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dubalai · 1 month
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Vendredi 9 février 2024, boulevard Voltaire, au coin de la rue du Chemin Vert, dans le quartier de Koffi et Sylvie, chez qui je crèche. Terrasse très au frais, où je prends mon premier café du matin : j'entends tout d'abord : 'je te l'ai dit....t'es pas mon père...' Et puis un homme passe devant moi, cinquantaine, bonnet, ample manteau lourd baluchon, voix assurée et forte, mais calme. Il poursuit : '...on peut pas le faire.' Puis s'installe un long moment de profil et parle à voix plus modérée dans son reflet de la vitrine du bistrot. On ne perçoit pas ce qu'il se dit. Puis repart lentement, plus calme encore ; secoue la tête, encore causant ; m'a jeté un coup d'oeil avant de tourner les talons.
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dubalai · 2 months
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LE CINOQUE DU T.E.R. POUR LYON
Dimanche 24 mars 2024, dans le train de 13h24 pour Lyon, qui me transporte à l'Opéra, peu de monde, mais, face à moi, à quelques travées, un homme somnole. Cinquantaine d'année, mais plus abîmé qu'ordinaire à son âge, il est très agité. Son demi sommeil est parcouru de tics, dont le principal consiste à se frotter les yeux et la bouche avec un geste papillonnant de la main, très léger et rapide. Il mime une dispersion de poussière, ou des miettes qui le gène, qu'il chasse d'un geste vif et répété. Il se lève fréquemment ; il est sale, mains noires, vêtu d'un survêtement relâché et pendant ; il fait quelques pas dans le couloir, abandonne son bagage, et revient rapidement, et semble se rendormir, après s'être déchaussé. Il est tout à fait édenté ; il bougonne ; à deux reprises, il pianote sur son téléphone portable à grands gestes. Il ne dérange personne.
Arrivé à Lyon, promenade à pieds jusqu'à l'Opéra : sans prendre de note, je relève cependant : un jeune type noir, survêtement, grands cris secs et violents à la sortie de la gare. Puis une femme qui danse, jeune, face à la vitrine d'un fast food où elle se regarde faire. Puis un type à un arrêt de bus, ventre considérable et jambes très noircies, malades, pansées, qu'il laisse voir par un short hors de saison.
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dubalai · 1 year
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Lyon, quartier de la Martinière, jeudi 27 avril 2023, midi ou à peu près, temps doux. Dans ce quartier de restaurants rapides, j’attends l’ouverture de la boutique de falafels quand, sur le trottoir d’en face, j’aperçois un homme qui danse, léger et élégant, larges gestes précis des bras terminés comme des têtes de canards, qui lui font comme une danse ‘égyptienne’ ; et même, il virevolte, ses jambes bougent bien, sans à coups, fluides. Très bien. Je traverse et m’approche. Sa danse ne dure pas. On dirait qu’il retombe : maintenant il est lourd et voûté, fringues sales et bras marqués de petites blessures. Voix éraillée : ‘...et moi, j’écoute Wauquiez...et il dit ça...Wauquiez...’ Léger quand il dansait, il est lourd et douloureux : ça ne va plus. Puis il se tait et se plante devant le passage piétonnier (comme on voit sur la photo ci-dessus). Quand il attend, il est silencieux. Je prends alors cette photographie et j’entends : ‘...ça c’est pas bien, monsieur, c’est pas gentil...’C’est un très jeune livreur, occupé à décharger un camion blanc, tout près. Sympathique et tranquille, mais à l’air désolé et réprobateur, il insiste d’un signe de la main : ‘...c’est pas gentil, la photo...’ Je m’approche. Il ajoute : ‘...il est malade, moi, ça me fait mal au coeur...’ Il est très jeune, presque enfantin, au très fort accent slave. J’explique que je fais ça depuis longtemps, pour qu’on parle d’eux, pour qu’on s’en occupe enfin, pour qu’on parle un peu d’eux, et que oui ils sont malades, ils ne vont pas bien etc...’ Le jeune débardeur continue son travail et sourit ; il me dit : ‘...alors c’est bien, chef, c’est bien..bonne journée, c’est bien...’
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dubalai · 1 year
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LE VÉLO DE BRIGITTE (CHABEUIL, DRÔME) EST AUSSI UNE BELLE OEUVRE D’ART BRUT.
D’ordinaire, Brigitte roule en vélo dans Chabeuil (Drôme) sur la drôle de machine, qu’on voit ici, compliquée et très ornementée. J’ai dû lui demander d’en descendre pour en tirer le portrait ; Brigitte a accepté en souriant, de très bonne grâce.
Brigitte roule au pas, vraiment lentement, et ne quitte pas le centre ville et ses maigres pistes réservées, le plus souvent étroites et accidentées ; ce jour-là, elle allait faire ses courses au super marché, sur la grande route de Valence, encore un peu dans le village. Faut faire gaffe tout de même, ça roule vite...Mais Brigitte va toujours au pas...
Sa machine est belle et bien tenue, pleine de peluches et de gri-gris, hérissée de rétroviseurs aux effets miroitants et éclairée par une imposante lampe à piles attachée sous le panier d’avant. Pas difficile : ‘faut tout démonter pour changer les piles...C’est un jeune du village qui me l’a installée...’ Sur ce panier, elle peut rabattre une planchette taillée à la mesure : une sorte de tablette, très astucieuse. L’auvent qui protège Brigitte de la pluie ou du soleil est formé d’un plastique alvéolé, léger mais rigide, qui couvre l’ensemble du véhicule jusqu’à l’aplomb de la roue avant. Trois parois bâchées encadrent la selle et l’arrière est orné de splendides bandes réfléchissantes de sécurité, rouges et blanches , disposées sur toute la hauteur de la machine. L’ensemble, posé et fixé sur une plate forme arrière, forme un abri, une hutte confortable, une guérite qui se déplace avec précaution, complète et rassurante, protégée du monde extérieur et peut-être aussi des voitures, par ses fétiches.
Brigitte est active dans la ville : elle aide à la distribution des nombreux colis d’entraide que distribue une association locale dévouée à soulager les difficultés des pauvres  à Chabeuil et alentours. Aussi elle participe avec assiduité à un atelier de peinture amateure et je connais deux collectionneurs chabeuillois qui lui ont acheté de petites toiles très bien composées, et qui les exposent en bonne place chez eux.
L’expression n’est guère satisfaisante, et sujette à bien des incompréhensions, mais les toiles de Brigitte, tout comme son vélo, c’est de l’’art brut’. De l’art à part entière qu’on appelle aussi l’art des outsiders tant sont perceptibles les difficultés existentielles de leurs auteurs. Ces artistes ont un grand musée, très beau et intriguant, à Lausanne, et un autre à Montpellier, où on peut admirer leurs oeuvres étranges, rêveuses (ou cauchemardesques) ou torturées, où on trouve justement ces oeuvres ‘brutes’ qui, d’ailleurs, montrent très souvent des avions, des locomotives, des voitures, et des vélos, toute sorte de machines. Bref, l’art brut s’occupe beaucoup de transport (et aussi d’armements, de plans de ville, d’architecture...), une sous spécialité, en somme, qui semble occuper beaucoup ces ‘outsiders’ qui composent comme mécaniquement leur oeuvre de détails et d’obsessions...
Dans cette chronique dédiée aux ‘luftmensch’ (si toutefois ces mots : ‘gens de l’air’... permet de mieux comprendre ce qu’ils sont...), j’ai déjà montré de ces vélos à la fois surchargés de vie et pleins de légèreté, un à Crémone en Italie, et deux autres à Valence. Voici donc maintenant celui de Brigitte, un croquis de fantaisie, amicalement brossé pour lui recommander encore une fois d’être prudente...On comprend en effet trop bien que les automobilistes chabeuillois ne sont pas tous sensibles à l’art brut, pas assez en tous cas pour passer au large du beau vélo de Brigitte......
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dubalai · 1 year
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LE CINOQUE DE L’AVENUE VICTORIA, À PARIS.
Jeudi 12 janvier 2023, en début d’après midi, quittant la place de l’Hôtel de Ville, quand on marche vers la place du Châtelet avec J.R. pressés par une petite pluie froide, crachin qui dure depuis le matin : sur les très larges trottoirs de l’avenue Victoria, vidés comme à l’accoutumé puisque personne ne passe jamais par là, on ne remarque pas tout de suite un vaste étalage de nippes et de sacs, serrés et humides mais bien empaquetés. Nombreux skate-board empilés. Quelques mètres carrés autour de quoi tourne un grand type très emmitouflé, doudoune et manteau, casquette à carreau de type bucheron, saleté luisante et clochardisée. Tête baissée, il fait le tour de ses bagages de fortune, d’un pas rapide. Quand on passe près de lui, on entend nettement : ‘...je ne suis jamais vaincu...je ne suis jamais vaincu...’ Sans changer rien. Tête baissée, voix sourde : ‘...je ne suis jamais vaincu...’
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dubalai · 1 year
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Francis allait de plus en plus mal, entre ses séjours au Valmont, à Montéléger et ses médicaments, qu’il lui fallait prendre à des doses de plus en plus lourdes. Insupportable sa santé mentale et insupportable la camisole chimique qui devait le soulager : sa petite maison du centre ancien de Chabeuil n’abritait plus que son hébétude et sa tristesse, parcourues d’accès de violence. En juin dernier, il a fini par lâcher la rampe : il s’est pendu.
Francis écrivait sur les trottoirs de Chabeuil et signait ses sentences, belles parfois, allumées toujours, d’une sorte d’astérisque aux longs rayons, très reconnaissable. Les cantonniers de la ville effaçaient tout ça assez vite, d’un trait d’eau sous pression, mais le plus souvent j’avais eu le temps de noter ces maximes éphémères qui font maintenant, dans ma machine, comme un journal de la vie de Francis...La prière qui est reproduite ici était tracée sous la porte monumentale de la ville ; les passants n’en pouvaient rien ignorer. Elle date du 18 août 2021.
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dubalai · 2 years
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Réfugié au café Bellecour pour éviter une petite pluie qui gène ma course en vélo, neuf heures et demi, mercredi 28 septembre 2022. A une table proche, une femme en blanc, évidence immédiate qu’elle parle seule depuis un grand moment, dans une conversation longue et appliquée, convaincue et sérieuse. Une excentrique, à l’élégance recherchée et soignée, tout de blanc vêtue et lunettes aussi, fine, en forme, manucurée, chignon attachée à la diable, barettes. Tenue blanche impeccable. Elle semble familière des lieux : elle finit son thé et commande un café. J’entends : ...c’est marrant mais....’ sans véhémence, tranquille, s’applique à convaincre son interlocuteur imaginaire. Ça dure longtemps. Puis elle remarque que je prends des notes, et semble vouloir établir un contact visuel insistant. Je paye mon café et sors.
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dubalai · 2 years
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LE FILS DE LA CICCIOLINA (BIS)
Mardi 29 mars 2022, vers 11 heures, quand je reviens du marché de Chabeuil pour rejoindre les amis à la table du mardi, au PMU de la ville. Près du bistrot, quand je suis encore sur le pont qui enjambe la Véore, me double rapidement, d’une démarche vive et à grands pas, un homme d’une cinquantaine d’année. Il est vêtu d’une jupette de laine à grands carreaux colorés, de collants épais (laine encore ?), de chaussures montantes et d’un blouson court. On lui donne en ville le nom du ‘fils de La Cicciolina’, qui rappelle un personnage haut en couleur (turquoise , le plus souvent) présent il y a quelques années à Chabeuil. Pour l’heure, il semble vieilli et sa calvitie progresse. Lunettes cerclées, légères et assez élégantes. Il salue des connaissances, attablées à la terrasse ensoleillée du PMU.
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dubalai · 2 years
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Jeudi 24 mars 2022, vers six heures et demi, devant le magasin Monoprix à Charenton (Val-de-Marne) ; soleil, mais petit temps frais ; je prends là un mauvais sandwich, avant de filer à Bastille (Opéra Wozzek) et le déguste sur une des tables de jardin qui sont installées en terrasse. C’est à l’entrée du magasin, sur une esplanade dégagée, ouverte au vent, tout près de la station de métro, près de l’arrêt de bus ; des groupes de jeunes gens sortent du collège et du lycée tout proche : bref, une foule distrayante et nombreuse s’agite à cet endroit très passant. Quand je me suis assis à ma place, je n’avais pas prêté attention à l’homme qu’on voit sur la photo ci-dessus : il est immobile, et regarde fixement devant lui, pas de quoi se faire remarquer. Je suis occupé aux mots croisés de mon journal, et ne relève que peu la tête. Et puis, tout de même, je finis par noter qu’il n’a pas bougé, qu’il ne bouge pas d’un pouce entre deux regards que je lui accorde, il conserve la même posture raidie qu’on lui voit là, dos droit, jambes à l’équerre, pieds à plat. Il semble battre une sorte de mesure sur le bord de la table de fer, très légèrement, mais assez rapidement. Il conserve un large sourire figé. Tout au plus lève-t-il le bras droit, comme pour interpeller quelqu’un et prononce-t-il quelques mots en silence, remuant à peine les lèvres. Il ne fait pas si chaud pour qu’il reste ainsi, en chemisette légère, planté là à ne rien faire d’autre que ce tremblement de la main et ce pauvre geste. Je vais prendre un renseignement à l’arrêt de bus 24, puis reviens assez rapidement : il est encore là, toujours souriant, toujours immobile. Et puis je file vers Bastille.
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dubalai · 2 years
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Le 23 mars 2022, à la tombée de la nuit, quand on quitte les quais de la Seine où habite Suzanne, pour remonter vers le Luxembourg où un de ses amis signe un livre, temps doux, balade très agréable et bavardante. Rue Dante, devant la terrasse fournie du café Le Dante, on butte sur un homme, pantalon remonté très haut sur le ventre, longue écharpe écossaise, casquette, plutôt jeune, visage fin ; il a un pansement sur le nez. Il se tient en équilibre instable sur le talon d’une de ses jambes raidies, pieds écartés. Comme cette position est inconfortable, il doit en changer souvent, et vivement. Entre les moments d’arrêt à l’équilibre, il fait quelques pas le long de la terrasse. A l’observer un moment, on dirait qu’il danse. Il est silencieux
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dubalai · 2 years
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Mardi 22 mars 2022, place de la Comédie française, vers trois heures, quand je quitte la terrasse du Nemours, je remarque un homme, sportif et nerveux, qui dégage un gobelet de carton par de vigoureux coups de pieds désordonnés. Quarantaine d’année, T-shirt ajusté noir au nom du groupe Iron Maiden, pantalon d’allure militaire, basquettes de marque Adidas neuves, cabas porté en bandoulière, lunettes noires sur le haut du crane, écouteurs aux oreilles, bonnet noir. Il est rapide et sec, agité, l’air pas tranquille. Surtout, il traîne un sac de plastique transparent, de ceux qui servent de poubelles dans toute la ville ; le sac est plein et semble assez lourd. L’homme en noir se dirige vers une des poubelles qui borde la place ; il puise dans son sac de quoi bourrer la poubelle, geste vifs pas très efficaces, gobelets, canettes métalliques, journaux et toutes sorte de petits déchets qui volent dans la manoeuvre. Il tasse du poing la poubelle, et finit par engager le sac qu’il portait dans le col resserré de la poubelle en question : pas facile, il fait des efforts, comme des coups de poings appuyés. Puis il semble faire un calcul et se ravise, il reprend quelques déchets, les remet dans on sac, et change brutalement de direction, se dirige vers l’entrée de la station de métro, où il stoppe près...d’une autre poubelle encore, où il recommence mécaniquement son opération de transfert de déchets, d’un sac à l’autre. Il a un tatouage IRON à l’intérieur du bras ; il sifflote. Quand je le croise, il s’adresse à moi : ‘ton sac, il est mal fermé derrière’. Voix claire, doigt pointé ; autoritaire. C’est juste, j’ai fait vite pour attraper dans ma besace un crayon, de quoi noter dans les marges de mon journal du jour : la poche arrière est restée béante. Il est très observateur. Brusquement, il se rend très vite vers la troisième poubelle de la place, à l’angle du bâtiment de la Comédie française (la photo ci-dessus est prise là...) Il refait un petit foot avec un gobelet de soda et recommence ses manigances appliquées, tout à fait répétitives : hésitations sur la marche à suivre, puis gestes brusques de rangement, de vidage et remplissage des sacs et des poubelles ; ça semble infini ; il ne fait rien d’autre ; ça n’aura de cesse, mais pourtant il ne s’épuise pas à cette tâche absurde.
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dubalai · 2 years
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Mardi 22 mars 2022, place de la Comédie française, à la terrasse du café Le Nemours (canard, mots croisés, deux heures et demi, etc...), saisie d’un très furtif et rapide mouvement de danse, bras largement ouverts, paumes tendues vers le haut, avec d'élégants effets de rotation contrariée. Silence, basquettes, pied léger. D’un homme plutôt jeune, de noir vêtu, capuche, à l’air très fatigué dès qu’il cesse de danser. Traverse la place en diagonale, vif, insaisissable...
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dubalai · 2 years
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LA CINOQUE DE LA PART-DIEU
Lyon, gare de la Part-Dieu, dimanche 20 mars 2022, en tout début d’après midi, à la sortie du train de Valence. temps doux, lumière grise : une femme aux cheveux frisés tirés en arrière par une queue de cheval serrée haut sur la tête, 35 ans et pauvre sourire, me regarde. Tient un gobelet. Vêtue d’un pantalon lâche et de petites chaussures très légères. Elle dit, en me regardant : ‘ces travaux, ouh là là...Je voulais enlever mon masque, mais ce n’est plus à envisager, n’est ce pas ?”Elle rajuste son masque en hochant la tête, et tourne vivement les talons ; elle s’engouffre dans le centre commercial Westfield qui fait faire à la gare.
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dubalai · 2 years
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LE CINOQUE ET L’OCCIDENTALITÉ
Mardi 1er février, place des Terreaux, à Lyon, milieu d’après midi. Petit crachin. Le musée des Beaux Arts où je voulais me réfugier est fermé ; je traverse la place pour acheter un magazine local, avant d’aller me mettre à l’abri dans un bistrot du quartier. En sortant du marchand de journaux, un jeune homme, Noir, tête très ronde, élégant sweat à capuche, survet’ bien ajusté, marche très vite. On se croise ; il parle assez fort, belle voix, bien portée ; j’entends nettement : ‘ça va être comme ça encore plus, pour sortir de l’occidentalité’. La fin de la phrase est masquée par un éclat de rire suraigu, long, qui semble forcé à la fin. Il disparait très rapidement derrière la fontaine Bartholdi.
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dubalai · 2 years
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LE CINOQUE DE LA PLACE DE L’OPÉRA, À LYON
Mardi 1er février 2022, à Lyon, petite pluie intermittente du début d’après midi, mais temps assez doux et gris, sur le grand trottoir qui débouche place Louis Pradel, dans le quartier de l’Opéra. Cris, voix forte de l’autre côté de la rue. Tout va vite, je renonce à traverser pour mieux voir et prends mes notes à la volée dans les marges de mon journal. Un homme jeune, de taille moyenne mais baraquée, petit bonnet bleu marine roulé, barbe de trois jours, démarche très rapide et saccadée. Jean clair et déchiré, blouson. Pointe du doigt en criant, marque ses phrases en agitant ce doigt pointé. Débit sans pause, mais pas haletant, très clair, d’un trait. c’est la vivacité du discours qui empêche de tout comprendre : je saisis tout de même : ‘connard...connard...ce programme est parti en couille à ce moment là...à cause de ce connard...ça a fait du mal...du mal...à tout le monde, cette histoire’. Je ne le suis pas et le laisse filer derrière l’opéra. Il hurle encore. Sur le banc où je me suis assis pour écrire, mon voisin fait, à haute voix, lasse : ‘....ouh...il est fou, celui-là...il est complètement fou...’
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dubalai · 3 years
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Lundi 27 septembre 2021, vers cinq heures, à Paris, comme je monte dans le bus 86, à son départ de Saint Germain des Prés. Chacun composte son billet ou manoeuvre sa carte magnétique, et on s’avance vers les sièges du fond ; le bus se remplit ; c’est la station de départ. Tout se passe bien jusqu’au cri d’une voix rocailleuse, très aiguë : ‘…y’a que le bus qui t’aime, avec ta sale gueule…’ Ça vient d’une femme de 65 ans environ, corpulente, cheveux rassemblés en chignon mal fagoté, sac à dos, gilet à poches très nombreuses et très remplies, qui se tient sur la plate forme centrale et qui poursuit sa diatribe à mi-voix, sans qu’on comprenne ce qu’elle dit. Elle se tient debout près d’un panier de super marché, à roulettes, dans lequel elle a fourré un volumineux sac poubelle ; elle attendait assise à côté de moi à la station, un long moment, sans que je remarque rien de son dérangement. Et d’ailleurs elle ne dit bientôt plus rien. Jusqu’au moment de descendre, à l’arrêt Cluny, peu après le départ. Là, dès qu’elle pose le pied dans l’abri bus, ça recommence : ‘…arrange ta sale gueule…sale petite ordure…le petit chien qui raconte des conneries (pas sûr de ‘chien’). Peut-être qu’elle ne hurle que lorsqu’elle change d’endroit, au moment où elle arrive, pour s’acclimater, peut-être.
Amusant : l’incident déclenche une très longue conversation avec ma gentille voisine, qui s’apitoie sur le sort de la cinoque du bus 86...y’a plus personne pour les soigner, y’en a de plus en plus dehors, c’est triste... Et puis la vieille dame me parle des grands hommes, qui auraient pu éviter ça, faire quelque chose pour tous ces malheureux, Mendès France (c’est le premier nom qui vient dans cette conversation) et Ambroise Croizat, et de Gaulle, les résistants, tout le monde…Elle me montre ensuite un petit livre, Les cinq blessures, dont j’écoute l’exposé un peu longuet d’une oreille floue. Elle a quatre vingt cinq ans, et on cause de sa vie, de ses choix électoraux, qu’elle me confie en riant (elle a voté un peu pour tout le monde…) Elle m’explique surtout longuement son point de vue sur l’écoute, nécessaire à l’harmonie générale. Je la taquine en lui disant que son Croizat, c’était surtout un tranchant, et que sa chère sécurité sociale, il l’avait imposé par ordonnance, sans trop traîner. Ah bon, réfléchit la vieille dame…ah…vous avez peut-être raison…faut écouter, et puis crac…trancher…On s’amuse aussi à ses souvenirs des montreurs d’ours de la place de la Bastille, que son père l’emmenait voir, et son escalade dans la tour du Génie, qui bougeait, qui bougeait…Elle ne s’arrête pas de parler, très vielle dame pipelante, ses cours de jardinage au Luco, et : la vie est belle, regardez ces nuages...on regarde là et hop, y’a un coin de ciel bleu...c’est beau... Et ma fille, elle a cinquante quatre ans, je l’ai eu à 24 ans, j’étais pas prête, ah ça j’étais pas prête, ben ma fille elle fait que m’engueuler, qu’est ce qu’elle me passe...Dîtes lui : je suis pas une poubelle ! Ah la la, ce que vous êtes drôle, c’est vrai, je suis pas une poubelle....mais je lui dirai pas ça. Je parviens à l’interrompre pour lui dire que c’est drôle cette conversation légère, évaporée, de deux hurluberlus qui se racontent leur vie, juste après les cris d’une vieille folle. Elle réfléchit un peu et répond que oui, c’est drôle, vous parlez bien, c’est bon de parler avec vous...hurluberlus...Et au Faubourg saint Antoine, elle me salue…faut que dise au revoir à mon charmant monsieur…au revoir, portez vous bien…
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dubalai · 3 years
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LE CINOQUE DE LA PLACE SATHONAY, À LYON.
Vendredi 24 septembre 2021, vers midi, place Sathonay, à Lyon, au moment de déjeuner en terrasse d’un petit restaurant de ces contreforts de la Croix-Rousse. Un jeune homme brun, visage rond, barbe follette mais fournie, cheveux courts, frange nette et luisante de gras. Grand mince, vêtu d’un survêtement sombre, petite pochette et bandoulière. Démarche rapide, mais fluide ; il s’arrête près de notre table et attaque sans ambage ; il me regarde franchement, voix nette, qui rend son propos très compréhensible : ‘sinon, ce qui marcherait, ce serait de couper des couilles. [Geste des doigts en forme de ciseaux.] Mais en France, c’est interdit’. Je lui réponds : ‘... ce serait une solution, pas sûr, tout le monde n’est pas d’accord, pour que...’ Il est confus ; il bredouille : ‘...voilà, c’est ça..du moment qu’on a le respect et qu’on vous regarde...Je vous souhaite une bonne journée.’
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