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Corse: Mafia or not mafia?

Bientôt, dès que possible, je vous propose un (long) travail en plusieurs chapitres. La périodicité n’est pas encore arrêtée, toutes les semaines ou tous les quinze jours. La publication durera plusieurs mois. 

Comme déjà annoncé dans un article précédent  -voir lien ici- j’ai procédé à une longue recherche sur la question de l’existence, ou non, d’une mafia en Corse.

Il ne faut pas attendre de révélations.Il s’agit d’un travail, souvent fastidieux, de mise en perspective et de décodage de la situation. Je vais tenter d’aborder un maximum de thèmes: politique, économie, social,, droit… 

Même si comparaison n’est pas raison, je ferai référence à la situation italienne. En effet  l’Italie, si proche et si lointaine de la Corse, est le pays européen où le phénomène mafieux est le mieux étudié. Le thème n’a pas l’air de passionner les chercheurs français. Le mot “Mafia” est souvent prononcé, mais il est visiblement peu connu en profondeur. L’approximation domine aussi bien dans la presse que dans les propos de certains hommes politiques et de manière encore plus surprenante dans les interventions de… magistrats. 

En Corse, des voix s’élèvent pour dénoncer la présence d’une “Mafia”. Des associations se sont créées et certains demandent que le droit français se rapproche de la législation italienne. Aujourd’hui il n’existe pas de délit mafieux dans le code pénal français. La Justice française ne peut donc enquêter sur un délit qui n’est pas nommé. 

Il existe, indéniablement, un problème en Corse. Doit-on parler de “Mafia”? Si oui, que faire? Existe-il une volonté politique de répondre à la question? Rien n’est moins sur. En effet, reconnaître l’existence d’une Mafia en Corse, c’est admettre qu’il existe une mafia française. Car une Mafia, ce n’est pas une simple bande de criminels, fussent-ils les plus endurcis. 

Reconnaître une Mafia serait une véritable révolution. Il faudrait voter des lois nouvelles, former les magistrats et les forces de l’ordre, ainsi qu’une grande partie du personnel administratif. Ce serait un changement de paradigme. On ne passe pas, sans dommages à une nouvelle représentation du monde. De plus ce serait reconnaître que les politiques menées, jusque là, étaient à coté de la plaque. 

S’il existe une Mafia, on pourra dire que les limites mies à son étude et les moyens de la combattre ont pris un sacré retard.  Il peut aussi ne pas y avoir de Mafias, semblables aux quatre organisations criminelles reconnues en Italie. Mais comme je vais tenter de le montrer, dans mon travail , des délits mafieux peuvent se passer de Mafia. Comme nous le montre notre voisin transalpin (outre-mer pour la Corse) les délits mafieux s’étendent, sans pour autant être tous commis par des mafias; L’extension de la corruption et de ses violences (physiques, mais aussi économiques et sociales) touche de plus en plus de domaines: Santé, réfugiés, travail… Les phénomènes de corruption et leurs conséquences touchent particulièrement les zones où se développe la spéculation immobilière et pas forcément dans des pays ou régions qui possèdent une  Mafia. L’archipel des Baléares, ne connait pas de mafia “indigène”, mais devient -selon plusieurs observateurs- un “laboratoire de la corruption. J’aborderai également la situation dans cet archipel. 

Les exemples que j’ai choisi et leurs corrélations (politiques, entrepreneurs, fonctionnaires, voyous) devraient nous permettre de nous interroger sur notre propre situation. 

Au moment ou le monde connait une crise majeur, aussi bien sanitaire qu’économique et sociale, il n’est pas inutile de s’interroger sur les mutations en cours. Les mafias italiennes ont bien pris le train de la pandémie, le COVID 19 est un business comme les autres… La Corse pourrait connaitre, dans les prochains mois, une “concentration économique” consécutive à la crise que nous traversons. 

Une Mafia c’est un objet politique et c’est, sans doute, pour cela que le thème prête à confusion. Je vais essayer de la lever, dans un travail qui sera publié sur plusieurs mois.Dès que possible. 

C’est nullissime je sais. Mais c’est juste pour vous embrasser.

Participation à un cadavre exquis intitulé “Vertiges”

Audition

L’an deux mille vingt, le sept novembre, à seize heures treize Nous, XXXX XXXXX, brigadier chef de police, en fonction Sûreté départementale Officier de police judiciaire en résidence Bastia —nous trouvant au service —poursuivant l’exécution des instructions contenues dans le soit-transmis N°XX/XXX/XX en date du XX/XX/XXXX de Monsieur XXXXX XXXXXX, vice-procureur de la République près le TJ Bastia —poursuivant l’enquête en la forme préliminaire —vu les articles 75 et suivants du Code de procédure pénale —avons mandé et constatons que se présente à nous Monsieur XXXXX XXXXXXX, né le 12/08/1952 à Lyon 3ème (Rhône), de nationalité Française, demeurant à Brando 20222 (Haute-Corse) Précisions: Route de Poretto Autres coordonnées: 06 13 XX XX XX —Je prends acte du motif de ma convocation et consens à répondre à vos questions —Question: Dans la nuit du 15 au 16 octobre dernier, vous avez bloqué la circulation à la sortie nord du tunnel de Bastia en distribuant des photocopies aux automobilistes. Reconnaissez-vous les faits ? —Réponse: Oui.J’avais deux cent exemplaires à offrir mais je n’ai pas pu tout distribuer. Quand les policiers m’ont attrapé, j’ai jeté en l’air les photocopies qui me restaient. Les voitures ont roulé dessus. C’est dommage. —Question: Toutes les photocopies que vous aviez sont identiques: c’est une image de forêt, sans aucun texte.Pour quelles raisons avez vous distribué cette image ? —Réponse: parce qu’elle montre un chemin au milieu d’une forêt —Question: Cette image a-t-elle une signification particulière pour vous ? —Réponse: Oui. Elle montre un chemin au milieu d’une forêt. —Question: Ce chemin a-t-il un sens particulier pour vous ? —Réponse: Oui. C’est le chemin au milieu de la forêt. —Question: Savez-vous où mène ce chemin ? —Réponse: Non. Il faut le prendre pour le savoir.Et vous m’en avez empêché. —Question: Vous souhaitez vous même prendre ce chemin ? —Réponse: Oui. —Question: Pour quelles raisons ? —Réponse: Pour ressentir. Pour sentir, le milieu de la forêt, l’humidité des mousses, la rugosité des troncs, l’odeur de la terre, la saveur d’une larme d’eau sur une feuille tombée au sol. —Question: Votre action à la sortie nord du tunnel de Bastia avait-elle pour but d’inciter les automobilistes à prendre ce chemin ? —Réponse : Oui, mais pas directement. Ce chemin n’est pas praticable en voiture. Il est étroit et fragile.Il faut y aller à pieds en marchant lentement, doucement, en étant très attentif à tout. —Question: Votre action était-elle donc une sorte d’invitation ? —Réponse: Non. On ne peut pas le dire comme ça. C’est trop réducteur. C’est oublier l’essentiel. —Question: L’essentiel ? Vous pouvez développer, m’expliquer ? —Réponse : Vous expliquer, non. Développer, par contre, c’est la bonne question. C’est de la photographie qu’il faut partir. Le paysage n’existe que dans sa reproduction et c’est dans le paysage reproduit qu’il faut entrer et se perdre. —Question: Êtes-vous l’auteur de cette photographie ? —Réponse : Qu’elle importance ? —Question: Nous avons trouvé dans les disques de votre ordinateur saisis lors de la perquisition de votre domicile, plusieurs centaines de photos similaires. Ces photographies ne proviennent pas de votre smartphone et nous n’avons pas trouvé d’appareil photo chez vous. D’où proviennent ces images ? —Réponse: D’une amie. —Question: Pouvez-vous me fournir l’identité de cette personne ? —Réponse : Non —Question: Pourrait-il s’agir de Madame XXXX XXXXX dont vous avez à de très nombreuses reprises visité le compte Instagram depuis plusieurs mois ? —Réponse : C’est possible. —Question: Avez-vous adressé des courriels, des SMS, des messages numériques à cette personne ? —Réponse: Sans doute. —Question: Entre le début du mois de juillet dernier et la fin du mois de septembre, vous avez envoyé à Madame XXXXX XXXXX plus de deux cent courriels ainsi qu’une bonne centaine de SMS dont les contenus insistants s’apparentent à du harcèlement. Reconnaissez- vous être l’auteur de ces envois ? —Réponse : Oui, mais ça n’a rien à voir avec du harcèlement. Rien à voir. —Question: Comment qualifieriez-vous votre relation avec Madame XXXX XXXX ? —Réponse : Je ne sais pas. Je ne peux pas répondre à cette question. Nous avons le chemin au milieu de la forêt en commun. C’est tout. —Question: Aviez-vous l’envie de rencontrer cette femme ? —Réponse: Oui, bien sûr. Mais c’est impossible. —Question: Pourquoi ? —Réponse : Parce que c’est une femme qui vole et nage dans les nuages. —Question: Que voulez-vous dire plus précisément ? —Réponse: Fermez les yeux. Vous verrez. Après lecture faite par lui même le déclarant persiste et signe avec nous le présent ce jour à dix sept heures trente cinq.

Embarquement dans l’atelier d’écriture animé par François Bon, hiver 2020

Contribution à l’Operata pè Santini avec les éditions Albiana publiée le 10 décembre 2020, jour de la libération sous contrôle judiciaire de l’écrivain et éditeur Jean-Pierre Santini.