Tumgik
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AKCE - 3
     Ce qui se passe dans sa tête à ce moment précis, elle ne le maîtrise pas. De la honte, elle passe à la colère. Elle est piquée. Ce qui entraîne mécaniquement une montée en puissance de son insolence. C'est sa meilleure arme, certes, mais c'est une arme qui a tendance à se retourner contre elle.
     Si elle parvient à se dominer suffisamment pour ne pas cracher immédiatement à la gueule du professeur, elle ne peut pas empêcher son visage de se déformer et son souffle d'accélérer. Elle déteste ça. Ça ne lui est pas arrivé depuis longtemps, de perdre les pédales. Et si elle ne retrouve pas son contrôle, elle pourrait craquer devant lui. Elle n'en a pas envie, et il n'en a pas conscience, mais lui aussi préférerait l’éviter.
     Elle ferme les yeux, bloque sa respiration, mord sa lèvre inférieure, très fort, très longtemps, jusqu'à ce que la vague se retire. Compte jusqu'à dix dans sa tête, puis rouvre les yeux, se recomposant une figure. Ça continue à cogner à l'intérieur de sa tête, mais de l'extérieur, elle a retrouvé son air serein.
     Lewis la fixe toujours, peut-être plus avec curiosité, à présent. Anna exhale un rire dépité.
–        Je ne l'ai pas vue venir.
–        Reconnaissez que vous l'avez mérité.
–        C'est de bonne guerre, je l'avoue. Vous estimez que je vous ai manqué de respect, vous me rendez la pareille.
     Il sourit. Elle a envie de lui arracher cette expression faciale. « Non, Anna, on n’égorge pas son prof d’anglais. On n’égorge personne, d’ailleurs. »
–        Mais il y a des choses à dire, et des choses à ne pas dire, souffle-t-elle simplement.
     À nouveau, il a ce petit sourire vainqueur. Et à nouveau, elle déglutit et serre les dents. Regards en chiens de faïence. Silence.
–        Désormais, Miss Éloi, conclut-il au bout d'un moment, à chacun de vos retards, ne prenez pas la peine de vous présenter devant moi. Vous viendrez rattraper tous les cours manqués en retenue le vendredi après-midi.
–        Impossible, le vendredi, je...
–        Je n'en ai rien à faire, sans vouloir vous offenser.
     « Garde ton calme, serre les dents. N'ajoute rien qui puisse te porter préjudice. »
     Elle hausse les épaules, ajuste ses lunettes et tourne les talons. Tant pis. Elle ira s'expliquer auprès de Chapira directement. Lui donner son justificatif. Et s'il a quelque chose à dire, il pourra aller en parler à un mur. Ou à son troisième doigt.
     Anna grince des dents quand elle se rappelle qu'elle a histoire-géo après la récré. Et qu'elle devra continuer à garder son calme, serrer les dents. Heureusement que la journée se finit sur le cours de culture des Arts.
                                                      ****************
Dimanche 29 septembre :
J'ai envie de brûler cette maison. J'ai passé le deux jours à me faire gueuler dessus. Lewis ne m'a pas vue à ma retenue vendredi, et n'ayant pas été prévenu par la vie scolaire comme ça aurait du se passer, il a encore pensé que je séchais. Il a appelé ma mère.
Le soir, en sortant de chez Morvan et alors que je fais un saut à la maison pour prendre mes affaires de danse, Petia appelle et m'ordonne d'être à la maison à son retour, si je ne veux pas voir disparaître mon ordinateur de ma chambre.
Il se peut que j'aie omis de lui parler de ma retenue. Alors imagine sa fureur quand elle reçoit un appel de mon prof principal, qui lui annonce dans la même minute que je suis tout le temps en retard, que ça m'a valu une heure de colle à laquelle je ne me suis pas présentée, et que donc, je risque le rapport. Curieusement, elle ne lui a pas dit que c'était parce que j'étais chez la psy. Ça m'étonne parce qu'elle prend un malin plaisir à m'humilier publiquement, en me faisant passer pour une folle.
Bon du coup, j'ai dégusté tout le week-end. J'ai eu droit à toutes les piques habituelles, auxquelles se sont ajoutées quelques joyeusetés de circonstance. Autant te dire que mon quota de patience est épuisé pour les cinq prochaines années. Le prochain qui passe par là va se faire envoyer paître. « Désolée, rupture de stock, revenez en 2018. »
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AKCE - 2
     La semaine passe à toute vitesse. Les profs testent leurs élèves, évaluent leurs niveaux, repèrent les têtes brûlées.
     Anna n'en fait définitivement pas partie. Tout est une question de stratégie. Elle s'arrange toujours pour n'être assise ni trop devant, ni trop derrière, ni trop au milieu. Ne participe pas, ne bavarde pas, ne cherche pas à s'intégrer. Alors que la deuxième semaine s'achève, elle a l'impression d'avoir trouvé le bon rythme.
     Lewis ne lui a pas reparlé de l'altercation. Aucune retombée. Mais il faut dire qu'elle ne lui en a pas laissé l'occasion. Non seulement son comportement est irréprochable, mais en plus – et surtout ! – elle est trop rapide. Il aurait moins de mal à attraper un lézard.
     Anna a hâte de reprendre la danse et le jujitsu. Le club de gym a fait sa rentrée, mais elle n'y va que le lundi et le jeudi. À la fin de la semaine, elle est une pile électrique. Elle sent ses nerfs bouillir en permanence.
     Heureusement, sa mère n'est pas trop sur son dos.
     Vendredi, à seize heures tapantes, elle est dans la salle d'attente du Dr Morvan. Celle-ci ne la fait pas attendre. Elle prend rapidement de ses nouvelles – ou du moins essaie – puis l'invite à se rapprocher du tableau blanc sans plus attendre.
     Comme la semaine dernière, deux colonnes qui le divisent. Dans la première, elle lui dit d'écrire le nom des personnes qui, d'après elle, sont des ennemis. Et dans la seconde, les personnes qui ne lui veulent pas de mal.
     Anna est beaucoup plus réticente, cette fois. Elle refuse catégoriquement le feutre que Nathalie lui tend.
–        Essayez, Anna, je vous en prie. L'idée n'est pas d'écrire ce que vous pensez que j'aimerais lire. Faites-le pour vous.
–        J'ai pas envie.
     Pour désamorcer la situation, Nathalie laisse tomber. Il est peut-être encore trop tôt. Elle s'en doutait un peu, mais il fallait qu'elle tente.
     Elle lui demande de venir s'asseoir.
–        J'ai quelque chose à vous proposer.
     Elle se dirige vers son bureau et revient les bras chargés de carnets. Tous très beaux. Épais et de belle qualité. Elle les pose sur la table basse et les étale face à Anna.
–        J'aimerais que vous en choisissiez un. Celui qui vous plait le plus.
–        Pour quoi faire ? Fait la jeune femme, sur ses gardes.
–        Pour écrire. Vous allez repartir avec, et y écrire votre ressenti au jour le jour.
–        Vous me demandez de commencer un journal intime ?
–   ��    Je n'aime pas cette expression, conteste Nathalie. Du moins, pas dans votre cas. Il y a quelque chose d'infantilisant, et vous n'êtes pas une enfant.
     Nathalie sourit en voyant sa patiente pincer les lèvres.
–        L'idée n'est pas que vous y écriviez tous les jours, sans faute. Vous pouvez le faire si vous en ressentez le besoin, mais vous pouvez aussi y dessiner, y noter quelques phrases, mots, idées, une fois de temps en temps.
     Le regard d'Anna survole la petite dizaine de carnets ouvragés. Ils sont magnifiques. Elle a envie de tous les toucher, les feuilleter, les sentir. Mais ils sont des pièges, étendus sous son nez, comme des baies empoisonnées. Alors elle détourne la tête.
–        En revanche, la notion d'intimité est très importante. Ce sera votre carnet. Vous pouvez y écrire ce que vous voulez, sans craindre d'être jugée.
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Dimanche 15 septembre :
Anna Éloi, 18 ans, jeune femme sans problème.
     Anna lit la ligne pour la énième fois. Ça sonne faux. Elle ne le sent pas du tout, ce nouvel exercice.
     « Vous aimez écrire, Anna ? Alors écrivez. Adoptez un cahier. Et pas n'importe quel cahier, un spécial, que vous aurez choisi avec minutie. Décorez-le, rendez-le unique... puis parlez-lui comme à un ami. Puisque vous ne me parlez pas à moi. » Voilà ce que Morvan a dit. Mais elle est marrante, elle aussi. Pourquoi est-ce qu'Anna devrait parler ? Elle n’a rien demandé, elle.
     Bon au final, elle a accepté le deal. Mais ça, c'est uniquement parce qu'on lui a proposé un marché. Si elle se prête au jeu, Morvan réduit la fréquence des séances. Deux fois par mois. Toutes les deux semaines.
     C'est une aubaine qu'Anna ne peut pas se permettre de refuser. On la traîne depuis deux ans devant tous les psys de la région, de gré ou de force. Quand le dernier lui a dit qu'il ne voulait plus la prendre en charge, elle a réussi à négocier avec sa mère pour choisir elle-même la suivante. Oui, elle a choisi Nathalie Morvan, mais ça ne veut pas dire qu'elle en voulait, de cette thérapie. Alors quand cette dernière lui a parlé de cet arrangement, il n'était pas question de refuser.
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Mardi 17 septembre :
On m'a dit d'écrire là-dedans. On m'a dit de donner une identité à un bout de papier.
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Jeudi 19 septembre :
Il pleut. Ça sent la pluie. Je sais pas quoi écrire alors je me contente de bla bla. Bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla. C’est bien, ça noircit un peu les pages.
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     Le vendredi, comme une âme en peine, Anna prend la direction du cabinet. Bruno, l'assistant, fait une drôle de tête quand il la voit. Elle n’est pas sensée être là.
     Il appelle Morvan, qui ouvre de grand yeux quand elle la trouve dans la salle d'attente.
–        Qu'est-ce qui se passe, Anna ?
–        J'y arrive pas, grommèle cette dernière en lui tendant le carnet. C'est inutile. C'est ridicule.
     Nathalie le prend et l'ouvre. La première page est griffonnée et raturée dans tous les sens. Il n'y a pas grand chose dessus, mais elle n'est pas non plus vierge.
–        Vous êtes trop dure avec vous-même, lui dit-elle. Vous dites que vous n'y arrivez pas, mais vous essayez. Et c'est exactement ce que j'attends de vous dans un premier temps.
–        Ça a pas de sens !
–        Ça n'a pas besoin d'en avoir.
     La jeune femme pousse un soupir rauque. Elle semble frustrée. Nathalie parcourt rapidement la page une dernière fois, avant de le lui rendre.
–        Pourquoi est-ce que vous n'essayez pas de... vous confier ? Je vous l'ai déjà dit, c'est comme si vous parliez à un ami.
–        J'ai pas d'amis !
–        Mais vous en avez déjà eu. Essayez de retrouver cette sensation. Commencez par le tutoyer, peut-être par lui donner un surnom.
     C'est comme ça que le soir même, Anna attrape un gros feutre indélébile et écrit sur la page de garde « poppycock » en majuscules. Ça sonne bien. Et quitte à faire dans le ridicule...
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AKCE - 1
     Il n'est pas sept heures du matin quand Anna fait coulisser la porte-fenêtre de sa chambre et se glisse dans l'air frais. Gaïa est déjà devant le portail, la queue frétillante.
     Il fait sombre. Les jours raccourcissent. Elle aime bien ce moment de la journée, celui où le monde somnole encore, et où elle n'est qu'une ombre furtive qui se faufile sur l'asphalte.
     La température est idéale. La fin de l'été veut dire que la chaleur se couche avec le soleil et se lève avec le jour. Elle peut courir longtemps sans sentir ses membres se liquéfier ni s'engourdir.
     Comme à son habitude, la chienne et elle montent vers le nord. Leur trajectoire traverse le parc dans toute sa longueur, et elles en ressortent par l'Avenue de Chartres. Celle-ci les emmène jusqu'au centre-ville, où Anna se plait à serpenter dans le dédale de petites rues pavées, réinventant leur chemin à chaque fois. Elles le dépassent par l'ouest, traversent la place des Arts, contournent la fontaine Saint-André, et redescendent jusqu'à l'Escale, où la jeune femme s'arrêtera pour prendre son café avant d'aller en cours.
     Quand elle passe devant son lycée, il dort, lui aussi. Les fenêtres sont comme des trous noirs. Même dans l'aube naissante, il ressemble à une apparition fantomatique qui la suit du regard jusqu'à ce qu'elle tourne à l'intersection suivante.
     Elle l'a aimé, un jour. Elle a été fière d'en être. De passer ses portes, comme une lycéenne lambda, qui ne savait pas trop pourquoi elle était là. Pourtant, là, maintenant, elle ne voit qu'une carcasse solitaire et vide de vie, qui attend le jour pour se réchauffer des corps de ses visiteurs.
     Alors qu’elles arrivent dans son quartier, elle ralentit l'allure, jusqu'à la marche rapide, pour faire redescendre l'énergie. Puis après un dernier tour de pâté de maisons à faible allure, Gaïa et elle se faufilent dans le jardin, l'une filant droit à sa gamelle d'eau, l'autre trouvant la petite terrasse de sa chambre puis s'introduisant par l'interstice de la baie vitrée.
     Il fait bon, dedans. Comme un cocon. Ses muscles sont tendus, mais sa tête, vide. Ses étirements lui apportent la satisfaction de reprendre conscience de la longueur de ses bras, ses jambes, son tronc. Faire corps avec sa propre matière. Ce bien-être est de courte durée, mais indispensable à sa santé mentale, sa survie.
     Elle prend souvent le temps, après sa séance du matin, de s'allonger à même le sol. Sur le dos, bras et jambes légèrement ouverts, paumes de mains vers le ciel. Elle écoute sa respiration, sent comment son corps est lourd et dense, contre la surface dure et tangible du plancher et au contact plus suggestif de l'air sur sa peau. Elle se tient là un moment, accueille l'ici et le maintenant comme un présent, et reste à l'écoute de ses sensations, sa musique interne, ses trois dimensions qui relient la terre et le ciel.
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Roman Intemporel
Par où commencer ? C'est une histoire qui n'a ni seuil ni terme. Un roman intemporel sans titre et sans filtre. Sans visage, sans couleur, sans odeur. Et pourtant, ce récit, que tu écris à la première personne et signes de tes larmes et de ton sang, raconte d'où tu viens.
À chaque page que tu noircis, il y a un peu plus de soleil dans tes mots. Si bien que tu ne vois presque plus les ombres qui obscurcissent le tableau. Oui, tu sens encore leur présence dans tes veines, mais ton sang se régénère. Tu n'es plus la même qu'hier.
Tu as longtemps eu peur de la peur elle-même. Peur de l'abandon. Peur de mal faire, de décevoir. Peur de t'accrocher à du vide, de t'engouffrer dedans et de t'y perdre. Peur de ne plus avoir peur, et de foncer dans un mur que tu aurais refusé de voir venir. Peur d'être tellement déglinguée que tu ferais fuir toutes les personnes qui te font du bien. Peur d'être stigmatisée par ces ombres que la main de la vie a peintes sur ton tableau. Peur d'échouer. Encore. Encore. Usée jusqu'à l'os, jusqu'à ne plus pouvoir te relever.
Il faut que cela cesse. Quand vas-tu enfin arrêter de douter ? Il est temps de poser les armes, de signer l'armistice. Tu as pris assez de coups, tu es assez forte à présent.
Ce n'est qu'en prenant de la distance avec toi-même et en posant sur le papier ton Histoire vue de haut que tu as réalisé pourquoi tu étais différente. Alors il t'a fallu t'effacer. Il t'a fallu recommencer tout un processus de création pour, sinon accepter, du moins comprendre que Charlie ne ressemble à personne. Et que c'est parce qu'elle est unique qu'elle est à la fois si attirante et effrayante, si bien entourée mais si solitaire, si solide mais vulnérable. Tu es un tout. Tu ne peux privilégier une partie de toi au détriment d'une autre, parce que si l'une manque, tu es incomplète.
Alors trouve la force de mettre un terme aux rapports de force, aux combats que tu livres contre toi-même. Aime-toi comme tu aimes ton prochain sans craindre son jugement. Après tout, le seul regard que tu crains vraiment est celui que tu adresses à ton reflet. Il est temps de poser les armes, de signer l'armistice. Tu as pris assez de coups, tu es assez forte à présent.
Tu le sais, Charlie. Mieux que personne. Tu sais qu'il faut que tu taises tes doutes. Il faut que tu te lances. Il faut que tu danses. Parce que quand tu danses, tu deviens une meilleure version de toi-même. La seule que tu arrives à accepter. Quand tu danses, quand tu manges l'espace et le son, ce sont tes rêves de petite fille que tu nourris. Des rêves qui sont passés à l'état solide en grandissant, mais qui se sont trouvés emmurés et inaccessibles. Parce que l'âge n'a pas amené que du concret dans ta vie, il a entrainé avec lui tous les maux avec lesquels tu te bats quotidiennement. Tes peines, tes désespoirs, tes doutes.
Mais il a aussi mis entre tes mains toutes les clefs de la création, tout pour être une femme solide et sans vice. Un être créé sans haine pour le monde, pour autrui. Un être venu au monde pour écrire et danser. Pour donner. La libre expression de ton corps et de ton âme est ce que tu as de plus cher. Pas comme une richesse matérielle, mais plutôt comme un moyen vital d'exister.
Et même si l'univers s'en prend à ton cœur, même s'il essaye de le percer, le briser, le brûler, tiens bon ; rien ne pourra plus te détruire.
« Nos cœurs ne sont pas de pierre. Les pierres peuvent s'effondrer et se briser, perdre leur forme. Mais le cœur ne peut pas s'effondrer. Le cœur n'a pas de forme mais peut se propager à l'infini. Pour le meilleur comme pour le pire, tous les enfants de Dieu savent danser. » (H. Murakami)
Ton cœur peut se propager à l'infini, petite louve solitaire. Et cette nuit, tes pensées iront vers celles et ceux que tu as aimés.
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A Wordless Alchemy
Drake is... dark-haired. Dark-eyed, dark-skinned. Quite tall. He has large shoulders on which it's good to rest. He has prominent cheekbones, pulpy lips and a mole on his left eyelid. Two dimples dig his cheeks when he smiles.
He can get everything he wants with this smile. I think it's one of the reasons why I hated him, at first. I think it's one of the reasons why I love him, now.
I'm probably the only one who can resist this mysterious power. That's why he hated me, at first. And that's why he loves me, now.
Drake and I are complicated, you know... But we're also complimentary and I think it's what makes people so jealous. However, you have to consider that it's not that easy. I can sit on his lap, lovely coiled against him, and struggle with him less that ten minutes later. Yet, there's always this kind of alchemy between us. It's tangible.
Is it the word “struggle” that is bothering you ? Don't worry about that. It happens everyday. I could almost say that these fights built our complicity. Almost.
Drake and I have strong characters. We are both unattached, as much as we need each other. In general, our needs don't coincide. I need him, he avoids me. He needs me, I run away from him. And it makes sparks. Blows up. He catches me, I scratch him. He immobilizes me and I try to bite him, struggling. We fight and we fight again until we are tired, and eventually, he stamps his foot on the floor, threatening, and I eye him scornfully, refraining from spitting in his face. Then I flee and refuge near the window, through which I can see flying birds. Because he always wins. He's taller, and heavier, and stronger. And the more I get angry, the more he laughs. Except when I manage to hurt him.
But don't worry, it's not always like this. We have some special moments which join us... Not many, but they do exist.
I definitely prefer when we are just the two of us. When he invites some friends of his, he looks different. He's not exactly the Drake I know, the one I'm used to.
No, I'm not possessive.
I like when he plays the guitar. I stay there, quasi-snoring as he plays and hums. I like when we watch television. We fall asleep, coiled against each other. I like watching him working. I sit on his desk, and let the sound of the pen sliding on paper rock me.
I like, at nightfall, coming to his room and bedding down next to him. I like his fragrance. I can hear his breathing. It's soothing. I love him when he's asleep more than ever.
I have my own room, you know... but I sleep so much better with him... And I think this is... the quietest and sweetest and most serene moments we can share. Even if sometimes he moves a lot, and pushes me away with his feet. It happens, but I don't care that much.
Sometimes, when I'm in a deep sleep, I can feel a hand on my cheek, stroking me. It annoys me... but I can hear his voice, telling me that I'm cute as a dark angel when I'm asleep, and that he loves me. These kind of words I do not often hear during the day. So I forgive him for everything.
At times, he wedges me in his neck, hugs me tightly, sighing with pleasure. But I never stay snuggled for long because I'm hot.
Our story began a cold morning of November. I had nowhere to go. Nowhere to live. I was lost and abandoned. I really thought I was going to die alone. It was like nobody could see me. But that morning of November, someone did.
As it was raining, I sheltered in the hall of a small aging building. And I saw Drake. No. Drake so me.
He helped me, somehow against my will. You see, I was proud, even in dirt, and disease and loneliness. I didn't want his pity which made weaker and weaker. But I had no choice. I had to accept his helping hand, as I was slowly dying. And he knew it. He knew he was trampling on my pride, and he loved this. I can remember his smirk, and his big dark eyes, and his voice telling me “you crazy, stop struggling and come on”. Oh I hated him...
But today, I just thank God he put me on Drake's way. That man who stood me up, fed me, and healed my wounds.
I could have run away, since that, if I wanted to. I could have packed and left him... but I don't want to. I can't. I can't even imagine living far from Drake. He's my everything, now. My heaven and my hell. And I don't want to feel lost and abandoned again.
I think... Drake is scared to wake up one day and to discover that I'm gone. How absurd. I would like to tell him that he's absurd. I'm the one who needs the other the most. Not him. I would like to tell him. But I can't.
Why not ? Because cats can't speak.
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Jour 1
Ce qu’il y a d'étonnant, à l’enfance, c’est cette capacité de s’émerveiller de toutes les petites choses de la vie. Du bruissement du vent dans les feuilles. De la hauteur des avions lactescents qui tranchent le firmament. De la couleur du manteau dont ce dernier se pare lorsque l’astre du jour disparait derrière l’horizon. De l’odeur des fruits, du ballet des nuages, de la rigueur de l’hiver, du chant des oiseaux, de la douceur de la peau de maman, du goût que le chocolat abandonne sur la langue.
Vois comme en prenant de l’âge, ils ont perdu l’usage fabuleux de leurs sens. Ils ne voient plus, ne sentent plus, et le temps qui passe affadit la beauté de la vie. Si bien qu’ils s’enferment dans un quotidien triste et sans couleur, à la recherche du détail qui bouleversera son cours monotone.
Pourtant, et tu le sais mieux que personne, ce détail est tout près. Il est partout, quand on se donne la peine de regarder, quand on sait comment regarder. Ce dont la vie du commun des mortels manque, ce n’est pas de détails, c’est de conscience du réel.
Remets les compteurs à zéro, petite louve solitaire. Oublie tout et réécris mot par mot, reconstruis brique par brique la genèse de ta vie depuis son commencement.
Et vis.
Vis chaque jour comme si c’était le premier.
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Aube
C’est l’heure où le jour se lève. La lumière se fait, l’oeil s’ouvre, le corps s’éveille. C’est l’heure où se brise la vague, s’ouvre la fleur, bruissent les feuilles. Tu subis encore les brumes de l’inconscient, un pied dans le sommeil du nouveau-né, l’autre dans la conscience de l’univers.
C’est l’heure où le jour se lève, l’aube d’une vie qui commence enfin, où la réalité se nourrit de rêves d’enfants, où les certitudes posent des questions au doute, où la liberté fait l’amour à la responsabilité. Tu penses donc tu es. Jusqu’à cette heure, tu croyais penser, tu croyais être, tu croyais vivre, si bien que tu as toujours cru en la valeur de ton passé. Pourtant, c’est maintenant que le jour se lève. Tu le sais, le jour se lève, tu es à l’aube de tous les changements.
Quelque part au dehors, plus près du reste du monde, les regards se croisent sans se voir. Quelque part dans le monde, le nouveau-né crie sans l’espoir d’exister. Quelque part dans cette pléiade, Pareto fait sa loi, à laquelle vingt contribuent et que quatre-vingt subissent. Tu ne comprends pas encore ta place dans ce « quelque part ». Tu penses donc tu es, mais tu ne sais pas encore qui tu es.
C’est l’heure où sonnent les cloches de l’esprit, de la conscience, du savoir. Où la curiosité flambe, où la peur glace, où la peine grandit. Où l’espoir se fige. Tu es à ce carrefour entre ignorance et innocence, cette fourche qui te laisse le choix de continuer sur le chemin merveilleux de l’utopie ou accepter d’emprunter le sentier chaotique du réel.
Tu as l’envie de vivre cette vie. Tu en as enfin la force. La puissance avec laquelle ton cœur s’épanouit ne doit pas t’effrayer, ni les obstacles te freiner. Tu n’es pas à l’abri, mais tu sauras te battre. Et tu n’es pas seule. Tu penses donc tu es, au même titre que ta voisine de droite pense et est. Ou ce monsieur, à la boulangerie. Ou cette vieille dame, dans le tramway. Ou cette jeune femme, à l’angle de la rue. Pense plus fort encore, aime plus fort encore, crois en ce qui est bon. Sors de cette bulle, pense avec altérité, connecte-toi au monde, car ce qui est beau, c’est que cette existence, tu la partages avec une multitude.
C’est l’heure où le jour se lève. Lève-toi donc avec le jour.
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Lettre à Maman
Maman, quand je me suis réveillée ce matin-là, il faisait si froid. Comme si la température était descendue dans la nuit et n'était jamais remontée. Le ciel était si bleu, pourtant. D'un bleu éclatant, d'un bleu étincelant. C'est un très bel automne que nous avons-là, tu sais ? Très doux, très lumineux, comme je les aime.
Maman, quand je me suis réveillée ce matin-là, j'ai levé mon regard sur ce ciel bleu éclatant, et j'y ai vu les anges pleurer. J'ai compris pourquoi j'avais si froid.
Maman, je viens d'avoir 21 ans, et je crains le noir comme quand j'étais petite. J'en ai perdu le sommeil. Les yeux grands ouverts dans la pénombre, j'y vois des monstres. Comme quand j'étais petite. Simplement, ils ont changé de visage. Prends-moi dans tes bras, berce-moi, chante-moi encore une fois cette berceuse que je connais par cœur.
Maman, je viens d'avoir 21 ans, et j'ai vu des torrents dévaler les versants de l'humanité. J'ai vu couler le sang, les larmes, l'encre. Trop de sang, trop de larmes, à une heure où la musique résonnait et où les sourires se confrontaient. Maman, j'ai grandi dans un monde de princes et de princesses, de sorcières et de dragons, de magie et d'éternité. Et me voilà assise dans l'ombre, à essayer de comprendre comment l'Homme est tantôt capable de tant de haine, tantôt de tant d'amour. À essayer de comprendre comment il peut répandre la haine au nom d'une religion d'amour. C'est comme essayer de se doucher, se purifier avec des excréments. Non-sens.
Maman, j'ai vu mes frères et mes sœurs tomber les uns après les autres. J'ai vu leurs os se briser, leurs cœurs se percer, leurs corps s'effondrer. Ces frères et ces sœurs que je ne connaissais pas, qui n'avaient probablement jamais croisé mon chemin, mais qui avaient des rêves, comme moi. Un sang rouge, comme le mien. Des frères et des sœurs qui aspiraient à vieillir paisiblement, aux côtés de ceux qu'ils aimaient.
Maman, j'ai vu des hommes, des femmes, des enfants inonder nos monuments de fleurs et de bougies, à la mémoire de frères et de sœurs qu'ils ne connaissaient pas, qui n'avaient probablement jamais croisé leur chemin. J'ai vu des hommes, des femmes, des enfants apeurés, se rassembler pour s'étreindre, s'aimer, s'indigner, lever le poing, chanter, crier « LIBERTÉ ». Puis se taire comme un, à la mémoire de leurs morts. Pousser le silence comme ils auraient poussé un cri.
Maman, je n'ai jamais été bonne à rien, à part danser, écrire et aimer. Je suis en vie, je suis debout, alors regarde-moi adresser ces mouvements, ces mots et ces sentiments aux disparus de notre monde.
Maman, je me moque de la langue qu'ils parlent, de la couleur de leur peau, ou de leur culture. Je me moque qu'ils aient d'autres croyances que les miennes. Ma religion, c'est l'amour, et tout mon amour va aux multiples victimes de cette humanité décadente qui se mord la queue. Toutes origines comprises, car mon amour n'a pas de frontière.
Maman, j'aimerais vivre dans un pays où la solidarité ne s'arrête pas non plus aux frontières. Où les médias cessent de ne montrer que ce qui les intéresse, de ne réagir que quand l'horreur court dans nos rues. J'aimerais vivre dans un pays qui cesse de se dire ouvert au monde alors qu'il se verrouille aux images de ces sinistres en terres étrangères. Qui se sente aussi concerné par l'horreur du dehors que quand elle vient jusqu'à lui. Parce qu’elle a le même visage, la même odeur.
Maman, j'ai foi en la vie. On va s'en sortir, j'y crois. Rien n'est simple, mais j'y crois. On a déjà peur de la mort et de ce qu'elle représente, de ce qu'elle sème sur son passage. On ne peut décidément pas aussi avoir peur de la vie. Moi, j'y crois.
Maman, merci d'avoir fait de moi cette femme aimante, droite et tolérante. Merci de m'avoir donné ces yeux grands ouverts sur la réalité, ce cœur large comme l'univers, cette tête pleine de bon sens. Merci de m'avoir mise sur le chemin de ces professeurs qui m'ont expliqué le monde. De m'avoir inscrite dans cette petite école du quartier juif de Paris, ce collège privé catholique, ce lycée de banlieue où tous les horizons se touchaient. Je ne suis pas parfaite, mais mes plus belles qualités, Maman, je te les dois.
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