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lombreduzed · 10 years
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lombreduzed · 10 years
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MARTINIQUE
Allez une autre nouvelle écrite pour un concours l'année dernière. Là encore pas sélectionnée, mais ce fut cathartique d'écrire cette histoire, sorte d'auto-fiction pas si loin de la vérité. Enjoy reading it.
MARTINIQUE (© Cédric "zed" Mayen 2012)
Le cercueil se consumait derrière la vitre ignifugée. Audric faisait face à l’incinérateur, tenant fermement la main de sa petite sœur. Les ongles de Léa lui perforaient la chair, mais il n’esquissa aucun mouvement et ne laissa rien paraître de sa douleur.
C’était la première fois qu’Audric perdait un être cher. Bien qu’empli d’une sourde mélancolie, il ne savait pas comment exprimer sa tristesse. Il avait du mal à s’autoriser cette pensée, mais il était jaloux des larmes qui coulaient sur les joues de sa soeur.
Les employés du funérarium invitèrent les proches du défunt à quitter la salle et Léa lâcha enfin sa prise. Audric la regarda s’éloigner et rejoindre leur famille avant d’examiner sa main où perlaient quelques gouttes de sang. Cela ne lui faisait aucun effet. Son corps était comme recouvert d’une fine couche d’ouate qui l’isolait du monde extérieur. Il se retourna une dernière fois pour regarder le four dans lequel son grand-père se consumait. Tout cela lui avait donné envie de fumer.
Audric s’éloigna de l’entrée du funérarium et traversa le parking qui le séparait de la plage. Il s’assit sur le bord de mer et sortit son paquet de roulées. Il referma prestement le papier sur le tabac et le lécha puis sortit un zippo de sa poche et alluma sa cigarette en se protégeant du vent marin.
Quand il releva la tête, il aperçut un vieil homme assis à quelques mètres de lui, fixant l’horizon et tirant sans empressement sur une pipe.
Quelque chose dans la physionomie de cet homme qu’il avait vu assis quelques rangs derrière lui à l’église, lui rappela son grand père. Quand un rayon de soleil transperça le ciel nuageux et vint éclairer la peau ambrée du visage du vieil homme, Audric ne put retenir un frémissement. La ressemblance lui sembla tellement frappante qu’il voulut se lever pour aller se blottir dans les bras de cet homme qui lui rappelait tant le cher disparu.
Celui-ci ne sembla d’abord pas s’apercevoir de sa présence, puis tourna la tête sous la pression de son regard. Il le salua d’un petit signe de tête puis se remit à fixer l’horizon.
« Nous adorions regarder passer les bateaux avec ton grand-père dans notre jeunesse. »
Audric tourna lentement la tête vers la mer. Des chalutiers se découpaient sur l’étendue azur. Il resta quelques instants à les observer avant de se tourner vers le vieil homme.
« Excusez-moi je ne crois pas que nous ayons été présentés… » avança Audric.
« Oh, je suis un vieil… ami de ton grand père. Je m’appelle André. Tu dois être Audric ? Pierrot me parlait souvent de toi dans ses lettres. »
Audric acquiesça de la tête. André lui tendit une main frêle et osseuse qu’il serra un peu trop fermement. André, impassible, souriait toujours. Une lueur de sympathie passa dans ses yeux couleur océan.
« Vous vous connaissiez depuis longtemps ? »
« Plus de soixante ans. Nous vivions là-bas, de l’autre côté de la mer. » André esquissa un geste de la main vers l’horizon avant de continuer. 
« Tu vois cette pipe? C'est ton grand-père qui me l'a offerte avant son départ. »
Audric suivit du regard la main d’André replaçant la pipe au coin de ses lèvres.
« Vous avez grandi ensemble en Martinique? »
Le vieil homme eut un petit soubresaut et étouffa un cri d’étonnement. Il fixa longuement Audric avant de lui répondre d’une voix amusée, puis baissa le regard sur le sable qu’il effleurait de sa semelle.
« Oui, la Martinique, c’est là que nous vivions… »
Il marmonna une suite d’autres mots qu’Audric ne comprit pas (Cela devait être du créole, pensa-t-il sans réussir à s’en convaincre) avant de relever la tête.
Audric le fixait avec curiosité. C’était la première fois depuis l’annonce du décès de son grand père qu’il semblait porter de l’intérêt au monde extérieur.
« Racontez-moi ! S’il vous plaît. J’aimerais en savoir plus sur l’enfance de mon papy. Il ne m’en a jamais parlé. »
« Tu sais quand je l’ai connu, je ne devais être guère plus âgé que toi. Quel âge as-tu d’ailleurs ? »
« Dix-sept ans, bientôt dix-huit. »
André posa son regard sur Audric avec intérêt. Il se racla la gorge avant de tirer sur sa pipe, l’air pensif.
« C’est ça, je devais avoir seize ans quand j’ai vu ton grand père pour la première fois. Il en avait dix, et c’était… » Il se racla à nouveau la gorge « C’était l’aîné de la fratrie. Tu l’aurais vu, un vrai petit coq, le Pierrot ! »
André dressa sa main, les doigts écartés, sur le sommet de son crâne, mimant une crête.
« Vous étiez bien plus âgé que lui alors ? Et malgré cette différence d’âge vous étiez amis ? » demanda Audric, sur un ton légèrement inquisiteur.
« Il me rappelait l’enfant que j’avais été, et j’étais un peu son mentor.» André se rembrunit « bien que j’aurais voulu que l’élève survive au maître... »
Audric et André baissèrent simultanément la tête et laissèrent un silence s’installer à la mémoire de celui qu’ils avaient aimé. Audric s’absorba dans le bruit lancinant des vagues. Il se frotta le nez avec le pouce avant de poser la main sur sa cuisse, paume ouverte vers l’extérieur.
André brisa le silence.
« C’est rigolo cette façon que tu as de te tenir ! Pierrot se tenait de la même manière quand il me bombardait de questions sur l’école militaire. Tu sais, j’ai passé toute ma jeunesse dans une caserne près de Marseille avant de revenir en… Martinique pour m’occuper de l’éducation des petits. Ton arrière-grand-père était inquiet pour ses enfants car à l’époque Fort-de-France était une véritable poudrière. Il voulait qu’ils soient éduqués par un « grand-frère » et il m’adopta pour que je devienne leur tuteur. »
Audric était surpris, il n’avait jamais entendu parler de ce grand-oncle.
« Je ne comprends pas très bien… Vous étiez son grand frère et son professeur ? Ça ne devait pas être un rôle facile à tenir…» Audric n’eut pas le temps de finir sa phrase, interrompu par la voix rocailleuse du vieil homme.
« Au début c’est certain, ce ne fut pas une partie de plaisir. Je le traitais avec la même morgue que mes instructeurs, et il n’aimait pas ça. C’était une sacrée tête de mule. Il n’appréciait guère les gens qui lui tenaient tête !»
Audric ne put réprimer un sourire, repensant à son grand-père jurant ses grands dieux qu’il avait raison quand tout et tout le monde lui donnaient tort. Il savait que cette façon d’agir et de penser avait déteint sur lui et qu’ils pouvaient tous deux avoir de véritables dialogues de sourds quand ils étaient ensemble.
Pourtant Audric avait toujours considéré ces altercations comme un jeu et aimait quand son grand-père, qui s’épuisait souvent avant lui, le gratifiait d’une tape sur l’épaule et d’un petit clin d’œil.
« Il n’a… n’avait pas changé avec le temps, je peux vous l’assurer. Papy n’acceptait jamais d’avoir tort… Mais comment êtes-vous devenus amis si le dialogue ne passait pas entre vous ? »
André se rembrunit à nouveau. Il tira une boîte d’allumettes de son imperméable et en craqua une pour rallumer sa pipe. Il tira une longue bouffée, redressant l’échine avant de souffler la fumée et de laisser son corps se décontracter.
« Ça s’est passé après la mort de Jacquot. C’était le frère cadet de Pierrot et ils étaient très proches. Il faisait extrêmement chaud ce jour-là, et j’avais décidé de désobéir aux ordres de papa qui nous avait interdit de sortir. »
Audric tiqua, mais André ne s’en aperçut pas et continua son récit.
« J’ai voulu emmener les petits dans la crique qui se trouvait en face de la maison. Il fallait traverser une grande avenue et j’avais demandé aux enfants de s’aligner en attendant que les voitures s’arrêtent pour nous laisser passer. Quand j’y repense, quelle connerie ! J’en avais fait des cibles toutes désignées. Semblables à leur mère, ils avaient tous la peau foncée et on pouvait facilement les confondre avec des autochtones. Il était déjà trop tard quand j’ai vu le canon d’une mitraillette sortir de la fenêtre arrière d’une traction. J’ai crié et je me suis jeté sur les enfants pour les protéger. J’ai pris deux balles ce jour-là, mais j’aurais voulu en prendre une de plus si cela avait pu sauver Jacquot… »
Sa voix se brisa et il se passa la main sur la bouche, incapable de continuer. Audric remarqua les pommettes saillantes qui tressautaient sur le visage du vieil homme. Il tâta sa joue, et sentit le même os bombé sous ses doigts.
C’était la marque distinctive de sa famille, de celles qui vous sculptent une dynastie.
Audric sentit un frisson remonter du bas de son dos et ses jambes se mirent à trembler. D’une voix incertaine, il s’adressa à André.
« Je ne savais pas qu’il y avait eu ce genre d’évènements en Martinique. Ça a dû être terrible… »
« Tu sais, à cette époque-là, tout le monde était l’ennemi de tout le monde. Les descendants d’esclaves voulaient leur indépendance et les colons ne voulaient pas leur abandonner l’île où ils avaient vu le jour. Des généraux dissidents de l’armée voulaient contrôler la province et s’étaient levés contre l’Etat français. C’était un souk infernal. Après l'attentat, j'ai passé quelques semaines à l'hôpital d'où j’entendais les balles fuser. Chaque nuit, je me réveillais au son des rafales. Je ne savais jamais si elles avaient vraiment eu lieu ou si c'était juste un mauvais cauchemar. Aujourd’hui encore, il m'arrive de les entendre. »
André se tut. Du coin de l'œil, il avait vu arriver Gaspard, le père d'Audric. Gaspard, le visage marqué par le deuil, vint saluer André et ils s'embrassèrent sans chaleur. On pouvait sentir une gêne profonde creuser un fossé entre eux, les maintenant sur des rives opposées.
Gaspard venait chercher Audric. Le vin d'honneur allait être servi, et ils devaient accueillir les amis et la famille. Gaspard invita André à les accompagner, mais suite au refus du vieil homme, il n'insista pas. Audric lui demanda de patienter encore quelques instants. Le regard de Gaspard tomba sur la cigarette qu'Audric était en train de rouler et fronça les sourcils. Il ne dit rien et se retourna, lui laissant cinq minutes pour finir ce qu’il avait à faire.
Audric se rendit compte que ses parents n'étaient pas au courant de son tabagisme et il fut surpris de ne pas avoir été réprimandé. Il haussa les épaules et n'y pensa plus. Alors qu'il finissait de rouler la cigarette, il se retourna vers André, et l'interrogea avec une pointe de curiosité dans la voix.
« Vous avez sauvé la vie de mon grand-père alors ? J’imagine que c’est là que votre relation a vraiment commencé… »
« À vrai dire, Pierrot m'en voulait de l'avoir sauvé lui et pas son frère, mais son sens de l'honneur le poussait à venir me voir tous les jours à l'hôpital. Au début il ne disait rien et restait planté là à me fixer pendant des heures, le regard plein de défi. J'essayais de lui parler, mais il ne me répondait jamais. Un jour où je lisais Vingt Milles Lieues sous les Mers, il vint s’asseoir à côté de moi. Je décidai de lire à haute voix et Pierrot resta jusqu'à la fin du récit. Le lendemain, il revint avec un de ses livres et se mit à me le lire avec ferveur. Quand je pus me remettre à marcher, il m’accompagnait jusqu’au vieux port pour regarder les bateaux prendre la mer. Pierrot rêvait de monter dans l'un d’entre eux et de partir. Il n'aimait pas cette terre où on le considérait comme un étranger et une cible. Comme nous étions tous deux métissés, je pouvais le comprendre, mais j'avais déjà vécu en métropole et je savais que la vie n'était pas forcément meilleure là-bas pour les gens trop bronzés comme nous... »
Audric regardait André de ses yeux clairs. Quelque chose dans leurs physionomies les rapprochait. Bien que déjà blancs, les cheveux crépus d'André avaient la même texture que ceux d'Audric et sa lèvre inférieure charnue avait la même forme. Dans son enfance, tous ces petits détails avaient valu à Audric de nombreuses moqueries de la part de ses camarades, et il avait fait de la fierté de venir des îles, un bouclier contre leur ignorance et leur bêtise.
Pourtant face à André, il sentait que cette identité partait en lambeaux. Tous les non-dits et les réponses évasives aux questions qu'il posait sur ses origines lui sautaient à présent aux yeux :
Quand son oncle était parti en Martinique pour chercher les sépultures de leurs ancêtres, il n'en avait trouvé aucune ;
Le jour précédent, son père avait découvert l’acte de naissance de Pierrot et s'était enfermé dans un mutisme qui avait duré plusieurs heures ;
Et puis ce qu'avait dit André sur un conflit d'indépendance de la Martinique, Audric qui passait son bac cette année-là et était féru d’histoire n'en avait jamais entendu parler. Cependant cela lui rappelait étrangement un conflit qui avait eu lieu sur l’autre rive d'une autre mer. De cette mer qui s'étendait à présent devant ses yeux.
L’évidence s’imposa brutalement dans son esprit.
Des larmes se mirent à couler sur ses joues dans un flot continu. Il réussissait enfin à pleurer son grand-père, ou plutôt pour son grand-père. Un homme qui avait eu honte toute sa vie de ses origines et qui avait préféré raconter des mensonges à sa famille. Qui avait dû souffrir de devoir cacher sa culture et sa langue à sa femme et à ses enfants. Peut-être s'en était-il senti coupable, mais il n'avait jamais trouvé l'occasion ou le courage de dévoiler la vérité.
Audric se tourna vers André avec l'envie de lui poser un million de questions, mais le vieil homme avait disparu. Il le chercha partout du regard, mais ne pu déceler aucune trace de sa présence. Seule sa pipe était posée sur le muret qui bordait la plage. Audric se leva et s'en saisit. Il découvrit un texte gravé dans le bois du bec « A mon frère de coeur et de sang ». Audric reconnu aussitôt l’écriture de son grand père malgré la patine du temps. L'ivoire du foyer était finement ciselé et représentait un port. Sous le bas-relief, la mention « Souvenir d’Alger ».
L’évidence devint certitude. Il connaissait à présent la puissance du mensonge et la douleur qui pouvait en découler. Une profonde résolution s'enracina en lui, celle de ne jamais imposer cela à ses proches.
On klaxonna derrière lui. Son père vint se garer sur la promenade. Le temps d'un instant leurs regards se croisèrent, et ils n’eurent pas besoin de plus. Le message était passé entre eux. Gaspard eut un sourire légèrement triste et fit un signe de tête à son fils, l’invitant à entrer dans la voiture.
Audric eut un dernier regard vers la mer. Il essuya ses larmes, mit la pipe dans la poche de sa veste et s’assit à côté de sa soeur.
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lombreduzed · 11 years
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SANG NEUF
Pour ceux que ça intéresse, voici la nouvelle que j'avais écrit pour le prix René Barjavel des intergalactiques de Lyon. Malheureusement je n'ai pas gagné mais j'ai pu discuter avec des membres du jury qui se souvenait bien de l'histoire et avait du la retirer du dernier carré car hors-sujet. Vous pouvez découvrir le sujet du concours ainsi que les nouvelles gagnantes sur le site des intergalactiques.
Bonne lecture.
SANG NEUF (© Cédric "Zed" Mayen 2013)
1*
Le ventilateur balayait la pièce, brassant l'air de la salle d’attente de sa respiration mécanique. Joe et Nessa, couple âgé d'une quarantaine d'années et qui en paraissaient vingt de moins, attendaient leur tour.
Joe feuilletait un magazine, sans y porter grand intérêt, tandis que Nessa se tordait les mains nerveusement, serrant les genoux pour les empêcher de s'entrechoquer. Cela faisait plus d'une heure qu'elle patientait et ses tempes palpitaient dès qu'elle desserrait les mâchoires. 
Joe paraissait imperturbable, mais elle le connaissait trop bien pour ne pas ressentir sa frustration. Il ahanait de plus en plus bruyamment, comme si l'air se raréfiait autour de lui. Pour oublier le vide douloureux qui lui taraudait les tripes, Nessa réfléchissait aux rimes de la nouvelle chanson qu'elle proposerait à son producteur, dès leur retour à Paris. 
Alors qu'elle ne l’espérait plus, la porte du cabinet s’ouvrit sur l'imposante moustache du docteur Holz. Un petit homme rondelet sortit et traversa rapidement la salle d'attente en jetant des regards inquiets à la ronde. Joe et Nessa ne lui prêtèrent aucune attention et se levèrent  prestement quand le docteur les invita à entrer. Leur tour était venu et ils allaient enfin être récompensés. Tous deux s’engouffrèrent dans la salle et le docteur ferma la porte derrière eux.
2*
Aristide Chatagny ne pouvait que constater sa malchance chronique. Certes, il était né suisse, de parents suisses et donc naturellement à l'abri du besoin, mais c'était bien là le seul avantage qu’il avait sur la vie.
Passable durant toute sa scolarité, il n’avait jamais vraiment cherché à se surpasser, préférant l’anonymat de la médiocrité à la gloire de la réussite. D'ailleurs, Aristide avait fait de l’anonymat son credo, s’évitant ainsi les brimades de ses jeunes camarades ainsi que tout autre type d’attention. 
Son passage à l’armée ne laissa pas plus de traces, hormis peut-être, le souvenir nauséeux de sa première et unique cuite, le pauvre garçon ayant fini nu dans le lac de Genève à hurler des ordres au jet d'eau qui ne voulait pas lui obéir. Mais il le savait, aucun de ses conscrits n'était capable de mettre un nom sur ce petit bonhomme enrobé qui les avait tant fait rire. 
N’ayant pas beaucoup d’inspiration en ce qui concernait son avenir, excepté sa vocation pour l’investigation, il se tourna rapidement vers le métier de policier. Après plusieurs années de régulation de la circulation et quelques affaires classées, il abandonna et se reconvertit en détective privé. 
Car Aristide était persuadé d’avoir du flair, ce qui était d’ailleurs vrai lorsqu’il s’agissait de retrouver ses clés ou divers objets égarés, mais s’avérait bien moins évident en d'autres situations. Par conséquent, son affaire ne marchait pas, ce qui ne le préoccupait nullement car il était suisse, fils de suisses et naturellement à l'abri du besoin. 
Ses journées s’écoulaient donc paisiblement, entre mots croisés et espionnage de maris volages, jusqu'au jour où sa porte avait été poussée par les Huelva, un couple d’immigrés sud-américains, inquiets suite à la disparition de leur fille. Face aux larmes de madame Huelva, Aristide avait senti qu'on lui confiait enfin une mission à sa hauteur. 
Et les ennuis avaient commencé.
3*
Couché sur le dos, fixant le plafond d'un blanc impeccable, Joe avait du mal à ne pas hurler. La douleur était devenue insoutenable depuis quelques jours et la vitesse à laquelle ses organes internes se décomposaient s’était accrue depuis le dernier traitement. Il s'interdit de regarder Nessa, car il savait qu'elle souffrait tout autant, ce qui la rendait repoussante à ses yeux.
Enfin, il sentit la seringue pénétrer sans aucune difficulté dans son bras et le liquide chaud se répandre à l’intérieur de son corps. En pleine extase, son sexe se durcit sans qu'il puisse se contrôler. À ses côtés, il vit Nessa frémir à son tour, et son plaisir s'en trouva redoublé. Il revivait, mais l'angoisse du manque à venir l'étreignait déjà. Dernièrement, leurs visites chez le docteur Holz étaient de plus en plus fréquentes, et le soulagement de moins en moins durable. Joe tourna lentement la tête vers Nessa et l’observa. Un sourire béat sur le visage, elle se laissait aller à rire sans raison. 
Joe se souvenait de Tom, son ami et mentor, qui lui avait présenté le docteur, dix ans auparavant. Ce qui n'était d'abord qu'un passe-temps était rapidement devenu un besoin puis une obsession. Tom avait petit à petit sombré dans la folie avant de disparaître dans d'étranges circonstances. Joe savait que le même destin l'attendait s'il continuait ainsi, mais il ne pouvait arrêter. 
Il s’en voulait à présent d'avoir entraîné Nessa dans cette histoire.
4*
Aristide avait patiemment écouté l’histoire des Huelva, ne les interrompant que pour avoir plus de précisions sur de menus détails, sans tirer de conclusions hâtives. Bien qu’il ne s’agisse à première vue que d’un enlèvement banal, certains éléments avaient éveillé des soupçons dans l'esprit d'Aristide. 
Tout d'abord, Concepcion avait disparu de jour, tandis qu’elle jouait devant chez elle et sous la surveillance de sa mère. Celle-ci avait, selon ses dires, simplement détourné le regard l'espace d'un instant et sa fille s'était volatilisée. 
Plus étrange encore, la police n'avait trouvé aucun indice et avait rapidement cessé les recherches sans donner d'explications aux parents désemparés. Aristide savait, pour avoir participé à plusieurs battues, que lors d'un rapt de mineur, tous les moyens étaient mis en œuvre pour le retrouver et que la police n'abandonnait jamais, examinant toutes les pistes, même les plus infimes. 
Aristide était persuadé que quelque chose ne tournait pas rond et qu'il devait en avoir le cœur net. Il accepta l’invitation des Huelva de venir enquêter sur le lieu de l'enlèvement et les suivit jusque chez eux.
5*
Le médecin retira la seringue du bras de Nessa. Baignant encore dans un bien-être éthéré, elle laissa son regard flotter jusqu'à Joe qui lui souriait. Elle respira lentement, goûtant chaque inspiration comme elle aurait dégusté un grand vin, puis de sa voix mélodieuse, elle chantonna un air doux et serein. 
Joe qui s'était levé, s'approcha d'elle et la prit dans ses bras. Ils restèrent longtemps à se bercer, tandis que le médecin finissait de nettoyer ses ustensiles. Leur étreinte se desserra et Nessa posa un pied incertain par terre, soutenue par Joe. Ils se rendirent dans le sas où se trouvaient leurs vestes et se rhabillèrent. Ils s'apprêtaient à quitter le cabinet quand ils furent rappelés par le toussotement discret du médecin.
Joe lâcha la main de Nessa pour fouiller dans la poche arrière de son pantalon et en sortir une enveloppe qu’il tendit au docteur Holz. Celui-ci l'ouvrit et compta rapidement la liasse de billets avant de les remercier et de leur indiquer la sortie. 
Sans un mot ni un regard, conscients de la déviance de leur addiction, Joe et Nessa quittèrent le petit chalet anodin à l'ombre du massif alpin. Ce fut seulement lorsqu’ils se retrouvèrent à l’extérieur que Joe se décida à parler.
« C'est la dernière fois que nous venons ici. »
Le cœur de Nessa sauta un battement, ces quelques mots l’avait terrifié.
6*
Rien ne paraissait sortir de l'ordinaire au domicile des Huelva, hormis l’absence de Concepcion. Malgré un certain laisser-aller qui devait dater de la disparition de la petite, l'ambiance du foyer était accueillante. La température ambiante ne dépassait pas 19 °C, l’aménagement bien que spartiate était fait avec goût, et des jouets présents dans chaque pièce soulignait l'importance que les époux attribuaient à leur fille. L’investigation qu’il mena à l’intérieur de la maison ne lui apprit rien d'important, hormis le fait que la petite était particulièrement laide ou bien très peu photogénique, et il se dirigea d’un pas décidé vers le carré de gazon qui séparait le portail de la porte d’entrée. 
Il en examina minutieusement chaque recoin, n'hésitant pas à salir son pantalon en s'agenouillant pour inspecter le lieu de l'enlèvement. Au bout d’un quart d'heure de recherche, quelque chose attira enfin son attention. 
Il s'agissait d'un cylindre de métal noir qui gisait sous la haie séparant le jardin de la route. Cela avait la taille et la forme d'une pile électrique banale, mais dégageait un étrange magnétisme. Aristide s’en saisit à l'aide de gants et le rangea dans un sachet hermétique. Il jeta un coup d'oeil aux environs pour s'assurer que personne ne l'observait puis rentra dans la maison. 
Les Huelva étaient assis sur le canapé du salon et Aristide vint se placer face à eux pour leur montrer sa trouvaille. Comme ils ne l'avaient jamais vu auparavant et ne savaient pas de quoi il s'agissait, Aristide en déduisit qu'il tenait une piste. Il décida de rentrer à son bureau pour l'étudier au calme. Il leur promit de les tenir au courant de l’avancement de ses recherches, rangea le cylindre dans sa mallette, puis grimpa dans sa Volkswagen qui démarra en toussotant.
7*
Joe posa la clé magnétique sur son support. Le moteur de l'Aston Martin démarra aussitôt puis se mit à ronronner. L’autoradio s’alluma, baignant l’intérieur de l’habitacle d‘une clarté bleutée. Les doigts de Django Reinhardt dansèrent quelques instants sur sa guitare, puis s’arrêtèrent sous un tonnerre d’applaudissements. Nessa posa sa main sur celle de Joe.
« Rentrons à la maison. »
Joe se frotta vigoureusement le visage pour reprendre ses esprits avant de passer la première et de s’insérer sur la chaussée. Quelques secondes plus tard, un second véhicule déboîta et vint se caler dans son sillage. Joe n’y prêta pas attention, concentré sur la route pour ne pas laisser l'apathie l'emporter. Du petit village de montagne jusqu’à Genève, il ne dépassa jamais les limitations de vitesse. 
La vieille Renault qui le suivait non plus.
8*
Malgré les assauts répétés d'Aristide pour faire céder la porte de son bureau, elle résistait encore et toujours. Il dut utiliser un tournevis pour faire sauter le pêne d’un coup sec, avant de pouvoir entrer. Son manteau posé sur la patère, il vérifia son répondeur qui resta désespérément silencieux. Il se servit un verre de Lagavullin, puis s’assit dans son vieux canapé de cuir pour le siroter en feuilletant le journal du matn qu'il n'avait pas pris le temps de lire. De toutes les rubriques, c'était assurément celle concernant les nouvelles technologies qui l'intéressait le plus.
Il parcourut d’abord les nouvelles avancées en matière de téléphonie et de robotique avant de s’arrêter sur un encart qui éveilla sa curiosité. L’article traitait d’une invention révolutionnaire du CERN, un prototype de micropile atomique, qui permettait de domestiquer la fission nucléaire au sein d’un cylindre miniaturisé. Il leva un sourcil et relut l’encart une seconde fois, vidant son verre d'un trait, avant de reposer le journal sur la table basse. 
Il resta quelques instants pensif, puis quitta son fauteuil, la tête dans ses pensées. Il saisit sa mallette et la posa sur son bureau avant de l’ouvrir. À l’aide de ses pincettes, il sortit le petit cylindre du sachet et l’examina à la loupe. Des bandes blanches, telles une signature, striaient le cylindre sur sa longueur.
« Se pourrait-il que.. ? » Sa question flotta longtemps, sans trouver de réponse. 
Aristide reposa l’objet et referma la mallette. Il nota le compte-rendu de ses recherches et de ses interrogations dans un dossier qu'il rangea ensuite dans son secrétaire. Il résolut d'attendre le lendemain avant de contacter une de ses connaissances qui pourrait peut-être l'aider dans son investigation.
Sur ce, Aristide retira ses chaussures et s'allongea sur son fauteuil, fermant les yeux pour trouver le sommeil.
9*
La circulation était assez dense dans les rues de Genève en cette fin d'après-midi et, la tête posée contre la vitre teintée, Nessa observait la placidité des automobilistes suisses. Elle n’avait aucune envie de rentrer à Paris et ressentit même une certaine appréhension à cette idée. 
Ses enfants lui manquaient, mais elle aurait préféré s'envoler loin de la capitale française qui avait fait d’elle ce qu’elle était, une image de papier glacé, vide de sens et de sentiments. Pour oublier ses idées noires, elle improvisa un scat sur les accords de Miles Davis. Joe la suivit en tapant en rythme sur le volant, le déformant un peu plus à chaque coup. 
Nessa adorait ces moments où tous deux tendaient au même absolu. Des moments de plus en plus rares tant le manque la dévorait, éclipsant son amour pour Joe et leurs enfants.
Plus les séances se rapprochaient et plus elle se sentait emportée dans une spirale qui la menait à sa perte. Elle se souvenait de Tom, l'ami de Joe, et de sa décadence. Elle ne voulait pas finir comme lui, lugubre et violente, dormant la tête en bas et attaquant tous ceux qui passaient à sa portée. La circulation se débloqua enfin et l'Aston Martin se dirigea vers l’aéroport, toujours suivi par la Renault.
10*
Aristide avait rencontré Humbert Frei le jour des résultats de l'examen d'entrée dans la police, puis ils avaient partagé la même chambre durant l'année d'entraînement qui avait suivi leur admission. Sans n’avoir jamais vraiment sympathisé, ils avaient appris à se connaître et à se tolérer. Humbert, qui avait suivi des études de médecine, aimait faire la fête et ramener des conquêtes dans leur modeste trois-pièces. Cela agaçait Aristide, bien qu'il reconnût le bon fond de son colocataire assez respectueux de sa vie privée. De plus, tous deux partageaient la même passion pour l’investigation et la technologie, ce qui avait meublé leurs longues soirées d'étude.
Et puis Humbert avait intégré la police scientifique où il avait très rapidement atteint le grade d’inspecteur et leurs chemins s’étaient séparés. Dans le cadre d’une enquête sur des fuites d'informations, il rejoignit l’équipe de recherche du CERN qu’il finit par rallier définitivement quelques années plus tard. Hormis les traditionnelles cartes de vœux à l’occasion des fêtes, il n'avait plus donné de nouvelles à son ancien colocataire et le lien qui les avait unis s'était étiolé avec le temps. 
Ils s’étaient dévisagés longuement devant les grilles du Centre de recherches avant qu'Aristide ne fasse un pas en avant pour serrer la main d'Humbert. Aristide avait récupérer son badge de visiteur, puis Humbert l'avait invité à prendre un café. Ils étaient tous deux assis à la terrasse du bar, se remémorant leurs souvenirs communs, quand un silence s’installa.
« Chatagny, j'imagine que tu n'es pas là pour discuter du passé. Qu'est-ce qui t'amène ? Commença Humbert.
— Comme tu le sais, je suis à mon compte maintenant et je travaille sur une affaire que nos amis de la police ont décidé de classer un peu trop rapidement à mon sens.
— Quel lien avec moi ?
— J'y viens. J'enquête sur le rapt d'une gamine et j'ai trouvé ça sur les lieux de sa disparition… Je me suis dit que tu pourrais peut-être m’en apprendre plus. »
Joignant le geste à la parole, Aristide sortit le sachet contenant le petit tube noir de sa mallette et le posa sur la table. Les yeux d’Humbert faillirent sauter hors de leurs orbites et il s'en saisit avant de l'examiner sous tous les angles
« Où as-tu trouvé ça ? Sais-tu seulement de quoi il s’agit ?
— Je n'en ai aucune idée, lui répondit Aristide cachant son jeu, mais j'ai cru reconnaître la signature du CERN sur la tranche. Cette série de traits blancs qui... »
Humbert le coupa sèchement.
« Aristide, je préfère t'arrêter tout de suite. Je ne suis au courant de rien concernant cet objet. » Son attitude cassante prouvait le contraire, mais bien qu'Aristide comprît l'avertissement, il décida de passer outre.
« Tu ne veux rien me dire ?
— Je ne PEUX rien te dire. Quand bien même j'aurais des informations à te transmettre, j'ai signé une clause de confidentialité et cela mettrait en péril mon emploi.
— Ton emploi ? L’interrogea Aristide sur un ton mi-sérieux, mi-amusé. Si je me souviens bien, tu ne travaillerais pas ici sans mon aide.
— Je ne vois pas de quoi tu veux parler !
— Alors, laisse-moi te rafraîchir la mémoire. Si tu ne m'avais pas copié dessus pendant le concours d'admission, tu ne serais jamais entré dans la scientifique. J'aurai pu plaider ma cause devant la commission qui m'a accusé de tricherie à ta place, mais je me suis tût par amitié. Trois ans de circulation, ça vaut bien une petite information, tu ne penses pas ? »
Humbert ravala sa salive et resta silencieux quelques instants, pesant le pour et le contre. « Tu as raison, mais ce que je vais te dire doit rester entre nous. Mon nom ne devra apparaître nulle part et en cas de procès, je refuserai de témoigner. » 
Humbert rapprocha sa chaise de celle d'Aristide avant de continuer à voix basse. « Il s’agit d’un prototype militaire d’une technologie que nous avons développée il y a quelques années.
— De quoi s'agit-il ?
— Tout simplement d'une pile nucléaire miniaturisée. Nous venons juste de révéler son existence au public, mais le prototype en ta possession est légèrement différent. L'objet en lui-même n'est pas très important, c'est l'instrument qu'il alimente qui devrait t'intéresser. »
Les mots de Mme Huelva résonnèrent à l’oreille d’Aristide. Elle n’avait tourné la tête que l’espace d’une seconde et Concepcion avait disparu en un battement de cil.
« Une machine capable d'effacer la mémoire ? Ou bien d'arrêter le temps ? »
Humbert ne répondit pas, mais son regard en disait long. Aristide avait vu juste. Alors qu'il allait poser une autre question à son ami, celui-ci le coupa en se levant promptement.
« Je ne peux rien te dire de plus et je dois te prier de partir. J'ai du travail.
— Je comprends Humbert. Je ne te dérangerai pas plus longtemps. Merci pour ton aide. » Humbert s’éloigna rapidement sans un regard, après lui avoir serré la main. Le détective resta pensif quelques instants avant de se lever et de se diriger vers le parking.
11*
La voix douce de l’hôtesse d'Air France invita les passagers de première classe à se présenter à l’embarquement. Joe et Nessa quittèrent le salon VIP où ils patientaient depuis plus d’une heure.
Un murmure sourd s'éleva sur leur passage, rapidement suivi par le crépitement des flashs et des demandes d’autographes. Ils étaient habitués à cet exercice, qui bien que déplaisant, était inhérent à leur condition de superstars. Cependant, ils coupèrent court à la séance d’idolâtrie et se rendirent jusqu’au comptoir d’embarquement.
Ils furent accueillis avec tous les égards par l'hôtesse qui s’occupait d’eux, les guidant jusqu’à leurs places respectives, à l’abri des regards. Les autres passagers s’installèrent peu après dans l'habitacle, les regardant avec envie sans pour autant oser les déranger. 
Nessa, qui n'aimait pas prendre l'avion, s’immergea dans la lecture d’un magazine offert par la compagnie. Joe, quant à lui, observait le ballet des bagagistes sur le tarmac. Ils étaient loin d'imaginer qu'ils étaient suivis par le petit homme corpulent qui venait de s'asseoir en classe économique.
12*
Quand Aristide posa la main sur la poignée de la porte de son bureau et qu'elle pivota sans difficulté, il fut pris d’une certaine inquiétude. Depuis qu'il s'était installé dans cet ancien cabinet de notaire, la porte d'entrée avait toujours posé problème, mais il ne s'était jamais résolu à la réparer. Il la poussa du plat de la main et découvrit sans surprise qu’il avait été cambriolé. Son secrétaire était éventré, des liasses de fiches et de papiers divers étalés sur le parquet. Aristide fit quelques pas dans la pièce, comme hébété, avant que son instinct d'analyse ne reprenne le dessus.
La ou les personnes qui s’étaient introduites chez lui recherchaient quelque chose de précis. Et au vu de l’état de la pièce, ils avaient mis du temps à le trouver ou ne l’avaient pas trouvé du tout. Examinant les papiers dispersés par terre, Aristide n’eut aucun mal à comprendre le motif du cambriolage. 
Le dossier de Concepcion était posé sur une pile de feuilles. Il ne restait que la couverture, toutes ses notes ayant été retirées. Apparemment, quelqu’un s'était donné du mal pour faire disparaître toutes traces de ses recherches avant de repartir. 
Relevant la tête, Aristide aperçut une lueur rouge clignotant sous un amas de papiers. Il en extirpa le répondeur, et appuya sur la touche lecture.
La voix inquiète d’Humbert résonna dans la pièce, invitant Aristide à le rencontrer au plus vite dans le parking souterrain de la gare Cornavin. Sans prendre la peine de refermer la porte de son cabinet, il descendit les escaliers et se dirigea jusqu'à sa Coccinelle.
13*
Le sommeil finit par gagner Nessa qui dormait profondément, dix minutes avant le décollage. Bercée par le ronronnement des turbines, elle se mit à rêver.
Elle se vit petite fille, jouant à la poupée devant la maison de ses parents. Un vent chaud caressait ses cheveux et elle levait les yeux pour regarder des papillons voleter autour d’elle. Le sourire de sa mère qui l'observait avec amour suffisait à la rendre heureuse. 
Elle se retrouva soudain dans un gigantesque cube de matière noire, dont les parois semblaient pulser à intervalles réguliers. L’air qui l'entourait devint glacial et le jardin, les papillons et sa mère avaient disparu. 
À présent, elle était couchée sur le dos, les bras en croix retenus par des sangles et le visage baigné de larmes. 
L'étrange ballet de monstres s’affairant autour d’elle la terrifiait. Ils n'avaient pas de visages et parlaient dans une langue qu'elle ne comprenait pas. Elle sentit une douleur vive lui traverser la colonne vertébrale, puis son corps devenir de glace. Elle voulait hurler, mais aucun son ne sortait de sa gorge. Sa vue se brouilla. 
Nessa se réveilla en sursaut et respira bruyamment pendant quelques secondes. Joe releva son siège pour se mettre à sa hauteur, lui posant une main affectueuse sur le bras.
« Tout va bien, ma chérie, ce n'était qu'un de tes cauchemars, la rassura-t-il.
— Je ne peux plus fermer l’œil, Joe, continua-t-elle, la voix enrouée. À chaque fois, c’est la même chose. J’ai peur.
— Ne t’en fais pas, ça va passer, je suis là. »
Des larmes perlèrent des yeux de Nessa. Elles étaient couleur rubis.
14*
La Volkswagen s’engouffra dans le parking souterrain de la gare. Aristide ne savait pas pourquoi Humbert lui avait donné rendez-vous ici, mais il soupçonnait son ami d'être mêlé au cambriolage d'une façon ou d'une autre. Aristide ne croyait pas aux coïncidences et commençait à se douter qu'il avait mis les pieds dans une affaire bien plus sérieuse qu'elle n'en avait l'air. Il regretta de ne pas avoir mis le cylindre en lieu sur avant de se rendre ici.
Le parking était vide et mal éclairé. Aristide aurait préféré rencontrer Humbert dans un lieu fréquenté où ils auraient pu passer inaperçus. Il se sentait piégé et fut pris d’un mauvais pressentiment, mais il était trop tard pour faire machine arrière.
À peine pénétrait-il dans le deuxième sous-sol, qu'il fut ébloui par un appel de phare. Soudain, tout changea autour de lui. 
Il n’était plus assis dans sa voiture, mais allongé, ligoté et bâillonné dans un quadrilatère noir, dont les parois s'illuminaient de façon récurrente. Il lui sembla percevoir un moteur qui démarrait et le cube se mit à tressauter. Aristide tenta de se lever pour examiner les alentours, mais quelque chose de dur le frappa à la nuque, et il s’étala au sol. 
À son réveil, il était couché seul dans une cellule. Ses mains n’étaient plus liées, et il put se masser l’arrière du crâne qui le lançait. En se relevant, il chancela et dut se rattraper à la paroi froide et humide avant de retrouver un semblant d’équilibre. 
Dans l'obscurité, il discerna une porte et s'en approcha. Sentant une bouffée de panique remonter dans son thorax, il se mit à la frapper en hurlant. Il perçut un martèlement de bottes  de l’autre côté du mur et un judas s’ouvrit dans un grincement strident. 
Aristide distingua une paire d'yeux qui le scrutait, puis le bruit d’une clé qui tournait dans la serrure. À peine la porte entrouverte qu’Aristide tenta de la forcer, mais il ne trouva aucune résistance sur son passage et s’écrasa contre un mur. Plusieurs hommes lui sautèrent dessus et Aristide sentit qu’on lui enfilait une cagoule sur la tête avant de le relever. Il ne résista pas et se laissa entraîner à l'aveugle.
15*
L’avion entama sa descente sur Paris tandis que le soleil disparaissait à l'horizon. Bien que le ciel se parât de couleurs crémeuses, cela ne provoquait aucune émotion chez Joe. Depuis trop longtemps, il se sentait vide et incapable d'apprécier quoi que ce soit. Seule une certaine affection teintée de complicité le liait encore à Nessa. Hormis ce résidu de sentiment amoureux, il ne ressentait plus que de l'agacement quand le manque devenait trop fort.
Joe connaissait l'existence d'un traitement palliatif qui pouvait les libérer de leur souffrance. Depuis son initiation par Tom, il avait découvert que la clinique du Dr Holz n'était qu'une façade destinée à masquer leur monstruosité au reste du monde. Il leur suffisait de donner libre cours à leurs instincts et leur désir serait satisfait, mais cela risquait de détruire Nessa.
Joe la regarda, se demandant si elle valait vraiment la peine de se retenir. Le poids de sa tête posée sur son épaule, ses cheveux bouclés et vaporeux, son regard triste et perdu. L'aimait-il encore ? Le chef de bord invita les passagers à relever leurs sièges et à attacher leurs ceintures. Après une longue descente, l’avion atterrit sans à-coups sur le tarmac de Roissy. Les passagers descendirent en file indienne et se dirigèrent jusqu'au bus qui les attendait. Joe et Nessa s’assirent l’un à côté de l’autre, tandis qu’un homme d’une certaine corpulence vint se placer face à eux. Il les fixait avec intensité ce qui poussa Nessa, mal à l'aise, à baisser les yeux. Joe, habitué à être regardé ne s’en offusqua pas et rabattit ses lunettes de soleil sur son nez. 
Le bus arriva au terminal et tous les passagers descendirent. Après un contrôle rapide des passeports, le couple se dirigea vers l’extérieur où leur chauffeur et sa Mercedes noire les attendaient. Tandis qu’il montait dans la voiture, Joe crut voir le gros homme héler un taxi. 
« Encore un paparazzi » pensa-t-il avant d'ordonner au chauffeur de les ramener chez eux.
16*
Deux mains puissantes forcèrent Aristide à s’asseoir. Sa respiration s’accéléra et il s’étouffa, pris de panique. Il pouvait sentir une présence face à lui, mais la cagoule opaque l’empêchait de voir. On la lui retira et il se retrouva face à une lampe intense pointée sur son visage. Aristide poussa un petit cri et se protégea les yeux des deux mains.
« Aristide Chatagny… Pourquoi te mêles-tu toujours de ce qui ne te regarde pas ?» Aristide avait reconnu cette voix. Quand ses yeux s'habituèrent à la lumière, il discerna la silhouette d'Humbert, assis face à lui. 
« Heureusement pour moi, tu es toujours aussi prévisible et négligent !»
Humbert sortit le cylindre noir et le fit jouer entre ses doigts.
« Tu ne te rends sûrement pas compte de l'importance de cet objet. Tant de puissance concentrée dans un si petit conteneur. Il y a plus d’énergie là-dedans que dans la bombe qui a pulvérisé Hiroshima. »
Aristide, qui était resté muet, jusque-là se décida enfin à prononcer quelques mots.
« Humbert, pourquoi m'as-tu enlevé ? Qu'est-ce que tu veux ?
— De toi, je n'attends presque plus rien. Concernant ton enlèvement, je n'ai fait qu'obéir aux ordres en t'attirant dans un piège.
— Mais pourquoi ?
— Pour l'argent bien sûr, répondit Humbert sans tergiverser. Le CERN paye bien, c'est sur, mais pas assez à mon goût. Je travaille pour des gens bien plus riches et puissants pour qui tu es rapidement devenu une menace à éliminer»
Aristide encaissa le choc. Il n'avait jamais été une menace pour personne et voilà qu'il se retrouvait au cœur d'un engrenage qui le dépassait.
« Et la petite, qu'est-ce que tu en as fait ?
— Ce n'est plus l'heure des questions, Chatagny.» lui répondit sèchement Humbert. D'un geste de la main, il interpella deux brutes en uniforme qui agrippèrent Aristide. Un troisième homme en blouse blanche s’approcha de lui. Il posa un casque sur sa tête, avant de lui enfoncer une seringue dans le bras.
« Dans quelques instants, nous saurons si tu peux encore nous être utile.»
Le casque produisit une lumière aveuglante qui aveugla Aristide, lui provoquant d'intenses douleurs au niveau du lobe frontal. Tous ses souvenirs défilèrent devant ses yeux jusqu’au jour de sa naissance, puis la lumière s’éteignit et Aristide perdit connaissance. L'homme en blouse blanche se tourna vers Humbert.
« Il est positif, pas de drogues, ni de tabac et relativement peu d'alcool, dit-il d'une voix monocorde.
— Très bien Franck, préparez-le !» Répondit Humbert.
Les deux soldats emportèrent Aristide allongé sur une civière. Humbert alluma une cigarette et en souffla la fumée avec plaisir.
17*
La nuit avait étendu son manteau sur Paris quand Nessa ressentit une grande fatigue l'accabler. Elle voulait rentrer chez elle et se laver. La journée avait été longue et difficile, et hormis la relaxation que lui avait procuré la séance dans le cabinet du docteur Holz, elle se sentait abattue.
Les événements s’étaient enchaîné si vite, qu’ils l’avaient rendue migraineuse. Et depuis qu’ils avaient atterri, elle avait l’impression d’être suivie, observée, presque souillée par une entité qui lui voulait du mal. L’homme du bus lui revint à l’esprit. Elle était sûr de l’avoir déjà vu quelque part, mais elle ne savait plus où ni quand. 
Ce visage l’avait terrorisé. Il était si banal et pourtant si dérangeant qu'à son simple souvenir, elle eût un haut-le-coeur. Elle pressa la main de Joe dans la sienne pour qu'il la réconforte, ce qu'il fit en la serrant contre lui. Elle le sentit plus tendu qu’à son habitude, faisant jouer ses mâchoires sous sa barbe.
Elle se demanda ce qui le mettait dans cet état, mais alors qu'elle allait lui poser la question, le chauffeur se tourna pour leur annoncer qu’ils étaient arrivés. Les grilles automatiques s’ouvrirent et la voiture s’engouffra dans le jardin intérieur de leur hôtel particulier. Nessa poussa un soupir de soulagement. 
18*
Quand Aristide se réveilla, il se sentit glacé de l'intérieur. Avec difficulté, il ouvrit un œil et ne réussit qu’à entrevoir des formes floues autour de lui. En voulant se relever, il s'aperçut que son corps ne lui obéissait plus. Des tubes dans lesquels s’écoulait un liquide vermeil étaient plantées dans chacun de ses bras. 
Il était seul dans la pièce stérile. Reprenant courage et grâce à une formidable pulsion de survie, il arracha les cathéters d'un coup sec et se mit sur son séant. Il posa un pied par terre, mais chancela et s’effondra. En s’appuyant sur un mur et réprimant un malaise, il réussit à se relever et à maintenir un semblant d’équilibre.
Les tubes qu'il s’était extraits des bras répandaient son sang sur le carrelage. Ils étaient reliés à plusieurs poches accrochées à un cintre de métal sur lesquelles était écrit un nom : Dr Holz. C’est tout ce que le cerveau d’Aristide put imprimer. 
Il se dirigea avec difficulté jusqu'à la porte qu'il entrouvrit pour jeter un coup d'oeil aux environs. Le couloir blanc était désert et Aristide s'y engagea sans vraiment savoir où il allait. Il entra dans la première pièce qui lui faisait face, espérant trouver la sortie et se retrouva dans une sorte de hangar où étaient entreposés des corps d'enfants. Leurs peaux étaient si pâles qu’elles paraissaient translucides. 
Devant cette vision d'horreur, Aristide faillit s’évanouir. Un frisson lui parcourut le dos. Il savait qu'il était sur le point de trouver le but de ses recherches. En effet, il reconnut au premier coup d'oeil la silhouette de Concepcion. Des larmes se mirent à couler sur ses joues et il resta de longues minutes à pleurer sur le corps sans vie de la petite. 
Le destin de l'enfant était injuste, et Aristide sentit monter en lui une sensation nouvelle. Ceux qui avaient fait ça devaient payer pour leurs actes, il s'en assurerait personnellement. Un bruit de pas provenant du couloir lui parvint. Feignant la mort, il se coucha sur une des tables de la morgue et ferma les yeux. Deux hommes entrèrent en discutant et s'arrêtèrent à quelques centimètres de lui.
« Mais qu'est-ce qu’il fait là, lui ? Demanda le premier
— Frank a dû en finir et nous l'amener ! Répondit son acolyte.
— Mais il est stupide ou bien ? Humbert a été clair, sa mort doit paraître accidentelle. » Les deux hommes s’emparèrent de lui pour le faire glisser sur un brancard et Aristide retint son souffle.
« De toute façon avec une voiture aussi pourrie, ça n'étonnera personne qu'il ait raté un virage. Encore un qu’on identifiera grâce à son dossier dentaire. »
L’homme se mit à rire tandis qu'il poussait le brancard dans le couloir. Respirant avec parcimonie, Aristide décida d’attendre de voir où on l’emmenait. Un plan venait de germer dans son esprit.
19*
À peine la porte s’était-elle ouverte, que les enfants leur sautèrent au cou. Après une longue embrassade, Joe fit mine de les gronder, car ils étaient encore debout si tard. Nessa quant à elle serrait sa fille dans ses bras de toutes ses forces. Après leur avoir offert à chacun une boîte de Toblerone acheté au Duty Free, Joe les poussa à aller se coucher.
Il leur lu une histoire, les embrassa et éteignit la lumière, avant de se diriger vers le salon où il retrouva Nessa, allongée sur le canapé, fixant d’un œil endormi la télévision allumée.
« Tout va bien ma chérie ? Demanda-t-il légèrement inquiet.
— Non, Joe. Je n’en peux plus. À chaque fois, c’est plus dur.
— Tu sais bien que c'est le seul moyen de rester jeunes et beaux.
— Mais c’est malsain. Dès que je rentre et que je retrouve les petits, je me sens sale, impure…
— Tu veux arrêter maintenant ? Tu sais ce que ça signifie ?
— Non je n’ai pas dit ça. Je voudrais juste trouver un moyen plus simple de satisfaire cette faim !
— Il y en a bien un, mais… »
Joe fut coupé par le fracas de la fenêtre qui volait en éclat. Quand il tourna la tête, il vit une silhouette debout dans l’encadrement de la porte vitrée et se précipita vers l'intrus.
« Qui êtes-vous ? Qu'est-ce que vous nous voulez ? Demanda Joe avec défiance. — Je vous retourne la question.» Lui répondit Aristide Chatagny.
20*
Pendant plusieurs jours, Aristide avait dû se cacher et vivre dans la clandestinité tout en poursuivant son enquête. Il avait sauté au dernier moment de sa voiture et l'avait regardé s'écraser au fond du ravin. Dès lors, il avait dû continuer ses recherches au prix de sa dignité.
À peine arrivé à Genève après avoir parcouru la campagne suisse, il s'était réfugié au sein des marginaux, dans le quartier de l'Usine. Il ne mit pas longtemps à trouver l’adresse du docteur Holz, l'un des médecins les plus connus de Suisse, surnommé le « Rajeunisseur des stars ». Il prit soin de faire parvenir par la poste les conclusions de son enquête à la famille Huelva avant de se rendre au cabinet du docteur. 
La lettre leur expliquait sa situation actuelle et leur demandait de transmettre son dossier à la police au cas où ils n’auraient pas de nouvelles de lui dans la semaine. Puis il avait vidé son coffre à la banque, s'était acheté une vieille Renault 4 et avait pris rendez-vous sous une fausse identité dans le cabinet de Gstaad. 
Sans un mot, le docteur l’avait fait entrer, puis lui avait introduit deux seringues dans les bras et Aristide avait senti un liquide chaud et plein de vie se répandre suavement dans son corps. La transfusion avait duré plus d’une heure, après quoi il avait payé et s’était enfui, passablement ébranlé. S’il n’avait pas croisé deux stars internationales dans la salle d’attente, l’histoire se serait peut-être arrêtée là pour lui, mais intrigué par leur présence, il avait ressenti le besoin d’en savoir plus. Il les avait donc suivis jusqu'à Paris et s’était introduit chez eux par effraction pour trouver des réponses. 
Aristide devait les interroger sur cette étrange force qu’il ressentait depuis qu’il était passé entre les mains du docteur. Il était impavide et si puissant qu'il avait pu grimper jusqu'au balcon sans effort malgré sa corpulence. Mais cette nouvelle énergie avait un prix, une faim intarissable. Il espérait que Joe et Nessa sauraient mettre des mots sur ce qui lui arrivait.
21*
Joe et Aristide s’examinèrent sans un mot. 
«  Je répète, qui êtes-vous ? Demanda Joe sans lâcher Aristide du regard.
— Je m’appelle Aristide. Aristide Chatagny. Je suis un privé. J'ai passé la journée à vous suivre pour...»
Joe le coupa avec animosité.
« C’était vous ? Qu'est ce que vous nous voulez et qui vous envoie ?
— Personne. Je suis là de ma propre initiative. Je suis désolé pour votre fenêtre, je voulais simplement toquer, mais elle a explosé dès que je l'ai touchée, expliqua Aristide avec une moue dépitée. Je vous promets que je vous rembourserais les dégâts. Je ne suis pas venu pour vous agresser, juste pour parler.»
Aristide semblait réellement désemparé et l’agressivité de Joe retomba. Aristide sortit de l'obscurité et s'avança avec précaution. Nessa ne put réprimer un cri quand elle le reconnut.
« Veuillez me pardonner si je vous ai fait peur aujourd'hui, je cherchais un moyen de vous aborder, mais je pensais que vous ne m’auriez pas pris au sérieux, s'excusa-t-il auprès d'elle.  — Bon, si vous avez quelque chose à nous dire faites-le vite avant que j'appelle la sécurité, le coupa Joe.
Aristide se mit à leur narrer toute son histoire depuis le début. La disparition de la petite Concepcion, le mystérieux cylindre noir, son propre enlèvement par Humbert et puis la découverte des corps sans vie des enfants, passage qui attrista énormément Nessa. Ensuite, il raconta sa fuite et enfin sa visite chez le docteur Holz.
« Vous croyez que tout est lié ? demanda Joe.
— Oui, et je pense que ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. J’aurais voulu savoir ce que vous veniez chercher chez le docteur Holz.
— Vous ne vous êtes jamais demandé comment les stars, les hommes politiques et tous les personnages publics faisaient pour rester jeunes et beaux sans recours à la chirurgie?
— Non, je dois admettre que ça ne m'a jamais traversé l'esprit, répondit Aristide.
— C’est à Los Angeles que j’en ai entendu parler pour la première fois. Une clinique très privée en Suisse qui proposait des services particuliers
— C'est à dire ?
— Et bien, vous avez pu en faire vous-même l'expérience. Le docteur Holz vous a vidé de votre mauvais sang tout en vous en injectant un plus sain, parfaitement oxygéné. Il vous a nettoyé de l’intérieur comme il le fait avec nous depuis plusieurs années.
Aristide resta pensif quelques instants. Nessa éclata en sanglots
— Je viens de comprendre Joe… Ce qu’il nous injecte, il le prend à des enfants. Il tue des créatures innocentes pour que nous puissions continuer à faire semblant. Nous sommes des monstres !»
Joe ne répondit pas. Cela faisait longtemps qu’il était au courant, mais cela ne le dérangeait pas. Seul le sang des enfants avait le degré de pureté nécessaire pour être utilisable. Et puis pour la plupart, il s’agissait d’immigrés clandestins que personne n’aurait osé réclamer. Joe se rapprocha de la cheminée et saisit un tisonnier qu’il cacha dans son dos
« Monsieur Chatagny, vous nous avez bien dit qu'on vous avaient fait une batterie de tests avant de vous vider de votre sang ?
— C’est exact, mais...»
Aristide Chatagny n’eut pas le temps de finir sa phrase. Joe venait de lui fracturer le crâne avec le tisonnier. Il ne vit pas les gerbes écarlates s’échapper de son cuir chevelu et ne sentit pas la mort l'accueillir. Joe s’était précipité sur lui et avait planté ses dents dans son cou, avalant le liquide chaud et bouillonnant. Il leva la tête et fixa Nessa, tenant fermement le corps secoué de spasmes d'Aristide, avant de prononcer deux mots avec gourmandise.
« Du sang.»
Nessa resta quelques instants interdite, puis comme mue par un besoin irrépressible elle se leva et vint participer au festin avec son amant.
Sang Neuf © Cédric "Zed" Mayen 2013
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lombreduzed · 11 years
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Test de ma basse faite main
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lombreduzed · 11 years
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Make your own gear Day 5 Finale
It's over! Et j'ai déjà la tête à mon prochain projet... Retaper mon Aria au manche pêté. Ca va être une autre paire de manche, alors autant profiter pour l'instant de mon nouveau bébé.
Tadam!:
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Et en cadeau, un petit test live de la bebete... Enjoy! (Désolé pour la qualité, la prise a été faite avec l'iphone) 
En tout cas ce fut une belle aventure, merci de m'avoir suivi, j'espère bientôt pouvoir attaquer la suivante qui ressemble à ça pour l'instant:
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D'ici là, continuez à faire de vos rêves des réalités,
A vous écrire,
zed
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lombreduzed · 11 years
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Make your own gear Day 4
Le corps fini, il était temps d'attaquer le manche, et quoi de mieux qu'une bonne séance de ponçage pour virer le vernis:
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J'ai ensuite retravaillé la tête en l'affinant encore plus:
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Comme j'avais mal serré le serre-joint; le manche est tombé et j'ai cassé le chevalet, mais pas de panique, il me restait encore du cerisier pour en fabriquer un autre (en haut l'ancien en dessous le nouveau en cours de ponçage:
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Une fois le manche poncé et le chevalet replacé, il était temps pour Luky d'apposer la marque au pyrograveur:
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Et voilà le résultat!
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Plus qu'à passer une couche de vernis et le tour est joué:
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Et puis super nouvelle, ma basse est revenue de chez l'ébéniste... J'ai du attendre quelques heures qu'elle sèche encore un peu avant de pouvoir monter l'électronique mais ça y est, elle est prête et après test, bonne surprise, elle ne buzz plus:
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En tout cas elle en jette! J'espère que le manche sera sec demain pour que je puisse enfin la monter et la jouer... pour l'occase je ferais une petite vidéo ^^
D'ici là, bonne soirée et à demain pour ce qui sera, je l'espère, le dernier acte de cette aventure.
A vous écrire,
zed
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lombreduzed · 11 years
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Make your own gear Day 3
Et patatra! J'ai rencontré une talentueuse peintre ébéniste, qui après avoir jeté un coup d'oeil à ma peinture m'a dit qu'elle ne tiendrait jamais la vitrification. J'ai donc du tout reponcer pour enlever la peinture, mais heureusement elle s'est proposée de me donner un coup de main.
Je l'ai donc accompagné dans son atelier où elle a tout repeint avec un pistolet à peinture pro, ça m'a fait bizarre de voir ma basse accrochée par un crochet de boucher, mais je dois admettre que le résultat est là:
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Elle a d'abord passé plusieurs sous couches de gris anthracite avant de poser 3 couches de peinture blanche. Une fois la peinture sèche, il était temps d'appliquer un vernis brillant du plus bel effet:
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Heureusement que nous étions sous une hotte sinon j'aurai les poumons tout vitrifiés! Une fois la troisième couche posée, ma basse resplendissait d'un bel éclat, il était temps d'attaquer le vernissage du pickguard et des autres babioles:
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Après cet après-midi à l'atelier, je n'avais plus trop la motivation pour continuer à bosser dessus. Demain, je devrais récupérer le corps et j'attaquerai les finition du manche que je dois reponcer et vernir à la main... pas une mince affaire, mais d'ici dimanche, elle devrait être finie ^^.
D'ici là, je vous tiendrai au courant de l'avancement.
A vous écrire,
zed 
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lombreduzed · 11 years
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Make your own gear Day 2
Suite de l'aventure DIY.
Aujourd'hui, atelier électronique et peinture. Après avoir mis un dernier coup de ponceuse à mon pickguard, il était temps d'attaquer l'électronique qui devait s'y insérer.
Tout d'abord percer les trous du pickguard pour préparer les pas de vis:
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Comme il est plus épais que le précédent, cela me posait problème pour pouvoir insérer les potards et qu'ils dépassent suffisamment pour pouvoir visser les écrous. C'est alors que mon père me présenta ma nouvelle meilleure amie, la bien-nommée DEFONCEUSE!
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Grace à elle, nous avons creusé dans le bois et préparé un petit nid douillet pour les potards. Ensuite nous avons percé deux trous de 8 pour eux et un trou de dix pour le jack:
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Après quelques péripéties avec la défonceuse pour agrandir les trous, il était temps de brancher et tester les micros:
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L'essai ayant été concluant, il était temps de passer à la deuxième étape du jour, la peinture, et là, autant vous dire qu'entre cette photo-ci:
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 et celle-là:
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De longues heures ont passé... Pour meubler l'attente entre chaque temps de séchage, j'ai donc peaufiné un repose-manche et un repose-pouce (objet trop souvent manquant sur les basses et d'une grande utilité pour les bassistes comme moi qui ne jouent qu'aux doigts et pas au pick):
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La suite de cette formidabilissime aventure demain, stay tuned!
A vous écrire,
zed
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lombreduzed · 11 years
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Make your own gear Day 1
Ca y est! Après des années a regarder ma vieille basse prendre la poussière, je me suis enfin décidé à la personnaliser et c'est loin d'être une mince affaire.
Remontons en 1998, j'étais alors un petit troisième avec beaucoup de temps libre. Un de mes meilleurs potes venait de recevoir sa première guitare et s'amusait à en casser les cordes quand me vint l'illumination! Pas envie d'être un branleur de guitariste, pour être une vraie rockstar, il me fallait une basse!
Mon père (noël) écouta mes suppliques et le soir du 25 décembre je reçu une basse de débutant bleue (que je m'empressais de nommer "Véro" du nom de mon amour d'ado) et à la qualité de son indescriptible sur laquelle je jouais pendant de longues années. 
Et puis le temps passa et je pu enfin m'en offrir d'autres, d'abord une Aria Pro MKII (Amandine) au son très "métal" qui fit une mauvaise chute et se cassa le cou quelques années plus tard, puis une Fender J-Bass (July), cadeau d'anniversaire de la part d'amis qui avaient assisté à la mort de l'Aria, et enfin Kay, mon joyau, une basse hollowbody vintage de 1963 avec un des derniers exemplaires de pick-up tissuebox qui lui donne un grain Jazzy... une merveille! Si vous avez traîné aux soirées open-mic du Johnny Walsh, vous avez déjà pu l'entendre...
Bref, cette vieille Véro était donc échouée chez mes parents depuis bien longtemps, usée jusqu'à la corde, un potard manquant, le système électrique arraché, pleine de pocs et de coups et inutilisée depuis une bonne dizaine d'année. Il était temps de tester mes skills de luthier!
Prenez un crayon et un calepin pour noter ce qui va suivre si vous souhaitez en faire de même:
Avant tout, Il fallait la démonter, ce que je m'empressais de faire avec bonheur:
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Puis, poncer pour retirer la peinture vernie à l'aide d'une bonne ponceuse électrique (Métabo est une super marque et j'aime bien leur slogan "work, don't play"):
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Le ponçage terminé, la basse ressemblait à la photo suivante. J'ai ensuite affiné le ponçage afin de lui donner une forme plus arrondi sur les angles, avec des creux plus doux:
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Après ça, mon père a voulu donner un coup de main et s'est fait un plaisir de faire sauter l'anse inutile d'un coup de scie sauteuse:
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Du ponçage et encore du ponçage en perspective! J'en profitais pour raboter une partie de la tête pour lui donner un côté plus agressif et je m'attaquais au pickguard. L'aspect plastique blanc dégueu du précédent qui recouvrait la quasi totalité de la surface ne me plaisait pas et j'avais envie d'un beau bois sombre pour casser avec le bois clair du corps. C'était aussi l'occasion de créer une forme unique et d'introduire un premier Z dans mon instrument. Après avoir choisi le bois et la forme, j'attaquais la découpe et le ponçage pour créer ceci:
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Un peu d'électronique et de soudage pour finaliser cette première journée:
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Et voilà le résultat après plus de huit heures de boulot:
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La suite demain ^^
A vous écrire,
zed
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lombreduzed · 11 years
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Mes premières amours
En ce moment je bosse pour la charte graphique d'un ami musicien... Je reviens à mes premières amours, créations de typo, de logo, etc... quelques visuels:
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Le lien de son bandcamp dont j'ai fait le design: http://yanakyl.bandcamp.com/
Contactez-moi si vous êtes à la recherche d'un graphiste pour des boulots de com: cedric.mayen(at)gmail.com
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lombreduzed · 11 years
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La vingt-cinquième volée
Ces derniers jours, une photo fait le buzz sur les réseaux sociaux, il s'agit de celle de François Hollande arborant un sourire niais à souhait devant un tableau d'école où est écrit à la craie blanche « Aujourd'hui c'est la rentrée ». Cette photo retirée de la publication par l'afp puis remise en ligne par d'autres médias catalyse le sentiment d'avoir un idiot au gouvernement chez ses détracteurs et amuse ou agace ses partisans.
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Cette photo est un bel exemple de ce que mon prof de prise de vue à la fac nommait très joliment « la 25e volée ». Pour être exact il s'agit en fait de l'1/25e volée. Pourquoi ? Laissez-moi vous l'expliquer.
Remontons pour cela à l'époque prénumérique. Comme vous le savez peut-être une seconde de film traditionnel correspond à 25 images mises bout à bout sur une pellicule. La succession rapide de ces images fixes crée le mouvement grâce à la persistance rétinienne. Mais que se passe t'il lorsqu'on presse le bouton pause lors de la projection d'une séquence où un acteur effectue un mouvement ? Et bien, on a une chance sur 25 de tomber sur une image fixe « invisible à l'oeil nu ». Cela a déjà dû vous arriver au moins une fois, ou si vous n'en avez jamais été témoin, je vous invite à l'essayer. C'est très facile aujourd'hui avec les plateformes de vidéos. 
Cette image invisible, c'est souvent en examinant les visages que l'on peut l'apercevoir. Les yeux presque révulsés, la bouche déformée, la personne paraît figée dans une pose ridicule. Bien avant d'entendre parler de cette 25ème volée, je me souviens d'un fou rire mémorable avec un ami, alors que nous regardions un film de Scharwzy, et que nous étant levés pour chercher quelque chose à grignoter, nous avions mis pause sur une scène où le visage de l'acteur exprimait la débilité la plus totale. À l'époque, pas de smartphones pour immortaliser la scène, mais le souvenir immortel d'avoir capturé un moment évanescent et improbable.
Cependant, la 25éme peut aussi être cet instant fugace où le mouvement est parfait. Je pense à ce très beau clip de Radiohead "Street Spirit" et surtout à cette image qui me hante à 3'56". Ne réussissant pas à décrire la fascination que cette image brève et fugace inspire chez moi, en voici une capture d'écran :
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Mais privée des images qui la précèdent et la suivent, elle perd grande partie de son charme. Je vous invite donc à voir ou revoir le clip.
En 2004, j'ai eu l'occasion de travailler au service audiovisuel du Festival de Cannes. J'étais alors en contact direct avec beaucoup de photographes que je devais gérer pendant les séances de photocall et la montée des marches. En discutant avec eux, j'ai alors découvert que cette 25e volée était une hantise pour certains et un Graal pour d'autres. En effet lors d'un photocall, les photographes hurlent le nom des acteurs pour capter leur regard. Pour les photographes, il s'agit d'une foire d'empoigne et pour les photographiés d'une torture pour les yeux, un mur de flashs crépitant sans interruption pendant 2 minutes face à eux. Une photo estampillée Festival de Cannes sans regard caméra ne valant absolument rien pour un éditeur de magazine, on comprend mieux pourquoi les photographes s'acharnent a obtenir l'image parfaite. Sur plus de 300 photos, il n'y en a peut-être qu'une de bonne. 
Un membre de ma famille a travaillé pendant quelques temps avec Yann Arthus-Bertrand sur son livre, la Terre vue du ciel, et d'après ce qui m'a été raconté, ce grand photographe travaille de la même façon que les paparazzis de Cannes, prenant des séries de photos en rafale pour n'en choisir qu'une au final, la photo parfaite. Magie du numérique.
À l'époque de Cartier-Bresson ou de Pierre Verger, saisir la 25e volée était l'essence même de la photographie. Capter le geste, l'image impossible où le mouvement nait ou meurt. L'instant de grâce ou de chaos.
De cette 25e volée, notre président en fait aujourd'hui, malheureusement pour lui, les frais.
À vous écrire,
zed
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lombreduzed · 11 years
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Rino Gaetano
Nun Te Reggae Più
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lombreduzed · 11 years
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Mourir pour des idées, oui, mais de mort lente
Depuis l'affaire Wikileaks qui porta sur le devant de la scène deux personnages aux antipodes l'un de l'autre (Bradley Manning un militaire mal dans sa peau et torturé qui s'est rebellé contre sa hiérarchie et Julian Assange, sorte de magnat de la contre-culture aux motivations et financements obscurs), en passant par la guerre des Anonymous contre le nouvel ordre mondial, et dernièrement en la personne d'Edward Snowden, il semble que la révélation de faits et de documents secrets et surtout la citation de personnes ou d'agence y ayant prit part est devenu le nouvel étalon du courage dans notre société surinformée. Les Anglo-saxons ont trouvé un mot qui sonne bien pour décrire ces nouveaux héros (ou traitres selon), les whistleblowers.
Depuis ce matin, la mélodie d'une chanson italienne ne me quitte plus. C'est une chanson de Rino Gaetano, chanteur pop des années 70, connu dans la botte pour ses textes surréalistes et surtout son succès de l'été à San Remo, Gianna. Mais cette mélodie qui ne me quitte pas, c'est celle de Nuntereggaepiu.
La mélodie est entrainante, la chorégraphie «originale » et tout cela respire la farce et l’humour... Pour les non-italophones, cette pantalonnade a l’air bien innocente, mais en Italie cette chanson entama le déclin de la carrière de Rino et sa fin tragique.
En effet, le chanteur parle de tout ce qu’il n’aime pas dans son Italie de fin des années 70 (Nun te reggae più = Non ti reggo più = Je ne te supporte plus) et tout y passe : les footballeurs, les présentateurs télés, les hommes politiques et leurs partis, les grands argentiers, un certain «cavaliere» qui n’en est qu’à ses débuts, l’intelligentsia qui regarde mourir les pauvres et ceux qui s’en nourrissent, dépeignant une Italie vérolée par la seule chose dont il ne parle pas ouvertement, la mafia.
Dans cette chanson, le chanteur calabrais, brise la sacro-sainte loi du silence italienne en nommant ouvertement les personnes dont il parle, L’avocat Gianni Agnelli, président de Fiat et argentier de la Juve et sa fille Susanna notamment sont l’objet de ses attaques. Le journaliste spécialiste des arts italiens, Vincenzo Mollica, dira ceci sur cette chanson :
« La chanson Nuntereggae più est certes une chanson très amusante, mais elle avait le courage de ses actions, elle ne se cachait pas sous de faux-semblants : Elle citait les noms et les prénoms de tous, à une époque où citer des noms et des prénoms était très difficile. »
Après cette chanson, le petit monde du spectacle qui l’avait porté aux nues, décida de la censurer, de l’obliger à chanter en play-back pour ne pas ajouter de noms, ce qui rendait furieux l’auteur-compositeur, électron trop libre d’une société qui commençait à se polisser, anticipant la décadence berlusconienne. En bref, il gênait son monde en parlant trop.
En découvrant la biographie de Rino, une autre étoile filante me revient à l’esprit, mais Française celle-là, il s’agit de Coluche. Certes le rayonnement de Rino en Italie est à des années-lumières de celui de Coluche en Fance, et leurs talents bien différents, mais il s’agit de deux auteurs qui se sont toujours refuser de parler à mots couverts, se sont fait le porte-voix d’une culture populaire et se sont battus pour aider les plus démunis et faire passer leurs idées.
Leur fin est d’ailleurs très similaire. La nuit du 2 juin 1981, au volant de sa volvo flambant neuve (sa précédente voiture avait violemment été percutée par un 4x4 quelques mois plus tôt, dans d’étranges circonstances, mais il s’en était sorti indemne), Rino aurait perdu connaissance avant de s’écraser violemment contre un camion venant en sens inverse. Sa tête percuta la vitre, fracturant la base de son crâne. Il sera transporté dans le coma, à l’hôpital Policlinico de Rome, qui refusera de le prendre en charge. Cinq autres hôpitaux romains le rejetteront, sans raisons évidentes, durant cette nuit tragique. Il décédera à six heures du matin après quatre heures d’agonie. 
De Rino nous restent des chansons a priori fantaisistes, mais remplies d’un message politique et social profond, d’un besoin de tirer la sonnette d’alarme. J’avais envie de rendre hommage à ce whistleblower, à ce visage sympathique et fantasque, le chapeau haut de forme constamment vissé sur la tête, qui tranche avec l’impression de sérieux que dégagent nos nouveaux « héros ».
À vous écrire,
Zed
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lombreduzed · 11 years
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Du sacrifice d'une muse au bénéfice de l'architecture
Je passe presque tous les jours devant l'Opéra de Lyon et j'aime à lever la tête et à contempler la découpe de sa verrière sur le ciel. En plein été notamment, son architecture se révèle et l'arrondi du toit dessiné par Jean Nouvel sur l'azur me procure une sensation de légèreté et d'harmonie intérieures. Le soir, des jazzmen jouent sur la terrasse devant un public d'amateurs et de badauds, tandis que des danseurs de hip-hop se déhanchent sur des rythmes plus actuels et que les skaters répètent pour la centième fois le même enchaînement de figures. L'architecture, la musique, la danse, la douceur des soirées estivales lyonnaises, les couples se croisant et se décroisant créent une sorte de magie pour celui qui sait prendre le temps de s'arrêter et de contempler.
Alors que le tumulte de la ville, le bruit des moteurs et les trilles typiques des klaxons des bus s'élèvent à quelques encablures de la place qui sépare l'Opéra de l'Hôtel de Ville, cet espace paraît protégé, une oasis où se tolèrent et se mélangent cultures urbaine, populaire et privilégiée. Il semble qu'une sorte de force supérieure garantit la paix et la cohésion sur cet ilot.
Et puis il y a les Muses, huit statues de femmes dédiées aux arts, les bras ouverts et qui dominent la ville du fronton de la façade. Elles dégagent une force pleine de douceur et paraissent inviter les amateurs d'art, les créateurs et les poètes à venir se reposer à l'ombre de l'arcade qu'elles surplombent pour y trouver réconfort et inspiration.
Attendez, j'ai bien dit huit muses et pas neuf comme nous l'affirme la tradition grecque ? Qui sont elles ses muses et que nous racontent-elles ? Comptons-les pour comprendre laquelle manque à l'appel.
Euterpe et Tepsychore, patronnes des danseurs sont bien là, observant les breakdancers en souriant ; Melpomène et Polymnie se régalent des envolées de sax et de piano, des scats et des chants du monde ; Clio, Thalia et Calliope me toisent du regard, avec un petit sourire narquois, m'invitant à les rejoindre sans pour autant me dévoiler l'étendue de leurs charmes ; et enfin, Érato me rappelle que je ferai bien de rentrer à la maison retrouver ma douce pour lui susurrer quelques mots d'amour.
Il en manque bien une, Uranie, "la céleste ", la plus vaporeuse de toutes. Muse des astres, liée aux étoiles et pas aux hommes comme ses soeurs, je l'imagine, le regard perdu vers les étoiles, ne daignant un regard qu'aux oiseaux qui savent désarrimer leurs pieds de terre pour s'élever au-dessus du monde.
Pourquoi Uranie n'a t'elle pas eu le droit de siéger aux côtés de ses soeurs et de profiter comme elles de la quiétude des soirées lyonnaise? La faute en revient à Paul Chenavard, architecte originel du bâtiment qui par souci de symétrie, préféra la sacrifier, car selon lui, elle ne représentait pas les arts de l'Opéra. Triste conclusion pour Uranie, muse céleste, sacrifiée sur l'autel de l'architecture et de la logique artistique.
À vous écrire,
Zed
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lombreduzed · 11 years
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De la nécessité d'être un bon menteur
Dernièrement, je me suis posé cette question : qu'est-ce qui fait qu'une histoire fictionnelle est bonne ? Est-ce la profondeur du sujet traité, l'excellence oratoire ou littéraire de celui qui la raconte, les mécanismes propres à la narration, la concrétisation des attentes du public, tout cela à la fois ? Je n'arrivais pas à trouver de réponse satisfaisante jusqu'à ce qu'une certitude me frappe. Une histoire est bonne si elle paraît crédible au lecteur/spectateur.
Pourtant, ce qui est crédible n'est pas forcément vrai, et il suffit de ressentir l'excitation que procure le fait de raconter un mensonge sans évoquer de suspicion chez sa victime pour sentir le pouvoir incroyable inhérent au travail du conteur. Il peut créer des personnages fantastiques, des destinations inconnues ou bien nous parler du quotidien d'un voisin, mais il est avant tout capable de nous raconter une histoire crédible en se basant sur des canevas simples et qui trouveront une résonance forte chez son public. J'aborderais ce sujet plus tard, je souhaiterais d'abord vous parler du mensonge.
Le mensonge, selon le dictionnaire, tire sa racine du mot latin mens, soit l'esprit ou l'imagination selon le sens que l'on veut lui donner. L'esprit est immatériel et se rapproche à mon sens du génie, selon la définition qu'en faisaient les Romains et très bien expliquée par Elizabeth Gilbert, c'est-à-dire une entité hors de soi et qui insuffle, dans certains instants de grâce, une sorte de magie créative et incompréhensible, mais extrêmement jouissive. L'imagination, quant à elle, est la faculté de se représenter des images et des futurs probables sur la base d'objets et de situations déjà perçues ainsi que la faculté de créer, de concevoir et d'inventer.
Le mens du mensonge serait donc la capacité de percevoir ce qui nous entoure, de traiter ces informations et de concevoir une route probable, sorte de caution rigoureuse et crédible, tout en faisant appel à une force créatrice extérieure, libre et multiforme, un flux qui nous traverse, que nous ne comprenons pas, mais qui nous transcende. Cette force, j'aime à la nommer, pour ma part, Fantaisie.
Imagination et fantaisie, rigueur et ambiguïté, certitude et énigme sont les talents qu'un bon menteur se doit d'avoir pour lui permettre de vous faire gober n'importe quoi, mais ils constituent surtout le socle du travail de l'écrivain et sa capacité à émerveiller. 
L'émerveillement fait appel à la faculté d'imagination du public, à son envie de croire dans l'illusion de réalité qu'il retrouve dans une histoire. Il s'agit de faire communiquer la mens du conteur et la mens de l'observateur, de les faire entrer en résonance pour atteindre l'harmonie. Un seul doute du récepteur d'un mensonge sur la crédibilité de l'histoire, un détail qui le sorte de son émerveillement et c'est tout le château de cartes du menteur qui s'écroule. La victime se referme et devient alors le spectateur diverti ou gêné par l'ampleur du marasme dans lequel le menteur est en train de s'enfoncer. Mais ses écoutilles sont fermées et il n'est plus capable de croire l'histoire ou le conteur. Le charme est rompu.
Quelle est la finalité d'un mensonge ? Selon qu'il est intransitif ou transitif, le verbe mentir prend deux sens bien différent à mes yeux. Nier ce qu'on sait être vrai (intransitif), affirmer ce qu'on sait être faux (transitif indirect). Le mensonge, pris d'un point de vue artistique et/ou littéraire est à mon sens l'affirmation du faux, tandis que la négation du vrai a un but plus rhétorique, voir politique (mais je ne m'appesantirais pas dessus pour l'instant). La finalité du mensonge, artistiquement parlant, devient donc le besoin de faire passer pour vrai ce qui n'est que vraisemblable, de détourner la réalité. Je n'invente rien, René Magritte et bien d'autres ont tracé ce chemin de réflexion avant moi.
Un mensonge se doit d'être simple et repose sur la probabilité d'avoir fait ou non une action. Prenons un exemple bien connu (si, si vous verrez). Si je vous dis, "Hier, je suis sorti acheter du pain ", je suis en train de vous mentir, mais vous n'avez aucune raison de me remettre en question, car quoi de plus crédible qu'un français sortant acheter son pain ? Je viens de poser les bases temporelles et spatiales pour situer l’action, néanmoins je ne crée pas encore d'émerveillement. « Hier, je suis sorti acheter du pain et j'ai croisé une fille. » C'est très probable, et j'éveille votre intérêt par la mention d'une rencontre. Après tout, les relations humaines sont la raison de notre présence sur Terre, elles donnent un but et du sens à nos vies. Nous avons naturellement besoin d'explorer les relations et trouvons du réconfort dans notre capacité à pouvoir nous lier avec d'autres êtres humains. « Hier, je suis sorti acheter du pain, et j'ai croisé une fille. Soudain, un voleur a arraché son sac. Je me suis mis en travers de la route pour l'arrêter, mais il m'est rentré dedans. On s'est battus et je suis arrivé à reprendre le sac, mais au passage j'ai pris un coup dans l'oeil. C'est pour ça que j'ai un oeil au beurre noir. Mais ça valait le coup parce qu'elle m'a invité chez elle ! » C’est faux, je suis sûrement tombé dans les escaliers, mais je veux tourner cette situation qui me rend ridicule en une situation qui m’apporte du prestige. En terme de mensonge, l’héroïque est celui que nous préférons raconter bien qu’il éveille aussi le plus de soupçons. Cependant, si l'histoire est crédible et que le récepteur de cette histoire n'a aucune raison de la mettre en doute, il aura tendance à y croire, tout simplement. 
La mécanique du mensonge devient dangereuse à partir du moment où l'on commence à raconter de nouveaux mensonges sur la base de mensonges précédents, car contrairement à une action réellement vécue et qui laisse des traces et des souvenirs, les mensonges construits sur un pur travail d'imagination n'ont pas de bases solides. Ils reposent sur de l'air, et il suffit de se tromper de version, d'inclure des objets ou des actes que l'on n’avait pas mentionnés la première fois pour que le colosse s'affaisse sur ses pieds d'argiles.
Mais qu'est-ce qu’une BD, un film, un roman sinon de gigantesques mensonges, des détournements de la réalité empilés les uns sur les autres dans le seul but d'émerveiller le lecteur ou le spectateur ? Voilà pourquoi je pense que la plus grande qualité d'un conteur est d'être avant tout un formidable menteur capable de rendre crédible n'importe quelle histoire, et qu'il est nécessaire pour un auteur de savoir mentir pour émerveiller son public.
Le mensonge me fascine depuis de nombreuses années, car j'ai pendant longtemps tissé une toile d'exagérations de la réalité autour de quelques amis. Le poids de ces mensonges était devenu si lourd à porter qu'un jour, j'ai décidé de m'en libérer. Faire tomber le masque, abandonner l'identité que je m'étais faussement construite, et que je finissais par croire moi-même m'avait demandé énormément de courage, et pourtant rien de ce que je n'ai pu leur révéler n'a surpris mes amis. Cela faisait longtemps qu'ils avaient vu les failles dans mes histoires et qu'ils m'observaient me débattre avec amusement. Mais surtout ils avaient su voir que malgré tous mes mensonges, j'étais une personne digne d'intérêt et qu'ils me considéraient et m'aimaient pour ce que j'étais et pas pour qui je me racontais.
J'ai alors découvert que j'étais un piètre menteur et cela m'a mis en colère. Comment pouvais-je raconter des histoires à des inconnus et espérer qu'ils y adhèrent si j'étais incapable d'être crédible face à mes amis ? J'ai alors pris une résolution, celle de ne plus mentir à mes proches, car au final c'est moi qui en souffrais le plus, mais en contrepartie de devenir un menteur hors pair dans mon écriture. Tout cela m'est arrivé il y a à peu près une dizaine d'années et bien que mes engagements de l'époque soient toujours valables, j'avais perdu de vue l'importance du mensonge dans mes histoires. En apprenant des méthodes d'écriture et en théorisant les mécaniques de narration, je privilégiais la forme au fond, et ne produisais au final que de médiocres ersatz de mensonges auxquels je ne croyais pas moi-même.
Il m'a fallu une longue remise en question, l'écriture d'un roman de 200 pages, pour me rendre compte que je faisais fausse route. Ce n'est pas au lecteur que je dois faire avaler mon mensonge, mais d’abord à moi-même. Si je crois en mon histoire, alors je serais capable de la partager, en faisant fi des lieux communs, des processus, des mécaniques, pour finalement produire de l'émerveillement. 
Dès que j'aurai fini l’écriture de ce texte cathartique, je me remettrais à la réécriture de mon roman, sans cesser de pointer vers mon but : raconter un beau mensonge, y croire avec fermeté pour pouvoir le défendre envers et contre tous, duper le plus de lecteurs possibles et surtout qu'on me demande et qu’on me paye pour en raconter encore plus. C'est mon idéal, mon rêve, mon mens songe.
À vous écrire,
Zed
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lombreduzed · 11 years
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10 Most inspirative music when writing
1. The Pink Floyd
2. Led Zeppelin
3. Piers Faccini
4. Elliott Smith
5. Ben Harper and the Innocent Criminals
6. Andrew Bird
7. The Black Keys
8. Neil Young
9. Crosby, Stills, Nash (and Young)
10. Bonobo
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lombreduzed · 11 years
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Aristide Chatagny n'est pas un homme très chanceux
En ce moment, je bosse sur une nouvelle à mi-chemin entre le roman noir et la science fiction pour un concours, et je m'éclate comme un petit fou. Notamment lorsque qu'il s'agit de présenter le héros:
"Aristide Chatagny ne pouvait que constater son manque chronique de chance dans la vie. Certes, il était né suisse, de parents suisses et donc naturellement à l'abri du besoin, mais c'était bien là le seul avantage qu’il consentait à se créditer.
Passable durant toute sa scolarité, il n’avait jamais vraiment cherché à se surpasser, préférant l’anonymat de la médiocrité à la gloire de la réussite. D'ailleurs, Aristide avait fait de l’anonymat son credo, s’évitant ainsi les brimades de la part de ses jeunes camarades ainsi que tout autre type d’attention. Son passage à l’armée ne laissa pas plus de traces, hormis peut-être, le souvenir nauséeux de sa première et unique cuite, le pauvre garçon ayant fini nu dans le lac de Genève à hurler des ordres au jet d'eau qui ne voulait pas lui obéir. Mais il le savait, aujourd'hui aucun de ses conscrits ne serait capable de mettre un nom sur ce petit bonhomme enrobé qui les avait tant fait rire.
N’ayant pas beaucoup d’inspiration en ce qui concernait son avenir, hormis sa vocation pour l’investigation, il se tourna rapidement vers le métier de policier, mais après plusieurs années de régulation de la circulation et quelques affaires classées, il abandonna et se reconvertit en détective privé.
Car Aristide était persuadé d’avoir du flair, ce qui était d’ailleurs vrai lorsqu’il s’agissait de retrouver ses clés ou d’autres objets égarés, mais s’avérait bien moins évident en d'autres situations. Par conséquent, son affaire ne marchait pas, ce qui ne le préoccupait par car il était suisse, fils de suisses et naturellement à l'abri du besoin.
Ses journées s’écoulaient donc paisiblement, entre mots croisés et espionnage de maris volages, jusqu'à ce que la porte de son bureau soit poussée par les Huelva, un couple d’immigrés sud-américains, inquiets à la suite de la disparition de leur fille. Face aux larmes de madame Huelva, Aristide avait senti qu'on lui confiait enfin une mission à sa hauteur.
Et les ennuis avaient commencé."
© Cédric Mayen
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