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laurentdeglicourt · 3 days
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Je ne sais pas vraiment ce que je pense d'Ostende. Est-il d'ailleurs obligatoire d'en penser quelque chose ? J'y suis revenu une première fois durant l'été 2018 pour vérifier quelques souvenirs. Une insupportable touffeur s'imposait en tout lieu ; le soleil était aussi brulant qu'à Marseille et le ciel était repeint de ce vilain bleu azur que les méridionaux considèrent comme une trésor national : j'étais déçu.
Car avant d'être une ville, Ostende est une chanson de Caussimon, mise en musique par Ferré, remise au goût du jour par Arno qui en a donné une version définitive. Il y pleut forcément, le ciel est lourd, le chagrin en embuscade et on se demande vraiment si c'est utile d'vivre sa viiiieu...
Ou alors on pense aux « Lèvres rouges » d'Harry Kümel, à la voix suave, incantatoire et spectrale de Delphine Seyrig - comtesse Bathory : «Je ne suis qu’un personnage (…). Vous savez, la belle étrangère un peu lasse, un peu mystérieuse, qui traîne son spleen d’une ville à une autre…». Ostende, Palais des thermes, morte saison... On songe aussi à « Je t'aime je t'aime », un des plus beaux films de Resnais...
Le 16 avril dernier, la ville tenait ses promesses ; un vent terrible balayait la côte, le sable s'en prenait aux yeux, la mer du nord – fidèle à sa mauvaise réputation – déchainait sa colère et mordait la digue. Les rafales avaient vidé la promenade, les colonnes des Galeries Royales semblaient sinistres sous le ciel gris – le bâtiment menace ruine depuis plusieurs années et les poutres métalliques de soutènement, graffitées et sales, paraissent vouées au même destin que les échafaudages du Palais de Justice de Bruxelles : du provisoire devenu définitif. D'une certaine façon, tout était donc parfait ; même les hideuses barres d'immeubles avec vue imprenable sur l'horizon – certaines encore en construction – qui tiennent lieu de remparts aux côtes flamandes, réponse bétonnée et arrogante à l'horizontalité souveraine du littoral.
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laurentdeglicourt · 3 days
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Le vent / Tentative de restitution d'un retable baroque. Ostende 16 avril 2024.
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laurentdeglicourt · 5 months
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Hervé Guibert, Le comte et la comtesse Klossowski de Rola, Rome, 1988.
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Le Rollei 35 d'Hervé Guibert, Paris, MEP, 2011 © Laurent Deglicourt
Rosée-du-Printemps verse le thé, je sors mon appareil de ma poche, je n'avais même pas pris soin de préparer les réglages, je règle rapidement sur deux mètres au 60e, je vise à peine, j'entends le très léger déclic, j'ai déjà remis mon appareil dans ma poche. Rosée-du-Printemps, qui continue de verser le thé, me lance un regard foudroyant et paniqué, qui veut dire : « Vous êtes donc réellement un voyou ! Et vous avez de la chance qu'il soit trop sourd pour vous avoir entendu, je vais fermer les yeux, mais ne recommencez pas sinon je vous fous à la porte ! » J'ai le coeur qui bat, comme si je venais de commettre un crime. L'avocat raconte l'histoire troublante du voyage qu'il avait entrepris pour fuir le décès de sa jeune épouse, qu'il adorait, et qu'il avait assassiné malgré lui dans un accident de la route : partout où il allait se dressait devant ses yeux un signe du hasard qui le ramenait à son idylle ravagée, et lui interdisait l'oubli. Doria m'a dit au revoir en me serrant sur sa poitrine, c'est la première fois qu'il m'appelait Hector. Son étreinte avait une telle puissance que j'ai pressenti que ça ne pouvait être que la dernière. Doria pressait tendrement sur son coeur celui qui venait de le trahir en lui dérobant son image, préservée avec acharnement comme un trésor durant des dizaines d'années. Angelo ne s'était rendu compte de rien, il était assis à mes côtés, il n'avait même pas entendu le déclic, il m'a dit dans l'ascenseur : « Vous êtes une ordure. »
Hervé Guibert, L'incognito, Gallimard, 1989.
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laurentdeglicourt · 5 months
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Les peintures sur bois des primitifs égrainent minutieusement leurs nuances de rose. C'est une étrange couleur qui tremble et chancelle. Successivement vulgaire puis délicate, une larme de blanc de plomb suffit à la rendre distinguée. Et aussi le jaune de l'oeuf, ce liant nourricier des tempera, les lignes du bois ou la matière des enduits. J'ajoute la délicatesse d'un glacis et voici ces pans de roses tendres, poudrés et pâles comme le visage d'une marquise, occupant tout doucettement les perspectives encore hésitantes des années treize-cent.
Sans doute es-tu cette marquise-là car ces pâleurs rosées m'évoquent le coloris de tes pommettes, la peau délicate à la naissance de tes seins. Tout à mon désir de les deviner, je regarde ceux de Sainte Christine, meurtrie par les flèches des archers, martyre exemplaire du regard, peinte par le Pseudo Jacopino. Une sensualité muette est blottie au coeur des tableaux, dissimulée dans leur piété enfantine, lovée dans leurs teintes fanées et leurs surfaces irrégulières.
Nous déambulons dans les salles de la pinacothèque, les yeux avides, unis et séparés, émus par ces lambeaux de retables ; je serre mon bonheur, j'exulte en secret. Nous n'échangeons que des sourires ou de pauvres mots, impropres à traduire ce qui nous emporte.
Bien souvent tu m'as expliqué que la peinture, comme pratique, te révulse, que ce plaisir-là t'a abandonnée peu à peu. Tu n'es plus, dis-tu, qu'une simple regardeuse. Tu aimes le dépouillement, les oeuvres modestes, la frugalité. Tu en fais même un cas de conscience, me traitant de casuiste à chaque fois que j'essaye d'inoculer dans tes froids raisonnements une part de modération. Pourtant, ce jour-là, devant le fragment de cassone de Francesco di Giorgio, tu lâches prise ; « c'est beau parfois la peinture... » murmures-tu les yeux un peu humides. Sans-doute penses-tu à cet instant qu'il n'est pas déshonorant, parfois, de rendre les armes ; et cette fragilité soudaine semble faire écho à l'aura timide des petits pans de couleurs qui, amoureusement, nous entourent.
Extrait de Viaggio sentimentale, texte en cours.
Image : Francesco di Giorgio, Le chaste Joseph et la femme de Putiphar, non daté, fragment de cassone, Sienne, Pinacothèque.
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laurentdeglicourt · 8 months
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Normandie - Août 2023 - Série Coeur simple.
C'était comme un coup léger frappé sur sa nuque, comme une main qui lui saisissait fermement le bras. Il arrêtait alors la voiture, prenait son appareil et déclenchait. Il avait de cette campagne une connaissance organique, animale. Ces champs clos de haies et d'arbres, plantés pour protéger les fermes des vents marins, combien de fois les avait-il longés ? Combien de fois en avait-il scruté les taillis en quête d'un hérisson ou d'une fouine ? Leur apparition, au détour d'une route, éclairés par la lumière du soleil couchant comme par les feux d'une rampe, provoquait invariablement chez lui un étrange saisissement, un trouble ; cette émotion lancinante que le brusque retour de sensations enfouies, souvent, suscite ; ces arbres, ces buissons constituaient un site originel, une frontière ondoyante. Mais, aussitôt, des souvenirs d'enfant délaissé, toujours un peu vagabond, parfois perdu, refaisaient surface ; il n'observait plus seulement un paysage familier, offert par le hasard au retour de la baignade : il enlaçait son drame, il arpentait son minuscule chemin de croix. Et, en regagnant sa voiture, l'appareil en bandoulière, il comprenait à demi-mot que ce panorama bucolique, comme l'amour, lui causait autant de joie que de souffrance.
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laurentdeglicourt · 8 months
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Normandie - Série Beau rivage - Août 2023.
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laurentdeglicourt · 8 months
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Dernier jour en Normandie, dernier regard sur la mer, dernière baignade, derniers émois antédiluviens, ultime ravissement à nager dans l'eau verte et saline, dernière sensation d'apesanteur, derniers doigts gourds – le corps tout entier truité par les vagues –, derniers grains de sable dans les chaussures, dernière odeur iodée accompagnant la douche du soir.
Retour des angoisses enfantines qui fermentaient encore et encore à l'approche de la rentrée, alors que les yeux étaient emplis d'un éternel été. Retour vers Lyon et son enfer caniculaire. Retour vers la terre, vers la glèbe, vers les horizons bouchés. Vers le minéral et le labeur, vers les corps pressés et harassés, vers les emplois du temps, les matins et les soirs, les week-end et les jours de la semaine.
Retour.
Toutes les réactions :
48Christophe Bourguedieu, Anne-Lise Broyer et 46 autres personnes
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laurentdeglicourt · 8 months
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Le Havre - Août 2023.
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laurentdeglicourt · 8 months
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Le Havre - Août 2023 - Série Beau rivage.
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laurentdeglicourt · 1 year
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Bénouville - Avril 2023. 
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laurentdeglicourt · 1 year
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Cabourg - avril 2023. 
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laurentdeglicourt · 1 year
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Livre en préparation - WINTERREISE - Polaroïds numérisés d’après image vidéo - Façon de vérifier si l’aura résiste. 
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laurentdeglicourt · 1 year
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Livre en préparation - WINTERREISE - Polaroïds numérisés d’après image vidéo. Façon de vérifier si l’aura résiste. 
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laurentdeglicourt · 1 year
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Dans DIACRITIK j’essaye de parler de la belle exposition de Chechu Àlava, visible jusqu’au 17 décembre à la galerie Xippas, à Paris. J’essaye aussi, modestement, de présenter son travail que je regarde avec attention depuis quelques années maintenant.
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laurentdeglicourt · 1 year
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J'essayais bêtement de photographier le mur. Un mur très étrange et un peu inquiétant qui enserre cette rue d'Aix-en-Provence où je passais souvent. J'ai oublié son nom. Elle n'est pas loin de la cathédrale. Elle est très étroite, presque une venelle. La lumière y tombe du ciel comme l'ange dégringole sur Saint Mathieu dans le Caravage de la chapelle Contarelli. 
Un garçon est arrivé, très beau, il avançait d'un pas vif, il semblait pressé, il s'est arrêté pour ne pas me gêner dans ma prise de vue. J'ai baissé mon appareil, je lui ai souri, j'ai dû bredouiller quelque chose comme : « je vous en prie, allez-y... » ; il a poursuivi sa route du même pas. J'ai déclenché. Vitesse lente, mur net, garçon flou, silhouette mince, élégante qui s'éloigne. C'était en 2012. Où est ce jeune homme maintenant ?
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laurentdeglicourt · 2 years
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D’après. Travail en cours - Polaroïd SX70 d’après image vidéo. 
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laurentdeglicourt · 2 years
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D’après. Travail en cours - Polaroïd SX70 d’après image vidéo. 
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