de la Culture, que «la rédaction [était] toujours aussi unie et solidaire». «La communication [en interne] est moins bonne», tempérait un rédacteur.
«Un grand point d’interrogation»
Ce même jour, place du Palais-Royal pour – a priori – un dernier rassemblement, peu de monde osait alors imaginer l’arrivée de Lejeune dans une équipe où, comme le rapportait une journaliste, «beaucoup de gens se sont organisés pour se rajouter des vacances». Elle y compris. «C’est un grand point d’interrogation», rappelait de son côté la cheffe du service Société, Emmanuelle Souffi. Quelques idées circulaient alors sur la manière d’accueillir le nouvel arrivant. Mais aucune proposition concrète, disait-on, ne se faisait sur le groupe WhatsApp de la grève. Seul David Assouline, sénateur PS de Paris venu soutenir le mouvement, se remémorait ses luttes étudiantes et proposait un «blocage»…
Lejeune, ancien leader de la rédaction de Valeurs actuelles lui-même débarqué par l’actionnaire de l’hebdo d’extrême droite pour son positionnement trop radical – il était un soutien revendiqué d’Eric Zemmour et est un très proche de Marion Maréchal – devrait donc bénéficier d’un premier jour calme. Quand – et comment – sortira le prochain numéro du JDD ? Depuis un communiqué publié le 24 juillet, la direction assure que Lejeune «travaille et prépare les éditions du JDD à venir». Mais tout dépend de la suite du mouvement et de la volonté de ce qu’il lui reste d’équipe en attendant des arrivées. Selon plusieurs bruits de couloirs, Lejeune serait accompagné de Charlotte d’Ornellas, l’une de ses plus fidèles à Valeurs actuelles et polémiste régulière de CNews. Il pourrait aussi être épaulé de Laurence Ferrari, déjà à Paris-Match. Même si la grève prend fin, sortir un journal de qualité risque d’être compliqué.
Dans l’intervalle, la Société des journalistes (SDJ) compte s’assurer de bonnes conditions de départs pour tous. Tant pis pour le contenu de la charte éthique : l’équipe souhaitait qu’elle mentionne explicitement l’interdiction de «toute publication de propos racistes, sexistes et homophobes». Refus de la direction. Outre le combat social, les journalistes du JDD espèrent que leur grève fera avancer le pouvoir politique dans la protection des rédactions. Première réussite, l’ouverture d’«états généraux de l’information» en septembre. L’exécutif a ressorti cette promesse des cartons de campagne d’Emmanuel Macron quelques jours après la demande, mi-juillet, d’une lettre ouverte des salariés du JDD au président de la République. Consciente qu’il s’agit pour le moment d’une simple annonce, la rédaction espère que ce rendez-vous ne se transformera pas en «coquille vide».
«Une “loi JDD”, ce serait une victoire»
Autre espoir : une proposition de loi transpartisane visant à protéger l’indépendance des rédactions. Son but serait d’agir en faveur des rédactions en «conditionnant les aides à la presse» ou, pour l’audiovisuel, «l’octroi de canaux TNT et de fréquences radio», à «la mise en place d’un droit d’agrément des journalistes sur la nomination de leur directeur ou directrice de rédaction». Emmenés par Sophie Taillé-Polian (Génération·s, groupe écologiste), les députés veulent offrir un droit de vote aux journalistes pour – comme c’est le cas au Monde ou à Libération – pouvoir s’opposer à la nomination d’une personnalité par la direction ou l’actionnaire majoritaire. Le Rassemblement national et Les Républicains ont, en revanche, refusé de s’y associer. Le porte-parole du parti d’extrême droite, Laurent Jacobelli, député de Moselle, rappelait lundi matin sur France Info que «la presse est libre, […] je ne vois pas ce qui pourrait empêcher la nomination d’un rédacteur en chef».
En plus de mobiliser les députés, l’équipe du JDD a approché, à deux reprises, le cabinet de la ministre de la Culture. Fin juin, après que Rima Abdul Malak a dit, via un tweet, «comprendre les inquiétudes de la rédaction». Une deuxième rencontre a eu lieu vendredi, après leur rassemblement place du Palais-Royal. Avec un appel solennel, exprimé dans une lettre ouverte, pour que «la ministre» aille «au-delà des clivages partisans» pour «souten[ir] ces initiatives parlementaires».
De quoi tenter d’ancrer leur grève historique dans un combat politique plus global. «S’il y avait une “loi JDD” ce serait une victoire, insistait ainsi Emmanuelle Souffi en marge de cette rencontre rue de Valois. Ce serait le signe que tout ça n’a pas été fait pour rien.»
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