Tumgik
archeoenlutte · 1 year
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On sort des sites et on les mets dans des caisses
Vous parlez de perte de sens dans une des dernières questions, mais ne l'abordez pas au cours du questionnaire. C'est dommage, car comme beaucoup je pense que, dans ce métier, je suis prêt à endurer pas mal. le travail étant difficile en particulier pour le préventif qui nous emploie le plus. Cette perte de sens est importante pas tant par des conditions matérielles que par la pression constante qui est mise allant du RO au technicien et dont la source est la rentabilité demandée. Il faut en faire toujours plus avec le moins de temps et le moins de monde possible. Pour la plupart des chantiers, on est passé de préventif des années 2000 à un retour au sauvetage, sans que les SRA ne puisse défendre les intérêts scientifiques et patrimoniaux. Je ne parle même pas du temps pour publier et diffuser des travaux qui peuvent être importants, sans que du temps n'y soit réellement accordé. Cela donne l'impression que l'on sort des sites, que l’on les mets dans des caisses et que tout cela se retrouve dans des rapports que personne ne lit et dans des dépôts où plus personne n'a le temps d'aller.
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archeoenlutte · 1 year
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Les "oubliés" de l'archéologie
Juste une petite remarque sur les “oubliés” de l'archéologie : les diagnostiqueurs. Métier invisible, absence de reconnaissance, pas d'espoir de promotion…Alors que ce sont eux qui avec un bon rapport peuvent déclencher une prescription. Le rapport de diagnostic est le seul document qui est soumis au contrôle, en cas de fouille du site.
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archeoenlutte · 1 year
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Obligation de donner une domiciliation fictive
Le problème majeur est finalement l'obligation de donner une domiciliation fictive pour maximiser ses chances de travailler tout au long de l'année. Nous avons tous conscience qu'il faut être mobile en archéologie pour enchaîner les CDD mais ce mode de calcul à partir de la résidence principale nous empêche de postuler à bon nombre d'emploi, si peu d'emploi dans la région où l'on vit. Un vrai casse tête. Trop de précarité dans le métier, pas de situation stable pour prendre un appartement en location car pas de CDI ou pour un prêt immobilier. Difficile de mener une vie personnelle stable particulièrement pour les CDD.
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archeoenlutte · 1 year
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Recours à plusieurs employeurs pour "combler les trous"
Je suis contractuel en archéologie préventive et amené donc à travailler ou postuler auprès de différents opérateurs afin de pouvoir travailler une année complète. Certains opérateurs utilisent un système de carences (dans mon cas 10 mois travaillés et 2 mois de carence) qui fragilisent encore plus le statut de contractuel et nécessite le recours à plusieurs employeurs pour "combler les trous". Ça m'est donc déjà arrivé de recevoir une proposition de contrat alors que j'étais en carence pour une période dépassant la carence sans possibilité de l'accepter ou de faire repousser la date de contrat, tout étant par la suite baladé un certain nombre de mois (5-6) par des reports de début de contrat successifs. Ces deux exemples illustrent, selon mon interprétation, une certaine gestion des ressources humaines proche de celle des ressources matérielles : l'employé, contractuel mais peut-être titulaire également, est un élément qui peut être affecté à une opération, ou y être échangé, retiré ou repoussé selon les besoins économiques, administratifs ou légaux.
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archeoenlutte · 1 year
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Les employeurs se cachent derrière le «  métier passion »
La médiation archéologique est encore plus dévalorisée que l'archéologie. Les archéologues nous prennent souvent de haut alors que j'ai fais les mêmes études qu'eux pour la plupart, et le public me prend encore pour une étudiante après 7 ans d'expérience en médiation. C'est un métier où l'on doit être présent les weekends et jours fériés, oublier nos vacances d'été et être toujours à fond et aimable car on reçoit du public. Les conditions de travail sont à mon sens compliquée pour la vie sociale privée. Nous sommes aussi carrément sous-payés. Aussi bien pour la médiation que l'archéologie les employeurs se cachent souvent derrière le "métier passion" et imposent des choses non concevables sous couvert de cette fameuse passion.
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archeoenlutte · 1 year
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L'université s'est demandé si elle allait payer les vacataires
En raison du confinement l'université s'est demandé si elle allait payer les agents vacataires d'enseignement, considérant que les heures n'avaient vraisemblablement pas été faites, alors que nous sommes nombreux à avoir travaillé deux fois plus pour assurer la continuité pédagogique… malgré un salaire misérable (41,40€/heure d'enseignement, reconnue comme correspondant à 4h de travail, soit 10,35€/h effective). L'université a finalement prévu de nous payer (3 à 4 mois après le service fait dans mon cas, qui fait partie des chanceux·ses).
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archeoenlutte · 1 year
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J'étais depuis "blacklisté"
Je n'ai plus jamais été contacté par une entreprise privée, pour laquelle je travaillais pourtant depuis plusieurs années, pour avoir soulevé des problèmes liés aux défraiements de transports (véhicule personnel) alors que je travaillais à plus de 50 km de mon domicile. J'ai appris par un CDI de cette entreprise que j'étais depuis “black listé” par le responsable d'agence, simplement pour lui avoir demandé de respecter la loi et les termes de mon contrat d'embauche.
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archeoenlutte · 1 year
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J'ai perçu une réelle dégradation de nos conditions de travail
Cela fait 10 ans que je suis en archéologie (sortie de la fac) et j'ai constaté beaucoup trop de départs et j'ai perçu une réelle dégradation de nos conditions de travail en tant que CDD et maintenant en CDI.
De plus, environ 60% de ma promo de Master Pro a quitté le secteur. Ce phénomène semble s'expliquer par le fait d'utiliser les gens comme des fouilleurs interchangeables et de ne pas de les intégrer à un processus d'évolution et de les appliquer aux différentes tâches du métier.
Tant que la main d'oeuvre CDD restera une variable d'ajustement pour permettre à l'archéologie préventive de tourner, les gens se feront pressés comme des citrons et la plupart quitteront le métier dégoûtés et physiquement diminués.
Personnellement, j'ai eu la chance de ne pas vivre trop d'expériences négatives durant ces 10 années de pratique. Ce n'est malheureusement pas le cas de tout me monde. J'aimerai bien qu'un jour, on s'intéresse au pourcentage de personnes quittant le secteur de l'archéologie préventive les 10 ou les 5 premières années suivant la sortie de la fac. Il risque d'être révélateur….
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archeoenlutte · 2 years
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Un passe sanitaire pour accéder aux conférences de recherche publique : cherchez l'erreur
Je n'ai pas de passe sanitaire permanent car je ne suis pas vacciné. J'ai l'impression que personne n'en parle : les séminaires de recherche actuellement demandent un passe sanitaire... Je pensais pas que je serais content qu'il y aient des séminaires en visio encore mais c'est ma seule façon d'accéder à des conférences sur l'archéologie sans payer un dépistage à chaque fois. Est-ce qu'on parle des étudiants ? Des doctorants ? Comment on peut accepter qu'une partie de l'audience doive payer un dépistage pour écouter une conférence de recherche ??? Au début j'espérais que les centres de recherche et les laboratoires ne joueraient pas le jeu de la discrimination. Déjà que je n'ai plus de vie sociale (ni bars, ni cinémas, ni musées - oui, oui, pour un archéo -, ni déplacements entre régions, ni concerts...). Mais on me prive aussi d'une partie de ma vie professionnelle. Et pour les étudiants à qui on demande d'aller assister à ces conférences (qui ont autre chose à faire avec les 20€ du dépistage, comme acheter à manger, payer le loyer....) !!! Je ne peux pas non plus aller dans les bibliothèques. Je sais qu'il y a des bibliothécaires qui sont en grève. Mais les chercheurs ? Je regarde chaque annonce de colloque et sur toutes est bien écrit que le passe sanitaire est requis. D'où ma question : est-ce que ça ne dérange pas les chercheurs et les professeurs de fac qu'une partie de leurs étudiants et des autres chercheurs doivent payer pour accéder à une conférence ? Est-ce que ça dérange quelqu'un qu'on soit discriminé officiellement pour l'accès à la culture, quand il s'agit de notre métier en plus ou de nos études ? Est-ce que c'est pas contradictoire avec la recherche PUBLIQUE financée en partie par nos impôts ? Je crois qu'on est suffisamment intelligent pour penser à d'autres solutions : gestes barrières, espacement entre les sièges... La discrimination ne peut pas être présentée comme une solution !
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archeoenlutte · 3 years
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Des séminaires d’archéologie réservés aux hommes ?
Nous voyons passer depuis quelques mois des annonces de séminaires en archéologie où les intervenants sont uniquement des hommes. Pourtant notre discipline est dans l’ensemble plutôt paritaire, même si évidement les hommes sont plus nombreux lorsque l’on monte dans la hiérarchie.
Liberté académique, liberté scientifique direz-vous ! Liberté d’inviter qui l’on veut en fonction de la qualité des travaux et pas du genre ni de la couleur de peaux… Pitié ne faisons pas comme en Amérique avec ces stupides quota !
Justement si nous ne voulons pas de quotas imposés par le haut prenons les choses en main. Essayons de faire attention, forçons-nous à ne pas céder à la facilité en invitant la personne en vue qui serait incontournable. Essayons-nous à une certaine discipline en diversifiant et multipliant les voix, en termes de genre, d’âge, de parcours, la science n’en sera que meilleure !
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archeoenlutte · 3 years
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Il faut avant tout écouter les paroles étudiantes
Les témoignages de la souffrance des étudiants-es se multiplient ces dernières semaines et pour une fois sont relayés dans les médias et entrent même dans l’hémicycle. Si évidement la fermeture des universités liée au covid accentue les difficultés des étudiants-es, d’autres raisons ne doivent pas être éludées. Je suis enseignante en archéologie et je constate comme mes collègues que ces souffrances ne sont pas nouvelles. Se limiter à expliquer les raisons de cette détresse étudiante par l’absence de relation sociale entre étudiants et avec les enseignants contribue à invisibiliser les autres problèmes. On aurait affaire à une sorte de mélancolie de la jeunesse, passagère, liée à l’isolement, que la réouverture des universités et la multiplication des dispositifs d’aide psychologique pourrait résoudre. Or, les étudiants ne constituent pas une catégorie homogène, et ne vivent pas non plus dans une bulle extérieure au reste du monde social, ils sont à la fois acteurs, en participant ou en condamnant les mouvements sociaux et plus ou moins victimes des réformes selon leur situation, leur condition, etc.
Parcoursup a déjà beaucoup abimé les étudiants, contraints à émettre plusieurs mois avant le bac des vœux motivés et finalement éparpillés par l’algorithme dans des formations qu’ils n’avaient pas vraiment choisies et dont ils ne pourront finalement pas vraiment sortir, à moins de repasser par le dispositif…
L’expérience de l’université n’est pas non plus toujours aussi romantique qu’on l’imagine, précarité économique, problèmes de logement, relation de dépendance avec la famille, nécessité de rattraper les cours quand on est salarié, etc. Mais c’est aussi un espace qui n’est pas exempte de violences, qui existent aussi ailleurs, humiliation des enseignants, compétition, sexisme, racisme, transphobie, manque de prise en compte des étudiants handicapés, mépris social… Et les problèmes structuraux de l’université, dénoncés depuis longtemps, touchent en premier lieu les étudiants : amphis bondés, absence de suivit d’une année sur l’autre, en partie lié au recrutement massif d’enseignants et de personnels administratifs précaires, surcharge de travail des enseignants titulaires, locaux insalubres, manque de matériel, etc.
L’autre grande source d’angoisse que je constate chez les étudiants, et c’est peut-être dans ce domaine que nous sommes les plus informés, puisqu’ils nous en parlent c’est la « peur de l’avenir ». La réforme du chômage et la Lpr sont probablement en archéologie ce qui a le plus contribué au stress des étudiants-es, exacerbé par leur absence de traitement dans les médias (à la hauteur de l’enjeu en tout cas). La baisse des recrutements pérennes à la fois dans l’archéologie préventive et dans la recherche et l’enseignement supérieur leur offre bien peu de perspective. Et à court terme, les nouvelles mesures prévues par l’allocations chômage ne leur permettra même plus de vivre en enchainant les petits contrats dans l’archéologie préventive. Que vont-ils faire ? Pourquoi les former ?
Il est difficile et même déplacé de parler à la place des autres et je pense qu’il faut avant tout écouter les paroles étudiantes. Mais considérer leurs problèmes comme uniquement liés à la perte passagère de leur petit boulot ou à leur envie de faire la fête c’est nier leur place dans la société et leur rôle politique.
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archeoenlutte · 3 years
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Ce métier m'a littéralement consumé alors que j'en étais passionné
Je suis archéologue spécialiste de l'étude de mobilier archéologique (je n'en dirais pas plus pour préserver mon anonymat) pour une chronologie précise bien marquée sur mon CV (moyen âge et époque moderne, c'est déjà large). Je rentre dans une entreprise d'archéologie préventive privée où je signe un CDI pour ma spécialité après plusieurs années d'errances avec des contrats à droite à gauche mais surtout beaucoup de chômage de longue durée non indemnisé(eh oui, des contrats tellement courts et disparates qu'ils ne rechargeaient déjà pas à l'époque mes droits au chômage, alors autant dire qu'avec la nouvelle réforme). Bah oui, rentrer sur le marché du travail de l'archéologie au moment où la crise des subprimes fait ses effets sur l'économie française n'était vraiment, mais vraiment pas une bonne idée. Mais je n’ai pas choisi ma date de naissance, zut !
La période d'essai se déroule sans accroc avec du travail d'archéologie de terrain (il n'y a pas de techniciens ! Nous sommes tous archéologues !) qui me laisse trouver mes marques avec les méthodologies de ma nouvelle entreprise.
Et puis vient la première étude de spécialiste que l'on me demande de réaliser, avec des ensembles de mobilier complètement éclatés sur la Protohistoire, l'Antiquité, le moyen Âge et un peu d'époque moderne. On me demande si je peux tout étudier. Je botte en touche sur la protohistoire et me débrouille pour dégotter moi-même un spécialiste qui l'étudiera, mais cela va entraîner plus de frais. Je comprends bien qu'il ne pourra en être de même pour le mobilier antique que je devrais étudier.
De toute façon, il m'est demandé de procéder moi-même au tri du mobilier pour dissocier les différents contextes chronologiques ce qui empiète déjà sur le budget de jours que l'on m'a donné pour étudier tout cela. Sauf que l'Antiquité j'y connais pas grand chose. Heureusement, mes responsables hiérarchiques me font une fleur, ils m'octroient 10 jours pour me former à l'étude du mobilier antique.
Oui vous avez bien lu, 10 jours, 10 jours pour se former sur un sujet pour lequel un étudiant passera en général, pas une mais souvent plutôt deux années à se former, avec l'aide de ses tuteurs ou tutrices et de personnes bienveillantes participant à sa formation. Mais tant pis, j'y vais tête baissée et je pense sincèrement que je dois faire mes preuves et que j'y arriverai bien. Et puis il y a une pression qui pèse sur mes épaules, celle de risquer le licenciement si jamais je ne suis pas apte à réaliser ce que l'on attendrait de moi. Parce que l'on a beau se rassurer en pensant qu'il y a un code du travail, il a nettement été détricoté par la loi travail et les réformes gouvernementales entreprises dès 2017. On nous annonce à l'époque le plafonnement des indemnités prud'homales, la boite à licenciement facile est ouverte.
Moi, je fonce tête baissée, je doute déjà de mes compétences mais je considère que l'archéologie, c'est 95% d'autoformation après l'université, donc je devrais y arriver. Et puis au final, cela me plait d'étendre mes compétences sur une période qui m'intéresse de plus en plus à mesure de la découvrir.
Le mur à gravir est toujours aussi haut mais je ne peux sacrifier la qualité de mon travail pour rentrer dans le temps imparti. Alors comme beaucoup de collègues, je commence dès le début à travailler sur mon temps libre.Cela commence avec de la DAO le soir après manger, puis un peu les week-end, puis 2-3 heures les soirs de semaines et 8-10 heures par jour les week-ends. Mon corps fatigue, mon esprit vacille, mais je m'obstine, je crains toujours pour mon avenir, je ne veux pas retourner au chômage de longue durée.
Nous arrivons en période hivernale, le virus de la grippe commence à circuler et de mon côté je commence à être très, très, fatigué au travail. Je commence à avoir des vertiges en pleine journée. Je me résigne à aller voir le médecin avec la hantise d'être arrêté parce que j'ai la grippe ou autre, et que je perdrais forcément trois jours de salaires (merci les carences). Mais je m'y résous, pas parce que je m'inquiète pour ma santé, mais parce que je m'inquiète pour ma productivité (voyez ou l'aliénation nous mène). 
Apparté : j'ai des convictions politiques et syndicales depuis plusieurs années, je suis engagé et militant et pourtant malgré toutes mes convictions, je m'enferme en conscience dans un système d'exploitation du travailleur, en contradiction complète avec celles-ci. Mais je reste humain et la hantise de connaître à nouveau une précarité plus grande me terrifie. Un autre point d'explication dans cette « acceptation » de l'exploitation procède du sentiment et de la nécessité de solidarité qui m'obligeait à essayer coûte que coûte à m'en tenir à l'enveloppe que l'on m'avait donnée. Parce que tous les jours que l'on m'aurait redonné en plus auraient été mathématiquement soustraits à l'enveloppe du responsable d'opération pour la rédaction de son rapport.
Reprenons l'histoire : le médecin m'arrête pour une semaine, syndrome grippal, apparemment. Mais il s'agit vraisemblablement des effets néfastes de mon rythme de travail. Je ne touche pas à mon travail pendant mon arrêt maladie, je le voudrais mais j'en suis incapable.
Je reprends le travail, il me reste moins d'une semaine sur mon compte de jours donnés par l'entreprise. Je ne souhaite pas les décevoir, la fermeture de l'entreprise annuelle de fin d'année approche, « ouf, je vais pouvoir avancer pendant mes congés ». Et c'est parti, 12 jours à travailler 10 heures par jours pour tenir les délais. Même mon anniversaire je le passe à travailler toute la journée, sauf deux heures ou ma compagne me fait décrocher pour passer un moment tous les deux.
Je reprends le travail après mes « congés », j'ai perdu l'opportunité de me reposer pendant mes vacances, je suis loin du compte pour finir le travail. Et je suis dans l'obligation de le dire à ma hiérarchie. Malgré tout mes sacrifices je n‘arriverais pas à rentrer dans les clous, je me sens fautif. On m'octroie une très petite rallonge mais il y a un chantier qui commence, on va m'y envoyer et « je vais souffler ». Oui, envisager un chantier en janvier dans la neige, la boue et la pluie comme une période où l'on va souffler, c'est certainement bizarre.
Les mois passent, l'on me laissera finir mon étude après 6 mois de chantier, avec la seule petite rallonge négociée et donc un quota d'heures supplémentaires non rémunérées encore plus énorme à rajouter. Petite victoire personnelle qui redonne un peu de goût dans mon métier, la commission CIRA notera positivement l'étude que j'ai réalisée sur une chronologie qui n'était pas la mienne. Mais cette petite satisfaction est chère payée vu le nombre d'heures perdues dans ma vie personnelle. Au final l'on m'a payé entre 40 et 50 jours pour cette étude, je ne sais plus bien. Mais j'ai dû donner à minima la même quantité de temps personnel (50-60 jours dilués sur plusieurs semaines) pour l'achever avec la rigueur scientifique nécessaire.
Les mois passent avant que l'on me redemande de réaliser une longue étude pour laquelle on me demande cette fois ci de faire une estimation du nombre de jours nécessaires pour réaliser cette très grande étude. Avec tout l'optimisme qui me caractérise je fini par donner un devis d'environs 160 jours pour la mener à bien. Mon employeur m'en donnera 40 de moins, soit deux mois de moins pour réaliser un travail pour lequel j'avais déjà revu à la baisse une bonne partie des objectifs scientifiques. Et malgré mon expérience passée que je viens de vous raconter, je vais retourner en conscience dans la même spirale de travail qui me dévore chaque moment de vie personnel. La fatigue s'accumule, le stress monte mais surtout le cerveau mouline. Parce que je ne suis pas sorti indemne de mon étude précédente. Je me rends rapidement compte que j'y ai laissé une bonne partie de mes capacités cognitives. Ma capacité de concentration a extrêmement baissé. Ma motivation pour une spécialité pour laquelle j'ai attendu longtemps un poste un peu moins précaire s'est presque complètement évaporée.
Les mois sur cette nouvelle étude passent, je suis de moins en moins performant. Les vertiges au travail reviennent et après plusieurs semaines à faire comme si de rien été je fini par aller consulter mon médecin pour lui dire que je n'en peux plus, mon employeur venant de m'achever en refusant de m'accorder les congés payés dont la seule perspective faisait office de lumière au bout du tunnel.
Le médecin est formel, je suis en burn-out, ou pour le dire en français : en situation de surmenage. Il est inenvisageable que je retourne au travail dans mon état. Ce sera un peu plus de 3 semaines d'arrêt maladie obligatoire. Évidemment le médecin est scandalisé par mes conditions de travail et me dit : « mais l'archéologie, c'est pas un service public ? Vous ne devriez pas être fonctionnaire et avoir suffisamment de moyens affectés à vos recherches ? »
Après cet arrêt, j'arriverai tant bien que mal à finir cette étude, avec un dégoût caractérisé rien qu'à l'idée de devoir y retoucher juste un peu, ne serait-ce que pour la corriger pour envisager sa publication et en faire de la médiation. J'arrive à ce niveau de dégoût à chaque étude que je fini. Depuis mon entrée dans cette entreprise, on ne m'a presque jamais octroyé un nombre suffisant de jours pour pouvoir travailler décemment. Quand je dis décent, j'entends par là ne pas en venir à se retenir d'aller au toilette pour éviter de perdre du temps.
Aujourd'hui la situation dans l'archéologie préventive est telle que je me cherche des portes de sortie et j'envisage réellement une reconversion professionnelle. Ce métier m'a littéralement consumé alors que j'en étais passionné. Je suis en colère de cette situation, de cette disparition prochaine des compétences archéologiques acquises par plusieurs générations d'archéologues du préventif.
 Si seulement j'étais le seul à l'avoir vécu ...
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archeoenlutte · 3 years
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« tu sais, c'est comme ça en archéo »...
J'ai dû cesser toute activité professionnelle en début d'année, suite à un burn-out dû à mon travail en archéologie préventive. Cet état dépressif et ce stress intense m'ont conduit à une série d'arrêts de travail continus qui ont couvert toute la fin de mon CDD, soit une durée de presque quatre mois. Suite à ces arrêts de travail, il m'a encore fallu plusieurs mois, que j'ai volontairement passé au chômage et avec un suivi psychologique, pour surmonter la dépression ainsi que l'abattement et la colère, avant de reprendre de travail – chose que j'ai souvent été à deux doigts de foutre en l'air, au cours de cette période de repos et de profonde remise en question. Ce burn-out, comme je l'ai compris trop tard, a été le fruit de près d'un an de déception causé par un travail exercé dans de mauvaises conditions matérielles et financières, le plus souvent loin de chez moi, avec un manque d'intérêt et de reconnaissance, au nom du « tu sais, c'est comme ça en archéo »... Il m'apparaît à présent que cette expérience reflète une partie des nombreux problèmes corollaires à notre métier ; c'est pour cela que je souhaite en faire ici le témoignage. Les conclusions, en revanche, n'engagent que moi.
Je suis archéologue du bâti, plus précisément castellologue. Je suis dans le circuit de l'archéologie préventive depuis peu ; fin 2017, date de mon premier contrat lorsque j'étais encore étudiant en master. Depuis, j'ai travaillé pour plusieurs services départementaux d'archéologie. Après mes études universitaires, mon début de carrière s'est plutôt bien déroulé, en ce sens que je n'ai jamais eu de problème pour trouver du travail. Au cours de ces différents contrats, de durée variable, j'ai le plus souvent participé à des opération aux thématiques éloignées de ma spécialité. Cela se comprend, me disais-je, les fortifications et sites castraux, souvent classés et protégés, ne sont que rarement impactés par l'aménagement du territoire. Tu es jeune, tu te formes car il faut bien bouffer, en attendant ta chance d'être recruté pour tes humbles compétences. Après environ deux ans, cette chance, je crois la saisir lorsqu'on me recrute en tant qu'archéologue du bâti pour une opération alléchante comportant un volet d'étude des élévations. Enthousiaste, j'accepte immédiatement. Au gré des soucis de calendrier, ma hiérarchie m'annonce le décalage de l'opération en question. Etant déjà embauché, on me propose de passer un mois sur une autre fouille préventive, en attendant le démarrage de l'opération pour laquelle j'ai été recruté. J'accepte là encore... J'ai finalement passé trois mois sur ce chantier. Deux heures de trajet quotidien, en raison de la distance entre le chantier et le seul logement que j'ai pu trouver, par relations personnelles, sans avoir à me ruiner en double-loyer en l'absence de défraiements de type grand dép. Passé ces trois mois, début de l'opération tant attendue. A l'arrivée sur le terrain, on nous annonce que le volet bâti est finalement retiré pour cette tranche... Déception. Le chantier se complexifie pour moi par un long temps de trajets quotidiens, avec bouchons et retards systématiques, toujours en l'absence de défraiements pour me loger à proximité ; il faut donc rouler, à mes frais. C'est là que la tension commence à monter, la fatigue à s'accumuler. Je dors mal, je suis de plus en plus stressé ; je manque de m'endormir plusieurs fois au volant et dois prendre deux brefs arrêts de travail pour souffler un peu.
Entre temps, on m'a proposé dans un autre service une responsabilité d'opération. Il faut saisir cette chance. Je rédige donc une partie du projet scientifique d'intervention (PSI) sur un jour d'arrêt de travail et me déplace pendant mes vacances pour réunion avec la hiérarchie. Cela ne peut attendre ma prise de poste, d'accord. Les choses se compliquent à mesure que se précise le calendrier : on m'apprend finalement que je ne bénéficie pas de plus d'un jour pour préparer l'opération, avec début de la fouille dès le lendemain matin. Je passe donc le premier jour de mon contrat, en tant que responsable d'opération novice, à courir et devoir gérer ce que la plupart des responsables ont le temps d'étaler plus sereinement sur plusieurs jours voire semaines (administratif, logistique etc.). Mauvaise organisation et stress donc, ce dès le début de l'opération.
En cet hiver il pleut, beaucoup même. Il fait froid aussi et la nuit tombe tôt - c'est l'hiver, quoi. Tant pis pour nous ; le groupe électrogène loué est renvoyé d'office pour faire des économies et on nous refile celui du service, qui ne fonctionne pas plus de quelques fois... Quand bien même il aurait fonctionné, le bestiau ne pouvait à la fois chauffer et éclairer les deux algécos. Mon équipe se change donc chaque jour dans le noir, dans un vestiaire frigorifique, jonglant entre les parkas et pantalons de ciré qui ne sèchent pas. De mon côté, impossible d'utiliser mon ''bureau'' dans lequel je ne peux travailler en raison du manque de lumière et rester sans geler à cause du manque de chauffage. Impossible donc de déjeuner sur place. On me dit sur le ton de la plaisanterie que, si nous étions à l'Inrap, nous serions déjà en grève. Les choses ne semblent donc pas si grave - « tu sais, c'est comme ça en archéo », une fois de plus... Là encore, la fatigue s'accumule et la pression commence à devenir intense : insomnies, panique permanente sur le terrain, impossibilité de me concentrer, relations parfois tendues avec l'équipe. Quoi qu'il en soit, j'essaie de prendre tous ces soucis d'organisation sur moi, afin de laisser mes collègues travailler dans les meilleures conditions. A bout de nerfs, je ne me sens pas bien, y compris pendant mes vacances au cours desquelles je redoute déjà la reprise.
A la reprise du travail, je ne suis déjà plus en état de travailler, mais je minimise la situation et retourne sur le terrain, après m'être fait délivrer une ordonnance en urgence pour des anxiolitiques. Je ne reste qu'une semaine, après quoi un arrêt de travail s'impose déjà : trois semaines, au cours desquelles je ne parviens pas à me calmer et me reposer, redoutant encore de devoir retourner travailler et culpabilisant de laisser mes collègues. Mon retour correspond avec le début de la post-fouille. Là, loin de chez moi dans une chambre de location déprimante, à un niveau de stress et d'angoisse ingérable, je craque. Après seulement une journée de travail et une nuit d'insomnie complète, totalement angoissé bien que sous cachets, je m'enfuis de la piaule et erre dans la rue en fumant cigarette sur cigarette. Je me maîtrise et attends l'arrivée de mes collègues et de mon chef pour annoncer que je ne suis plus en capacité mentale et physique de travailler. Vingt minutes après, je suis en route pour chez moi.
S'en suit une période de trois mois d'arrêt de travail, avec anxiolitiques et suivi psychologique hebdomadaire. Je dors des jours entiers, léthargique, je broie du noir et ne veux plus jamais entendre parler de ce métier qui m'a fait du mal. Je suis en outre en colère, pour tout ce que je viens de lister : les mauvais recrutements, la logistique souvent défectueuse, le manque d'intérêt et de dimension scientifique, les conditions de travail dans leur ensemble, qui font ouvrir des billes énormes à la plupart de nos collaborateurs chauffeurs de pelle et ouvriers du TP ; bref, tout ce que nous ne connaissons que trop souvent et trop bien. Trop agité et manquant de recul pour prendre des décisions, je suis à deux doigts de plaquer la future fouille pour laquelle on m'a appelé il y a déjà quelques mois ; je prends également langue avec un centre de formations, dans l'idée d'une reconversion en CAP. N'étant plus embauché et pas encore totalement remis, je prends la décision de passer encore quelques mois au repos en vivant sur mes droits au chômage. Bien m'en prend ; je fais une rechute qui prolonge mon suivi psychologique. A cela s'ajoutent des soucis financiers, que l'on connaît lorsque l'on jongle entre les emplois précaires et les ARE.
Ce n'est qu'au bout de tout cela, après environ sept mois sans travailler, que je prends la décision de participer à la fouille pour laquelle j'avais été contacté de longue date. Aujourd'hui, je ne regrette pas cette décision. J'exerce à nouveau, pour la première fois depuis des années, le métier pour lequel j'ai choisi de tenter l'aventure en archéologie et dans de bonnes conditions. Combien de temps cela tiendra ? J'en n'en sais rien ; le spectre du burn-out plane toujours et je ferai tout pour ne pas revivre cette situation. Il y a aussi la précarité grandissante, sans cesse accélérée par les réformes actuelles. Cette expérience m'a permis de prendre un recul nécessaire sur moi-même et mes attentes et surtout sur ce que j'ai compris de la discipline. Je ne cache pas mon dépit face à ce que j'y ai vu et ce qui se raconte entre archéologues : des conditions de travail très souvent médiocres, voire pire, une précarité institutionnalisée, un manque de reconnaissance et d'intérêt, de l'hypocrisie souvent dissimulée derrière un faux esprit de corps, un vrai problème pour faire valoir des revendications qui pourtant concernent une majorité d'entre nous, en partie expliqué par le fonctionnement même du milieu, basé sur le bouche-à-oreille pouvant mettre n'importe qui sur le carreau pour des raisons diverses et partiales. Il est possible que je ne sois pas fait pour l'archéologie préventive... Peut-être que j'en demande trop : des salaires réévalués sur une même base, tenant compte du niveau d'études, des frais systématiques afin d'éviter de se ruiner en double loyer et essence, un recrutement adapté aux compétences, dans la mesure du possible évidemment.
J'aime ce métier, je continue à me passionner pour mes thèmes de recherche et je pense que rien ne m'enlèvera ça. En revanche, que l'on ne me demande plus d'être reconnaissant pour un CDD de deux mois ou bien de sacrifices personnels pour l'archéologie préventive, qui pousse tant de collègues à la précarité, au découragement, au renoncement voire à la dépression. Non, ça n'est pas "comme ça, en archéo". Prenez soin de vous et de vos collègues.
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archeoenlutte · 4 years
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J'ai dû m'expatrier pour que l'on me donne ma chance
Diplômée d'un M2 en archéologie des mondes antiques méditerranéens en 2014 - pas au bon moment apparemment. Je n'ai commencé à postuler qu'en 2016 (après avoir tenté vainement de préparer l'agreg - ce n'était pas pour moi). Pourtant (bien naïvement) persuadée avoir une expérience de terrain plutôt solide - 6 campagnes de fouilles dans des contextes plutôt variés avec de l'expérience en tant que responsable de secteur - je n'ai reçu pratiquement aucune réponse à mes candidatures et les rares qui m'ont répondu me disait que je n'avais pas suffisamment d'expérience ! Comment acquérir de l'expérience sans pouvoir décrocher un premier poste ? C'est quelque chose qui m'a toujours interpellé en France.
Je suis donc partie passer un an en Angleterre. Pour changer d'air. Sans la moindre expérience dans le domaine j'y ai décroché un petit contrat d'assistante de langue dans le secondaire et ai trouvé un second emploi en tant que barista. Des semaines à près de 70h parfois ! Probablement les fêtes de fin d'année les plus tristes et stressantes que je n'aurai jamais 🤞Mais je ne regrette rien ! Ça m'a permis de reprendre mon souffle. 
Arrivé l'été je retournai sur le terrain et réalisai que ma place était bien là. J'ai retenté pour la forme de postuler partout en France. Aucun résultat. Alors j'ai tenté l'Angleterre. Et là, non seulement on répondait à mes mails mais j'ai reçu plusieurs offres d'embauche. Alors certes pour des contrats de 6 mois renouvelables mais c'était déjà ça ! Alors je me suis lancée. Aujourd'hui cela fait deux ans que je travaille pour une compagnie d'archéologie préventive dans le Lincolnshire. Alors tout n'est pas rose. Mon premier contrat n'a duré que 6 mois. A temps pour retourner sur mon site de programmé favori 😊
J'ai accepté un nouveau contrat de 6 mois en janvier 2019 et ai été promue à un contrat d'assistant responsable d'opération en juin 2019. L'année à été rude niveau contrats mais en attendant je suis toujours en poste et envisage de progressivement faire mon chemin vers un poste de RO (et non de mini manager).
Voici mon parcours.
Maintenant, suite à la récente publication d'offre d'emploi de l'Inrap je ne peux que ressentir un sentiment d'injustice. Comment peuvent ils changer de ton à ce point en quelques années ? Ni moi ni beaucoup de mes camarades sortis des facs un Master en poche n'ont eu accès à un contrat avant bien des galères si ils n'ont pas abandonné en cours de route. Fatigués d'enchaîner les petits contrats et de devoir faire avec des petits boulots entre 2 contrats archeo. Contrats temporaires sans cesse renouvelés ou non, sans aucune possibilité de s'installer ou de planifier quoi que ce soit au delà de la fin du CDD. Maintenant on nous met en compétition avec des candidats sans diplôme ni expérience ? Après des années d'étude où l'on nous pousse à l'excellence, sans cesse mis en compétition, sans promesse d'emploi à la clé. A quoi bon ?
En parallèle de ce sentiment d'injustice, d'être née au mauvais moment comme aime à nous le rappeler les anciens, une certaine inquiétude de voir se confirmer un système à 2 vitesses, un retour à une certaine mode du 19ème siècle, avec une élite diplômée dirigeant les opérations et ne retirant leurs gants blancs qu'au moment de la photo finale et du dernier coup de pinceau 🤮 Car à quel moment le fouilleur qui entre dans le circuit sans diplôme va-t-il avoir le temps et l'opportunité de préparer licence+Master+doctorat, de publier des articles, de rédiger des rapports (ce qui suppose qu'on lui aura confier des responsabilités autre que l'entretien de sa truelle) autant de pré-requis exigés lors des dernières offres de poste de RO auxquelles j'ai candidaté sans y croire l'hiver dernier ?
Si vous m'avez lu jusqu'au bout, merci 😊 J'avais besoin de partager. 
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archeoenlutte · 4 years
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Le revers de la médaille n'est pas des plus reluisant
J'ai commencé à travailler dans le domaine préventif il y a quelques années. Je dirais que les débuts se sont bien déroulés, j'ai eu la chance de trouver régulièrement des emplois, et des contrats parfois longs pour rester dans la même structure. C'est toujours le cas, et j'estime avoir un peu de chance sur cet aspect. Toutefois, le revers de la médaille n'est pas des plus reluisant et je vais m'efforcer de planter le décor de notre activité, tel que je le vois. 
Je parle ici des services archéologiques de collectivités territoriales, structures que je connais le mieux pour y avoir travaillé ou pour avoir eu nombre de collègues contractuels évoluant auprès de ce type d'employeurs. 
Les contraintes varient fortement, mais j'ai pour ma part, observé que d’emblée la question du logement est un problème récurent. En effet, concernant les services archéologiques rattachés à des collectivités territoriales, l'obtention d'un logement de service durant la période d'embauche est quasi impossible, et il n'y a pas de subside de prévu pour aider le contractuel à se loger décemment. Je me retrouve donc à payer deux logements, ma résidence fiscale et un second “pied à terre” proche de mon lieu de travail. 
Compte-tenu des salaires - relativement faibles, allant du smic à vaguement 1800 euros pour un technicien suivant l'employeur, avec une ancienneté rarement prise en compte - cela a pour conséquence de réfréner au départ nombre de collègues. Quand ceux-ci le font, ils n'ont pas ou peu d'argent pour rentrer régulièrement chez eux. Par ailleurs, il faut se trouver un logement dans des villes ou en campagne, et bien sur un logement décent, ce qui est souvent loin d'être évident. Chacun sait la pression au logement dans certaines zones de notre pays, pour louer un bien, chacun sait la somme de papiers et justificatifs en tout genre pour obtenir “l'immense privilège” d'occuper quelques mètres carrés à l'année quelque part. Dans ce contexte, je vous recommande d'essayez de vous loger pour une durée de quelques semaines ou de quelques mois face à des propriétaires ne recherchant que de “bons” locataires à l'année - et avec un “bon” salaire, en CDI (rappel : je suis contractuel comme la majorité écrasante de mes collègues). Votre employeur ne vous aidera pas mais exigera, comme de juste, que vous soyez présent rapidement sur votre lieu de travail - souvent sans vous faire signer de contrat avant la prise d'activité et sans proposition de prise en charge pour votre premier déplacement à plusieurs centaines de kilomètres de chez vous. 
Des contrats courts de 2, 3 mois, dont on sait souvent à l'avance qu'ils seront renouvelés plusieurs fois compte-tenu de l'activité du service archéologique, mais que l'employeur maintiendra avec acharnement en contrat court reconductible,peut-être pour maintenir une vague pression qui n'a aucun sens. Un contrat de travail réclamé bien entendu par le bailleur. Bon courage… 
Les conséquences à cette question de la mobilité géographique sont simples. La vie de couple vacille, l'environnement amical s'étiole et s'ensuit le cortège classique du développement de pathologies d'ordre psychologiques (anxiété, dépression), du développement d'addiction en tout genre (drogue, alcool) et au final d'un changement d'orientation. Encore faut-il que les gens se rendent compte à temps du problème, car l'usure mécanique contribue - encore un facteur d'usure - à fortement restreindre les possibilités de ré-orientation au bout d'un certain âge. 
Pour ma part, si je tiens, pour le moment, par habitude et conviction pour l'utilité de mon métier, celui-ci a malheureusement entraîné sur moi-même des problèmes de santé divers.
Je pense que la nécessité que je ressens de travailler dans l'archéologie préventive ne doit pas occulter qu'il faut avant tout travailler pour son épanouissement personnel. Les conditions d'embauche - qui ne prennent pas en compte nos besoins personnels, je dirais même que les employeurs semblent savamment ignorer - contribuent à faire disparaître les acteurs de ce métier, de gré ou de force. Car si l'exercice du métier d'archéologue peut contribuer à cet épanouissement personnel, les conditions réelles de travail peuvent vite détruire des vies et faire disparaître toute trace de cet épanouissement. C'est ce que je vois depuis des années auprès de certains de mes collègues, sans évolution positive des choses. 
Par ailleurs, les dotations en équipement sont elles aussi variables, et il n'est pas rare de devoir s'équiper soi-même (une paire de chaussure de chantier digne de ce nom coûte rarement moins de 100 euros, une parka d'hiver 150 euros, polaires, pantalons de chantiers renforcés etc.). 
Ces éléments devraient nous interroger collectivement sur la valeur portée à notre travail, à la perception que les responsables d'unités archéologiques territoriales et leur hiérarchie ont des contractuels qui, de fait, font de gros efforts de façon systématique pour aider un service archéologique a faire une fouille, donc à faire rentrer de l'argent, et à justifier de son utilité auprès de son autorité de tutelle - car un service archéologique territoriale qui ne fait pas rentrer d'argent régulièrement représente juste une charge pour la collectivité… Mais de quels efforts s'agit-il ? Il s'agit du travail sur le terrain, dans des délais relativement courts, quelque soient les conditions climatiques. Il s'agit du travail en bureau, quand il faut traiter des données, parfois sans poste de travail attitré (ce qui nécessite de naviguer entre les bureaux parfois vides de leur occupant employé sur le terrain, ou dans certains cas de figure à utiliser son propre ordinateur). Mais aussi, et je dirais à égalité, un archéologue doit faire l'effort de se déplacer, loin des siens, pendant des semaines - à minima - faute d'avoir l'argent et les temps de transports décomptés sur son temps de travail, ce qui entraîne de forts dégâts psychologiques sur nombres de collègues. 
Visiblement, les personnes en CDI ou titulaires de la fonction publique qui rentrent chez eux tous les soirs ne comprennent pas particulièrement l'utilité - pour les autres - d'entretenir une vie sociale et affective de qualité. Pour autant, il semble nécessaire de leur rappeler que ces éléments sont indispensables à nos équilibres personnels et à l'exercice de notre discipline, si passionnante soit-elle. Et que cela ne constitue en aucun cas un aspect négociable de nos vies… 
Enfin, je constate qu'il est très compliqué de travailler sur des programmes de recherche fondamentale. Nombres d’entre nous aimeraient s'investir sur des thématiques portées par des universités ou le CNRS dans le cadre de programme pluriannuels de recherche, mais malheureusement, nos déplacements fréquents rendent la tâche ardue. Pourtant, cela constitue un autre facteur d’épanouissement personnel et cela à du sens. Épanouissement, car cela permet de remettre sa façon de travailler en perspective, cela produit une émulation intellectuelle entre des collègues n'évoluant pas dans les mêmes structures de tutelle. Sur cet aspect particulier, les aller-retours entre le terrain et les laboratoires sont riches d'apports respectifs (méthodologiques comme interprétatifs) et représentent donc une nécessité absolue pour l'évolution - dans le bon sens - de notre discipline. Du sens, car il ne faut pas oublier que nous sommes avant tout des chercheurs, et que vouer sa carrière à extraire des données du terrain sans participer à des programmes d'exploitation de celles-ci n'a justement… aucun sens.
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archeoenlutte · 4 years
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Diplômée en archéologie mais ne finira pas archéologue
En stage en archéologie en Martinique, j'ai eu à faire à un chef de chantier des plus abjectes. Infantilisation, cris envers ma personne, blessure non prise au sérieux (à cause de cela mes nerfs sont gravement endommagés, j'envisage une opération), racisme, moquerie et non respect des autres fouilleurs envers moi, alors que j'étais la plus âgé du groupe. J'ai fini par quitter le chantier avec une réputation de filles fragile et de voleuse. Mais ce n'est pas tout, j'ai pu trouver un autre stage, mais bizarrement, j'ai eu affaire aux mêmes accusations et à la même attitude irrespectueuse des fouilleurs. J'ai vite compris que le chef de chantier de mon 1er stage m'avait fait une mauvaise réputation. 
Aujourd'hui, j'ai décidé de quitter l'archéologie car personne même pas mon université n'a bougé contre ces individus. Nous savons que la réputation dans le milieu est primordiale, la mienne a été foutu par un abruti que je soupçonne fortement, d'avoir des relations intimes avec des étudiantes désireuses de valider leur mémoire ou thèse.
Triste.
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archeoenlutte · 4 years
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J'ai fini par craquer et changer de métier
J'étais anciennement archéologue. J'ai fait plusieurs masters en archéologie .  Les années à l'université ont été assez complexes, certains maîtres de stage sont assez colériques sur les chantiers notamment avec les filles, les conditions d'hygiène sommaires et les étudiants se battent pour obtenir la possibilité d'avoir un doctorat.  J'ai eu la chance de travailler par la suite dans des collectivités et même à l'INRAP. La situation est assez précaire, l'ambiance entre les CDD déplorables et le suivi par les CDI face aux CDD laisse grandement à désirer principalement sur les chantiers INRAP. Le burn out est apparu dans ce contexte, entre la pression de devoir fouiller toujours plus vite, parfois avec des sols contaminés et des passants laissant des préservatifs usagers ou allant directement uriner et plus sur le terrain, des gestes déplacés venant de quelques archéologues et des blagues sexistes, aucune aide sur certains chantiers des CDI (même si ils ne sont pas tous comme ça, il y a aussi des chefs d'une grande générosité et bienveillance) et des actes de violences gratuites mentales répétées entre les CDD pour savoir qui pourra rester sur le chantier. Bref une belle liste de soucis qui ont fait que j'ai fini par craquer et changer de métier bien que l'archéologie restera toujours une passion et un regret.
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